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Pierre-André Wiltzer, ambassadeur en mission, haut représentant pour la sécurité et la prévention des conflits

Publié le mercredi 11 août 2004 à 08h35min

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P-A. Wiltzer

Il était un temps où la France aimait à créer des commissions sur tous les sujets. Depuis quelques mois, ce sont des ambassadeurs qui sont nommés pour lutter contre le sida, la xénophobie, développer internet, etc... Dernière création en date : ambassadeur en mission, haut représentant pour la sécurité et la prévention des conflits.

La fonction étant nouvellement créée, il reste à en définir les contours et l’objectif. La seule certitude que l’on puisse avoir est que la création de ce poste permet de résoudre un problème auquel était confronté le gouvernement : trouver un point de chute pour Pierre-André Wiltzer qui, ayant été ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, se trouvait sans nouvelle fonction depuis la mise en place du gouvernement Chirac II-Raffarin III.

Il y a quelques jours, le quotidien Les Echos (Jeudi 22 juillet 2004) s’était fait... l’écho de l’amertume de Wiltzer : "Cela fait longtemps, disait-il, que je ne me
fais plus d’illusions sur certaines formes d’ingratitudes en politique". Mais il est vrai que le long passé UDF de l’ancien ministre délégué ne plaidait pas en faveur de son avenir dès lors que sa formation politique d’origine tend àjouer sa propre partition au sein de la majorité présidentielle. En politique, aussi, on a parfois de ces mesquineries !

Chirac et Raffarin ont décidé, au printemps dernier, de se séparer de Wiltzer. Pour le remplacer par Xavier Darcos. J’ai dit récemment tout le mal que je pensais de cette volatilité des ministres en charge de la coopération et du développement (cf LDD France 0232/Jeudi 17 juin 2004). Je n’étais pas de ceux qui avaient été séduits par l’arrivée de Wiltzer, rue Monsieur.

Même si je pense que la Coopé n’est qu’un garde-meuble dont on change périodiquement le concierge. Je n’avais jamais entendu parler de Wiltzer avant qu’il n’y débarque. Jacques Godfrain, qui a été le dernier "vrai" ministre de la Coopération, sous la droite, au temps de Juppé (1995-1997), me disait que c’était "un type très rigoureux qui a un grand sens de l’Etat". Wiltzer paraissait discret, efficace, performant. Je ne vois pas (au-delà de la cuisine politicienne au sein de l’UMP) l’urgence qu’il y avait à changer de titulaire ; en deux ans, il a fait son boulot convenablement et noué quelques relations qui sont, en matière de coopération, essentielles. Darcos n’a pas un CV (cf LDD France 0206/Mardi 6 avril 2004) qui permette de penser que, rue Monsieur, il ira plus vite et plus loin que son prédécesseur.

Enfin, peu importe. Wiltzer a été viré de la rue Monsieur et vient de retrouver un job (pour lequel il a été proposé par Claudie Haigneré, ministre délégué aux Affaires européennes) : ambassadeur en mission, haut représentant pour la sécurité et la prévention des conflits. Je me suis souvent posé la question de savoir à quoi sert le ministère délégué à la Coopération et à la Francophonie (cf LDD France 0155/Mardi 23 septembre 2003) dès lors qu’il y a l’Agence
française de développement (AFD) d’une part, et l’Organisation internationale de la Francophonie (OfF) d’autre part. Je me pose désormais la question de savoir à quoi peut bien servir un ambassadeur en charge de la sécurité et de la prévention des conflits. Est-ce un super-médiateur international ? L’interface entre le Quai d’Orsay et les services spéciaux ?

Sécurité et prévention sont dans l’air du temps. J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer (cf LDD Japon 03/Mardi 13 janvier 2004 et Japon 04/Vendredi 20 février 2004) le concept de "sécurité humaine" développé par l’économiste et prix Nobel Amartya Sen et la patronne de la Japan International Cooperation Agency (Jica) Saddako Ogata. Au sein des Nations unies, un poste de secrétaire général adjoint chargé de la prévention des conflits a été mis en place. Du côté de l’Union africaine un conseil de sécurité et paix a été institué.

PA W me rappelle tout cela et me précise qu’il y a "désormais une prise de conscience qu’i ! existe un lien entre la sécurité et le développement". Il s’agit, me dit-il, "d’empêcher l’engrenage de la violence, de traiter les crises et, surtout, les sorties de crise. Il faut avoir face aux crises, avant qu’elles ne sombrent dans la violence, une capacité d’alerte et une capacité de réaction qui comporte deux volets : que peut-on faire ? Qui peut le faire ?". Son domaine d’intervention, me précise-t-il, est mondial mais concerne particulièrement les pays où la France a des intérêts, et tout d’abord l’Afrique.

PA W a en poche une lettre de mission du Premier ministre. Avant de définir les priorités et un calendrier, il va rencontrer Michel Barnier, ministre des Affaires étrangères, et Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense. Sans perdre de vue Jacques Chirac qui suit cette affaire de près. Il est vrai qu’avec le dossier ivoirien, le gouvernement français a, en vraie grandeur, un exemple de ce qui n’a pas été fait (la prévention de la crise au cours des années 1999-2002) et de ce qui a été fait (limiter les effets de la crise par une action conjointe militaro-diplomatique impliquant tout à la fois les acteurs ivoiriens et les chefs d’Etat africains).

Pierre-André Wiltzer est né le 31 octobre 1940 à Agen, dans le département du Lot-et-Garonne. Son père a été préfet de région et délégué général de la Compagnie générale des eaux (CGE) devenue Vivendi. Etudes à Lons-le-Saunier, Troyes, Paris, lEP-Paris, Ena (1965-1967). PA W débute sa carrière dans les cabinets ministériels. Chef de cabinet du directeur des Terrirtoires d’outre-mer (1967), chargé de mission au cabinet de Christian Fouchet, ministre de l’Intérieur, de Joël te Tbeule, ministre des Dom-Tom (1968), chef de cabinet de Joël Le Theule encore, mais secrétaire d’Etat à l’Information cette fois (1968-1969), chargé de mission au cabinet de Jacques Chaban-Delmas, Premier ministre (1969-1972). Il sera secrétaire général adjoint de la Gironde (1972-1975), sous-préfet de Dreux (1975-1976). Il deviendra un des proches collaborateurs de Raymond Barre. Quand Barrre est nommé Premier ministre, il est d’abord chef de cabinet (1976-1979) puis conseiller (1979-1981).

En 1981, avant l’arrivée des socialistes au pouvoir, il est nommé maître des requêtes au Conseil d’Etat. Le 16 mars 1986, il est élu député de l’Essonne, sera réélu le 12 juin 1988, le 28 mars 1993, le 1er juin 1997. Il sera vice-président de l’Assemblée nationale en 1993-1995, lors de la deuxième cohabitation. Il le sera à nouveau à compter de 1999. A l’Assemblée, il sera membre de la Commission de la Défense nationale et des Forces armées et présidera le groupe d’amitié France-Québec de 1988 à
1997 ; par la suite, il en sera le vice-président. Il sera membre de l’Assemblée internationale des parlementaires de langue française (AIPLF), dont il présidera la section française, et président de la commission politique de l’Assemblée parlementaire de lafrancophonie (APF).

Un mandat électoral en appelant un autre, il a été conseiller régional d’Ile-de-France en 1992. Au plan local, il est, depuis 1995, conseiller municipal de Longjumeau, commune de l’Essonne dont il a été élu maire en 2001. Délégué national de l’UDF, chargé des relations avec les Dom-Tom de 1988 à 1998, il a occupé le poste de délégué général des adhérents directs de l’UDF de 1990 à 1998 et a assuré le secrétariat général de la Nouvelle UDF depuis 1998. PA W est considéré comme un des" barons de la droite" ; le plus discret d’entre eux.

Le 16 juin 2002, il a été réélu dans l’Essonne, sous l’étiquette UMP-UDF. Sa suppléante est l’ultra-chiraquienne Nathalie Kosciusko-Morizet, petite-fille d’un ambassadeur qui a été l’ami de Houphouët-Boigny (cf LDD France 046/Vendredi 17 mai 2002 et France 047/Lundi 20 mai 2002). Elle s’installera à l’Assemblée nationale quand PA W entrera au gouvernement. Il n’est plus ministre ; elle est toujours à l’Assemblée.

Jean-Pierre Béjot
La Dépêche Diplomatique

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