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LIBERATION D’OTAGES ESPAGNOLS : Ainsi donc, on peut négocier avec AQMI

Publié le mardi 24 août 2010 à 01h09min

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On vient d’assister à un dénouement heureux dans une prise d’otages dans la bande sahélo-saharienne. En effet, deux des trois humanitaires espagnols enlevés en novembre 2009, Roque Pascual et Albert Vilalta, ont recommencé à goûter à la liberté le lundi 23 août 2010. Alicia Gomez, le 3e otage, elle, avait déjà été libérée auparavant. Cette dernière libération intervient après neuf mois de captivité, neuf mois entre les mains de leurs ravisseurs qui ne sont nul autres que les fameux éléments d’Al Quaïda au Maghreb islamique (AQMI). Il a fallu tout le temps que dure une grossesse normale pour que les négociations avec AQMI accouchent enfin de cette remise en liberté. Une libération qui intervient hélas après la froide exécution de l’ex-otage français, Michel Germaneau.

On se souvient que cette intervention musclée qui a échoué, a nourri largement la polémique, surtout dans l’Hexagone. Sarkozy, lui, a promis que la mort de Germaneau ne restera pas impunie. Dès lors, l’on se demandait si la logique ne serait pas désormais à l’usage tous azimuts de la méthode forte face à cette gangrène qui sévit dans la zone. Au demeurant, l’escalade verbale entre Occidentaux (à travers la voix de la France) et AQMI faisait craindre, désormais, la mise à l’écart de toute solution négociée pour ce qui est de la gestion des otages dans ce vaste désert. Bref, depuis l’exécution de Germaneau, bien des observateurs se faisaient beaucoup de soucis pour les autres cas.

Et puis, du bon ! Avec ces libérations, on se rend compte que l’option diplomatique garde toujours une place dans la stratégie de libération des otages. Comme quoi, on peut aussi négocier avec AQMI. Selon toute vraisemblance, les Espagnols n’ont pas épousé la thèse du "tout militaire" et la logique va-t-en-guerre, qui ont conduit au désastre que nous connaissons dans le cas de l’ex-otage français. Ils auront joué la carte de discrétion et du pragmatisme. Toutefois, les éternelles questions demeurent : y a-t-il eu paiement de rançon ? Qu’est-ce que la nébuleuse a perçu en contre-partie de cette libération ? On imagine mal que les enfants terribles du désert se soient amadoués seulement face à des yeux doux que leur auraient faits les négociateurs ou qu’ils soient juste tombés sous le charme des prestations footballistiques de la Roja, la bande à Casillas en Afrique du Sud ! Ont-ils mis quelque revendication dans la balance ?

En tout cas, d’aucuns lient à ce dénouement l’acceptation par la Mauritanie d’extrader vers le Mali l’ex-prisonnier malien, Omar le sahraoui, condamné à 12 ans de prison à Nouakchott pour avoir facilité la capture, par AQMI, des otages dont il est question. Ce dernier aurait du reste déjà rejoint les bases d’AQMI, au nord du Mali. En attendant d’en savoir plus, on peut dire que tous les moyens sont bons, s’ils permettent de sauver des vies humaines. Il est évident qu’avec cette montée en puissance des actes de terrorisme, dans la bande sahélo-saharienne, les chancelleries et les médiateurs ne savent pas vraiment quoi faire, entre intervenir militairement ou négocier. Reste que jusque-là, la négociation a toujours fait ses preuves, même si les éventuelles rançons versées servent à alimenter les fonds de la nébuleuse et la rendent de ce fait, plus forte et plus difficile à neutraliser.

En ce qui concerne la négociation pour la libération de ces otages espagnols, le Burkina, le Mali et la Mauritanie auraient joué un rôle capital. Si tel est le cas, le Burkina, une fois de plus, s’illustre positivement dans les pourparlers pour le dénouement pacifique d’une prise d’otages dans le Sahel. A ce rythme, Ouagadougou deviendra un axe important par rapport aux stratégies de négociation. Il est heureux de redonner la liberté à des otages. Mais il serait bien plus agréable d’éviter ces prises d’otages elles-mêmes. Et c’est cela le vrai casse-tête. Un combat difficile et de longue haleine s’il en est. Son importance commande que l’on se mette à la tâche. D’autant que la psychose des menaces d’enlèvements et autres actes terroristes ont la fâcheuse conséquence de conférer à une région l’image de zone rouge.

Nul besoin de dire qu’avec une telle réputation, humanitaires et autres partenaires finissent par tourner les talons. Et ce sont les pauvres populations qui sont rendues plus vulnérables parce que privées du soutien habituel d’ONG et autres. Il faut donc oeuvrer à sécuriser la zone en s’attaquant non seulement aux causes profondes du terrorisme, mais aussi en travaillant à tarir les éventuelles sources de financement de la pieuvre. Hélas, c’est justement ce volet du combat qui peine à prendre corps. L’importance de l’enjeu et la pénibilité de la tâche commandent que l’action soit concertée et que tous les Etats jouent à fond leur partition.

"Le Pays"

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