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Wade, 10 ans au pouvoir : C’était donc ça, le Sopi ?

Publié le vendredi 19 mars 2010 à 01h46min

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Comme dans un rêve, rêve caressé depuis un quart de siècle, le 19 mars 2000, face à un régime socialiste ossifié par 40 ans de pouvoir, la coalition Sopi, conduite par Me Abdoulaye Wade, s’emparait de la présidence. Les Abdoulaye Bathily et Amath Dansokho, ses amis d’alors qui s’étaient réunis plusieurs semaines auparavant avec le gagnant dans un hôtel de Paris pour le convaincre de rentrer à Dakar pour briguer la magistrature suprême, avaient donc vu juste.

Envolées, les réticences et les appréhensions du patron du Parti démocratique sénégalais (PDS), qui estimait être trop âgé, désargenté et sans aucune chance d’accéder à cette fonction suprême. Le résultat était désormais là : le PDS, créé le 31 juillet 1974 et dont le premier congrès constitutif s’est tenu à Kaolack du 30 janvier au 1er février 1976, s’emparait des rênes de la présidence pour 7 ans. Le charisme personnel de Wade, le poids de ses alliés de l’époque et la sclérose qui s’était emparée du PS ont pesé lourd dans cette victoire au premier tour.

Un regard sur le miroir de ce premier mandat (2000-2007) de l’enfant terrible de Kebémar renvoie les images d’attentes déçues, d’alliances, de ruptures et de ralliement et, in fine, de personification du pouvoir. Ainsi, la première moitié du septennat, le bagout et l’aura “d’Ablaye” Wade faisaient recette. Très vite pourtant, les guerres de tendances et les luttes factionnelles feront surface : Moustapha Niasse, le premier chef de gouvernement, paiera cash les premières épreuves du PDS au contact du pouvoir, notamment après les législatives de 2001. Ce sera, du reste, le début du délitement de la Coalition Sopi, et une recomposition du paysage politique sénégalais, faite de démissions et d’alliances contre-nature.

Symptomatique de cette instabilité politique, le défilé de 4 Premiers ministres à la Primature lors de ce septennat : Moustapha Niasse, Madior M’Boye, Idrissa Seck et Cheick Adjibou Soumaré iront grossir le cimetière politique de l’homme au crâne légendaire et aux allures de dalaï-lama africain. Ils ne seront pas les derniers... Puisque, actuellement et à deux ans de la fin de son second mandat, le locataire de l’avenue Léopold-Sédar-Senghor est à son 6e Premier ministre, soit une espérance de vie de moins de 2 ans à la Primature. Or Wade compte remettre le couvert en 2012…

Si l’on y ajoute certains errements tels l’adoption, par référendum, d’une nouvelle constitution, la suppression puis la restauration du Sénat, qui a désormais primauté sur l’Assemblée nationale, sans oublier le gonflement du budget de 500 à 2 000 milliards de FCFA, la crise de l’énergie, le chômage endémique, un abaissement du pouvoir d’achat des foyers, le naufrage du joala, on le constate, l’alternance sénégalaise se retrouvait prise dans un traquenard, comme l’écrivait en 2003 notre confrère Abdou Latif Coulibaly (1). La fin du septennat, caractérisée par la rupture du charme qu’inspirait le pape du Sopi et la désillusion face aux attentes, déteindront sur le quinquennat (2007-2012).

A l’évidence, la galaxie Wade a implosé : depuis la défenestration (2004) de son fils spirituel Idrissa Seck, le navire Sopi a tangué, et les multiples déconvenues politiques et sociales qui s’en sont suivies ont scellé définitivement le désamour entre le pouvoir libéral et les populations. Avec la dégradation du niveau de vie des populations, les récurrentes crises énergétiques, il est patent que Wade ne fait plus rêver. Pire, les craintes de certains Sénégalais des prémisses de dérives dynastiques s’en trouvèrent fondées, lorsque le chef de l’Etat tenta savamment de mettre son fils biologique, Karim sur orbite.

“Karim Wade descendra dans l’arène politique comme tout prétendant au fauteuil présidentiel, si jamais l’envie lui vient d’être président de la République, Karim n’a pas de pulsions pour le fauteuil présidentiel” (2), lisait-on dans certains journaux en 2007. N’empêche, le fait de l’avoir nommé patron de l’Agence nationale pour l’organisation de la conférence islamique (ANOCI) et de lui confier certaines grandes missions corroborent la thèse d’une tentative de dévolution du pouvoir de façon dynastique.

On est d’autant plus enclin à le croire que, n’eût été le désaveu des Dakarois, les locales du 22 mars 2009 auraient consacré RIMKA, comme l’appellent ses intimes, bourgmestre de la capitale ; une défaite électorale qui sonne comme le chant du cygne pour le PDS ? Peut-être pas, car l’animal politique, sentant le danger, tente depuis plusieurs mois de rassembler sa famille libérale, dispersée au 4 vents.

Et si “Idy” se laisse tenter, espérant un poste de vice-présidence, tout en sachant qu’il aura Karim au travers de son chemin, Maky Sall a rejoint le mouvement Benoo Siggil Senegaal (Sénégal debout) pour arrêter la “marche bleue”, qui est devenue “une marche noire”. Dix ans après cette alternance historique, les fruits du Sopi n’ont donc pas tenu la promesse des fleurs : le pays de la Terranga est empêtré dans de multiples crises (alimentaires, inondations, énergies), et la mutation du PDS en PDSL n’y changera rien, tout juste a-t-on ajouté le mot libéral au sigle.

Pour ne rien arranger, ce 19 mars 2010, ce sont des combats au fusil entre militaires et rebelles casamançais qui ont tenu lieu de cadeau à Wade. On l’avait constaté, et le cas Wade vient le confirmer : les bons opposants ne font pas forcément de bons présidents de la République ; à l’épreuve du pouvoir, ils n’arrivent pas souvent à se défaire des oripeaux d’opposant pour enfiler les habits de chef d’Etat. Hélas, Wade n’a pas dérogé à la règle. Et beaucoup de Sénégalais, au vue des 10 ans de ce pouvoir aux résultats mitigés, ne sont pas loin de se demander : c’est ça donc, le Sopi ?

Par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

Notes :

- (1) in Abdou Ladif Coulibaly, Wade, un opposant au pouvoir. L’alternance piégée.
- (2) in : Succession de Wade : comment Karim compte prendre le pouvoir (cf : Grincements de porte de Cheick Diallo) dans Walfadjiri et Le Soleil du 20 septembre 2007.

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 19 mars 2010 à 20:01 En réponse à : Wade, 10 ans au pouvoir : C’était donc ça, le Sopi ?

    Dieudonne, pourquoi tu regardes loi n pour poser cette bonne question ? tu manges dans leur main ou quoi ? Pourquoi tu n’as pas fait la meme analyse pour conclure par cette question violente et realsite : C’est don ca la Rectification ? Il y a 23 ans qu’ on ne respire plus. Si tu est atteint de prebitie il faut dire. Le presbyte, c’est celui qui ne voie pas a cote mais voit loin.

    • Le 19 mars 2010 à 20:47, par Bawala En réponse à : Wade, 10 ans au pouvoir : C’était donc ça, le Sopi ?

      c’est vrai quoi ! le frère a raison ;tu as tellement fait une bonne analyse sur le cas wad, mais nous burkinabé, je dirai que ça ne nous regarde pas trop"à chacun son wade !" que dis-tu de blaise compaoré et de son régine depuis 1987à nos jours.dis nous seulement combien de journaliste sont reduits definitivement au silence d’une manière ou d’une autre ? est-ce ton cas ? dis moi non !

  • Le 20 mars 2010 à 12:45, par sergio En réponse à : Wade, 10 ans au pouvoir : C’était donc ça, le Sopi ?

    Dommage que tu considères Wade comme un "dalaï lama africain". Ce seul clin d’oeil jette une ombre sur l’article et montre un peu ses limites analytiques !

  • Le 20 mars 2010 à 12:49, par sergio En réponse à : Wade, 10 ans au pouvoir : C’était donc ça, le Sopi ?

    Dommage que tu considères Wade comme un "dalaï lama africain". Ce seul clin d’oeil jette une ombre sur l’article et montre un peu ses limites analytiques !

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