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DEVELOPPEMENT DU PASSORE : "Ressortissants, taisons nos rancoeurs !"

Publié le lundi 28 juin 2010 à 00h29min

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Ceci est une réaction d’un ressortissant du Passoré suite à un article publié dans notre édition du 9 juin 2010 sur le développement de sa province. Il appelle les ressortissants à taire leurs rancoeurs et à unir leurs efforts pour sortir la province de l’ornière

Dans sa livraison du 9 juin 2010, n°4632 "Le Pays" publiait un article sous le titre "Développement du Passoré : “un échec imputable à Oumarou Kanazoé”. Parce que cet article est signé de deux partis politiques de la mouvance présidentielle contre un membre influent de la FEDAP-BC, on en rit ou on en pleure en s’imaginant l’atmosphère qui règnera entre eux lorsqu’ils se retrouveront pour battre campagne pour leur candidat commun aux élections de novembre prochain et ce sera bon à prendre pour certains et un cauchemar pour d’autres. L’article qui est à la base de cette intervention se focalise sur deux points essentiels :

- le déplacement du marché de Yako ;

- le non-achèvement de l’immeuble situé sur le site de l’ancien marché. Dans de telles circonstances, il paraît toujours bon et opportun de se mettre au-dessus du débat politique pour analyser une situation donnée lorsqu’on en détient une petite parcelle de vérité tout en incitant tout autre dépositaire de parcelle de cette vérité à s’investir dans ce sens. C’est ce à quoi nous voudrions nous essayer à travers ces lignes.

I - Du déplacement du marché de Yako

Lorsque dans les années 1986-1987, le gouvernement du Burkina Faso décida d’instituer des foires régionales pour booster le développement économique des différentes régions du pays et surtout des provinces les plus défavorisées, c’est la ville de Yako au Passoré qui fut, non sans récriminations de ressortissants des autres provinces ( qui auraient sans doute souhaité la voir se tenir plutôt chez eux), retenue pour abriter l’évènement dans la région du Nord. C’était là un évènement politique à portée nationale car participant de la nécessité de doter les localités devant l’abriter d’infrastructures marchandes modernes. Le marché pour la réalisation de ces nouvelles infrastructures fut attribué à l’entreprise Oumarou Kanazoé. Cette annonce qui avait été saluée par tous les ressortissants de la province allait par la suite être une pomme de discorde entre les commerçants du marché de Yako d’abord et, plus tard, entre les fils du Passoré comme l’atteste l’article du 9 juin 2010.

Mais, il convient de préciser dans un rappel ou un récit historique, selon les goûts, qu’après la mise en place du comité provincial d’organisation de cette foire présidée par le premier responsable politique et administratif de la province à savoir le haut-commissaire, le premier problème que devait résoudre ledit comité au sein duquel étaient représentés les premiers bénéficiaires de ces futures nouvelles infrastructures à savoir les commerçants de Yako, était la désignation de l’aire de la foire. Cet exercice fut pénible et parfois même insoutenable. En effet, certains commerçants qui ne voulaient pas être déplacés après la foire proposèrent de retenir le site sur lequel ils exerçaient déjà leurs activités, c’est-à-dire le marché à l’époque de ces faits.

Cependant, ce site, pour un évènement d’une telle ampleur, s’avérait objectivement trop petit de l’avis de tous et pour régler cette question d’exiguïté, il s’en trouva quelques uns qui proposèrent son élargissement. Mais en dehors du côté Ouest qui donnait directement sur la route Ouagadougou - Ouahigouya, les côtés Nord, Est et Sud qui étaient séparés du marché par la voie publique étaient occupés par des boutiques, des restaurants et autres maisons d’habitation.

Il était donc impossible de réaliser cet agrandissement sans vider ces trois côtés de leurs occupants, commerçants comme simples habitants, propriétaires ou locataires. Les tenants de la solution unique d’agrandissement de ce site, proposèrent l’étirement de cette aire par son côté Est, tout en préservant les cotés Nord et Sud et c’est de là qu’éclata la pomme de discorde car pour d’autres et pour plus d’équité, il fallait l’agrandir dans tous les sens, Nord, Sud comme Est. Il fallait donc casser toutes ces maisons d’habitation et ces boutiques.

Quelles allaient être les conséquences sociales d’une telle opération même s’il fallait se contenter de ne casser que les bâtiments du coté Est tout en annexant la voie qui les sépare ? Les extrémistes en vinrent même à dire que si la solution de l’agrandissement par le côté Est ne pouvait être retenue, il fallait renoncer à la foire elle-même au profit d’une autre province. Chaque chapelle maintenant sa position, l’autorité politique de la province, face à cette radicalisation, prit ses responsabilités et choisit le site de l’aire de la foire sur lequel aménagera plus tard le marché de Yako à la fin de la foire, c’est-à-dire le site actuel.

La question de déplacement volontaire ou forcé des marchés a toujours provoqué des grincements de dents au sein surtout des acteurs qui y exercent leurs activités. La grogne des commerçants de Rood-Wooko (après son incendie qui a provoqué leur installation sur des sites provisoires en attendant sa reconstruction) nous le rappelle. Ces commerçants eux-mêmes étaient allés jusqu’à accuser l’édile de la ville de vouloir les déloger au profit d’opérateurs économiques plus huppés. Il semblerait que la ville, de Diébougou dans la Bougouriba a connu une situation quasi- similaire à celle de Yako mais s’est vite ressaisie. Il semblerait en effet que l’ancien marché de cette ville qui était en bordure de la route qui traverse la ville, avait été jugé dangereux pour ses usagers de même qu’il était devenu trop petit.

Il aurait été de ce fait dans les années 81-82 ou même plus tôt, courageusement déplacé par un fils de la région alors ministre de l’Intérieur ou personne très influente malgré les grincements de dents, les lamentations et autres coups de gueule qui ont accompagné sa décision. Il aurait été déplacé en son temps à près d’un kilomètre de son ancien site et presque en dehors de la ville. Ceux qui ne vivaient que des activités qu’ils y exerçaient et qui ne pouvaient s’en passer l’ont rejoint et l’ont fait revivre. Il semblerait qu’aujourd’hui il est florissant et se retrouve aujourd’hui en pleine ville peut-on dire, puisque entouré de bâtiments administratifs et privés. Je m’en suis moi-même rendu compte lorsque l’année dernière je m’y suis rendu avec d’autres personnes pour assister un ami à l’occasion de la cérémonie de doa de 7e jour d’un des siens. Après ladite cérémonie, mes compagnons de route et moi avions voulu faire faire des emplettes au marché et l’on nous y conduisit.

Il était très animé et c’est vrai que c’était un dimanche mais il paraît qu’il a été l’aire de la foire de Diébougou entre 1988 et 1995. Notre curiosité, ce jour, nous poussa, mes compagnons et moi, à aller visiter la résidence qu’Oumarou Kanazoé s’y est construite à l’occasion de la réalisation de la route Pa-Diébougou – Gaoua – Kampti - frontière de Côté d’Ivoire mais nous nous sommes contentés de l’admirer de loin. Le déplacement du marché de Diébougou a donc été salutaire pour le développement de cette ville, peut-être que Yako devrait s’en inspirer.

II - Du bâtiment inachevé appelé "Centre commercial Oumarou Kanazoe" de Yako situé sur le site de l’ancien marché de ladite ville.

L’ancienne autogare de Ouagadougou en zone commerciale est aussi un bâtiment en chantier de Oumarou Kanazoé. Il serait appelé Centre commercial Oumarou Kanazoé de Ouagadougou. Mais pourquoi ce chantier et celui de Yako paraissent-ils à l’état d’abandon ? Seul leur propriétaire peut en donner les raisons qui ne doivent pas être l’expression de sa volonté de tuer économiquement Yako et Ouagadougou. De toutes les façons, ces deux sites lui sont revenus après le paiement du prix qui lui a été demandé. L’homme, faut-il le rappeler, est au Passoré le constructeur du Lycée provincial de Yako, du barrage de Dourou et bien d’autres réalisations réligieuses ou sociales.

Il a réalisé et continue de réaliser à travers le Burkina Faso des infrastructures à caractère social, religieux ou économique. Il n’appartient donc plus au seul Passoré, c’est un nationaliste et, à ce titre, il va partout où on a vraiment besoin de lui pour faire le bonheur des uns et des autres comme s’il accomplissait une mission que lui impose ou inspire le Créateur. En fait, la finition de ce bâtiment est-elle une urgence ? Si oui, pour qui ? Il faut admettre que le fait qu’il ne soit pas inachevé devrait être une aubaine pour les riverains de la route Ouagadougou-Ouahigouya et des alentours de l’ancien marché pour construire des boutiques ou autres locaux à usage de bureaux à louer aux sociétés minières opérant dans le Passoré.

On peut épiloguer davantage sur ce point et par voie d’anecdotes, on pourrait rappeler cet évènement qui s’est produit en 1984 à Bobo Dioulasso. Thomas Sankara alors président du CNR y effectuait une visite avec J.J. Rawlings, le président ghanéen. Une marée humaine accueillit à l’aéroport les deux chefs d’Etat et scandait à tout va leur nom. J.J. Rawlings sembla surpris par la popularité de son hôte et lors du meeting improvisé qui fut le clou de cet évènement il lâcha : “When this man was arrested, where were you ?”. (Il faisait sans doute allusion à la vague d’arrestations du 17 mai 1983 des membres de l’aile gauchisante du CSP I dont le président du CNR ; évènements qui placèrent l’avenir de notre pays entre les mains du capitaine Blaise Compaoré, lequel y ayant miraculeusement échappé, prépara l’avènement du 4 août 1983 et du CNR à partir de sa retraite de Po).

Toujours est-il que la question du leader ghanéen martelée à plusieurs reprises ne rencontra qu’hilarité et sourd applaudissement du public qui, dans sa grande majorité, n’en pipa mot. Comparaison n’est pas raison mais de même, lorsqu’en 1999, les élèves du lycée provincial de Yako (construit par Oumarou Kanazoé) manifestaient violemment sur la voie publique dans le cadre des douloureux évènements de Sapouy et brûlaient cet immeuble, où étaient les gens du Passoré pour les convaincre ou les dissuader de saccager ce bâtiment ? "Le vieux" a dû tellement être meurtri non seulement par cette violente manifestation mais surtout par l’indifférence des gens du Passoré qu’il s’est “ exilé ” à Diébougou. Dans de telles circonstances et en se mettant chacun à sa place, qui peut honnêtement avoir le courage de terminer un si imposant projet si c’est pour le voir saccagé dès la première occasion par les enfants pour lesquels on a construit un temple du savoir, et ce, dans l’indifférence totale de leurs pères, mères, oncles, tantes, grands frères et autres qui entendent néanmoins exiger le bénéfice de ses retombées ?

Le Passoré a la mauvaise réputation d’être difficile dans tous les sens. Seuls le respect mutuel, la tolérance et l’esprit de solidarité entre ses fils peuvent lui garantir un avenir meilleur. Aujourd’hui, force est de reconnaître que Oumarou Kanazoé a tout gagné dans la vie : une vie de famille bien remplie, honneur et argent et, en plus, beaucoup d’humilité et d’humanisme. Ce n’est donc ni en l’affrontant (sans raison apparente), ni en le confrontant que l’on pourrait le convaincre d’avoir encore le courage de construire des barrages ou des infrastructures socio- éducatives ou économiques au bénéfice des gens du Passoré mais par un comportement qui s’approche du sien et qui s’établit sur la base des principes d’humilité et d’humanisme, de respect mutuel.

Alors, est-ce qu’il ne faut pas le laisser en paix maintenant et nous interroger nous-mêmes sur ce que nous avons pu apporter à notre province ? Ressortissants du Passoré, comme le dit ce chanteur dans l’hymne au pardon, "Taisons nos rancoeurs, unissons nos efforts … " !

Un ressortissant du Passoré

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 28 juin 2010 à 09:33, par Ed da passoré yé En réponse à : DEVELOPPEMENT DU PASSORE : "Ressortissants, taisons nos rancoeurs !"

    Bonjour, je m’attendais à voir un appel à l’union des fils de Yako, mais je constate que ce sont des récriminations contre ceux qui ont eu le courage de poser le débat sur le développement de Yako. Pourquoi Yako est toujours à la traine dans les développement ses potentialités tant au niveau de ses cadres que de ses opérateurs économiques ? Allez-y à Gourcy vous serez étonné de voir qu’il y a développement, tout simplement malgré les querelles de ses fils dans l’arène politique n’empêche pas leur union une fois il s’agit de leur province. Il en est de même pour Ouahigouya. Mais à Yako, les querelles politiques l’emportent sur l’union autour du développement de la province. C’est ça le problème du Passoré. Et puis si aujourd’hui Kanazoé est jugé comme responsable du sous-développement du Passoré, c’est que rien ne peut se faire sans son consentement. Vous qui en parlez vous le savez, ce n’est pas un secret. Si le vieux refuse, forcer c’est s’exposer à son courroux et vous savez où cela peut conduire le téméraire. Allez-y à Yako et faites un sondage.
    Il y a un véritable problème à Yako. J’ai été agréablement surpris que le président du carde de concertation du Passoré dise que l’heure n’est plus au discours mais à l’action. Je suis d’avis avec lui car les nous allons faire ça, ceci, cela est dépassé. Il faut l’action.

    Qui détient le pouvoir politique aujourd’hui à Yako ? Le CDP, mais que fait-il ? Je suis tenté de dire quasiment rien : ville sale,les sachets noirs partout hôpital en manque de réactifs et sale pour certains examens, caniveaux bouchés, des infrastructures en dessuetudes et j’en passe. C’est le bilan de ce parti dans la province qui est décevant. Et ce qui est pire c’est l’usurpation des réalisations de l’État par le parti : CEG de Song-Naaba,écoles PDDEB, forages, dont aux femmes rurale et j’en passe.
    Je crois qu’il faut aux fils du Passoré un forum où nous nous dirons toutes les vérités afin de jeter les bases de la cohésion.

    Le cas du marché, je me suis dit pourquoi cette précipitation du vieux à construire sur le lieux de l’ancien marché ? Pourquoi l’arrêt de la construction ? Es-ce comme le dit la rumeur à Yako, c’est pour empêcher le retour du marché à ce lieu ? Le lieu du marché n’avait-il pas de propriétaire ?

    Le barrage a été fait par le Vieux certes mais il semble qu’il a été remboursé par l’État. Si tel est le cas, le Passoré n’a pas une main mise là-dessus.Et parlons du barrage véritable source de fixation des jeunes dans le terroir. Quel est le projet digne de foi pour son exploitation ?

    Le départ du Vieux à Dédougou n’est pas dû à la réaction des élèves de Yako suite à la mort de Norbert Zongo mais ses démêlée avec la commission indépendantes d’enquête. Il a été entendu dans l’affaire Norbert Zongo. Tout le monde sais cela.

    pour moi il est temps de se battre pour que le Passoré avance et cela passe par la mise à l’écart de ceux qui constituent où peuvent un obstacle. Ceux qui ont le pouvoir politique et ne se contente que d’en jouir font du mal à la province, alors place à l’action.

  • Le 29 juin 2010 à 09:08, par Nobga En réponse à : DEVELOPPEMENT DU PASSORE : "Ressortissants, taisons nos rancoeurs !"

    Ed da passoré yé, très belle contribution de votre part. Et grandement merci pour cela. Quand au soit disant ressortissant de passoré il faudrait qu’il sache ceci :

    D’abord je dirai qu’il est un faux ressortissant du Passoré Ouèh ! Pourquoi garder l’anonymat ? Le problème de Yako n’est pas du tout politique. Le chantier de l’ancienne gare routière à Ouaga a-t-il été brûlé aussi par des ouagalais ? Pourquoi est-il bloqué ? Les yakolais se plaignent particulièrement de l’impossibilité pour aucun de ses fils d’y édifier un hôtel ou une auberge digne de ce nom. Oui ! c’est çà qui empêche Yako de se développer car aucun regroupement d’envergure nationale ne peut se tenir là-bas sur plus d’une journée puisqu’il est impossible d’héberger quelqu’un sauf rallier Gourcy et dans les pires des cas Ouahigouya. Pensez-vous que les fous qui sont pleins à Yako c’est parce qu’on les y conduit ? Non ! c’est ce qui bloque le développement de la ville. Toutes les filles et tous les fils de Yako qui ont tenté un quelconque investissement à Yako se sont retrouvés devant le mur. Yeux voient bouche parle pas ; C’est tout. Le déplacement du marché n’est vraiment pas le problème ; le non achèvement de l’immeuble de O.A. non plus. Les ivoiriens disent Yaako. Donc Yaako pour Yako car toute chose a une fin, et nous espérons que très prochainement Yako décollera inch Allah.

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