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PROTECTION DES JOURNALISTES AFRICAINS : Le silence coupable de l’UA

Publié le jeudi 29 avril 2010 à 03h04min

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Les nouvelles sont à la fois bonnes et mauvaises ces derniers temps concernant la profession de journaliste en Afrique. Disons que les mauvaises nouvelles dominent les bonnes. Par ordre chronologique, tout a commencé en fin de semaine dernière avec la mort en prison du journaliste camerounais Bibi Ngota.

Directeur de publication de l’hebdomadaire "Cameroun express", il était détenu préventivement depuis un mois et demi avec deux autres journalistes dans le cadre d’une affaire de faux document relatif à une interview du secrétaire général de la présidence camerounaise, Laurent Esso. Pendant que l’on était en train de pleurer ce confrère mort des suites de maladie qui s’est aggravée faute de soins en prison, d’autres mauvaises nouvelles tombent. Au Nigeria voisin, un reporter chargé des affaires judiciaires au quotidien "The Nation" est abattu chez lui le 24 avril. Le même jour, deux journalistes du bimensuel chrétien "The Light Bearer" sont tués à coups de machettes à Jos, capitale de l’Etat central du Plateau, par des jeunes qui s’en prenaient aux passants après la découverte du corps d’un musulman. Aux assassinats, se sont ajoutés au même moment des menaces, des intimidations, des agressions physiques de journalistes au Nigeria.

La seule bonne nouvelle après ces morts et assassinats a été la libération , le 27 avril dernier du journaliste et opposant tunisien Taoufik Ben Brik qui a fini de purger ce jour-là la peine d’emprisonnement de 6 mois à laquelle il avait été condamné pour "violence, outrage public aux bonnes moeurs et dégradation volontaire des biens d’autrui". Des faits qu’il a toujours niés en parlant plutôt de machination du pouvoir en place qu’il ne porte pas dans son coeur, pour le réduire au silence.

Emprisonnements, assassinats, intimidations sont les sorts réservés, la plupart du temps, aux journalistes dans les pays où la liberté de presse et la liberté d’expression n’ont pas de sens pour les pouvoirs en place et même pour de simples citoyens qui ne supportent pas la critique, la contradiction. L’absence de sanctions pour les atteintes à ces libertés fondamentales reconnues dans la plupart des constitutions des pays, met en danger permanent les journalistes et les défenseurs des droits humains. C’est à croire que les dirigeants des pays africains où les journalistes sont constamment menacés sont complices de ceux qui mettent volontairement des bâtons dans les roues de la presse.

Pourtant, ces mêmes dirigeants vantent à longueur de discours la liberté de presse sans véritablement tout mettre en œuvre pour qu’elle soit vraiment concrète et permanente. Dans certains pays, il est question de plus en plus de dépénalisation des délits de presse. Autrement dit, de ne plus envoyer un journaliste en prison pour un délit commis par voie de presse. Dans d’autres , on durcit plutôt la législation sur la presse au point qu’il faille être vraiment fou pour exercer la profession de journaliste. La dépénalisation y est vue d’un mauvais oeil et est assimilée à une impunité que l’on veut accorder aux journalistes. Or, il n’en est rien car à y voir de près, si les peines de prison sont supprimées, il y a les amendes qui coûtent souvent la peau des fesses parce que l’on tape là où ça fait le plus mal : la trésorerie de l’entreprise de presse.

La dépénalisation n’est donc qu’un moyen supplémentaire de protection des journalistes. Vu les appréhensions qu’elle suscite à tort et la mauvaise compréhension dont elle est l’objet par les autorités de certains pays, la marche vers la dépénalisation des délits de presse ne se fait pas au même rythme. Si fait que l’on se demande s’il n’y a pas lieu que l’Union africaine (UA) fasse sien ce combat qui est pour l’instant celui des associations de journalistes aux niveaux national et régional. Ce serait d’ailleurs l’occasion pour l’organisation continentale de se racheter par rapport à son silence coupable concernant les emprisonnements, les assassinats, les persécutions de journalistes africains. L’UA devrait pourtant réagir promptement et avec fermeté face à ces situations comme elle le fait, par exemple, lorsqu’il y a coup d’Etat.

Mieux, elle doit prendre des textes relatifs à la protection des journalistes que les Etats membres doivent respecter sous peine de sanctions. C’est d’ailleurs ce que compte lui demander la Fédération des journalistes africains (FAJ). Au terme de son 2e congrès tenu les 27 et 28 mars derniers à Harare au Zimbabwe, la FAJ a décidé de demander à l’UA d’adopter une résolution sur la protection et la sécurité des journalistes africains et travailleurs des médias. Elle compte aussi demander à la commission africaine des droits de l’Homme et des peuples de convoquer une session spéciale sur la sécurité des journalistes africains. Autant de perches tendues à l’organisation continentale et sur lesquelles on fonde l’espoir qu’elle saura les saisir.

Séni DABO

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 29 avril 2010 à 11:38, par Paris Rawa En réponse à : PROTECTION DES JOURNALISTES AFRICAINS : Le silence coupable de l’UA

    Ne vous fatiguez pas pour rien à réclamer que l’UA rompe son silence pour ce qui ne l’a jamais intéressé !

    - Depuis quand l’UA a-t-elle défendu les droits de citoyens et des peuples africains ? Depuis quand s’est-t-elle préoccupé de la promotion des droits et libertés individuelles ?

    - L’UA n’a d’yeux que pour les chefs d’État : soit quand l’ancien et le nouveau se disputent le pouvoir comme à Madagascar, soit quand la communauté internationale cherche des poux sur la tête des chefs d’État, comme la justice internationale aux trousses du président soudanais (pour qui l’UA invoque l’immunité présidentielle en taxant la CPI de partialité) et de l’ancien président du Tchad (bien planqué au Sénégal qui joue la montre pour commencer le procès au nom de l’UA). On ne touche pas à un seul cheveux d’un chef d’État africain, mais eux peuvent égorger leurs populations, l’UA s’en bran..! Pas d’ingérence dans les affaires intérieures des États !

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