LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Cinquantenaire des indépendances en Afrique : Situation peu reluisante au Burkina

Publié le lundi 22 mars 2010 à 02h46min

PARTAGER :                          

Bobo-Dioulasso, la capitale économique de notre pays, est de nos jours un vaste chantier. On y bitume des routes, des édifices sont construits à grande échelle. Des séances de travail se succèdent. On y coupe même des caïlcédrats centenaires au grand dam de quelques écologistes. La raison : la ville de Sya, qui tient à réussir brillamment son organisation, accueillera le 11 décembre 2010 (soit dans moins de neuf mois) les festivités marquant le cinquantième anniversaire de l’accession de l’ex-Haute-Volta à la souveraineté nationale.

Ce lundi 22 mars 2010, il ne reste plus aux organisateurs que 264 jours francs pour mettre les petits plats dans les grands afin que la fête soit à la hauteur des attentes. C’est dans cette perspective que, le week-end dernier, y ont été lancées officiellement les manifestations commémoratives de ce cinquantenaire.

Mais au-delà de notre pays, c’est une bonne partie de l’Afrique qui célèbre, en cette année 2010, le cinquantième anniversaire de son indépendance. Une commémoration qui, au-delà du caractère festif, se doit d’être surtout un moment d’introspection pour apprécier, sans complaisance, le chemin parcouru et envisager les correctifs à y apporter afin de sortir de l’ornière. Alors, quel bilan peut–on dresser cinquante ans après ?

L’auteur de l’Aventure ambiguë, le Sénégalais Cheikh Hamidou Kane, qui passe à l’heure actuelle pour un sage à l’échelle africaine, tout en déplorant le bas niveau d’avancement des Etats africains dans bien des domaines, estime que le continent noir aurait pu dépasser son stade actuel de développement s’il avait assumé son intégration au lendemain des indépendances. Et l’écrivain sénégalais d’inviter les leaders du continent à « s’inspirer de ce que l’histoire du berceau de l’humanité a laissé comme outil, comme sagesse, comme mode de gouvernance. Et aller de l’avant suppose aussi effacer les frontières actuelles, qui ne sont qu’artificielles ».

Engluée depuis les années 60 entre coups d’Etat et révolutions de palais, l’Afrique, jusque-là, peine à trouver ses repères. De 1960 à 1990, les spécialistes estiment qu’environ 270 coups d’Etat ou tentatives de putsch y ont été dénombrés. Et pour qui connaît les bouleversements et autres remises en cause qu’occasionnent les coups de force, c’est assez pour durablement saper les bases du développement.

En vérité, en dépit de ses richesses naturelles, pour bien des observateurs, l’Afrique dite indépendante a collectionné des échecs au triple plan économique, politique et humain. Oubliées depuis les expressions de PIB, de taux de croissance pour parler plutôt de seuil de pauvreté, le revenu par habitant en Afrique étant de moins d’un dollar par jour. Que peut-on bien faire avec un si petit pécule en termes d’éducation, de santé et de production agricole ?

Et pourtant, le berceau de l’humanité a une multitude d’exemples qui auraient pu l’inspirer grandement : les dragons d’Asie. Hier encore lanterne rouge dans le classement du pays du tiers-monde, tigres et dragons d’Asie, grâce à une discipline rigoureuse et à un travail acharné, inquiètent grandement désormais l’Occident, au point de lui disputer quelques précarrés africains.

Cinquante ans après son indépendance, qu’en est-il du Burkina Faso ? Petit pays enclavé au nord de la Côte d’Ivoire, du Ghana, du Togo et du Bénin, l’ex-Haute-Volta a connu des périodes d’instabilité avec des sommets sanglants ; et elle est, à ce jour, à son sixième chef d’Etat, Blaise Compaoré, qui totalise à lui seul 23 ans de pouvoir sur les 50 années.

En l’absence sur le terrain de formations politiques capables de constituer un réel contre-pouvoir, la presse joue son rôle de veille en égratignant de temps à autre ceux qui sont aux affaires. La cohabitation entre les religions a été presque toujours fraternelle. Au plan économique, l’ex-Haute –Volta est un des pays en queue de liste des indices de développement humain du PNUD.

Trois adultes sur quatre y sont analphabètes, et l’espérance de vie plafonne à 51 ans pour les hommes et 54 pour les femmes. Les campagnes végètent dans une pauvreté désarmante. Les secteurs de l’éducation et de la santé, mamelles de tout développement, ne reçoivent pas les financements requis.

Selon les économistes pourtant, pour qu’un pays espère amorcer le moindre décollage, il faut qu’il ait une population alphabétisée au moins 50%. Ce qui n’est guère le cas du Burkina, cinquante ans après la proclamation de son indépendance. Le hic ici, c’est que le système scolaire ne semble pas aller dans le sens d’une véritable amélioration.

Certes, nos autorités ne manquent aucune occasion de bomber le torse pour étaler des résultats records de croissance du taux de scolarisation – les bailleurs de fonds y tiennent comme à la prunelle de leurs yeux - mais s’agit-il, comme l’a dit Félix Damette, consultant et professeur à la Sorbonne, de scolarisation ou de simple inscription dans les registres ?

Il y a lieu de craindre que l’accroissement exponentiel des effectifs ne s’accompagne d’une dégradation du contenu. Et à bien des égards, le système éducatif burkinabè actuel fonctionne en trompe-l’œil, car on ne fait que bourrer les classes de gosses avec, dans bien des cas, des enseignants mal formés, venus à l’enseignement plus par nécessité de se trouver un emploi que par vocation.

Selon les spécialistes en éducation, en effet, dans l’enseignement, le seul indicateur pertinent devrait être le nombre d’enseignants qualifiés et motivés à mettre devant les élèves, tout en sachant qu’il y a un ratio enseignants-élèves à ne pas dépasser. Il semble que celui-ci est de 35 élèves par classe. Au-delà, on ne peut plus suivre tout le monde. Et avec 50 élèves par section, à entendre le consultant Félix Damette, on fait de la garderie. Et dire qu’au Burkina nous en avons 125, voire 150 ! Avancer donc des taux de scolarisation de 70 à 75 % au Burkina semble n’avoir aucun sens.

La démographie galopante de notre pays reste aussi une des préoccupations majeures. Les spécialistes pensent que le Burkina atteindrait 23 millions d’habitants, voire davantage, à l’horizon 2025. Pendant que les ressources, elles, ne suivent pas.

Et il y a urgence à inverser la tendance pour espérer s’en tirer, car aucun développement n’est envisageable avec la configuration démographique actuelle, surtout que le secteur santé n’est pas non plus logé à la bonne enseigne.

Pourtant, nous devons nous battre pour que, avant le prochain cinquantenaire, la patrie des hommes intègres soit toujours un havre de paix, où la majeure partie des habitants ne continue pas de manger de la vache enragée.

La Rédaction

L’Observateur Paalga

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 22 mars 2010 à 04:18, par Armando En réponse à : Cinquantenaire des indépendances en Afrique : Situation peu reluisante au Burkina

    Le chemin du développement est long et sinueux. Par quelle bout commencer ? Seule l’éducation peut nous sauver.Quand je vois qu’en Afrique on investit des milliards pour acheter des "gourdins"(armes primitives qui ne servent qu’à protéger le chef en matant les populations) et qu’en même temps on coupe les cantines scolaires, les bourses d’études etc ca fait mal. Après 50ans, on trime encore et on peine à amorcer le développement.

  • Le 22 mars 2010 à 07:59, par Tapsoba En réponse à : Cinquantenaire des indépendances en Afrique : Situation peu reluisante au Burkina

    En plus des instabilités politiques à foison,ne perdons pas de vue que côté monetaire,nous demeurons dans la servitude.Le franc cfa créé le 25 décembre 1945 par decret,au lendemain de la seconde guerre mondiale dans laquelle la France fut pendant 5 longues années occupée par l Allemagne nazie,a été l oeuvre de trois francais qui avaient en commun un double caractère:Ils sont imbus de la supprématie blanche ;ils sont fervents acteurs de l agresion coloniale contre l Afrique.Or,nous savons que l occupation nazie de cette même France n avait pas que le caractère particulièrement bestial des hordes de soldats mais aussi elle fut un formidable champ d execution de nazisme monetaire externe.Elle a subi ce nazisme monetaire externe avec beaucoup plus de rigueur que d autres territoires conquis comme la Belgique et la Pologne.C est ainsi qu écrivait Réné Sédillot en 1945 dans son livre intitulé “Le franc enchainé-histoire de la monaie francaise pendant la guerre et l occupation” ceci :« Avec les siècles,les formes de pillage sont devenues savantes.Les anciens germains dévastaient en toute simplicité les pays qu ils avaient conquis .Leurs déscendants,en 1940,ont recouru à une methode de rapine plus subtile et plus fructueuse :ils ont mis le mark à 20 francs. »

    Cette manipulation de taux de change ,à l avantage exclusif du conquérant est l une des caractéristiques du nazisme monetaire appliqué à la France ,nazisme monetaire que celle-ci,une fois libérée du joug hitlérien appliquera aussi intégralement et en l’accentuant à l Afrique.Ce n est pas une surprise ,les francais créent le franc cfa en 1945 après l occupation, la même année où Sédillot publie son livre.Pour cette création ils ont au préalable récupéré l arsenal statutaire du nazisme monetaire que leur a infligé l Allemagne et fut entre autre inclus dans la convention d amnistie signé le 22 juin 1940 entre la France conquise et l Allemagne conquérante .Les francais ont alors fait du « copier-coller ».À leur tour ,ils ont retourné l arsénal nazi contre les africains,le nazisme monetaire.C est cela la réalité.(Cf,Le franc cfa et l euro contre l Afrique du Proffesseur Nicolas Agbohou)

  • Le 22 mars 2010 à 13:19 En réponse à : Cinquantenaire des indépendances en Afrique : Situation peu reluisante au Burkina

    Pourtant, on nous parlait de société d’espérance, de développement continu, et de faire du Burkina un pays émergent... Enfin, si ma mémoire est bonne.

  • Le 13 juillet 2010 à 01:05, par Bibi En réponse à : Cinquantenaire des indépendances en Afrique : Situation peu reluisante au Burkina

    Il ne sert à rien d’ acuser les autres,c’est vrai quant-on affirme ke l’on nous exploite mais qu’est ce ke nous AAFRICAINS faisions pour arreter ça ?Nos dirigents AAfricains ne pensent qu’ à leurs intérèts personnelles,la population qu’ en ta elle ne cesse de se battre pour avoir un lendemain meilleur mais hélas il ya encore la famine qui séville.Nous sommes les seuls coupables de ce long retard de l’Afrique,de ce visage péjoratif,négatif que l’ Afrique affiche aux yeux du monde.Quand la conscience,la manière d’agir de chaque Africain changera et les intérèts du pays serons mis au devant avant les intérèts personnelles,je penses et j’ai la conviction que l’Afrique aura un essor extraodinaire.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique
Le Dioula : Langue et ethnie ?
Sénégal / Diomaye Faye président ! : La nouvelle espérance