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ROLAND LUMUMBA, fils de Patrice Lumumba : "Ouaga, c’est notre Cannes à nous"

Publié le vendredi 4 juin 2010 à 04h41min

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Roland Lumuba, fils de Patrice Lumumba, ex-Premier ministre congolais, est architecte de formation, mais affirme s’intéresser à la chose politique. Il est actuellement à Ouagadougou comme invité du festival Ciné droit libre. Le fils du père de l’indépendance de la Répubublique démocratique du Congo est également le président de la Fondation Patrice Emery Lumumba. Il s’exprime dans l’entretien ci-dessous sur l’état de la liberté d’expression en Afrique, l’indépendance des pays africains et l’oeuvre de son père.

"Le Pays" : Qu’est-ce qui a motivé votre participation à la 6e édition de Ciné droit libre ?

Roland Lumumba : "Je participe à ce festival en tant qu’invité, je suis architecte donc très loin du cinéma que j’aime bien pourtant. Je suis là également pour représenter la fondation Patrice Emery Lumumba et j’en suis très fier. Avec la renommée qu’a eu le Burkina Faso, Ouaga c’est notre Cannes à nous Africains. Ce festival, je le trouve positif dans le sens du combat de Patrice Lumumba, qui s’est toujours battu pour la liberté d’expression et la bonne gouvernance".

Cet événement coïncide cette année avec le cinquantenaire des indépendances des pays africains. Que pensez-vous de la souveraineté de ces pays ?

Comme je l’ai souvent dit, 50 ans c’est beaucoup dans la vie d’un homme, mais c’est peu dans celle d’un peuple ou d’une nation. La difficulté qu’on a avec l’ère des innovations comme Internet, c’est qu’on a tendance à vouloir aller aussi vite que les autres, mais par rapport à ce qui se passait il y a cinquante ans, il y a eu de l’évolution. Petit à petit, avec le peu d’ enseignement que nous avons, les populations se réveillent et essaient de trouver leurs propres modèles en dehors de ce qu’on nous a toujours imposé. Il y a des fêtes par-ci par-là, peut-être fêtons-nous en tant que Bantous chez qui tout se termine par la fête : naissance, mariage, deuil, etc. C’est dans ce sens là que je peux participer à ces fêtes, parce que ce que nous avons comme résultats au niveau de l’éducation, la santé et autres ne nous pousse pas à faire la fête. On doit plutôt se préoccuper de chercher à corriger nos erreurs, car la situation n’est pas pire et peut encore être redressée ; les Européens aussi ont mis du temps pour atteindre le niveau où ils sont actuellement. Nous devons aller à notre rythme.

Et le cas particulier de votre pays, la République démocratique du Congo (RDC) ?

La RDC devait atteindre un niveau de développement meilleur à ce qu’elle a réalisé jusque-là. Certes, il y a eu quelques progrès dans les infrastructures, mais beaucoup reste à faire.

En tant qu’architecte, vous sentez-vous loin de la chose politique ?

Je ne suis pas loin de la chose politique. Pour faire la politique on n’a pas besoin d’être président, ministre ou autres. Toi qui tiens ton micro, tu fais de la politique. Il y a des questions que tu poses et il y en a d’autres que tu essaies d’éluder. C’est ta façon de ruser. J’applique ce que Lumumba a écrit dans sa dernière lettre : « A mes enfants que je laisse et que peut-être je ne reverrai plus, dites-leur que le Congo est beau et que j’attends d’eux comme de chaque Congolais qu’ils remplissent leur devoir sacré. »

L’on constate que parlant de Patrice Lumumba, vous ne l’appelez pas "papa" mais par son nom. Pourquoi cette préférence ?

Il est plus grand que mon père. Si je l’appelle "papa", je le ramènerais à une petite dimension. Or il est plus grand que cela. Quand je sais que je suis le fils d’une légende, je dois éviter de voir en lui le petit père de famille, et lui permettre de garder cette grandeur qui le hisse au-delà de l’échelle d’une famille. Il est père de l’indépendance, père fondateur de l’Union ou l’unité africaine, et nous a fait rêver du Nord au Sud du continent et même au-delà. Au lieu de dire, c’est le papa de Roland, je préfère que l’on dise que c’est Lumumba.

Pensez-vous que 50 ans après votre père n’est pas mort pour rien ?

Bien sûr qu’il n’est pas mort pour rien. Il y a cinquante ans qu’il est mort, vous vous (Ndlr le journaliste qui a fait l’interview) n’étiez pas là, mais vous parlez de lui. De plus, le festival Ciné droit libre lui accorde une grande importance. C’est parce que c’est un exemple à suivre, un exemple de fierté, de dignité, de l’Afrique debout. Car on a toujours essayé de nous convaincre que l’Afrique, c’est la misère, ce sont les grands malheurs. Heureusement qu’il y a eu des gens comme Cheikh Anta Diop pour présenter les moments de gloire du continent. Même de grandes civilisations comme la Grèce, la Rome, après leur apogée, ont connu un déclin.

Quelle appréciation faites-vous de la liberté d’expression en Afrique ?

La liberté de presse, cela dépend des pays, mais grosso modo, ce n’est pas satisfaisant. Cela fait une dizaine d’années que ça commence à se corriger, mais c’est à l’image de la démocratie parce qu’on arrondit tout politique. Il faut que chacun se batte beaucoup plus pour sa liberté, car ce n’est pas celle de son voisin, c’est la sienne.

Propos recueillis par HO

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 4 juin 2010 à 13:48, par ma biche En réponse à : ROLAND LUMUMBA, fils de Patrice Lumumba : "Ouaga, c’est notre Cannes à nous"

    La dernière phrase est pleine de sens, la liberté d’expression est l’affaire de tous, il ne faut pas que les gens se morfondent chez eux à la maison croyant que ce sont les journalistes seul qui doivent l’aquérir. Comme il a dit il faut que chacun se batte pour sa propre liberté d’expression. Patrice LUMUMBA n’est vraiment pas mort pour rien et il a tout le mérite d’être honoré par tout le continent.

  • Le 9 octobre 2014 à 16:13, par Gode Mboma En réponse à : ROLAND LUMUMBA, fils de Patrice Lumumba : "Ouaga, c’est notre Cannes à nous"

    Je suis fier de mon compatriote et grand-frere Roland Lumumba d’avoir rappelle un vibrant hommage de notre pere de l’independance congolaise au festival "Ciné droit libre" de Burkina a Ouaga malgre que je ne sois pas encore ne a cette epoque.

  • Le 6 mars 2015 à 21:37, par jean Marie. Rwanteli En réponse à : ROLAND LUMUMBA, fils de Patrice Lumumba : "Ouaga, c’est notre Cannes à nous"

    Bonjour Roland
    C est ton frere jumeau de Bujumbura (Burundi) a ton passage a Bujumbura en 1987.
    avec notre ami Antoine journaliste. Je voudrais avoir de tes nouvelles et tes coordonnées.
    Merci.

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