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GUEGUERRE ALGERIE-MALI : Les terroristes rient sous cape

Publié le mercredi 10 février 2010 à 01h55min

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Les légendaires relations de bon voisinage entretenues depuis belle lurette par deux pays frontaliers, l’Algérie et le Mali, sont depuis quelques jours soumises à bien rude épreuve. La raison en est la très difficile équation des otages européens détenus par la section maghrébine de la tristement célèbre nébuleuse Al-Qaïda.

Les terroristes islamistes ont récemment fixé un nouvel ultimatum de quelques semaines pour la libération des six Européens. En outre, ils menacent d’attenter à la vie de deux otages français et italien si d’aventure ils n’obtenaient pas l’élargissement de ceux de leurs membres retenus prisonniers au Mali. Se voulant plus précis, ils fixent une date butoir à la France et au Mali : le 20 février 2010. Quant au gouvernement italien, il bénéficie d’une plus grande largesse : l’ultimatum qui le concerne court jusqu’au 1er mars. La question est difficile. Il y a tout d’abord que l’Algérie ne veut à aucun prix de la remise en liberté de ces tueurs du désert. Elle en a déjà tellement souffert de par le passé que la simple perspective de les savoir hors des geôles maliennes la fait frissonner. A défaut de pouvoir influencer le Mali dans ses prises de décisions, elle choisit de lui mettre la pression.

Il y a ensuite que les autorités maliennes se trouvent, pour cette question des otages européens, dans un bien cruel dilemme. Refuser la remise en liberté des prisonniers en question les expose, elles, à porter la grande responsabilité des Occidentaux otages d’Al-Qaïda. C’est loin d’être son intérêt. Mais d’autre part, les faire sortir des geôles provoquera immédiatement le courroux de son voisin algérien. Déjà que Alger a régulièrement reproché à Bamako son manque de fermeté à l’endroit des terroristes islamistes. Le gouvernement malien tente de ménager la chèvre des capitales occidentales et le chou de son voisin sahélien. Mais l’opération est des plus délicates et plus personne ne sait vraiment à quel saint se vouer.

C’est cette incompréhension réciproque qui a provoqué une hausse de tension et de ton entre les deux voisins qui se sont affrontés par la voix des ondes ces derniers jours et par le truchement de leurs presses respectives. Heureusement, il semble qu’il se trouve désormais comme une certaine accalmie. Elle peut aider les uns et les autres à retrouver leurs esprits dans le but d’envisager de façon plus sereine quelles solutions idoines. Car, de toute évidence, les deux pays font face à un seul et même fléau. La sagesse commande que, plutôt que de s’entredéchirer inutilement, ils consentent à unir leurs différents efforts pour traquer efficacement un ennemi commun.

Car, en l’état actuel des choses, c’est bien la nébuleuse terroriste qui rit sous cape et se frotte les mains, se délectant d’avoir fort intelligemment réussi à diviser deux pays dont elle est cependant la cible principale. Alger et Bamako doivent accepter l’évidence, qu’ils ont besoin l’un de l’autre pour mener une lutte victorieuse contre AQMI (Al-Qaïda pour le Maghreb islamique). Car il est clair pour tout le monde que si ces terroristes viennent du territoire algérien, leur nouvelle prédilection pour la bande sahélo-saharienne s’explique par la lutte sans merci que leur livre depuis des années le gouvernement algérien d’une part, et d’autre part, parce qu’ils y trouvent une grande liberté d’action et n’y rencontrent pratiquement pas de résistance.

Il faut le reconnaître, le Mali ne dispose sans doute pas des ressources nécessaires pour quadriller toute la partie sahélienne et désertique de son territoire où règnent depuis peu, en maîtres, ces terroristes des sables. Une sérieuse conjugaison des efforts des deux pays devrait produire du bon et viser à l’éradication des islamistes de ces grandes contrées désertiques qu’ils arpentent à la recherche de proies sur lesquelles fondre.

Mais à vrai dire, abandonner pareille lutte aux deux voisins concernés serait une bien grande erreur. Les nations européennes devraient se sentir elles aussi concernées. Les otages européens en ce moment retenus par AQMI sont français, italiens et espagnols. Ces européens ont le devoir de participer à une œuvre commune. Car, après tout, ce sont bien leurs ressortissants qui risquent de payer de leur vie le courroux des islamistes d’Al-Qaïda, si d’aventure les choses devaient mal finir.

Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a mené une mission bien discrète, il y a quelques jours à Bamako. Rien n’en a filtré, mais on se doute bien que la question des otages était au menu des entretiens. Il faut le comprendre. En pareilles circonstances, discrétion et prudence sont de mise et produisent davantage que de très tapageuses déclarations. On a de sérieuses raisons de croire que quelque chose est en train d’être fait dans l’ombre. Et ce, d’autant qu’il se susurre que le chef d’Etat burkinabè aurait été sollicité pour entreprendre une nouvelle médiation. L’option, si elle est avérée, n’est pas farfelue. Blaise Compaoré entretient d’excellentes relations avec l’Algérie. Du côté de l’Elysée, tout le monde ou presque est convaincu qu’en Afrique occidentale, il est désormais un homme qui, de plus en plus, a voix au chapitre. Et avec le Mali, les relations sont plus que chaleureuses.

De plus, le maître de Kosyam s’est bâti une solide réputation de médiateur hors pair. Si on fait appel à ses services, il se pourrait que d’une pierre, il fasse deux coups : obtenir la libération de ces malheureux otages européens d’une part, et de l’autre, restaurer les bonnes relations entre l’Algérie et le Mali que les épisodes de ces derniers jours auront jetées dans de sérieuses zones de turbulence. Pour le moment, rien ne filtre du gouvernement du pays des hommes intègres, à ce propos. Mais pour une fois, on se met à souhaiter qu’il n’y ait pas de fumée sans feu. Si la résolution de l’équation AQMI qui sévit dans la bande sahélo-saharienne passe par la capitale burkinabè, c’est tant mieux. Car, au pays des hommes intègres, on n’oublie pas que l’épouse de l’otage italien est burkinabè. Alors, on touche du bois et on croise les doigts.

"Le Pays"

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