LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Issa, le médecin des pauvres

Publié le lundi 30 août 2004 à 07h59min

PARTAGER :                          

Dr Issa Ouédraogo

A la rue 137 du secteur 30 de Ouagadougou se trouve une clinique gérée par un médecin hors du commun. Des quatre coins de la ville de Ouagadougou et des villages, les patients viennent s’y faire soigner.

C’est une bâtisse à deux étages qui abrite la clinique. Sur une pancarte fixée à l’entrée est écrit "Clinique médicale Dr Issa Ouedraogo, médecin généraliste ". Il n’est même pas encore quatorze heures que les places réservées aux patients venus en consultation sont toutes occupées. Certains sont assis à même le sol, pendant que d’autres se trouvent sous le parking réservé au personnel. Des enfants aux personnes âgées, tous s’y retrouvent.

Au rez de chaussée, se trouvent les salles de traitements, une chambre d’hospitalisation où sont couchées des personnes âgées ainsi que des patients affaiblis. A un pan du mur, une flèche indique un escalier qui mène à la pharmacie, au cabinet dentaire, au laboratoire ainsi qu’à d’autres salles d’hospitalisation.

Des patients et leur accompagnant descendent les marches, leur poche de perfusion à la main, pour se rendre aux toilettes situées au rez de chaussée. Les uns prétendent qu’ils viennent en ces lieux parce que c’est moins cher, pendant que d’autres disent que c’est le seul endroit qui accepte les soigner à crédit. M. S. Ouédraogo affirme qu’ il y vient depuis près de vingt ans. Bien qu’il soit domicilié au secteur 17 (Pissy), la distance ne l’effraye pas du tout. " Quand je n’ai pas d’argent, le docteur accepte me faire crédit ", ajoute-t- il.

Tout juste à côté, un autre patient s’impatiente de donner son avis :" Ici, on respecte beaucoup les gens ; ce n’est pas comme ailleurs où on crie sur les malades, pour les rendre encore plus mal à l’aise ". Mme Konaté, elle, assiste son père hospitalisé. Elle trouve que cet endroit est moins cher, et que l’attention y est. Elle pense néanmoins que l’ endroit a encore besoin d’ être agrandi, car l’ affluence est grande.

Au deuxième étage, ce sont les mêmes éloges. D’aucuns ajoutent qu’il n’y a pas d’heures fixes de visite des malades. Les visites peuvent se faire n’importe quand.
A quinze heures moins le quart, le docteur arrive. Même sans rendez-vous, il nous accueille trois quart d’ heures après. Juste un bout de temps, pour pouvoir s’occuper ensuite de ses nombreux patients

Clément Bassolet


« Je suis un chrétien, c’est ma source d’énergie »

Je suis médecin de formation, avec une formation supplémentaire dans la prise en charge de la chirurgie d’urgence. J’ai commencé ma formation de médecin en 1994. J’ai débuté au district sanitaire de Saponé, dans le Bazéga. Je me suis installé dans le privé depuis mai 1998.

Comment ont été vos débuts dans le privé ?

Les débuts ont été modestes. J’ai d’abord loué un petit local où j’ai commencé et quand j’ai eu plus de moyens, j’ai pu acquérir un terrain à mes propres frais. J’ai construis ma propre clinique, et quelques années plus tard, ce terrain était devenu exigu. J’ai donc acheté un deuxième terrain pour une extension.

Donc, les débuts ont été modestes, mais du fait de l’affluence des patients, nous avons pu élargir, non seulement l’espace mais aussi la gamme d’activités par rapport aux besoins de nos patients.

Quels sont vos domaines d’intervention au niveau de la clinique ?

Nous faisons des consultations de médecine générale ; nous donnons des soins infirmiers ; nous hospitalisons. Il y a aussi la radiologie, le laboratoire d’analyses, l’échographie, le bloc opératoire, le cabinet dentaire, une pharmacie, une salle d’observations pour les cas opérés.

Racontez-nous votre journée de travail ?

Le matin, je quitte mon domicile à six heures, je fais le tour des lieux, pour voir chaque patient. Une fois ce tour terminé, à sept heures, je débute mes consultations. Ces temps-ci : à cause du paludisme, je ter mine vers treize heures. Après, je rentre, chez moi juste le temps de manger, me reposer un peu avant de reprendre à quinze heures. Les après-midi, j’arrête les consultations vers dix-huit heures. Entre dix-huit heures et dix-neuf heures je fais tour des patients. Mais habituellement je descends à - dix-neuf heures.

Rencontrez-vous des difficultés avec vos patients ?

La plupart de nos patients sont démunis à 1’extrême, et même si on veut les aider, ce n’est pas facile. Nous avons créé une caisse de nécessiteux à la clinique. Mais souvent cette caisse est vite vidée. Il y ’a aussi des cas très compliqués, tels des malades qu’on veut évacuer, mais qui refusent de bouger. Notre plateau technique ne couvre pas non plus toutes les pathologies. Il y a aussi le nombre réduit du personnel soignant. Nous avons ici trois médecins généralistes.

Il paraît qu’ici, les prix des prestations sont bas ?

J’essaie d’adapter les prix en fonction des capacités des patients parce que je les connais ; je connais ce que gagne le
Burkinabè moyen. J’essaie de proposer des prix qui tiennent compte de tout cela. On veut bien donner des soins, mais on ne peut tout de même pas fermer les yeux sur le pouvoir d’achat de la population. J’essaie donc d’adapter mes prix aux capacités financières des gens moyens.

Comment arrivez-vous à compenser le coût modique de vos prestations quand on sait que vous ne faites pas de l’humanitaire ?

Nous ne faisons pas de l’humanitaire, c’est vrai, mais le fait que les prix soient bas attire plus d’affluence. Quand On multiplie les prix bas par un grand nombre, on arrive à s’en sortir. Ainsi, on arrive à fonctionner sans difficultés.

Croyez-vous en Dieu ?

Je suis un chrétien, c’est surtout cela qui fait ma source d’énergie. Il faut croire en quelque chose pour pouvoir aller de I’ avant. Je crois en Dieu pour faire des exploits. Pour qui connaît l’histoire de notre clinique, il faut croire en Dieu pour arriver là où nous sommes aujourd’hui. Je crois que la foi en Dieu est un stimulant pour toute action qui tend à rendre service à son prochain.

C.B.
L’Evénement

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 31 août 2004 à 21:23, par Mahaoua Konaté Bamba En réponse à : > Issa, le médecin des pauvres

    Bonjour Docteur,

    Vous avez un sacré courage , que Dieu vous appuie dans votre travail de tous les jours . N’essayez pas d’être comme votre homonyme dans la Bible ( c’est Jésus qui est Issa en arabe ). Créez une fondation , donnez les grandes lignes de ce que nous voulons faire avec et faisons en sorte que votre clinique ait les moyens grâce aux patients et à leurs parents .

    Mahaoua K. Bamba

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique