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GREVE A AIR FRANCE MALI : Les survivances du fait colonial

Publié le mardi 17 août 2010 à 01h23min

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"A travail égal, salaire égal ! Non à la discrimination et à l’injustice !" ont scandé les membres du personnel de Air France Mali, ce 11 août 2010 au siège de l’agence de la compagnie à Bamako. Avec à la clé, une grève illimitée. Causes : avantages et indemnités largement moins égaux que ceux du personnel de l’agence de la compagnie internationale au Sénégal.

Des larves de l’esprit colon continuent à grouiller en Afrique

A priori, on peut comprendre qu’il y ait des écarts entre les avantages accordés à un personnel d’une même entreprise, si les membres de ce personnel travaillent dans des pays différents aux niveaux de vie différents. Mais que ces écarts ne soient pas tels qu’ils viennent titiller la discrimination. De même, les raisons avancées pour justifier ces écarts doivent être plus plausibles. Pour l’heure, l’hypothèse du coût plus cher de la vie à Dakar qu’à Bamako, a les jarrets en sable. Autant donc ne rien leur donner du tout, à ces citoyens maliens, puisqu’ils n’ont pratiquement rien à dépenser, qu’ils travaillent moins durement qu’à Dakar, qu’ils peuvent se contenter du minimum et que l’entreprise fait moins de bénéfices puisque la vie est moins chère. Outre cela, la thèse de la crise économique n’est guère plus convaincante. Air France vole librement dans les cieux du continent noir depuis que les ailes de Air Afrique ont été cramées. Avec le nombre de ses vols et dessertes en Afrique, il serait dificile de croire qu’elle voyage à perte vers ses destinations.

Une petite visite aux sièges des agences de cette compagnie sur le sol africain, et on se rendra bien compte qu’elle applique à fond la maxime du commerçant attaché au profit maximum avec le minimum d’investissements. Air France agit-elle dans le social en Afrique ? Rien n’est moins sûr. En tout état de cause, il ne faut pas oublier que ce sont des hommes et des femmes qui s’échinent dans les aéroports et que l’heure de la mécanisation intégrale n’a pas encore sonné. Mais pourquoi tant s’en faire ? De toute façon, ne s’agit-il pas de colonies, fussent-elles anciennes ? Exactement comme le pensait l’homme en complet blanc et au chapeau en cloche, il y a plus d’une soixantaine d’années.

Une fourmi ne dévore un chat vivant que parce que ce dernier s’est laissé faire

Du reste, une fourmi ne dévore un chat vivant que parce que ce dernier s’est laissé faire. Que le personnel de ces entreprises françaises - cela va au-delà même du cas d’Air France - soit exploité et essoré contre des misères de salaires, à la barbe et malgré la résistance des syndicats, semble n’insuffler à nos dirigeants qu’une piètre émotion. Normal que les patrons de ces entreprises se montrent parfois arrogants. Et comme nous courbons docilement l’échine, l’exploitation ne peut que s’abattre impunément, comme il y a 65 ans. On a accepté qu’on étouffe Air Afrique. Qu’on ne soit pas étonné de ressentir les conséquences de sa mort. Il y a cinquante ans, les pays africains, ou du moins leurs gouvernants, ont dit avoir pris leur indépendance du colonisateur. Mais des larves de l’esprit colon continuent à grouiller en Afrique. Et pour paraphraser l’autre, l’indépendance n’est pas un vain mot. C’est une mentalité qui dicte un comportement. L’avons-nous vraiment cette mentalité ?

Abdou ZOURE

Le Pays

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