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CONTESTATIONS POST-ELETORALES : Une malédiction africaine

Publié le vendredi 28 mai 2010 à 03h20min

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Les élections sont redoutées en Afrique. Chaque fois qu’elles ont lieu, les populations retiennent leur souffle. Les scrutins donnent lieu la plupart du temps à des lendemains gros de dangers pour la paix sociale et la stabilité des pays. Et ce, depuis les années 1990, avec l’avènement de la démocratie sur le continent.

Depuis lors, la vie de beaucoup de pays est rythmée par des violences post-électorales qui ont pris en otage leur développement. A titre d’exemple, le Togo ne s’est pas entièrement remis des violences, des massacres, des tueries, des destructions de biens qui accompagnent tout le temps les élections présidentielles organisées dans ce pays et toujours remportées par Eyadéma père. La "rupture" avec le passé violent n’a eu lieu que cette année avec la réélection du fils Faure Gnassingbé.

Depuis 20 ans que des élections sont organisées sur le continent, le sans-faute semble être une ligne d’horizon dans ce domaine. Si fait que les pouvoirs africains sont perçus comme étant incapables d’organiser des élections propres. Il faut nécessairement qu’ils trichent pour les gagner. Et dans ce "jeu", les partis au pouvoir sont accusés à tort ou à raison comme ceux qui s’y adonnent le plus. Ils ont beau clamer leur innocence et leur probité, ils ont du mal à convaincre grand monde.

Ils sont desservis par une phrase devenue célèbre attribuée à feu Omar Bongo : "En Afrique, on n’organise pas des élections pour les perdre". Au nom de cette logique, beaucoup de régimes font tout pour ne pas perdre les élections. Autrement, c’est la fin et la perte des énormes privilèges liés à l’exercice du pourvoir. Leurs partisans sont donc prêts à frauder, à tricher. Pour se faire entendre des pouvoirs fraudeurs et de l’extérieur qui finance et observe la plupart du temps les élections sur le continent, les partis d’opposition n’hésitent pas à faire descendre leurs militants dans la rue. Pourtant, la contestation des résultats d’une élection se fait par des voies légales bien définies à travers les codes électoraux dont les pays se sont dotés.

Malheureusement, le manque de confiance aux institutions en général et aux institutions judiciaires en particulier amène les contestataires à ne pas privilégier la voie légale du contentieux électoral. Pour eux, la meilleure façon de se faire entendre est la rue dans laquelle ils risquent de se retrouver face aux forces de l’ordre ou aux partisans de ceux dont la victoire est contestée. L’affrontement est inévitable et c’est la paix sociale et la stabilité des pays qui prennent de sérieux coups. Ici, on a encore frais dans les mémoires les horreurs des violences qui ont suivi l’élection présidentielle de fin 2007 au Kenya.

Ces temps-ci, l’on retient son souffle en Ethiopie et au Burundi, deux pays dans lesquels il y a eu récemment des élections. Comme il fallait s’y attendre, la victoire des partis au pouvoir dans ces pays est remise en cause par les opposants. La crainte de lendemains troubles est grande si l’on sait que les mêmes élections ont donné lieu en 2005 à une répression féroce d’opposants, de défenseurs de droits humains, et de journalistes dans un pays comme l’Ethiopie.

Le Burundi se remet à peine d’une guerre civile provoquée par des mésententes politiques et la remise en cause des résultats des élections peut bien réveiller les démons assoupis de la division et de l’ethnicisme. Les contestations post-electorales sont typiquement africaines et elles sont systématiques. C’est par exemple le cas au Burundi où une organisation indépendante réputée proche de l’opposition et qui a observé les dernières élections locales, a estimé qu’elles se sont relativement bien déroulées, ce qui n’a pas été du goût de l’opposition burundaise. Visiblement, l’opposition joue ici les mauvaises perdantes et doit peut-être s’en prendre à elle-même pour ne s’être pas bien préparée.

Contestations systématiques et violences post-électorales, donnent une mauvaise image des Africains. Elles les infantilisent. Heureusement que le tableau n’est pas partout sombre. En effet, des pays se sont illustrés par des scrutins propres avec des vainqueurs qui ont rapidement reconnu leur défaite et félicité ceux qui ont été élus. C’est le cas du Ghana avec l’élection en fin 2008 de l’opposant Atta Mills. Avant, il y a eu l’alternance en 2000 au Sénégal avec Abdoulaye Wade. D’autres pays comme le Mali, le Bénin forcent aussi l’admiration avec l’organisation de scrutins sans remous. Ce sont des exemples à suivre par les autres, malheureusement encore trop nombreux.

Séni DABO

Le Pays

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