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Suspension du Nigeria : Goodluck n’est-il pas hors-jeu ?

Publié le vendredi 2 juillet 2010 à 00h41min

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Décidément, la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) aura fort à faire après la 19e coupe du monde de football, Afrique du Sud 2010. Entre les réflexions qui doivent être engagées sur l’arbitrage et l’introduction de la vidéo, elle devrait aussi gérer des contradictions extrasportives, notamment l’intrusion du politique dans la sphère footballistique.

Le cas le plus médiatique est sans doute celui de la France où après la débâcle du mondial, les affaires ont pris une tournure politique avec l’implication personnelle du président Nicolas Sarkozy qui a reçu Thierry Henry dès leur retour à Paris, les sorties fracassantes de la ministre de la Santé et des Sports, Roselyne Bachelot puis l’audition du coach Raymond Domenech et du président démissionnaire de la Fédération française de football (FFF) par la commission des Affaires culturelles de l’Assemblée nationale.

Ainsi la FIFA a beau menacer de sévir, rien ne semble arrêter la tournure politique pour ne pas dire politicienne qu’a prise cette déroute des Bleus qui est pourtant et avant tout sportive. En réalité, on a l’impression qu’on nage en pleine hypocrisie parce que de tout temps, le politique a toujours fourré son nez dans les stades, soit pour voler au secours de la victoire quand les athlètes décrochent des médailles, soit pour sévir en cas de déconvenue.

Cela d’autant plus que dans bien des cas, l’Etat casque pour payer les entraîneurs expatriés (à ce propos, le coach nigérian, le Suédois Lars Lagerback, qui a signé un contrat de 1,8 million de dollars pour 5 mois, a un salaire mensuel de 360 000 dollars par mois soit près de 200 millions de FCFA), payer les primes des joueurs, payer pour la préparation de l’équipe, payer pour le séjour des sportifs tout au long des compétitions…

Dans ce cas, quoi de plus normal que celui qui a payé la guitare veuille imposer l’air qu’il veut entendre jouer. C’est précisément ce qui se passe au Nigeria où le président Goodluck Jonathan a frappé fort en prenant la décision de suspendre, pendant deux ans, l’équipe nationale de son pays de toute compétition internationale après la sortie prématurée des Supers Eagles dès le premier tour du mondial sud-africain.

Avec cette suspension pour « réorganiser le football nigérian », le pays de Jay Jay Ococha ne devrait donc pas participer aux éliminatoires de la CAN 2012 où il se trouve dans le groupe de la Guinée, de l’Ethiopie et de Madagascar. Les Super Eagles n’ont pourtant pas démérité dans un groupe B où ils avaient quand même affaire à forte partie (l’Argentine, la Corée du sud et la Grèce).

Au finish, ils sont repartis avec un match nul (2-2 avec les Sud-Coréens) et deux défaites (0-1 face aux Argentins et 1-2 face aux Grecs), soit 1 point engrangé sur 3 matches avec 3 buts marqués pour 5 encaissés. Tout au plus, peut-on reprocher au capitaine Nwankwo Kanu et à ses coéquipiers de compter uniquement sur leur talent intrinsèque et de ne pas se battre véritablement pour remporter des parties qui sont parfois à leur portée.

Que le Chef de l’Etat nigérian ait l’impression d’avoir jeté ses 900 millions de nairas (soit près de 3 milliards de F CFA) par la fenêtre, on peut le comprendre, mais il n’est pas sûr que ses oukases soient appropriés car, dans un domaine comme le sport où c’est seulement en se frottant aux autres qu’on peut s’améliorer et se bonifier, ce n’est pas en se repliant sur soi-même face à ses propres carences et lacunes qu’on peut aller de l’avant.

Il y a donc lieu de se demander si Goodluck Jonathan n’est pas tout simplement hors jeu ou, en d’autres termes, s’il ne fait pas fausse route, et ce, d’autant plus qu’il expose son pays à une sanction de la FIFA qui a rappelé encore le 30 juin dernier, après le cas français, qu’elle ne tolérerait pas d’ingérence politique dans le fonctionnement d’une fédération.

Et quand on connaît le pouvoir de cette organisation internationale, dont les décisions sont parfois plus respectées que celles-mêmes de l’ONU, on peut avoir peur pour le Nigeria ; même si pour l’heure la structure de Sepp Blatter a indiqué qu’elle n’avait pas eu confirmation de cette suspension. De plus, l’indispensable travail de réorganisation et d’assainissement du milieu footballistique nigérian n’exclut pas la participation aux joutes continentales et internationales qui contribuent à aguerrir les joueurs.

On a même souvent l’impression que les responsables politiques, administratifs et fédéraux battent souvent leur coulpe sur la poitrine des joueurs, car bien souvent, ils sont aussi comptables, ne serait-ce que par leur incurie, des contre-performances sportives. Que chacun ait donc le courage de se regarder dans la glace et de reconnaître sa part de responsabilité au lieu de charger seulement les acteurs de tous les péchés du sport roi.

D’ailleurs, si, d’autre part, la recette nigériane devait être appliquée au Burkina Faso, où le but coûte parfois un milliard de F CFA (1), il y a bien longtemps qu’on aurait dû suspendre ces canassons qu’on appelle Etalons pour, disons, au moins 4 ans, pour les mêmes raisons, quand on sait par exemple qu’Angola 2010 nous aura coûté 1 milliard 200 millions de F CFA pour… rien. Mais, bon, comme le dit l’adage, « à chacun sa vérité » ou plutôt, pour parler football, à chacun son système de jeu.

Hyacinthe Sanou

(1) En référence à la CAN 2004 en Tunisie où les Burkinabè avaient cotisé un milliard de F CFA au profit des Etalons qui sont revenus prématurément de la compétition, éliminés dès le premier tour avec seulement un match nul et un seul but marqué

L’Observateur Paalga

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