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Santé de la reproduction dans le Sahel : Une évolution positive malgré des pesanteurs

Publié le jeudi 24 juin 2010 à 02h26min

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La Direction de l’hygiène publique et de l’éducation pour la santé (DHPES), et la direction de la Santé de la Famille ont entrepris une série de campagnes sur la promotion de la santé de la reproduction et la planification familiale. A cet effet, une caravane de presse a sillonné la région du Sahel du 15 au 18 juin 2010.Malgré le récurrent poids des pesanteurs socio-culturelles, les indicateurs de la santé maternelle et infantile sont encourageants.

Dans la cadre de la mise en œuvre du projet « Communication en santé de la reproduction », la Direction de l’hygiène publique et de l’éducation pour la santé (DHPES), et la Direction de la Santé de la Famille (DSF) ont bénéficié d’un soutien du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) pour mener des actions de communication/plaidoyer.

A ce titre, une caravane de presse a été organisée du 15 au 18 juin 2010 dans la région du Sahel. Il s’est agi pour les responsables de ces deux structures de permettre aux hommes de médias de cerner la situation de la santé maternelle et infantile dans ladite région, de mesurer l’évolution des indicateurs des différents services proposés en la matière, et d’être par la suite des relais dans les actions de communication et de plaidoyer pour un changement de comportement.

Pour ce faire, les activités de la caravane se sont focalisées sur des entretiens avec les responsables de la santé dans la région (directeur régional et collaborateurs, les médecins-chefs des districts sanitaires de Dori et Sebba, les responsables de la santé de la reproduction, les sages-femmes et infirmiers, etc.), les autorités politiques ( le gouverneur) , les chefs coutumiers (le conseiller de l’Emir de Dori, le chef de Gangaol, le chef et maire de Sebba) et des échanges avec les populations cibles (les femmes et les hommes notamment).

Consultations prénatales : des avancées notoires

La santé de la reproduction présente trois piliers. Il s’agit de la prise en charge des soins obstétricaux, l’accouchement assisté et la planification familiale. Encore récemment, la moyenne nationale en termes d’indicateurs en planification familiale était de 28,2% au niveau national alors que la région du Sahel ne présentait qu’un taux de 20%. Les statistiques indiquent également 162 décès maternels pour la région du Sahel pour une moyenne nationale de 88 décès.

Mais le temps s’est écoulé, et grâce aux interventions de certains partenaires notamment le système des Nations unies et l’action des autorités sanitaires, le voyant rouge est devenu jaune verdâtre. Selon M. Marc Ganou, attaché de santé Sessio et responsable du bureau des groupes spécifiques à la Direction régionale de la santé du Sahel, le constat général est que les indicateurs ont beaucoup évolué.

En effet, entre 2000 et 2009, le taux d’utilisation des services de santé de la région est passé de 13,59% à 39,54%. En termes d’indicateurs de santé maternelle, la région du Sahel a presque doublé le taux de consultations prénatales (CPN2) passant de 44,10% en 2000 à 80,15% en 2009. Pour ce qui est des accouchements assistés, dans la même période, le taux est passé de 23, 52% à 47,06%. L’évolution du taux d’utilisation des services de planing familial indique aussi une avancée significative : 18,80% en 2009 contre 5,26% en 2000. Tous ces indicateurs ont notamment une incidence sur le ratio de mortalité maternelle intra-hospitalier ; lequel est évalué en 2009 à 2,22% contre 13,54% en 2000.

De l’avis des responsables sanitaires de la région, c’est tout une diversité d’approches, de programmes et de produits (certains nationaux et d’autres propres à la région) qui ont permis d’obtenir de tels résultats. Sont de ceux-là, le renforcement continu des compétences des agents de santé, l’approvisionnement et la dotation en consommables médicaux y compris les contraceptifs, la subvention nationale de la prise en charge des accouchements et des SONU ( Soins obstétricaux et néonataux d’urgence), l’intervention de l’ONG Help avec la prise en charge des frais de santé des femmes enceintes et allaitantes et des enfants de 0 à 5ans, ,enfin la mise en œuvre du Projet d’appui au programme national de lutte contre les fistules obstétricales pour l’amélioration de la sécurité humaine et du bien-être de la population dans la région du Sahel.

De façon spécifique, les actions menées dans la région sont liées à l’implication des leaders d’opinion (les chefs coutumiers et religieux) dans la sensibilisation, des associations (causeries-débats et projection de films), la réadaptation des horaires de consultations (une permanence la nuit) pour améliorer la fréquence et l’implication des accoucheuses villageoises. Le travail abattu par ces dernières dans les villages reculés des formations sanitaires a surtout été salué et reconnus par tous les agents de santé.

Il y a enfin la formation d’un pool de personnes ressources à l’intérieur des différentes communautés pour faciliter l’accès aux paquets de planning familial vu que nombre de femmes refusent de se présenter en plein jour ou sont contraintes de ne pas fréquenter les formations sanitaires par leur mari.

Dans la même dynamique, le gouverneur de la région, Eloi Bambara a relevé la mise en place du Conseil des leaders religieux, un organe susceptible d’avoir plus d’efficacité en termes de communication pour le changement de comportement aussi bien dans le secteur de l’éducation que de la santé. A Sebba par exemple dans le Yagha, il a été mis en place un Conseil du partage des coûts pour la prise en charge des césariennes ; lequel est présidé par l’Emir (en même temps maire de Sebba) . Grâce à cet organe, le coût de l’opération d’une césarienne est ramené de onze (11.000 F CFA) à 2000 F CFA.

Un fonds a été crée à cet effet par le COGES et la mairie avec l’appui de l’ONG Help. Dans la même ville de Sebba, existe un groupement de femmes (l’association Libouboum) dont les activités de sensibilisation ont aujourd’hui des effets plus que remarquables : « aujourd’hui à Sebba, beaucoup d’enfants naissent et grandissent en bonne santé et très peu de femmes souffrent. L’espacement des naissances est de plus en plus une réalité. Les femmes sont conscientes que la réalité d’hier n’est plus celle d’aujourd’hui. Toutes savent les avantages qu’il y a à scolariser son enfant et en avoir en nombre très limité », a témoigné une jeune enseignante.

Des pratiques ancestrales qui rendent la vie dure aux agents de santé Etre agent de santé dans la région du Sahel au regard de la nature de ses habitants, qui, à certains constats, semblent refuser le changement, n’est pas chose aisée. Quoiqu’en constante amélioration, les niveaux de performance en ce qui concerne l’utilisation des services de santé et les et les indicateurs de santé maternelle et infantile restent insuffisants. La faute d’abord à la persistance de pesanteurs socio-culturelles.

En effet, la décision pour une femme d’aller en consultation ou d’avoir un accouchement assisté relève toujours du mari ou de la belle-mère si bien que bon nombre de femmes peuvent suivre les consultations prénatales et finir par accoucher à la maison avec comme motif : « le mari en a décidé ainsi ».

D’autre part, une certaine culture de bravoure (une femme peulh ne doit jamais crier à l’accouchement), fait que les accouchements à domicile sont encore monnaie courante et la planification familiale réellement négligée. Nombre d’entre elles pensent comme les hommes que la progéniture est un don de Dieu : « c’est Dieu qui m’a donné ; il ne faut pas diminuer ce que Dieu a prévu pour moi. » entend-on assez souvent. Tant et si bien qu’à la question « combien d’enfants souhaiteriez-vous avoir ? », l’on ne tarde pas à vous dire, sept (07), huit (08) voire plus. Une autre cause de cet état des lieux dans Le Sahel tient au mariage précoce.

Beaucoup de jeunes filles sont mariées dès l’âge de six (06) ans parce que leur maman ou leur papa voudrait se voir rembourser au plus vite ses investissements sur sa fille compromettant du même coup sa scolarisation. Les échanges avec les associations de femmes et celles des hommes ont révélé l’inexistence de dialogue entre les parents et leurs enfants en ce qui concerne la santé de la reproduction. Toute chose qui n’est pas pour favoriser leur épanouissement et les préparer à affronter l’âge de l’adolescence puis l’âge adulte.

Enfin, la dernière cause de cet état des lieux dans le Sahel est à mettre à l’actif des autorités politiques. En effet, dans certains districts, la quasi-totalité des formations sanitaires sont déficitaires en ressources humaines. Ensuite, la couverture sanitaire de la région n’est pas encore une réalité en ce sens que les distances qui séparent les populations cibles des centres de santé sont assez significatives.

Dans le district sanitaire de Dori, il existe par exemple un seul CSPS (Centre de santé et de promotion sociale) urbain en plus du CHR. La localité la plus éloigné de ce CSPS urbain est à 35Km. Au CSPS de Gangaol, sur une population cible de 34858 habitants, plus de 22379 sont à une distance de plus de dix (10) km. Toute chose qui n’est pas pour favoriser un taux de croissance rapide et constante de l’utilisation des produits contraceptifs et une assiduité dans les consultations prénatales.

Ismaël Bicaba

Sidwaya

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