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LES AFRICAINS FRANCOPHONES AU SUD DU SAHARA SERAIENT-ILS PAR NATURE PLUS MALLEABLES PAR LEUR ANCIEN COLONISATEUR QUE LES AUTRES ?

Publié le lundi 15 février 2010 à 00h44min

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Ça peut paraître insultant que de le dire mais on a malheureusement souvent le sentiment, lorsqu’on interroge l’histoire et les tempéraments des peuples africains, que ceux de l’ancien espace francophone colonial au sud du Sahara, ont été et continuent d’être ces grands enfants que la colonisation s’est longtemps plu à coller à l’image des colonisés. Par exemple, Jacques Chirac, pour marquer sa désapprobation pour la désignation de l’ex-président sud-africain Thabo Mbeki comme médiateur dans la crise ivoirienne, affirmant que ce dernier ne maîtrisait pas l’âme de l’Afrique de l’Ouest, traduisait en quelque sorte ce sentiment de droit exclusif sur le destin de ces anciennes colonies françaises.

Alors que dans les parties anglophone, lusophone, arabophone, la pénétration coloniale s’est la plupart du temps heurtée à plus de résistance, dans la partie sus-indiquée, les choses, sans s’être passées comme sur du billard parce qu’il y a eu quand même Samory Touré, Béhanzin et quelques autres rois, se sont plutôt déroulées sans trop d’encombres.

On relève ensuite que là où la colonisation (exception faite du Cameroun et de Madagascar) a le plus été contestée, c’est précisément dans d’autres zones d’occupation du continent comme les pays du Maghreb, le Kenya, les colonies portugaises, la Namibie, la Rhodésie… Plus symptomatique, une fois le gong de la décolonisation sonné, on observera qu’alors que l’indépendance a été acquise plutôt dans le sens entier du terme dans les territoires d’expression lusophone, arabophone, anglophone et même hispanophone, dans la partie francophone, on a joué de subterfuges pour lui fourguer une indépendance typée par le maintien de bases militaires et par des accords de coopération léonins qui ont maintenu tels quels, les rapports économiques et commerciaux coloniaux.

Des décennies de ce système ne permettront pas à ces territoires de sortir véritablement de l’ambiance indépendance « tchatcha » et de cette fausse illusion qu’ils avaient dans les années 60, réussi à se libérer intégralement de la servitude coloniale. Des juristes africains avisés auraient pu élaborer le concept juridique de fraude à la décolonisation et l’assortir de demandes de dédommagements pour le vol continué des richesses qui a été la cause pour les Etats concernés, de tant de souffrances. Hélas, le travail reste à venir.

Mais comme la France, ancienne puissance colonisatrice, n’est pas prête à s’arrêter en si bon chemin, elle a continué, pour préserver tous ces avantages indispensables à sa croissance, son prestige, à inventer des stratagèmes et notions qu’elle a encore facilement « vendus » aux Africains francophones qui, à l’insu de leur plein gré, se font les acteurs de la perpétuation de leur propre domination.

Une de ces notions est la politique de la chaise vide, nuisible et à la limite antipatriotique que constitue le boycott des élections. Il faut que ces dernières aient lieu, quelles que soient les conditions. Et pourtant, comment peut-on reprocher à une équipe de football de 11 joueurs de faire la politique du terrain vide parce qu’elle refuse d’entrer dans une compétition où sur le terrain, l’équipe adverse est composée de 22 joueurs qui au surplus sont eux, autorisés à jouer aussi bien avec les pieds qu’avec les mains ? En bien, on leur dit d’y aller, que c’est comme ça ! Quant à ceux qui refusent de se présenter à l’élection présidentielle, estimant que tout est pipé, on leur dit d’y aller coûte que coûte même s’ils voient qu’ils n’ont rien à gagner à une élection où le président en poste a tout verrouillé en maîtrisant les médias d’Etat, domestiquant la Justice, l’Administration, les chefs coutumiers, les opérateurs économiques, qu’il a fait élaborer un fichier électoral calibré qui lui assure mathématiquement à l’avance et à son choix, le score qu’il veut pour lui-même et pour les autres compétiteurs, avec bien sûr une structure électorale qui est là pour veiller au maintien du statu quo.

Un autre de ces stratagèmes ou concepts régulièrement dénoncés par des partis est celui de l’incapacité des partis d’opposition à jouer leur rôle à tous points de vue, et particulièrement par le fait que, quoi qu’on fasse, ils ne peuvent faire privilégier la candidature unique qui pourrait au moins favoriser l’alternance. L’Union nationale pour la démocratie et le développement (UNDD), qui a toujours dénoncé ces attrape-nigauds, vient d’être rejointe sur le deuxième point par un journal togolais qui souligne de façon magistrale, la perfidie qui gît au fond de ce présupposé en ces termes : « … le fait qu’on cherche à imposer au peuple noir, cette fausse stratégie de candidature unique face au dictateur au pouvoir, élu d’office dans le sillage de la doctrine selon laquelle l’Afrique n’est pas mûre pour la démocratie ou celle qui proclame qu’on n’organise pas les élections pour les perdre, montre bien l’attrape-nigaud qui nous est tendu. Sous les oripeaux de ce piège que beaucoup prennent naïvement pour une stratégie politique ou électorale de rassemblement, se cache bien l’idée que le dictateur a une telle assise populaire que, pour arriver à le battre, il faille lui opposer un seul challenger.

On occulte ainsi savamment les conditions nécessaires et suffisantes que sont la transparence et le respect de la voie démocratique pacifiquement exprimée par le peuple. Pour tout dire, lorsque le dictateur aura été proclamé vainqueur, ce ne sera pas qu’il ait triché mais ce serait la dispersion de l’opposition qui l’a fait Roi » (in AgoraVox du 26 01 2010, sous le titre : « Voici le coup d’Etat que prépare la France pour l’élection présidentielle de février 2010 au Togo »). Tout est dit : ni en France, ni en Italie, ni en Inde, on ne monte autant en neige cette candidature unique, grand sésame pour l’alternance. C’est surtout chez nous que l’on avance cette idée en passant bien sûr sur tout ce que les pouvoirs ont pu faire en amont, avec des complicités internationales, pour saper toute possibilité d’institutionnalisation des partis d’opposition. Le même refrain revient alors qu’on s’active à donner des couleurs, des saveurs et des senteurs à l’inutile et budgétivore présidentielle de 2010.

Le plus grave dans tout cela et qui nous amène à nous demander de façon peut-être insultante mais sincère, si nous sommes, nous Francophones de l’Afrique au sud du Sahara, moins intelligents que les autres Africains. Pire, il y a des gens qui savent, qui ont voyagé et qui se font tout de même les propagateurs de cette idée déboussolante ; il y a des ONG, censées lutter pour la dignité de l’homme noir, du Burkinabé, qui en font leur credo et malheureusement, au sein même de l’opposition, on en voit qui en deviennent les plus fervents défenseurs. Ils disent que c’est peine perdue mais ils y vont quand même.

Qu’il est long, chez nous, le chemin qui mène à la lumière libératrice !

La Rédaction

San Finna

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Vos commentaires

  • Le 15 février 2010 à 02:58 En réponse à : un faux mythe

    C est un faux mythe. Le Rwanda est une ancienne colonie francophone. Cela ne les a pas empeche de se liberer recemment de la colonisation francaise avec l arrivee de Paul Kagame. L anglais est meme devenu la langue officielle et le Rwanda a quitte la francophonie.
    Les africains francophones ne sont donc pas plus idiots que les autres africains.

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