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Et revoilà la guerre des tracts !

Publié le lundi 17 mai 2010 à 00h28min

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Depuis que Le Reporter et d’autres confrères (Bendré et JJ notamment)
ont fait écho des affaires de mœurs qui ont éclaboussé certains membres
du gouvernement, les dénonciations se sont multipliées. Combien de fois
avons-nous été saisis des pratiques peu honorables dans telle ou telle
administration, sur telle ou telle personnalité ? Certains semblent
avoir opté de créer leur propre tribune clandestine de dénonciation.
Ainsi, la presse souterraine a pris le relais.

En effet,
des tracts inondent régulièrement la capitale burkinabè et les adresses
électroniques pour dénoncer des comportements peu orthodoxes de certains
Burkinabè d’en haut. Sujet sensible, s’il en est, les affaires de fesses
déchaînent des passions au pays des Hommes intègres. L’une de ces
affaires fait même l’objet d’enquête à la gendarmerie, et des agents
d’un ministère vivent aujourd’hui dans la crainte d’être embastillés du
jour au lendemain. L’un d’entre eux aurait déjà séjourné dans les geôles
de la gendarmerie. « Ouagadougou la rumeur » bruit dans tous les sens.

Cette presse souterraine alimentée par on ne sait quel quidam cagoulé ni
quelle intention multiplie les révélations ou plus exactement les
dénonciations. Une situation sans doute très gênante pour les
personnalités incriminées mais qui invite quand même à la réflexion.
Dans l’histoire de ce pays, les printemps des tracts sont toujours
annonciateurs de mauvaises nouvelles pour la stabilité politique et
institutionnelle. C’est en cela qu’il faut y accorder un minimum
d’attention, surtout quand ces nouvelles commencent à susciter une
attraction populaire.

Doit-on se contenter de croire que ce sont des inventions de petits
jaloux, qui en veulent à des personnalités de la République, qui
s’adonnent à ce jeu dangereux ? Ou bien s’agit-il de simples petites
gens déçues ou même frustrées par les comportements d’hommes et de
femmes qui devraient, à leurs yeux, incarner des valeurs morales et
éthiques qui se révèlent être le contraire de ce qu’ils croyaient ?
Est-ce de simples expressions des fameux trois « M » (méchanceté,
médiocrité et médisance) de l’ex-ministre des Affaires étrangères
Ablassé Ouédraogo, qui sont censés caractériser le Burkinabè d’aujourd’hui ?

Quelle que soit la réponse, cette situation traduit au moins un malaise
certain qui mérite qu’on y réfléchisse froidement. Elle interpelle en ce
qu’elle concerne les mœurs dans notre société et qu’elle utilise des
canaux prohibés. Elle interpelle aussi parce que s’il s’agit de simples
méchancetés et médisances, personne ne devrait se sentir à l’abri. Elle
interpelle surtout parce que, s’il s’agit de dénonciation de pratiques
réelles, il est impérieux que les structures et institutions chargées de
la moralisation de la vie publique s’y intéressent pour lever le doute
sans cesse grandissant dans l’opinion publique.

Des canaux autorisés existent pour dénoncer les pratiques qui font
l’objet de ces tracts. Soit les auteurs de ces messages électroniques
ont perdu toute confiance en la capacité des institutions à assurer leur
protection s’ils s’exprimaient à visage découvert, soit c’est la volonté
politique de moraliser la vie publique qui est remise en cause par ces
« justiciers » qui ont décidé d’utiliser les voies qu’ils croient les plus
sûres pour garder l’anonymat.

Le drame dans ce genre de situation, c’est que certains mauvais esprits
peuvent en profiter pour verser dans l’intoxication de l’opinion. La
guerre des tracts ne peut donc, en aucun cas, être un signe de
lendemains paisibles, même si, pour l’instant, on ne sent pas une lutte
sans merci entre des clans rivaux qui pourrait justifier une telle
situation. Surtout dans un contexte où la crise de confiance entre les
institutions et la société atteint progressivement des seuils chaque
jour plus inquiétants. Et l’on comprend que bien des citoyens s’en
délectent et se fassent le plaisir de les diffuser allègrement sans
savoir qu’ils tombent sous le coup de la loi. Et le silence étouffant du
gouvernement sur certains scandales en son sein n’est pas pour aider
l’opinion à faire la part entre les informations vérifiées et
vérifiables et les accusations gratuites et méchantes.

En tout état de cause, cette résurgence de la presse souterraine qui
rappelle certaines époques de la vie nationale ne devrait pas être
négligée. Elle peut avoir des conséquences sociopolitiques plus
fâcheuses qu’on ne le pense. Il faut circonscrire donc le problème avant
qu’elle ne chauffe l’opinion à blanc et provoque des réactions
inattendues. Car, une chose est sûre, il y a un ressort qui semble cassé
quelque part dans la société et il faut le raccommoder ou le remplacer
avant qu’il ne cède définitivement, au moins là où l’on s’attend le
moins. Il ne reste plus à espérer que les enquêtes en cours aboutissent
à l’éclatement de la vérité au lieu d’une chasse aux sorcières parce que
justement, cette affaire peut produire l’effet inverse. Certains
puissants peuvent en profiter pour régler des comptes à de pauvres
collaborateurs ou adversaires qu’ils accuseront à tort d’être à
l’origine des dénonciations portées contre eux.

Boureima OUEDRAOGO

Le Reporter

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Vos commentaires

  • Le 17 mai 2010 à 14:50, par Kôrô Yamyélé En réponse à : Et revoilà la guerre des tracts !

    BOUREIMA, les ressorts sont cassés partout !

    - Où est donc le CSC, lui qui s’en prend à la presse que tout le monde connait et lit ? Je demande au CSC de censurer ces tracts !!! Allez !! On attend le CSC ici !!!!

    EFFICACITÉ pour EFFICACITÉ, j’attend de voir les performances du CSC ici sur ces tracts.

    Par Kôrô Yamyélé

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