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Sommet de l’UA : Aux Actes, Excellences !

Publié le jeudi 9 septembre 2004 à 11h03min

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Annoncée depuis plusieurs mois, la session extraordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine (UA) consacrée à l’emploi et la lutte contre la pauvreté s’est ouverte hier à Ouaga 2000 en présence d’une vingtaine de présidents.

C’est à 10h 09 mn que, ce mercredi 8 septembre 2004, les chefs d’Etat ont fait leur entrée dans la salle des banquets. Robert Mugabe le Zimbabwéen, dans sa démarche dandinante, et Mélès Zenawi de l’Ethiopie ouvrent la marche, suivis de Paul Kagamé, le maître du Rwanda, et bien sûr de Blaise Compaoré.

Au total, ils sont 18, sauf erreur ou omission, à avoir répondu à l’invitation de leur homologue burkinabè (voir liste en encadré). Au nombre de ceux-ci, les quatre chefs de file du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) que sont le Sud-Africain Thabo Mbeki, l’Algérien Abdel Aziz Bouteflika, le Sénégalais Abdoulaye Wade et le Nigérian Olesegun Obasanjo, par ailleurs président en exercice de l’UA.

Auparavant, ils ont été précédés par les premières dames, conduites par Chantal Compaoré. L’instant T était arrivé. Le président du Faso donnera le "la" de la cérémonie en ouvrant le bal des discours, une quinzaine au total si l’on inclut ceux des responsables d’institutions panafricaines ou internationales.

Pour le chef de l’Etat burkinabè, la lutte contre la pauvreté demeure un défi capital pour l’Afrique. "Quelle stabilité macroéconomique, s’est-il interrogé, dans un pays où le chômage demeure endémique ?".

L’emploi, source de quiétude

La convocation du présent Sommet, poursuivra-t-il en substance, est un engagement politique fort, et il faut un plan d’action pour inverser la tendance de ce chômage croissant.

"L’emploi décent est source de quiétude dans les familles" , a-t-il dit.

Blaise Compaoré est également partisan d’une mondialisation plus solidaire et d’un accès rapide des pays africains aux marchés occidentaux.

Il demeure convaincu aussi que les subventions agricoles sont très nuisibles à l’économie du continent, et c’est pourquoi, encore une fois, il a demandé l’arrêt de ces subventions déloyales. Le plein emploi et le travail décent sont indispensables au développement de l’Afrique.

La président du Faso évoquera également le travail abattu par la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation, conduite par la présidente de Finlande et son homologue tanzanien.

Une commission qui a produit un rapport mettant l’accent sur le côté social, pour ne pas dire humain, de la mondialisation.

Le premier orateur a terminé son speech en invitant les décideurs politiques et les opérateurs économiques à s’investir davantage dans les combats pour le développement, notamment dans le cadre des objectifs du millénaire pour le développement (ODM).

Quant au président de la Commission de l’UA, Alpha Omar Konaré, un habitué des discours enflammés, il a fait presqu’un réquisitoire et à l’endroit des dirigeants et à celui des partenaires au développement, tout en concluant que l’Afrique n’a plus droit à l’erreur si elle veut s’en sortir.

Konaré estime d’abord que toutes les questions qui vont être soulevées à cette grand-mess pour l’emploi doivent aboutir à un consensus.

Ensuite, certains problèmes tels les conflits et la malgouvernance ont pour responsable, "en partie", précise-t-il, les chefs d’Etat.

Selon lui, "l’impératif moral, mais politique", commande de combattre ces maux.

Ouaga, capitale de l’espérance

Il égrenera quelques réalités sous les tristes tropiques. "Il y a en Afrique des étudiants qui retardent la fin de leurs études par peur du chômage et de perdre la bourse... Il y a des familles, des frères qui dorment à quatre avec un grand frère déflaté et un père retraité qui s’use encore au labeur..." a-t-il assené.

Mais Konaré reste optimiste, un optimisme qui a pour nom NEPAD ; et le patron de la Commission de l’UA croit dur comme fer à cette nouvelle vision faite par les Africains. Pour cela, il faut aussi des ressources additionnelles par l’annulation de la dette, qui demeure un frein à l’avancée du continent.

A ce sujet, l’ex-chef de l’Etat malien a interpellé le FMI et la Banque mondiale pour que chacun, en ce qui le concerne, assume ses responsabilités. Car, de nos jours, le non-recrutement à la Fonction publique et les privatisations recommandés par ces institutions de Bretton Woods ont montré leurs limites.

Le directeur du Bureau international du travail (BIT), Juan Savaria, lui, a seulement affirmé que Ouaga est, avec ce Sommet, "la capitale de l’espérance".

Pour lui, cette réunion doit accoucher de mesures réalistes et réalisables pour l’emploi et la lutte contre la pauvreté. Enfin, le président en exercice de l’UA, le Nigérian Olesegun Obasanjo, bouclera la boucle des intervenants principaux en mettant l’accent sur le fait que la pauvreté est un terreau favorable à tous les problèmes dans lesquels se débat l’Afrique.

Pour lui, il faut mettre rapidement en place des stratégies pour résoudre tous les problèmes qui empêchent le continent de décoller.

Les travaux proprement dits ont débuté avec la communication du président tanzanien Benjamin Mkapa, par ailleurs coprésident, comme indiqué plus haut, de la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation. Ils se poursuivent aujourd’hui et la clôture du Sommet est prévu en principe dans l’après-midi.

Les chefs d’Etat et de gouvernement ont donc 48 heures pour prendre des décisions vigoureuses pour l’emploi et contre la pauvreté, et s’il y a quelque chose à souhaiter, c’est qu’après avoir vitupéré du haut de la tribune de Ouaga 2000, leurs Excellences passent maintenant, et enfin, aux actes, car des discours de cette veine, on en a suffisamment entendu, sans que, pour autant, le sort du continent noir ne s’en trouve amélioré.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
Hamidou Ouédraogo

L’Observateur


Sauf erreur ou omission, 19 chefs d’Etat (y compris Blaise Compaoré) étaient présents hier à l’ouverture du Sommet. Il s’agit de :

1. Blaise Compaoré (Burkina Faso)

2. Abdel Aziz Bouteflika (Algérie)

3. Thabo Mbéki (Afrique du Sud)

4. Azali Assoumani (Union des Comores)

5. Mélès Zénawi (Ethiopie)

6. John Kuffuor (Ghana)

7. Amadou Toumani Touré (Mali)

8. Mamadou Tandja (Niger)

9. Olesegun Obasanjo (Nigeria)

10. Paul Kagamé (Rwanda)

11. Abdoulaye Wade (Sénégal)

12. Ahmad Tejan Kabbah (Sierra Leone)

13. Benjamin Mkapa (Tanzanie)

14. Mathieu Kérékou (Bénin)

15. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo (Guinée-Equatoriale)

16. Idriss Déby (Tchad)

17. Robert Mugabe (Zimbabwe)

18. Omar El Béchir (Soudan)

19. Ismaël Omar Gueleh (Djibouti).


Vu et entendu

• Reviens-nous vite !

La délégation mauritanienne, conduite par le ministre des Affaires étrangères, n’a pas pris part aux travaux du Sommet. En effet, il a été rappelé le lendemain de son arrivée, donc hier, et est rentré à Nouakchott. Que s’est-il passé ? Mystère et boule de gomme !

• Quand BAD et BCEAO filent le parfait amour

Charles Konan Bany, gouverneur de la BCEAO, et Omar Kabbaj, président de la BAD, qui étaient assis côte à côte dans la salle, étaient constamment en conversation. Que peuvent-ils bien se dire en superbanquiers ? En tout cas, Kabbaj, lors de son intervention, a affirmé que les banques, notamment la BAD, restent à l’écoute des Africains.

• Le géniteur du Sopi, vedette de la presse

Abdoulaye Wade a été très sollicité à la fin de la cérémonie par la presse, qui lui a posé de nombreuses questions auxquelles l’homme de l’Alternance du 19 mars a répondu, sans détours, comme à son habitude.

• Mettez ce rapport dans la corbeille !

Le même Wade n’a pas du tout apprécié qu’un rapport ait été produit par certains partenaires, la BAD notamment, sur le Sénégal (il le faisait remarquer à Kabbaj) ; il a demandé que ce rapport ne soit pas publié.

• Qui sont-ils, ces enturbannés ?

Le ministre qatari (Royaume du Qatar) des Affaires étrangères, Ahmed Al Mahamud, qui était assis à côté du président du CSI, Luc Adolphe Tiao, était présent à ce sommet, avec d’autres de ses camarades, en tant que représentant du groupe des « 77 plus la Chine ». On aura remarqué qu’il apportait un soin particulier à sa tenue, qu’il n’arrêtait pas d’ajuster.

• Des discours à la pelle

Après l’intervention du président Nigerian Olesegun Obasanjo, d’autres intervenants se sont succédé à la tribune, notamment les représentants de l’ONU, du FMI, de la Banque mondiale, de la FAO, de l’Alliance coopérative internationale, du PNUD, de la BAD, du FNUAP, du Forum des partenaires sociaux. Le discours du représentant de ces derniers, Brahima Nacoulma, a été apprécié. Au total, une quinzaine d’interventions ont ponctué la cérémonie d’ouverture.

• La verve oratoire de Konaré

Autre discours qui a été fort apprécié, celui d’Alpha Omar Konaré surtout par les syndicalistes présents dans la salle. Au moment où l’ancien chef de l’Etat malien et président de la Commission de l’UA évoquait les privatisations qui conduisent au chômage, on a vu le « général » Tolé Sagnon opiner de la tête.

• En retard, en retard…

Le chef de l’Etat ghanéen, John Kuffuor, est arrivé pendant que Blaise Compaoré était déjà en train de livrer son message. Kuffuor est allé s’asseoir à côté de Wade.

• Boutef, sacré meilleur auditeur

Abdel Aziz Bouteflika, « Boutef » pour ses concitoyens, est resté attentif tout au long des interventions, alors que certains se penchaient pour parler à leurs voisins. On bâillait aux corneilles, preuve d’une certaine lassitude ou d’un certain ennui. Quand on a été ministre des Affaires étrangères de son pays pendant de longues années, au nom duquel on a présidé entre-temps l’Assemblée générale de l’ONU, puis chef d’Etat, on finit par s’habituer aux séances interminables.

• Le lapin d’Eyadéma

Le président togolais, qui avait confirmé sa venue, s’est finalement fait représenter par son Premier ministre Koffi Sama. C’est vrai que les relations entre Blaise et mon général sont des plus cordiales. Mais peut-être que le doyen des chefs d’Etat du continent se réserve-t-il pour le Sommet de la Francophonie ?

• Les journalistes nigérians, venus en force

De tous les journalistes, la présence des confrères nigérians a été la plus remarquée, de par leur nombre. On ne pouvait faire quelques pas sans les croiser, tant ils étaient dynamiques et mobiles. On remarquait également une différence entre leur matériel de presse (appareils photo, enregistreurs, caméras) et celui de nos nationaux. C’est quand même le Nigeria !

• Cet agent qui n’aurait pas dû être là

Par la faute d’un agent de sécurité, pratiquement tous les reporters photographes n’ont pu immortaliser la photo de famille des présidents de l’Union africaine qui étaient présents. Il a en effet bloqué les chasseurs d’images dans la salle de conférences, pendant que les chefs d’Etat étaient dehors pour ladite photo. Au grand dam des journalistes nationaux et surtout internationaux. Merci donc à cet agent pour son excès de zèle. Les journalistes lui revaudront au centuple son bienfait.

• Charité bien ordonnée…

Les premières dames en visite étaient véhiculées par des Mercedes S350 rutilantes. Quant à la première dame du Burkina Chantal Compaoré, elle était à bord d’une Cadillac Liberty aux vitres fumées.

• Entre invité et évité, il n’ y a qu’un pas

Un monsieur qui portait un badge marqué "invité" a voulu créer du grabuge dans la salle de conférences. Réaction du chef d’état-major de la Gendarmerie, le colonel Mamadou Traoré, qui était à côté : « Foutez-le dehors ! ». En un temps trois mouvements, l’infortuné est fermement saisi par de gros bras et entraîné vers la porte de sortie.

• Conseil d’usage, se travestir

Un agent de sécurité, certainement pour plaisanter, a demandé à Mme Karama, chef du protocole de Mme Chantal Compaoré, s’il pouvait participer au déjeuner des premières dames. Réponse de Mme Karama : « C’est possible, à la seule condition que vous portiez une perruque ».

• Du bordel dans la Commission presse

S’il y a des gens qui étaient malheureux à ce Sommet extraordinaire de l’Union africaine sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté, c’est bien les hommes de média, qu’ils soient de la presse nationale ou internationale.

D’assistance, il faut l’avouer, ces chasseurs d’informations n’en ont pas du tout eu. « Où sont-ils ces messieurs de la commission presse ? », ne cessaient de se demander des journalistes aussi bien burkinabè qu’étrangers.

Les plus frustrés étaient surtout les paparazzis ; hormis celui de la présidence du Faso, personne ne pouvait s’approcher de l’estrade des chefs d’Etat ou même de la tribune pour photographier un intervenant, empêchés qu’ils étaient par la sécurité.

Qui d’autres devraient jouer à la médiation pour supplier la sécurité de permettre à nos photographes d’immortaliser pour la postérité ces images, si ce ne sont les membres de la commission presse qu’on ne retrouvait plus entre-temps.

Même le photographe du ministère des Affaires étrangères, lui qu’on croyait bien connu de ces hommes de sécurité pour ses multiples reportages avec les autorités de ce pays, a failli être molesté par les « codos ». Et que dire de celui du BIT, alors qu’il voulait flasher le directeur général de ladite institution pendant son intervention, qui a été purement et simplement repoussé violemment.

Le sommet prend fin cet après-midi, et l’on se demande à quoi aura servi la commission mise en place à cet effet. Toujours est-il que nombre de confrères étrangers repartiront chez eux avec un souvenir amer de ce sommet. Du bordel était bien visible.

Le cas le plus illustratif était par exemple l’octroi de badges presse à des photographes privés sinon ambulants. Certains journalistes mécontents s’en sont même pris à la presse présidentielle burkinabè, qui a laissé entendre qu’elle n’était pas associée à l’organisation pour ce qui est du volet communication. Pour un sommet réunissant des chefs d’Etat, c’est quand même bizarre.

C’en est fini pour ce sommet mais il faudrait désormais pour l’image de notre pays que ce soit mieux organisé surtout quand on sait que c’est la presse qui rend compte des évènements. La commission presse du sommet de la Francophonie est bien avertie.

• Les chômeurs veulent un chez-soi

Selon une correspondance que nous avons reçue du Centre d’assistance, de formation, d’emploi et de stages (C.AF.E.S) - Burkina Faso, 15 personnes membres du réseau de ladite structure devaient organiser une marche les 8 et 9 septembre 2004 à l’entrée de la salle de conférences de Ouaga 2000.

Pour, disent-ils, interpeller les chefs d’Etat afin qu’ils construisent la « Maison du chômeur » au Burkina Faso. Au moment où nous tracions ces lignes, nous ne savions pas si les intéressés ont pu manifester.

Rassemblés par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana ; Issa K. Barry ; Hamidou Ouédraogo

L’Observateur Paalga

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