Enfin, il y eut les menaces proférées par la nébuleuse islamiste Al Qaïda. L’ombre de l’organisation islamiste aura plané tout le mois que cette fête du football aura duré et c’est avec un réel soulagement que l’on vit s’éteindre les lampions de Soccer City, quelques instants après l’apothéose de la remise de la prestigieuse coupe à la méritante Espagne.

Mais c’est que cette fête du football aura tout de même servi de prétexte à des assoiffés de sang pour perpétrer une bien basse besogne, ailleurs, dans un autre pays africain. En effet, au moment même où à l’intérieur du temple du foot, les yeux étaient rivés sur le match opposant l’Espagne aux Pays-Bas, à des kilomètres de là, dans la capitale ougandaise, Kampala, fusaient des cris de détresse et d’horreur. Deux explosions ont secoué deux restaurants de la ville, causant plus d’une soixantaine de morts et de nombreux blessés. A l’heure actuelle, la police privilégie la piste islamiste. Elle a de quoi. Les chefs des shebabs, cette milice somalienne proche d’Al Qaïda, il y a seulement quelques semaines, proféraient des menaces considérées sérieuses, et menaçaient de frapper l’Ouganda et le Burundi, au motif que ces deux pays ont envoyé des soldats au sein des troupes de paix de l’UA en Somalie.

Et revoilà la difficile équation somalienne qui surgit en territoire étranger, fait des victimes et crée la panique. En filigrane, ou pourra lire, d’ailleurs, qu’à défaut d’avoir pu perturber le Mondial sud- africain, Al Qaïda aura tout de même été en mesure de jouer une troisième mi-temps d’horreur et de désolation en territoire ougandais. En restera-t-elle là ? Il faudra sans doute attendre pour le savoir. Car la menace pèse toujours, lancinante. Et lorsqu’on sait que la nébuleuse fonctionne à la manière d’un fantôme insaisissable, il y a vraiment de quoi s’inquiéter.

Tout comme, ce double attentat fait surgir de légitimes interrogations sur le prochain sommet (le XVe) des chefs d’Etat et de gouvernements de l’Union africaine, prévu pour se tenir du 25 au 27 juillet de cette année, à Kampala. Car, ce pays se trouve dans le collimateur des islamistes shebabs. Ces derniers ayant la rancune tenace, ne se contenteront peut-être pas d’avoir frappé une fois. Et leur désir de choquer en faisant le plus grand nombre possible de victimes étant avéré, un tel rassemblement de dirigeants du continent en un seul lieu leur offre l’occasion rêvée de satisfaire de bien sombres desseins. Reste à savoir si l’Ouganda saura utiliser les moyens adéquats pour sécuriser l’évènement.

En a-t-elle les moyens ? Si non, quelles mesures palliatives devra-t-elle préconiser ? La question somalienne est là, bien là, et lui trouver une solution appropriée est d’autant plus difficile que l’on a affaire à des extrémistes pour qui le meilleur des dialogues consiste purement et simplement à la capitulation de l’adversaire. Ces "fous de Dieu" qui ont du mépris pour leur propre vie n’ont évidemment cure de celle d’autrui. Et c’est là toute la complexité du problème somalien que viennent aggraver la non-existence d’un vrai Etat central fort, la dictature de "cheffaillons" fanatiques auto-proclamés, leaders religieux qui rêvent, après avoir pourri ce qui se trouve chez eux, tentent de détruire ce qui se trouve ailleurs.

Alors, quelle réponse sera celle de la communauté internationale ? Et, dans l’immédiat, que fera l’UA pour assurer la sécurité d’un sommet qui s’ouvre très prochainement ? Une chose est sûre. Plus que hasardeux, il serait dangereusement imprudent de prendre à la légère les menaces des shebabs. Ils viennent de frapper et de la manière la plus horrible qui soit. Mais il serait également illusoire de croire que la résolution de la question sécuritaire est l’affaire du pays hôte, et que seule l’Ouganda a le devoir de s’en occuper.

On ne l’oubliera pas, les shebabs ont pour parrain, Al Qaïda, une nébuleuse qui a le don de s’infiltrer partout et se montre capable de frapper où et quand on ne l’attend pas. Le tout sera de prendre à temps, les mesures qui s’imposent, en toute collégialité. Ce sera sans doute là, le moyen le plus efficace de dissiper à temps ces gros nuages qui s’amoncellent et constituent autant de menaces sur la tenue du prochain sommet de la panafricaine continentale.

"Le Pays"