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Terrorisme et mondialisation

Publié le lundi 4 octobre 2010 à 04h00min

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Ibrahiman Sakandé, DG des Editions Sidwaya

L’une des conséquences directes des actions terroristes dans le monde, c’est de nous apprendre à nous méfier du romantisme du village dit planétaire. D’un côté, qu’est-ce qu’un village dont la vie, l’organisation et les activités ne relèveraient que de la loi du plus fort (politiquement, économiquement, militairement) ? De l’autre, qu’est-ce qu’un village où la liberté d’aller et venir serait sous la surveillance d’organisations ou d’individus qui ne demandent qu’à outrepasser la loi de tous ?

Examiné du côté de ses causes, et pas seulement de ses effets, évalué à partir de ses conséquences sans sous-estimer ses racines, le terrorisme se comprend comme un mal de civilisation, et c’est en cela qu’il nous concerne tous. Deux préjugés entourent ce mal et en rendent l’explication hasardeuse. D’abord, le fait de présenter le terrorisme comme le prolongement d’un tempérament et d’une culture est inadmissible.

Cette manière de penser, tire sa logique de considérations interculturelles ou de prétendus conflits de civilisations qui ont lieu avant les actuelles organisations terroristes ; c’est pourquoi, on est fondé à l’appeler préjugé. On ne peut pas être au premier rang des impréssarios de la mondialisation, et organiser, en même temps, la chasse aux sorcières, au détriment d’une partie des populations du monde.

Dans son livre, Race et histoire, Claude Lévi-Strauss a écrit ces mots inoubliables : « c’est dans la mesure même où l’on prétend établir une discrimination entre les cultures et les coutumes que l’on s’identifie le plus complètement à ce qu’on essaie de nier. En refusant l’humanité à ceux qui apparaissent comme les plus « sauvages » ou « barbares » de ses représentants, on ne fait que leur emprunter une de leurs attitudes typiques. Le barbare, c’est d’abord l’homme qui croit à la barbarie ».

S’il semble difficile de lutter contre le terrorisme qui serait lié à la culture d’autrui, il reste à divulguer comment on lutte contre ses propres terroristes, ceux de sa culture et de sa communauté.

En effet, il n’existe nulle contrée au monde, où à un moment donné de l’histoire, des individus ou groupes d’individus n’aient décidé d’user de la violence au nom de telle ou telle cause. Nous pensons, en bref, que le terrorisme n’est pas lié à une culture exclusivement. Dans toutes les communautés humaines où des personnes se sont senties lésées, il a toujours existé des groupes plus ou moins organisés, pour exiger dans la violence, ce qu’ils estiment leur appartenir de droit.

Ensuite, le terrorisme, face au système mondial de violence et d’exploitation, n’est pas une nécessité. Le « martyr » que certains terroristes acceptent montre que, pour ceux-ci, l’acte terroriste est d’une nécessité absolue pour obtenir un nouvel ordre local ou mondial dans lequel le droit et l’honneur de tous seraient garantis. Tout en tenant en haute estime la noblesse des valeurs que prétend défendre le terrorisme, nous pensons que l’usage de la loi ferait mieux que celui de la terreur.

L’ONU et ses démembrements existent. Ils sont sans doute perfectibles, d’où la possibilité de les perfectionner au fur et à mesure que nous progressons ensemble vers une intelligibilité partagée de nos conditions de vie, dans un contexte de mondialisation galopante. On devrait se méfier de l’effet profondément dévastateur (pour les peuples) et corrosif (pour les mentalités) de la violence. Sous l’effet de la saturation, la violence anticipe sur ses propres objectifs et les annihile.

Nul ne sortira vainqueur de cette guerre sans fin, quand elle aura fini de nous loger, nous tous, dans la grande caverne du mal. Ainsi, notre conviction est que le système mondial ne justifie pas le mal du terrorisme de façon irréductible. Le recours à la loi est toujours possible. Les Burkinabè, à la suite de leur président, s’intéressent de plus en plus aux solutions que le monde devrait pouvoir donner à l’un de ses maux, le terrorisme.

Il est impératif que nous puissions comprendre ce phénomène à partir de notre propre situation, en évitant tous les préjugés qui alimentent la littérature terroriste. Des expressions terribles comme « axe du mal" ,« grand Sata », ne sont pas de notre lucarne. Rien ne nous permet de pendre autrui à ces gibets d’incompréhension. Nous voyons beaucoup mieux le monde en termes de « réconciliation », de « médiation », « d’intégration ».

A l’intérieur de ces mots, et des attitudes qui les accompagnent, nous prenons la présence au monde de notre pays, de « notre guide » et de notre développement, comme devant résulter d’un engagement à cultiver la fraternité, la solidarité et la justice à l’échelle mondiale. En tous les cas, et c’est le prix Nobel de la paix Nelson Mandela qui nous l’enseigne… : « Pour faire la paix avec un « ennemi », on doit travailler avec cet « ennemi », et cet « ennemi » devient notre associé ».

Par Ibrahiman SAKANDE (sakandeibrahiman@yahoo.fr)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 5 octobre 2010 à 16:23, par Goodman En réponse à : Terrorisme et mondialisation

    Merci bien M. le Directeur pour cette réflexion juste.
    God bless you !

  • Le 11 octobre 2010 à 12:57, par ODI En réponse à : Terrorisme et mondialisation

    Très bonne annalyse. cependant je me demande si ce n’est pas l’histoire qui se repète en terme de "traite des blancs" où les blancs sont vendus aux blancs à l’inverse de la tarite des noirs. Dans tous les cas, je pense que le terrorisme actuel découle des flustrations et injustices. nous devons travailler tous à instaurer une équité et cultiver la paix et l’amour pour son semblalbe.

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