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Crise au Front populaire ivoirien : Désiré Tagro sera-t-il le mouton du sacrifice ?

Publié le mercredi 30 juin 2010 à 00h46min

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Si la « Sorbonne » (1), une place au cœur du Plateau, quartier administratif et des affaires, n’était pas fermée, c’est certain qu’on débattrait des jours et des jours sur une affaire qui défraie la chronique en ce moment sur les bords de la lagune Ebrié : il s’agit de l’affaire Désiré Tagro, ce ministre de l’Intérieur proche du président Laurent Gbagbo. Soupçonné dans une affaire de corruption, il est actuellement dans de beaux draps.

Et savez-vous qui est à la base des malheurs qui l’assaillent ? Tenez-vous bien, c’est son camarade politique du Front populaire ivoirien (FPI) le professeur Mamadou Koulibaly, qui a créé le scandale. Celui-ci n’est pas n’importe qui, puisqu’il occupe le perchoir. Si l’information avait été donnée par un journal de la place, on aurait certainement pris cela avec des pincettes. Mais venant d’un homme politique de la trempe de Koulibaly, cela change tout. Et depuis ce pavé dans la mare, l’événement a éveillé l’intérêt de la classe politique. Les refondateurs du FPI, qui ont décidé de gouverner la Côte d’Ivoire autrement après leur arrivée au pouvoir en octobre 2000, seraient-ils en train de faire autre chose ?

Au-delà de la corruption dont on accuse l’ancien directeur de cabinet de feu Boga Doudou, c’est une affaire qui discrédite le parti au pouvoir aux yeux de l’opinion publique. Un parti futé et suffisamment responsable aurait réglé cette affaire en famille sans qu’elle ne s’ébruite à moins qu’il y ait des taupes. Mais ce ne fut pas le cas et voilà que l’affaire est portée à un autre niveau après que le président Gbagbo a demandé une enquête judiciaire.

Des auditions ont même commencé au palais de justice du plateau, où Tagro a été entendu il y a quelques jours de même que Koulibaly. Les accusations portées contre le ministre de l’Intérieur portent aussi sur le recrutement à la police, la perception de commissions qui auraient été versées par Sagem Security, et le Probo-Koala ainsi sur le détournement des fonds destinés au pèlerinage à la Mecque. On parle d’une enquête administrative, et le procureur Raymond Tchimou a un mois pour boucler le dossier à lui confié. Une fois les données recueillies, ce dernier, apprend-on, les fera parvenir au chef de l’Etat.

On ne peut donc pas aujourd’hui affirmer que Tagro est mouillé dans plusieurs « sauces ivoiriennes ». Pour le moment, la présomption d’innocence existe, l’enquête n’ayant pas encore établi la culpabilité de l’accusé. Pendant que Gbagbo attend impatiemment de connaître les tenants et les aboutissants de cette affaire, le président de l’Assemblée nationale a initié un projet dénommé Commission d’enquête parlementaire pour tirer au clair cette affaire. Hier mardi 29 juin 2010, une session parlementaire a eu lieu à cet effet.

Mais tous les députés n’ont pas adhéré à ce « front », puisque qu’un groupe parlementaire, baptisé Loyauté, s’est désolidarisé de ceux qui réclament une commission d’enquête parlementaire. Son président, c’est Drissa Dagnogo, qui pense que le président a fait son choix, un choix qui consolide la concrétisation de la séparation des pouvoirs, qu’est la saisine de la justice. Ce groupe parlementaire va plus loin en demandant aux autres députés de ne pas mettre le pays dans une impasse inutile qui les détournerait de l’essentiel. C’est-à-dire la démobilisation, la réunification, les élections.

Comme on le voit, les parlementaires ivoiriens n’ont pas les mêmes préoccupations, et on ne peut s’empêcher de se demander si l’Assemblée nationale veut se substituer à la justice. Il y a comme un acharnement pour en finir avec un adversaire gênant. Mais Tagro sera-t-il le mouton du sacrifice ? Décidément, avec ces refondateurs, on verra tout, et chose curieuse, au lieu de s’unir pour préparer la présidentielle, ils étalent au grand jour leurs divergences. A ce rythme-là, on pourrait penser que les professeurs du FPI ont leur place à l’université n

(1). C’est un espace de discussion où les orateurs débattent avec passion les problèmes du pays. Les « sorbonnards » sont proches du camp présidentiel.

Par Justin Daboné

L’Observateur Paalga

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