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Journée nationale de pardon : 9 ans après, l’insouciance est de retour

Publié le mardi 30 mars 2010 à 03h31min

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Les images datent de 9 années mais sont encore vivaces dans les esprits : le chef de l’Etat Blaise Compaoré et trois de ses devanciers (Sangoulé Lamizana, Saye Zerbo et Jean-Baptiste Ouédraogo) côte à côte sur un podium au stade du 4-Août avec des personnalités du monde religieux et coutumier, un lâcher de pigeons et le président du Faso qui demande pardon à toutes les victimes des crimes et violences politiques de 1960 à nos jours.

L’acte de componction n’était pas feinte, mais il s’en trouvait qui demeuraient circonspects, à commencer par les représentants de certaines familles concernées qui, du reste, n’avaient pas effectué le déplacement dans la cuvette du stade du 4-Août.

D’ailleurs à l’époque, nous faisions partie des sceptiques, même si nous comparions cette Journée nationale de pardon (JNP) à une catharsis à même de faire baisser le mercure national. Du reste, voici ce que nous écrivions le 12 mars 2001 après la première conférence de presse du métronome de cette JNP, Alain Yoda :

« Pour sa première sortie face à la presse, Alain B. Yoda n’avait pas grand-chose à servir aux journalistes sauf sa bonne foi, qu’il a voulue contagieuse... Cette JNP peut-elle seulement être efficiente, contribuer à résorber un tant soit peu la crise si certains protagonistes de ladite crise sont laissés sur le bas-côté du chemin qui mène au pardon et à la réconciliation ? » (1).

A l’époque, beaucoup de Burkinabè n’avaient, en effet, pas adhéré à cette JNP, car ils la trouvaient peu sincère. Si on excepte l’attitude maximaliste de certains politiciens qui avaient récupéré le boucanage de Sapouy pour en faire un fond de commerce, la majorité des Burkinabè voulait tout simplement connaître les fauteurs (la Vérité) avant de pardonner.

Exigence légitime, car avant tout acte de contrition, il faut passer aux aveux. Sinon à qui pardonne-t-on ? « Alain Yoda est-il prêt à pardonner à quelqu’un qui aurait tué un être qui lui est cher sans au préalable connaître (au moins) l’identité de la personne à qui l’on pardonne ? Croyant comme Alain l’est, il le ferait soutient-il la main sur le cœur », écrivions-nous, toujours dans le même éditorial.

Certes, au nom de la continuité de l’Etat, Blaise a battu sa coulpe et la concrétisation d’une des recommandations du comité de sages, à savoir l’indemnisation et l’identification des sépultures, a été, en partie, accomplie. Un autre pilier de l’œuvre de ces sages concerne les réformes politiques, dont certaines ont connu également une concrétisation.

Hélas ! neuf ans après, ceux qui sont au pouvoir semblent frappés d’amnésie. Les mêmes qui en 1999, 2000 et 2001 étaient devenus aphones face à la bronca du « pays réel » (Collectif) donnent curieusement de nouveau de la voix pour qu’on accorde un mandat en 2015 à Blaise Compaoré.

Le principal concerné n’a encore rien dit sur le sujet, très querellé, et on peut même affirmer qu’on lui fait actuellement un procès d’intention. Mais à observer l’agitation fébrile de certains de sa garde rapprochée, plus royalistes que le roi, on se dit que l’article 37 va encore être toiletté.

Ce comportement donne raison à ceux qui, déjà, il y a 9 ans, estimaient que cette JNP confinait à du spectacle pour amuser la galerie, histoire pour le régime, acculé à ce moment-là, d’avoir du répit. En somme, de la Com. politique. Et comme les temps meilleurs sont revenus, l’insouciance est aussi de retour.

Jean-Jacques Rousseau affirmait que « l’homme naît bon, c’est la société qui le rend méchant ». (2) Il prévenait que la bonne ou mauvaise socialisation mène toujours chaque peuple quelque part.

Z. Dieudonné Zoungrana

- Notes :

(1) In l’Observateur paalga : Commentons l’événement du 12 mars 2001 « Alain et sa foi » (2) In Jean-Jacques Rousseau dans Emile ou de l’Education

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 30 mars 2010 à 10:08 En réponse à : Journée nationale de pardon : 9 ans après, l’insouciance est de retour

    Merci frère Dieudonné. En effet, la journée nationale de la paix était en fait un somnifère pour tout le peuple. Heureusement que certains n’ont pas pris la dose ! Le Burkina était dans une vraie crise causée par le drame de Sapouy, c’est évident, et en fait de pardon demandé, on a ressuscité les anciens torts et crimes pour que beaucoup de Burkinabè se détournent de l’affaire de Sapouy ; ça aussi c’est évident - parce que qui n’a pas perdu un être si cher depuis l’après Maurice Yaméogo ? -
    Il me semble que le cirque de la journée de pardon se veut de se repéter chaque année ; ainsi, on tue chaque année et on pardonne l’autre année. Des monuments élevés, mais qui serviront au tourisme parce que le départ ne fut pas correct.
    Il semble que monsieur Blaise Compaoré ne quittera pas facilement ce fauteuil de Ouaga2000. Et il va aller où ? Aux dernières élections, on a vu surgir les "ABC", et mêmes les "ACC" partout ! Ce fut effectif ! Si l’on soupçonne la modification de l’article 37 ou le report des élections, c’est évident que quelque chose de floue se manigance. C’est pourquoi très peu de burkinabè n’iront pas s’inscrire pour voter ; autrement, c’est participer à la ruine de son propre pays où les voix n’ont aucune importance devant les truchements électoraux. Mais nous parlerons par tous les moyens qui nous permettront de le faire sans peur ! Et merci d’avoir élevé la voix !

  • Le 31 mars 2010 à 16:02, par SAWADOGO Asseta En réponse à : Journée nationale de pardon : 9 ans après, l’insouciance est de retour

    Le jeux est fait que faire ? Instruire au peuple les rudiments de la politique qui n’arrange pas le peuple, mais, plus tôt les élus de tous bord, les sages ne sont ils pas de même bord placés oû ils sont, par les élus ? Ce qui est bon le présidant que tout le monde nomme meilleur par ses médiations et bonnes oeuvres ne déçevra son honneur surtout, de ceux qui ont mis leurs espoirs en lui il brillera au lieu de se salir.

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