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Orpaillage : Ruée vers Boulsa

Publié le mercredi 21 juillet 2010 à 00h15min

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vTougui, village de la commune de Boulsa, situé à une douzaine de km sur l’axe Boulsa Zéguédéguin connaît ces temps-ci une affluence due à la découverte d’un gisement d’or sur une colline. Depuis lors, la course à l’extraction du métal jaune fait des émules...

Les habitants du quartier de Kandaaga viennent de découvrir, il y a moins de deux mois, que son sous-sol regorgeait du métal jaune. De bouche à oreille comme une traînée de poudre, la nouvelle s’est répandue dans toute la commune et a même dépassé les frontières provinciales.

Un village cosmopolite, en un temps record, s’est constitué au flanc de la colline sacrée du village. D’ailleurs, le Namentenga est une province à très forte potentialité aurifère. Taparko, dans la commune de Yalgo, abrite l’un des plus grands gisements d’or du Burkina exploité par SOMITA (Société minière de Taparko).

Sur les huit communes que compte la province, seules Dargo et Zéguédeguin n’ont pas encore de sites à exploiter. Naaba Kib Lalwendé, chef coutumier du village de Tougui indique : « Peiguem, communément appelé Kandaaga, là où se trouve le site, est un des quartiers de mon village. C’est moi qui nomme le chef de ce quartier, avec mon autorisation, il fait les sacrifices sur les lieux sacrés à l’approche de chaque saison hivernale pour demander paix, santé, prospérité et abondance ».

Il y a plusieurs lieux de sacrifice à l’intérieur du village selon le chef Kikirkanré (bosquet des génies), le Tanyiilé (colline à cornes), Tansablogo (colline noire). Au flanc de cette dernière où fouillent les orpailleurs, se trouve un serpent boa visiblement remarquable. Il est en outre inoffensif. Faisant la genèse du site, il y a environ 45 jours, le chef du village de se souvenir : « Tout a commencé avec ma sœur Zonabo Lallogo au puits qui, en voulant satisfaire sa curiosité a été rassurée que le minerai qu’elle observait du fond de sa calebasse était bel et bien de l’or.

C’est ainsi que les plus avertis se sont mis au travail en ne se limitant pas seulement à vanner la terre de surface qu’ils ramassaient mais, en creusant ». L’un des courtisans du chef de renchérir : « Nous ne savions pas que les prélèvements et le bornage qui étaient faits par des chercheurs, il y a plus de dix ans, révéleraient qu’il y avait de l’or sur notre territoire ». Le site compte de nos jours plus d’un millier de personnes à majorité jeunes venant principalement des villages voisins. On note également la présence des orpailleurs de renom de provinces voisines et de pays limitrophes tels des Nigériens, des Ivoiriens.

A l’entrée du site, le vrombissement des moulins écrasant le précieux minerai accueille tout arrivant. A la faveur de l’orpaillage, tout ce dont on a besoin est à portée de main. Ce site est incontestablement à l’image de ceux d’ailleurs, selon les visiteurs. Les filles sont pour la plupart des vendeuses ambulantes. Avec leur assiette sur la tête, elles vont d’un groupe de personnes à un autre. Elles vendent des galettes, des gâteaux, de l’eau.

Madeleine Gougbou, élève de la classe de 5e explique sa présence sur le lieu : « C’est parce que ce sont les vacances que je suis venue vendre des gâteaux » alors que l’une des vendeuses d’eau, Zounoogo Diallo, âgée de 13 ans environ poursuit : « Le bidon d’eau de 25 litres coûte 150 francs ici. A la fin de la journée, je peux gagner 2 000 francs ».

Salif Sallé 16 ans à peine, au bord du puits de son frère, se charge de déverser la terre extraite. De la présence des femmes ? Il faut reconnaître que si certaines d’entre elles se sont constituées en restauratrices, d’autres dans leur bivouac vendent par contre leur « corps » avec toutes les conséquences qui en découlent : MST /IST, VIH, etc.

Les garçons, eux, sous des hangars, à cœur joie, se chargent de moudre soit au moulin ou au mortier l’argile contenant le précieux minerai. C’est un véritable travail de fourmis et très fastidieux auquel ils s’adonnent au point que le jour, ceux ayant travaillé pendant la nuit dorment sous les arbres. « Ils attendent encore la nuit pour relayer ceux du jour », a fait savoir Aboubacar Ganemtoré nouvellement arrivé de Côte d’Ivoire.

Pour lui, le rendement actuel n’est pas encore à la hauteur de leurs attentes mais, il a bon espoir de lendemains meilleurs et de signaler au passage que « personne n’a atteint pour le moment les 15 m de profondeur ». Issouf Ouédraogo, ancien militaire est sur le site au nom de Issa Namouna responsable d’une société minière. Il veille sur la sécurité des biens et des personnes sur le site.

Il protège le domaine des propriétaires agréés et prête de l’argent à ceux qui ne disposent pas de ressources propres pour recruter une main-d’œuvre non qualifiée pour l’extraction du minerai des puits. Il achète aussi l’or de ses créanciers, règle les litiges nés entre les orpailleurs. Pour le moment, les risques d’éboulements sont minces car le constat de l’ancien militaire Issouf Ouédraogo indique que les puits ne sont pas encore profonds. « Les éboulements arrivent souvent lorsque le site est vieux.

D’ailleurs, ce sont les esprits malins qui provoquent souvent les éboulements : ils cassent les murs internes qui constituent des supports. Ce sont des « topomals » (mauvais topographes - dans leur jargon du milieu), des voleurs, des assassins… », explique M. Ouédraogo. Pour la protection des enfants sur le site, "l’association Vision Plus" mène la sensibilisation. Cette association est soutenue par le « projet Mines » financé par l’UNICEF en partenariat avec l’« Association pour le théâtre le Trésor » de Boulsa.

Cette campagne porte sur les droits des enfants. Les services en charge de la protection des enfants mettent également les bouchées doubles pour éviter un grand déplacement des enfants sur le site du fait de sa proximité avec Boulsa, le chef-lieu de province.

Le décret portant fermeture temporaire des sites en saison de pluies, principalement en août pourra-t-il être appliqué dans toute sa rigueur sur ce site au regard de l’ambiance qui y règne ? A ce propos, le haut-commissaire de la province du Namentenga, Pierre Emmanuel Ouédraogo est ferme : "On a encore en mémoire qu’en août 2009, deux jeunes sur le site de Tampèla, (quartier de Simagué), village de la commune de Bouroum ont trouvé la mort suite à un éboulement".

Jean-Baptiste DAMIBA

Sidwaya

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