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Ivo Moussa : un peintre de notre quotidien

Publié le jeudi 4 février 2010 à 01h02min

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Il y a longtemps que « Projecteur » voulait épingler ce discret artiste-peintre à son tableau de chasse mais il nous a toujours glissé entre les mains, comme une anguille. Nous l’avons rencontré à l’Espace Culturel Gambidi où il posait ses toiles aux cimaises de la salle d’exposition.

Ivo Moussa est un artiste-peintre dont beaucoup de parents voudraient comme gendre car, c’est un jeune homme clean, bien dans ses baskets. Il n’a pas le look déjanté du jeune artiste contemporain. En effet, il ne porte ni dreadlocks, ni accoutrement excentrique, et il n’a ni le boniment ni le regard halluciné ou vaporeux de l’artiste soi-disant inspiré. C’est un jeune homme d’une extrême politesse, peu disert et d’une grande disponibilité.

De part sa conception de l’artiste, il est proche de Malherbe, à savoir que l’artiste n’est pas plus important qu’un joueur de quilles. Par conséquent, il n’est pas de ces artistes qui s’autoproclament porte-parole de la société et se prennent pour des élus ayant un message prophétique à délivrer. Il aime la peinture et il l’exerce en véritable stakhanoviste. Tout simplement.

Ivo Moussa fait partie des jeunes peintres qui ont été formés par l’Espace culturel Gambidi. Ayant suivi des stages de formation avec des peintres européens et africains, il est familier de la perspective, des volumes et des nuances.

D’ailleurs, les toiles de l’artiste portent le sceau d’une réelle maîtrise du langage pictural. Ivo Moussa fait du figuratif, en rupture avec la mode qui incline la plupart des jeunes artistes burkinabè vers la peinture abstraite. Il est peintre de notre quotidien. Déambulant dans les ruelles des quartiers populeux de Ouagadougou, il croque sur ses carnets les scènes de rue, les gestes insolites. Ensuite il transpose sur ses toiles la vie du petit peuple de la capitale burkinabè.

Ainsi le tableau à l’huile « L’eau c’est la vie » qui saisit une ruelle de Ouaga après une pluie d’hivernage. On y voit des flaques d’eau au milieu de la rue dans lesquelles barbotent des bambins à moitié nus, une fontaine où s’alignent des bidons de plusieurs couleurs et des files de femmes, enfants au dos et large bassine sur la tête pour la corvée d’eau. On sent qu’ici, les rêves ne s’élèvent pas haut car la pluie leur mouille les ailes et le ciel est si bas qu’il les prive de toute chance d’envol.

Un autre tableau, « La porte bleue » : une dame avec un enfant au dos tend un plat de son à deux béliers. A travers l’embrasure de la porte, on aperçoit un autre enfant torse nu. Si le milieu est pauvre, il ne s’en dégage aucun misérabilisme. D’ailleurs les couleurs chaudes de la dame, l’éclat du soleil sur l’ocre des murs et la douceur du bleu de la porte suggèrent un certain bien-être malgré la sobriété des éléments. Quelques fois le regard du peintre passe le seuil des maisons et s’introduit dans l’intimité de ses sujets.

Dans « Séduction », il nous invite à l’intérieur d’une case ajourée. Sur une litière blanche, une jeune fille à demi vêtue et dans une pose lascive, cache ses appâts sous une gaze blanche. Sur le mur, se projette l’ombre de l’amant. Mais tout cela reste pudique, suggestif et d’un romantisme bucolique. On est content de savoir que la jeune villageoise échappe ici à l’image de victime du mariage forcé à laquelle la réduisent certains discours ; elle connaît les joies de l’amour vrai.

Et toutes les toiles de Moussa Ivo sont ainsi. Sous leur dehors naïf parce qu’ils se veulent le reflet du quotidien, il affleure de sa peinture une sincérité et une dignité des sans-culottes. Sûrement parce que le peintre n’a pas le regard froid de l’entomologiste devant la ruche mais Ivo Moussa pose un regard plein d’empathie sur ces hommes. D’où la lumière qui nimbe ses tableaux sur les petites gens de Ouagadougou.

Avec l’urbanisation à marche forcée de Ouaga, la disparition prochaine des quartiers populaires de Ouaga remplacés par les cités de béton est à envisager. On se dit que les œuvres de Ivo Moussa resteront comme le témoignage d’une époque évanouie.

Barry Saïdou Alcény

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 4 février 2010 à 11:35, par KA En réponse à : Ivo Moussa : un peintre de notre quotidien

    ça se sont des persoones talentueuses à supporter
    il faut que le burkina exploite son potentiel
    s’ila du génie il faut le faire voir au monde entier !!!
    du courage moussa ivo !!!!!!!!!!!!!

  • Le 4 février 2010 à 22:52, par bogoss En réponse à : Ivo Moussa : un peintre de notre quotidien

    Bon courage aux peintres qui travaillent et qui exposent.La richesse de la palette de ce jeune peintre laisse rever.Mais quand il s’agit d’oeuvres picturales,il faut bien que le media qui rapporte l’evenement montre des images.

  • Le 5 février 2010 à 12:48, par delta foxtrot En réponse à : Ivo Moussa : un peintre de notre quotidien

    puis-je compter parmis mes nouveaux amis aussi bien l’artiste IVO que le journaliste qui a su si bien traduire en lettre de maître ce qu’il a vu et ressenti à travers ces toiles et le portrait de monsieur IVO ? MERCI PAR AVANCE !

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