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NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

Publié le mercredi 1er septembre 2010 à 23h06min

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Modeste Yaméogo, cadre des Nations Unies, a été intronisé chef de Issouka en 2005. Lors de son intronisation, il avait pris l’engagement de faire rayonner la culture moaaga et partant celle burkinabè. Avec lui, nous avons fait le point de ce qu’il a pu réalier depuis son intronisation et discuter d’autres sujets entrant dans le cadre de ses fonctions.

"Le Pays" : Vous êtes cadre des Nations unies, chef traditionnel, père de famille, fidèle chrétien. Comment arrivez-vous à allier toutes ces fonctions sans que l’une ne prenne le dessus de l’autre ?

Naaba Saaga 1er : Vou savez, celui qui est occupé ne s’ennuie pas. J’ai essayé d’aménager ma vie pour que chaque fonction que vous avez citée puisse trouver sa place vraiment de manière pleine. Ma fonction première, c’est mon travail à l’UNICEF et je fais tout pour remplir mes obligations vis-à-vis de cette institution, pour honorer mon engagement pris sur la base d’un contrat. Quant à ma deuxième fonction, c’est-à-dire celle de la chefferie traditionnelle, je peux dire qu’elle est héréditaire parce que je suis né à Koudougou d’un père qui a été chef, d’un grand-père qui a été chef également et en plus je porte le nom Yaméogo. J’ai beau travailler aux Nations unies ; je suis avant tout un Yaméogo. Ce qui fait qu’à un moment donné, mes racines m’ont fait appel pour que je puisse venir continuer ce que mes aïeux ont entrepris. La troisième fonction, je suis chrétien, j’avais pris même le chemin des ordres pour devenir prêtre chez les Camilliens pour m’occuper des enfants et des malades. J’ai fait 12 ans de séminaire et après cela, on sort trempé d’une culture à la limite plus que religieuse mais humaine. Donc je suis chrétien pratiquant, je vais chaque dimanche à la messe, même ce matin j’y étais.

Chef traditionnel et chrétien pratiquant ; ces deux fonctions ne sont-elles pas antinomiques ?

Oui je pense que vous avez très bien fait de me poser cette question parce que cela me permet de lever une équivoque. Je me rends compte que les gens pensent que le chef traditionnel est celui qui est en contact avec le monde occulte. Non, ce n’est pas le cas, le chef traditionnel aux temps anciens était le chef politique qui organisait la vie dans la société. A côté de lui, il y a le chef coutumier qui est celui qui immole les poulets pour les ancêtres. Pendant l’intronisation, ce sont les chefs coutumiers qui désignent et donnent leur accord pour que le chef traditionnel soit intronisé. Mais une fois celui-ci intronisé, il n’a pas à immoler les poulets . Le chef traditionnel et celui coutumier doivent marcher chacun sur sa voie en se disant que l’essentiel est le bien-être du peuple ; c’est pourquoi je suis catholique pratiquant jusqu’à l’heure où je vous parle. Je suis fier de le dire, et je le dis à haute voix.

Pendant votre intronisation en 2005, vous avez pris l’engagement de faire rayonner la culture moaaga : quelles sont les actions que vous avez pu mener dans ce sens ?

Quant j’ai été intronisé, mon souci premier était d’apporter ma modeste contribution au rayonnement de la culture moaaga. Pour commencer , j’ai intronisé une femme pour la première fois, pour qu’elle soit chef. Et cette femme m’aide beaucoup dans les conseils sur tout ce qui concerne les femmes. Ensuite, j’ai essayé de travailler pour que les fêtes annuelles des chefs (Nabasga) soient comprises et vécues par la population de Koudougou ; cette fête est célébrée dans le mois de mars chaque année. J’ai essayé également de construire un espace pour que quand les gens viendront me rendre visite, qu’ils sachent qu’ils sont dans la maison d’un chef. Cet espace est un musée qui s’appelle "Rayimi" qui signifie en français "Refus de l’oubli"

Qu’est-ce qu’on peut trouver dans ce musée ?

Je me suis rendu compte après de nombreux voyages que l’une de nos pauvretés est l’absence de musée qui garde le souvenir de nos aïeux. Donc j’ai essayé de construire ce musée pour garder les objets que nos grands-parents ont laissés. Je me rends compte que les gens de Koudougou sont fiers de ce musée parce qu’ils commencent à m’envoyer des objets de leurs aïeux qui pourrissaient. Il faut vraiment que nous fassions cela pour que nos petit-enfants sachent d’où ils viennent.

Avez-vous d’autres projets ?

Oui, j’ai beaucoup d’idées pour faire rayonner la culture moaga. Je vais construire une maison, un espace qui va s’appeler la case de grand-mère. Et dans cette case, je vais recevoir des enfants une fois par semaine et je ferai de telle sorte qu’ils puissent trouver dans cette case ce qu’on peut trouver dans la case d’une vieille. En plus, je ferai de telle sorte que des personnes ressources viennent leur parler de l’histoire du Burkina Faso. Outre la construction de cette case, je vais agrandir le musée afin de pouvoir y mettre beaucoup d’objets.

Propos recueillis par Yannick SANKARA

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 2 septembre 2010 à 07:19, par Mamadou En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    Merci bcp Naaba pour ce que vous aviez fais et compte de faire.que Dieu vous guide

  • Le 2 septembre 2010 à 07:32 En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    "Le Pays" : Vous êtes cadre des Nations unies, chef traditionnel, père de famille, fidèle chrétien. Comment arrivez-vous à allier toutes ces fonctions sans que l’une ne prenne le dessus de l’autre ?
    chers confrères, vous nous livrez à la raillerie de nos lecteurs. s’il vous plait, il n’as qu’une seule fonction. A ce que sache, être père de famille, chrétien ou encore chef traditionnel n’est pas avoir une fonction. Sinon on ne parlerait plus de chômage. Je pense honnêtement que les aîné de l’organe doivent lire davantage les papiers des jeunes frères avant de les faire passer sous presse. Dans tout les cas, beaucoup de courage dans cette noble et exaltant metier

  • Le 2 septembre 2010 à 09:01, par amin En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    Félicitation Naab et courage pour la poursuite de vos actions. Vous êtes en quelque sorte la synthèse entre la tradition et le modernisme.

  • Le 2 septembre 2010 à 10:04 En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    Bonjour Modeste et encore une fois toutes mes felicitations pour tes engagements diverses et combien profonds et entiers (te connaissant). Plus particulierement pour la question de la memoire ! vraiment heureux de voir que (enfin ?!) nous prenons conscience de l’importance vitale de cet aspect de la culture. En tout cas thanks, merci y gracias... de paquita reche y reche ! je t’entends rigoler !!!!
    le voiz Somé célestin

  • Le 2 septembre 2010 à 10:11 En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    tu m’aas fait tellement rigoler que j’ai oublié de t’ajouter un commentaire sur un aspect tres important et dont je suis tres fier de te voir initier : le role politique de le femme dans la société traditionnelle. Alors là ! chapeau bas mon chef !! Je te sais reconnaissant qu’au travers de tes peregrinations de par le monde tu aies pu en tirer une reflexion aussi profonde sur la nature profonde de nos sociétés traditionnelles... Bon je te repondrai je t’ai point oublié et on pourra continuer
    a bientot
    Somé celestin

  • Le 2 septembre 2010 à 10:16, par le bon citoyen En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    Bonjour à tous
    Je pense que ce sont ces gens qui sont en train de faire perdre la culture africaine aux africains.
    Suivez mon regard, il ne suffit pas de construire un musée pour que les gens passent se rappeler du passé qu’on a du mal à assumer. Pour sauvegarder la tradition et la culture, il faut qu’en tant que chef on montre l’exemple par la pratique (prenez le cas de maître Titinga PASSERE).

    On ne peut pas défendre 2 choses à la fois, soit on opte pour être chrétien pratiquant, soit on opte pour être chef traditionnel donc défenseur des valeurs traditionnelles et africaines.
    Je pense qu’on doit imposer cette option pour la nomination des chefs coutumiers. Comment peut-on représenter l’Afrique que nous même nous proclamons autres choses. (Voyez les chefs coutumiers au Ghana ou en Afrique du Sud). Tant qu’on ne reviendra pas à nos racines pures, les africains seront toujours les derniers des autres peuples.

    Comme le disait quelqu’un, parmi tous les peuples du monde, seul les africains qu’on a pu convaincre que ce que leurs ancêtres faisaient n’était pas bon. Et aujourd’hui on trouve des africains qui se battent bec et ongle pour défendre des valeurs qui ne sont pas les siennes.
    Que ceux qui ne sont pas d’accord me pardonnent ? C’est que mon point de vue.

    Bonne journée

  • Le 2 septembre 2010 à 10:28, par le philosophe En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    je me demande comment ce naba chrétien qu’il se dit pourrait avoir comme réaction devant des sacrifices aux mannes des ancêtres, ou-bien le catholicisme tolère le syncrétisme ?

  • Le 2 septembre 2010 à 13:23, par Moussa En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    De grâce avant de commencer à critiquer, rassurez-vous que ce que vous dites est vrai. Naaba Saaga n’imole pas, c’est un assoiffé de la culture. Il n’est pas un chef coutumier pour ceux qui le connaissent et il le dit tout haut. La tradition africaine ne se résume pas à imoler des poulets et autres moutons... En tout cas, à mon humble avi, je trouve qu’il fait de son mieux. Combien de chefs traditionnels se sont convertis à la politique politicienne. Mais pas Modeste. Sachez qu’on peut défendre la culture africaine en étant bon chrétien ou bon musulman. N’ayez pas honte de reconnaître les mérites d’un grand homme

    • Le 2 septembre 2010 à 22:54 En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

      bien merci il y en a qui croient qu’il suffit de s’asseoir derriere un ordinateur et de distribuer les notes aux autres qui eux au moins font quelque chose Ils ne prennent meme pas le temps de temps les articles et se jettent sur des commentaires comme pour se faire voir. A moins qu’ils lisent sans rien y comprendre. critiquer est une science qui s’apprend si l’on veut que sa critique soit utile (et ne paas rester polemiste seulement)
      somé

      • Le 8 septembre 2010 à 18:05, par Làà -i -làà !! En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

        Parfaitement d’avis avec vous, SOME ! On ne peut être chrétien et chef coutunier à la fois ! D’ailleurs, on immole AU NOM DU CHEF, même s’il ne tient pas lui-même le couteau ! Et puis, ce chef n’a qu’une seule fonction ; père de famille et autre ne sont pas des fonctions !

  • Le 2 septembre 2010 à 14:05, par uncandidat En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    "Le Pays" : Vous êtes cadre des Nations unies, chef traditionnel, père de famille, fidèle chrétien. Comment arrivez-vous à allier toutes ces fonctions sans que l’une ne prenne le dessus de l’autre ?
    Qu’est ce qu’une fonction mon cher journaliste ?

  • Le 4 septembre 2010 à 23:52, par Aurelien En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    Si Monsieur Modeste Yaméogo a accepté d’etre intronisé chef traditionnel,gardien et défenseur de la tradition,c’est son droit le plus absolu ! Je le félicite pour son engagement a la perennisation des us et coutumes de sa communauté.Par contre lorsqu’il déclare qu’il reste chretien pratiquant,là c’est ca fait sourire !!!
    Monsieur Yameogo pense certainement comme beaucoup de personnes qui prennent d’assaut les églises le dimanche et sont chez les feticheurs et autres marabouts les autres jours de la semaine !
    Aller regulieremnt l’eglise,lire la bible,prier ,jeuner etc...sans mettre la parole en pratique reste purement et simplement du folchlore !
    Le chretien pratiquant est celui qui met la parole de Dieu en pratique !!!
    Et la parole declare qu’on ne peut suivre Jesus et adorer d’autres dieux !C’est là malheureusement un choix qu’il faut faire !
    Monsieur Yameogo comme beaucoup de personnes de nos jours vont à l’eglise et croient à tort que la religion peut sauver ;c’est une grave erreur ,car la religion ne sauve pas ,bien au contraire elle éloigne l’homme de Dieu !Le salut est personnel et non collectif !C’est la relation personnelle qu’on cultive avec Jesus Christ qui sauve.
    Et si Monsieur Yaméogo chretien pratiquant de son état,comprenait la signification du sang de Jesus versé à la croix,lui l’allié des sacrificateurs,épargnerait la vie à bien du betail !

    Bien amicalement

  • Le 22 septembre 2010 à 14:00, par sidwata En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    je vous encourage a persévéré dans votre attitudede transcendance

  • Le 22 septembre 2010 à 14:12, par Marx En réponse à : NAABA SAAGA 1er DE ISSOUKA : "Je suis chef traditionnel et chrétien pratiquant"

    Bonjour,
    Ici j’ai l’impression que les uns et les autres font de la confusion. En effet, être intronisé chef coutumier ou traditionnel obéit à des règles bien précises entourées de SACRÉES. Au cours de l’intronisation, il y a des LOIS et REGLES SACREÉES que tout prétendant chef doit obéir (auxquelles je ne voudrais m’appesantir). Et ces lois et règles sont immuables depuis des générations. Déclaré qu’on est chef traditionnel et chétien pratiquant est à mon avis vide de sens. En cela je rejoinds Aurelien et Le bon citoyen car ces deux entités ne sont pas conciliables. Quelqu’un a évoqué le cas de Me Pacéré Titinga qui en est l’illustation parfaite de cette incompatibilité. Ne confondons pas CULTURE et CHEFFERIE TRADIONNELLE car tous les peuples ont LEUR culture alors que tous les peuples n’ont pas de CHEFFERIE TRADITIONNELLE, en tout cas au Burkina (les sociétés acéphales).
    Si Issouk Naaba a trouvé des subterfuges pour être "chef traditionnel et chrétien pratiquant" c’est tout à son honneur mais encore une fois ne mélangeons pas les genres. Les réligieux vous le diront, on ne peut pas immoler des poulets sur des autels et venir prier dans leur église !! et la tradition vous fait l’obligation d’immoler les poulets pour diverses occasions : Naabasga, implorer les mânes pour telles ou telles raisons....
    Alors restons AFRICAINS et soyons fiers des legs de nos ancêtres et "ne pervertisons pas la Nature en voulant la perfectionner" comme disait un penseur.

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