LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Tertius Zongo : Le difficile combat pour la bonne gouvernance (3/5)

Publié le mercredi 9 juin 2010 à 00h27min

PARTAGER :                          

Le programme de privatisation burkinabè a été lancé en 1991. J’ai pu, récemment, évoquer son processus. Celui-ci n’est pas totalement abouti encore : dans son discours sur la situation de la Nation, le Premier ministre, TertiusZongo, a précisé que ce programme allait être poursuivi, le gouvernement étant « conscient de la nécessité de réduire judicieusement la présence de l’Etat dans la sphère de production », le mot-clé étant « judicieusement ».

Cinq entreprises sont concernées : l’Office national des télécommunications (Onatel) « qui a parachevé son processus avec la cession de 20 % des actions par offre publique et la cession de 6 % du capital de la société aux salariés en étape ultime » (l’action Onatel a été introduite à la BRVM, la Bourse d’Abidjan, le 30 avril 2009 sans y briller) ; le Bureau des mines et de la géologie du Burkina (Bumigeb), société d’Etat créée en 1978 pour la recherche et l’exploitation minière dont seules les activités commerciales seront cédées au secteur privé ; le Centre de contrôle des véhicules automobiles (CCVA) qui verra 51 % de ses actions cédées à un « investisseur stratégique », 20 % par offre publique et 4 % aux salariés ; l’hôtel Silmandé (enseigne Mercure du groupe Accor) adjugé au propriétaire burkinabé du Splendid Hôtel ; la Société nationale burkinabè des hydrocarbures (Sonabhy) créée le 9 octobre 1985 sur la base des actifs de la Société d’entreposage de Bobo (SEB) et de la Société d’entreposage burkinabè d’hydrocarbures (SEBHY) à Ouagadougou - toutes deux indemnisées - pour importer, stocker, transporter, conditionner, vendre et distribuer (la distribution à la pompe est assurée par les compagnies pétrolières traditionnelles, filiales de multinationales) les hydrocarbures liquides et gazeux : sa privatisation « consistera en une ouverture [c’est moi qui souligne] du capital de la société au privé ».

Selon le conseil des ministres du mercredi 10 mars 2010, « la fin de l’exécution du programme de privatisation de ces entreprises est envisagée pour l’horizon 2011 ». Par contre, deux sociétés - et non des moindres - ont été retirées de la liste des privatisables. Il s’agit de l’Office national de l’eau et de l’assainissement (ONEA) et de la Société nationale d’électricité du Burkina (Sonabel) que « le conseil [des ministres] au vu des résultats […] a décidé d’assujettir à une gestion de type privé assortie d’un contrat de performance ».

Zongo, lors de son intervention, ne fera pas de commentaires sur cette décision mais le conseil des ministres de ce matin, mercredi 31 mars 2010, a précisé que cette décision résulte de « leur caractère vital et stratégique ainsi que de leurs performances par rapport à d’autres sociétés similaires du continent ». Le conseil des ministres ajoute que des « instructions » ont été données aux ministres « concernés » afin de « veiller au renforcement des capacités opérationnelles desdites sociétés pour une meilleure gestion technique, financière et commerciale ». Par ailleurs, Zongo a annoncé la « création du comité interministériel de sélection des candidats au poste de directeur général des établissements publics et des sociétés à participation majoritaire de l’Etat. Désormais, a-t-il souligné, la nomination à ces postes interviendra à l’issue d’une procédure de sélection assortie d’un contrat d’objectifs ».

Il faudra s’y faire. Avec Zongo c’est la micro-économie (les entreprises) avant la macro-économie (les grands équilibres), le privé avant le public. Mais il y vient quand même soulignant le « fort recul du niveau de croissance du secteur primaire de près de sept points de pourcentage en raison de la baisse des productions vivrières et de celle plus que raisonnable des productions de rente notamment du coton dont la production s’est située en recul de 25 % [ce qui n’est pas vraiment raisonnable] par rapport à l’objectif fixé » (le coton assure plus de 20 % de la valeur ajoutée globale et plus de 60 % des recettes d’exportation). Il ajoutera : « Cette contre performance n’a pu être compensée par le dynamisme du secteur secondaire impulsé par l’essor des sous-secteurs des bâtiments et travaux publics (BTP) et des mines d’or notamment, ni même par celui du secteur tertiaire marqué par l’expansion des activités de commerce et de transport ». Dans ce contexte de croissance « retenue », il convient de noter que l’inflation est passée de 10,7 % en 2008 à 3,4 % en 2009 (un peu au dessus du taux communautaire : 3 %).

Zongo va s’étendre sur l’évolution du secteur minier, l’activité minière et l’industrie extractive connaissant « un réel essor » : le nombre de titres et autorisations délivrées est passé de 537 en 2008 à 599en 2009 (+ 11,6 %) tandis que les activités de production des mines d’or de Taparko dans le Namentenga, de Youga dans le Boulgou, de Mana dans les Balé et au Mouhoun et de Kalsaka dans le Yatenga ont créé environ mille trois cent cinquante emplois permanents. La production industrielle d’or est passée d’environ 5.000 kg en 2008 à 11.642 kg en 2009. Le Premier ministre a souligné que « les travaux de construction des mines d’or d’Essakane dans l’Oudalan, d’Inata dans le Soum, de la mine de zinc de Perkoa dans le Sanguié et de la petite mine de manganèse de Kiéré dans le Tuy se sont poursuivis sans difficultés majeures. Leur exploitation portera le nombre des emplois créés par les mines industrielles à environ trois mille et le montant des investissements cumulés à 367 milliards de francs CFA ».

Zongo a affirmé « la volonté du gouvernement de faire du secteur minier un secteur porteur de développement au bénéfice de la nation toute entière », rappelant la tenue du 1er au 4 décembre 2009 des quatrièmes journées de promotion minière (Promin 2009 Burkina) auxquelles ont participé près de 800 personnes venues d’horizons géographiques divers pour discuter des stratégies à mettre en œuvre pour une exploitation minière dans une perspective de développement durable. Si 2010 doit voir l’entrée en production des mines d’or d’Essakane et Inata et de la mine de manganèse de Kiere, Zongo a surtout annoncé que le gouvernement entreprenait « l’identification d’un partenaire fiable » pour l’exploitation du gisement de manganèse de Tambao.

Le projet d’exploitation du gisement de minerai de manganèse de Tambao, qui se trouve dans l’extrême Nord-Est du Burkina Faso, dans la zone sahélienne, non loin de la frontière avec le Niger et le Mali, est une vieille affaire. Dès 1975 avait été créée la Société minière de Tambao (Somitam) entre l’Etat alors voltaïque (51 %) et des intérêts étrangers : japonais (Tambao Manganese Mine Development), allemand (Exploration und Berghan GmbH), américain (Union Carbide) et français (Tambao manganèse).

Une étude d’évaluation avait été effectuée par la Banque africaine de développement (BAD) et la mise en chantier de la mine devait démarrer dans le dernier semestre de l’année 1977. Restait à régler la question des infrastructures ferroviaires afin de permettre l’évacuation du minerai. Il fallait prolonger la voie ferrée de la Régie Abidjan-Niger (RAN) de Ouagadougou à Tambao, via Kaya et Dori. Le rail est arrivé à Kaya le 17 octobre 1988. A l’issue de la première « bataille du rail » (qui a, désormais, sa place et son monument à Ouagadougou) : lancée dans la ferveur révolutionnaire en février 1985, elle cessera d’être un mot d’ordre pour devenir une réalité après les quarante-deux mois nécessaires pour amener, rail après rail, traverse après traverse, le chemin de fer de Ouaga à Kaya, soit 105 km. Le « chemin de fer du Sahel » avait été déclaré « premier chantier national du Burkina Faso » et avait mobilisé les cadres et les militants de l’Union nationale de la jeunesse du Burkina (UNJB) mais pas les bailleurs de fonds qui, dans un premier temps, se montreront réticents à s’engager dans ce projet.

A suivre

Jean-Pierre BEJOT
LA Dépêche Diplomatique

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 9 juin 2010 à 08:48, par oumsa En réponse à : Tertius Zongo : Le difficile combat pour la bonne gouvernance (3/5)

    La privatisation c’est bien, mais le suivi au Burkina pose un problème. Il va falloir que le gouvernement soit plus regardant.
    L’état devrait également imposé aux miniers de développer les zones où les mines d’or sont installées : bitumage de voie, école, dispensaire... Sinon la plupart de ces zones sont difficilement accessible et la population dans la souffrance. Proposition d’imposition de bitumage de voie pour notre développement :
    De Mana à Boromo, de Essakane à Dori, de Youga à Manga, de Perkoa à Koudougou, de Inata à Ouahigouya, de Dori à Djibo...

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Un Communicateur chevronné au chevet du Burkina Faso…
Nouveau gouvernement : Tertius Zongo explique