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Nadège Apiou, teinturière : La formation avant la passion

Publié le vendredi 15 octobre 2010 à 02h52min

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Né en 1975 à Po dans le centre-sud du Burkina, Nadège Apiou arrive à Ouagadougou dans les années 1990 et se familiarise avec l’artisanat comme vendeuse. Puis elle est atteint par le virus de l’artisanat notamment la teinture. A trente cinq ans, elle est aujourd’hui la plus jeune à disposer d’un atelier au village artisanal de Ouagadougou.

Profane il y a peu, Nadège est une vraie professionnelle dans l’artisanat aujourd’hui. Vendeuse d’objets d’art près du jardin de l’amitié, la boutique prend feu en 1999. Le village artisanal de Ouagadougou ouvre ses portes et en avril 2000, Nadège et son patron Innocent Ouédraogo y déménagent. En arrivant dans ce domaine, son objectif n’était pourtant pas d’y rester. « Je vendais dans cette boutique en attendant de trouver mieux ailleurs », précise-telle. Le marché étant moribond, Innocent Ouédraogo lui propose d’apprendre un métier. En plus de la vente, elle apprit alors la teinture, la profession de son employeur. Pour la première fois de sa vie, Nadège apprenais un métier. « Le premier tissu que j’ai confectionné, je l’ai porté en guise de souvenir » se rappelle-t-elle encore. C’est là que commence à naître son amour pour l’artisanat. Le contact facile avec le monde entier vient conforter cet amour qui est en train de virer à la passion.

« C’est la première fois que j’apprends quelque chose qui est à moi. Même la mort ne peut pas me la retirer, en mourant je pars avec », se plait-elle à répéter. Au fil du temps la confiance s’installe et se renforce entre la teinturière et son maître qui la met en contact avec tous ses fournisseurs.
Se sentant assez mûre dans la teinture, elle propose à son patron de s’installer à son propre compte en 2005. Innocent Ouédraogo n’y voit aucun inconvénient. Mieux, il l’encourage, rédige la demande pour elle. Mais, elle continue à travailler avec lui jusqu’en décembre 2006 quand on l’appelle et lui dit « tu as été sélectionnée, voici ton atelier ».

Depuis lors Nadège travaille à son propre compte. Et cela grâce à son ex-employeur et formateur, qui l’a encouragé à persévérer dans ce domaine. Les relations entre les deux sont restées très bonnes. « Je n’hésite pas à lui demander des conseils à chaque fois que j’entreprends quelque chose, je me réfère toujours à lui. Avant tout, c’est mon maître », précise-t-elle. Et voici donc la liste de ses produits aujourd’hui : des rideaux, des chemises, des draps de lits, des habits pour enfants, des tenus scolaires, etc. Pour obtenir ces chefs d’œuvre, Nadège utilise du tissu, blanc en général, qu’elle trempe dans de l’eau chaude avec une solution déjà préparée avec les couleurs souhaitées. Elle n’oublie jamais de porter ces gans pendant ce travail. Ce tissu n’a aucun effet néfaste sur le corps et peut être lavé à 40° sans qu’il ne se déteigne.

Nadège s’épanouit pleinement dans ce métier et gagne bien sa vie. « Je vis mieux depuis que je suis teinturière ». Elle n’a pourtant pas connu que des moments heureux. Après avoir perdu son père dès le jeune âge, Nadège perd son époux en 2007. La jeune veuve doit éduquer toute seule son enfant, quatre ans après la naissance de celui-ci. Qu’à cela ne tienne, elle considère la naissance de cette fille comme le plus beau jour de sa vie. Elle a travaillé au village artisanal jusqu’au jour de son accouchement.
Le SIAO ouvre ses portes dans moins de trois semaines. Nadège n’a pas pu acquérir de stand du fait de ses moyens limités. Donc, elle fera la fête au village artisanal où elle demande aux différents visiteurs de s’y rendre massivement. Son souhait : se faire le plus de contacts possibles car c’est un moment propice pour tisser des relations d’affaires. Tout comme elle, l’ensemble des artisans du VAO s’attèlent pour accueillir cette biennale de l’artisanat. « Même si ce n’est pas pour acheter, je demande aux gens de venir nous rendre visite pour savoir ce qu’on fait. Cela nous fait énormément plaisir », souligne-t-elle.

Nadège Apiou ne voit plus son avenir que dans l’artisanat. Un métier qui lui permet de se frotter à toutes les sensibilités et de voyager à travers le monde. Elle a notamment participé à des foires au Mali, au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Niger. « L’artisanat ouvre le monde à la jeunesse, il faut donc l’aimer », lance-t-elle.

Son plus grand rêve : ouvrir une école de teinture dans son village pour aider les femmes. Quoi de plus normal de penser aux autres quand on est issue d’une famille africaine très nombreuse, dépassant la centaine, à la croire. Bon vent et Dieu vous appuie dans votre bonne volonté.

Moussa Diallo

Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 15 octobre 2010 à 04:29 En réponse à : Nadège Apiou, teinturière : La formation avant la passion

    ouuufffffffffff .. Ca sent la galere ici !!!

  • Le 16 octobre 2010 à 01:52 En réponse à : Nadège Apiou, teinturière : La formation avant la passion

    Merci de nous montrer de tels exemples de courage dans un BF ou les jeunes ne savent pas perseverer et se lamentent que les riches pillent le pays et contribuent a leur chomage.
    Je prefere encore l’exemple d’une battante comme cette Apiou aux exemples d’aventuriers comme nous (je m’inclus) qui avons fuit le pays pour nous retrouver aux USA.
    Courage a ceux qui sont restes au pays et qui se battent comme ils peuvent (a l’image de Apiou) et que Dieu vous soulage de vos souffrances

  • Le 20 octobre 2010 à 22:13, par Alain DESCHAMPS En réponse à : Nadège Apiou, teinturière : La formation avant la passion

    la galère ? non, simplement du courage, de la ténacité, une grande volonté de se réaliser elle-même, par son travail. Une farouche envie d’être une vraie "femme debout", sans attendre des subventions comme le font, hélas !, beaucoup de jeunes qui ne savent se comporter qu’en assistés. Très bel exemple, à méditer et à faire connaître, et pourquoi pas dans les écoles ? C’est ce genre de réussite qu’il faut promouvoir et non se limiter aux joueurs de foot ou aux "tapeurs" de djembé.
    Elle est courageuse, ce petit bout de femme ! Et de plus, elle fait un travail d’une rare qualité !

  • Le 20 octobre 2010 à 23:02, par Alain DESCHAMPS En réponse à : Nadège Apiou, teinturière : La formation avant la passion

    Très bel exemple de courage
    quand certains vivent dans la philosophie du "Inch Allah", cette femme a préféré se laver et le ventre et le dos sans attendre un quelconque sponsor
    un très bel exemple pour les jeunes qui souffrent mais qui ne se bougent pas.
    Je sais que rien n’est facile au Burkina, mais quand on veut, on peut y arriver
    Bravo !

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