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Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

Publié le lundi 7 juin 2010 à 01h01min

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Le village de Léfourba, dans la commune rurale de Sabcé, situé à une trentaine de kilomètres à l’est de Kongoussi, chef-lieu de la province du Bam, a vécu des heures chaudes dans la nuit du 03 au 04 juin 2010. A l’origine, un différend foncier qui oppose les habitants de Léfourba Mossé à ceux de Léfourba Foulbé. C’est en voulant cultiver sur le terrain litigeux que cinq agriculteurs ont été interpellés. En represailles, les agriculteurs ont chassé les éleveurs peulhs et incendié leurs habitations. On déplore d’importants dégâts matériels.

Des sources concordantes, l’origine du différend qui oppose les agriculteurs du village de Léfourba Mossé aux éleveurs peulhs de Léfourba Foulbé date de depuis 2004. Selon une source proche du Tribunal de grande instance (TGI) de Kongoussi, le terrain, cause des affrontements est une piste à bétail dont les agriculteurs réclament la propriété.

C’est à partir de ce moment que commence une série de négociations-conciliations entre les agriculteurs et éleveurs, chacun se disant être propriétaire du terrain. Mais à chaque fois, selon le représentant des agriculteurs, le conseiller municipal Saïdou Ouédraogo, les éleveurs ont été déboutés de leur réclamation.

C’est ainsi que ces derniers vont alors s’attacher les services d’un avocat. Car selon le représentant des éleveurs, le conseiller municipal de Léfourba Foulbé, Aliou Diallo, les terres appartenaient à leurs parents depuis plus de 113 ans. Les agriculteurs de Léfourba Mossé vont également faire autant. Une bataille judiciaire va alors s’engager entre les deux parties.

Les éleveurs vont faire appel de chaque jugement, et aujourd’hui, selon le haut-commissaire de la province du Bam, Lamoussa Constant Ouédraogo, le dossier est à la Cour de cassation et le terrain litigieux a été mis sous séquestre. Un dossier pendant donc qui a conduit au drame du 3 au 4 juin 2010, a souligné le préfet du département de Sabcé, Mme Aminata Hien Boro.

Avec l’hivernage, le chef de terre de Léfourba Mossé a ordonné à ses enfants revenus de la Côte d’Ivoire de défricher le terrain mis sous séquestre par la justice, a expliqué le haut-commissaire.

« Dès que j’ai aperçu les agriculteurs sur le terrain, je suis allé voir la police pour leur faire part », a indiqué le conseiller municipal, Aliou Diallo. Pourtant, les agriculteurs affirment avoir un papier de leur avocat les autorisant à exploiter le terrain alors que la Cour de cassation n’a pas encore rendu son verdict. « Nous avons suivi les conseils de notre avocat », a soutenu le conseiller municipal de Léfourba Mossé, Saïdou Ouédraogo.

Un conflit qui couvait

Une source proche du dossier au TGI de Kongoussi indique qu’il y a eu déjà des risques d’affrontement en 2008 et 2009. Mais à chaque fois, les forces de sécurité intervenaient pour rétablir l’ordre et éviter le drame. Cette année, les choses n’ont pas été ainsi.

Après l’alerte faite par des éleveurs, les forces de l’ordre ont, selon M. Saïdou Ouédraogo, interpellé cinq agriculteurs, Noufou Ouédraogo, Jean Ouédraogo, Tibila Madi Ouédraogo, Wend Pouiré Ouédraogo et Napouglba Ouédraogo pour les interroger. « Et à l’absence de leur avocat, il ont été gardés par les forces de l’ordre », a indiqué le haut-commissaire Constant Lamoussa Ouédraogo. « Quelqu’un est venu m’informer qu’ils ont envoyé deux des cinq à la maison d’arrêt », a soutenu M. Saïdou Ouédraogo.

C’est cette « mauvaise information » qui a déclenché la colère des agriculteurs. « le village peulh a été brûlé en représailles à l’arrestation des cinq agriculteurs », a indiqué le conseiller municipal de Léfourba Mossé, Saïdou Ouédraogo.

Ainsi, dans la nuit du 03 au 04 juin 2010, les agriculteurs ont brûlé 13 cases, des huttes, des greniers, blessé deux personnes et causé 74 sinistres.

Pour le haut-commissaire, la valeur pécuniaire des dégâts s’élève à plus de 1,5 million de F CFA. Quelques heures après les affrontements, « la tension était toujours vive », a reconnu le maire de la commune rurale de Sabcé, Mahamoudou Pierre Zoungrana qui a par ailleurs demandé de trouver « une solution rapide pour calmer la population ». Du côté des agriculteurs, la mobilisation était toujours forte à notre arrivée sur les lieux aux environs de 18 heures.

Dans la matinée, « toute la population était mobilisée », a déclaré le haut-commissaire. Les agriculteurs réclament la libération pure et simple de ceux qui ont été interpellés. « Tant qu’on ne libère pas nos compatriotes, nous n’allons pas renoncer », a soutenu Saïdou Ouédraogo.

Les éleveurs disent ne pas comprendre la réaction des agriculteurs qui n’ont pas respecté comme eux la mise sous séquestre du terrain. « Je n’ai fait que mon rôle de conseiller municipal et de responsable du village en allant voir la police », a souligné Aliou Diallo montrant ses blessures, victime de la furie des agriculteurs.

Des mesures pour parer au plus pressé

Devant la détermination des agriculteurs, les autorités provinciales ont mis en place un dispositif sécuritaire pour protéger les habitants de Léfourba Foulbé. Dès les premiers instants des affrontements, les autorités se sont déplacées, a indiqué le préfet du département de Sabcé, Mme Aminata Hien Boro. « Nous avons discuté avec les représentants des deux parties et nous pensons avoir été compris par la population », a estimé le maire de Sabcé.

Une partie des habitants de Léfourba Foulbé a été logée dans une école dans le village de Mafoulou. Là également, un dispositif sécuritaire a été mis en place. « Les populations se sont mobilisées pour leur venir en aide, » a souligné le haut-commissaire de la province. « Nous sommes des voisins et nous leur venons en aide avec de la nourriture », a soutenu Sambo Ouédraogo, habitant de Mafoulou.

Au niveau régional, l’action sociale est en train de voir dans quelle mesure elle pourra installer des tentes pour soulager ceux qui ont perdu leur maison. Il faut également de la nourriture puisque les greniers sont partis en fumée.

Moumini YAMEOGO (yambaz@yahoo.fr)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 7 juin 2010 à 10:42, par Tapsoba En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    Nous avons suivi les conseils de notre avocat”.Que disent les autorités à propos de cet avocat qui,si les affirmations des agriculteurs se vérifiaient,en est, en principe, le complice ? D où a-t-il recu cette instruction d ordonner les agriculteurs à prendre possession de la zone scéllée ? Vous auriez pu chercher à le savoir pour rendre votre enquête complète.

  • Le 7 juin 2010 à 10:47, par Kôrô Yamyélé En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    « le village peulh a été brûlé en représailles à l’arrestation des cinq agriculteurs ».

    - Il est temps que l’Etat montre réellement ses griffes. Pourquoi chaque fois, ce sont les campements des peuls qui sont brûlés en représaille par des mossis ?

    Et pourtant, pour un simple vol de chèvre ou de portable, des gens éccopent de 3 mois. Et pourquoi ces incendiaires ne sont pas souvent inquiétés ? Même s’ils le sont, on ne sait pas de combien car ce n’est pas la 1ère fois. Et à chaque fois, on organise une mission de bon office, de médiation farfelue et hyppocrite auprès des peuls. Ce qui n’empêchera pas les criminels de recommencer encore ailleurs l’année prochaine.

    Le problème commence à prendre des dimensions non maîtrisable (Léraba, Poni, Est, etc....etc...). Chacun se lève et se farcit des peuls sans s’inquiéter ! Qu’ont-ils fait de mal pour mériter une telle négligence ???

    Il est temps que l’Etat tape du poing sur la table. Si les peuls ne font pas partie de cette population, que celà soit aussi dit clairement afin qu’ils trouvent un pays serein d’accueil.

    Par Kôrô Yamyélé

  • Le 7 juin 2010 à 11:49, par janka En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    Il y a quand même un problème. L’autorité ne parle ni de porsduite

  • Le 7 juin 2010 à 12:56, par AFE En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    C’est dommage que ces conflits fonciers persistent toujours à l’approche de la saison hivernale. On espérait qu’avec l’adoption de la loi 034 portant régime foncier rural, ces problèmes allaient s’estomper. De plus, la loi portant RAF (en relecture) à son article 34, classe les pistes à bétail comme faisant partie du domaine public de l’Etat et de ce fait ne peuvent être revendiquées par qui que se soit en dehors de l’Etat lui même. Ce sont des biens inaliénables, imprescriptibles et insaisissables. Comment la question a t elle été traitée par la justice ? La piste avait elle été reconnue légalement ? si oui, pourquoi cette remise en cause ? Autant de questions qui interpellent tous les acteurs du foncier au respect des textes législatifs et règlementaires pour éviter ces situations de plus en plus récurrentes.

  • Le 7 juin 2010 à 13:34, par Ky Pierre En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    Et personne n’est arreté ? et ça se passe toujours ainsi ? alors que si c’étaient des ivoiriens qui brulaient des cases de burkinabé, cela allait etre un tollé général. Je pense que nous devaon arreter ces manieres d’agir parce que ce pays nous appartient tous et nul n’est au dessus de la Loi. Hier encore c’etait des bissa qu’on massacrait à ouahigouya. Demain ??????

  • Le 7 juin 2010 à 16:39, par Thmas En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    Bonjour moi je panse que le peuple burkinabe est ignorants. Donc il faudrasi que les autorites tourve des solutions a edique notre peuple les valeur civic. Parceque il y certins persones qui panse que on est toujour au moment de avent colonisation ou aperes colinisations des anees. il faudrasi aprendre les burkine a connaitre que le Burkina Faso a partien a tout les burkinabe. Et a meme tepms que chacun respect la jsutice. moi je panse chque foi les peulhs sont les victimes de cette stuiation on se rapel l’anne passe ce quei c p[asse a laye ou le mair meme soutene les mossi pour alle masacre les peulhs et heureusemnt que c n pa pu avoir lie.

  • Le 7 juin 2010 à 20:33 En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    Sur un terrain aussi dangereux (ou litigieux), on n’appelle pas la police tout de suite. Et le cas échéant, la police ne garde pas tout de suite cinq (5) personnes à vue.

    Pour les grands connaisseurs des conflits agriculteurs/éleveurs, est-ce qu’en arrêtant (même en garde à vue) 5 agriculteurs qu’on emprisonne ensuite, est-ce qu’on pouvait s’attendre à autre chose que ce qui s’est passé ? Les situations passées devraient pourtant nous enseigner que les tribunaux modernes (la Justice moderne) ne suffit pas pour régler ces types de conflits

  • Le 7 juin 2010 à 21:35, par Ollo En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    Bonjour à tous
    Encore une fois, les mêmes qui sont pris à partie ; encore une fois les mêmes mesurettes qui, en définitive, confortent les uns dans le sentiment d’impunité et relèguent les autres dans le sentiment d’être, dans ce pays, des sous-citoyens. Prenons garde à la gestion de ces situations car aucune communauté ne peut indéfiniment subir de tels traitements sans réagir collectivement.
    Juste qques questions :
    - les peuls du burkina sont-ils des êtres humains, sujets de droit ?
    - Quelle serait la réaction des autorités ou des autres communautés si, quelque part, les peuls se livraient à de tels actes.
    Hier Kankounadéni, Baléré, Manga, Loropéni... Aujourdhui Léfourba. Hommes et femmes du Burkina, soyons vigilants et ...intègres dans la condamnation de l’inacceptable.

  • Le 8 juin 2010 à 13:16, par AFE En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    C’est dommage que ces conflits fonciers persistent toujours à l’approche de la saison hivernale. On espérait qu’avec l’adoption de la loi 034 portant régime foncier rural, ces problèmes allaient s’estomper. De plus, la loi portant RAF (en relecture) à son article 34, classe les pistes à bétail comme faisant partie du domaine public de l’Etat et de ce fait ne peuvent être revendiquées par qui que se soit en dehors de l’Etat lui même. Ce sont des biens inaliénables, imprescriptibles et insaisissables. Comment la question a t elle été traitée par la justice ? La piste avait elle été reconnue légalement ? si oui, pourquoi cette remise en cause ? Autant de question qui interpelle tous les acteurs du foncier au respect des textes législatifs et règlementaires pour éviter ces situations de plus en plus récurrentes.

  • Le 9 juin 2010 à 11:49, par "Nous-aime" En réponse à : Différend foncier entre agriculteurs et éleveurs à Léfourba : L’interpellation qui a mis le feu aux poudres

    La loi est responsable de se qui s’est passé à Léfourba. Parce que n’eut été l’arrestation des cinq agriculteurs, il n’y aurait pas de représailles. Dans une telle situation, la logique voudrait que les deux parties soient convoquées pour être écoutées avant de prendre quelque mesure que se soit. Mais, se montrer déjà partial dès les premiers moments de l’affaire ne pouvait qu’échauffer les coeurs des opprimés. La justice devait-elle prendre partie aussi tôt ? Pourquoi l’a-t-elle fait ? Serait-elle corrompue à tel point ? C’est dommage que certains croient que l’affaire est purement et simplement ethnique !!! Même s’ils étaient tous de la même ethnie, qui aurait accepté une telle injustice de la part de la justice ? Plaidons nous pour la justice ou pour l’argent ? La première qualité de l’arbitre, c’est l’impartialité.

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