LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

GEL DU VOTE DES BURKINABE DE L’ETRANGER : La réprobation deUnion nationale pour la démocratie et le développement/Côte d’Ivoire

Publié le mardi 22 décembre 2009 à 01h31min

PARTAGER :                          

L’Union nationale pour la démocratie et le développement, section de Côte d’Ivoire, ne voit pas d’un bon oeil l’éventuel report de la mesure portant sur le vote des Burkinabè de l’étranger. Elle s’en explique dans la déclaration ci-dessous.

Notre parti, l’Union nationale pour la démocratie et le développement (UNDD), s’est toujours battu pour le vote des Burkinabè de l’étranger, ce, depuis les années 1978 dans sa forme première, l’Union nationale pour la défense de la démocratie. Ce combat s’est accentué plus particulièrement à partir de 1990 avec l’Alliance pour la démocratie et la fédération (ADF) et au fil du temps, avec l’Alliance pour la démocratie et la fédération-Rassemblement démocratique africain (ADF-RDA) après la fusion de l’ADF et du RDA. Cette lutte reste une préoccupation permanente de l’UNDD reconstituée en 2003, en raison du coup d’Etat dont nous avons été victime notamment pour prise de position jugée antipatriotique, contre l’agression de la Côte d’Ivoire. C’est dire qu’après un activisme multiforme (conférences de presse, meetings, déclarations…), nous transportant même à l’étranger et spécialement en Côte d’Ivoire, nous avons été légitimement comblés d’en voir la consécration solennelle avec l’adoption le 07 mai 2009 de la Loi sur le vote des Burkinabè de l’étranger.

C’est donc tout naturellement, bien qu’étant de l’opposition, que nous avons tenu à féliciter la décision même en ayant émis préalablement des réserves et en faisant des propositions pour améliorer les aspects pratiques liés à sa mise en œuvre (vote pour les législatives avec une place pour les Burkinabè de l’extérieur à l’Assemblée, immatriculation de nos compatriotes par tous les camps politiques, mesures pour éviter que la votation dans les Consulats ne soit managée par le seul pouvoir qui corsette par le truchement de ses services, les Burkinabè de l’extérieur, places en permanence pour l’opposition dans les consulats et ambassades, ouverture de la TNB à l’opposition …) qui n’ont pas été prises en compte.

Certains nous ont brocardés comme étant des gens qui jouent du violon pour faire danser les autres, parce que cette loi ne pouvait profiter en priorité qu’au CDP. Pourquoi ? Parce que ce parti présidentiel avait les moyens de sa campagne et qu’il s’était préparé en conséquence (mettant sa voix, la TNB , sur satellite, multipliant les missions vers les compatriotes de l’extérieur…) et surtout parce qu’il profitait de la situation de médiateur choyé de Blaise Compaoré dans la crise ivoirienne pour activer l’implantation de ses structures dans une pré-campagne manifeste afin de renverser l’opinion qui lui était défavorable pour des raisons évidentes. Nous, nous avons persisté dans notre satisfaction sans demander, ni reconnaissances de droit d’auteur ni un quelconque Prix, parce que notre contentement tenait par-dessus tout au fait que nous n’avons jamais imaginé le vote des Burkinabè de l’étranger comme un escabeau, un tremplin direct pour parvenir au pouvoir mais comme la juste reconnaissance des droits constitutionnels conférés à des compatriotes qui se trouvent en dehors du Faso.

Il faut par conséquent comprendre que la douche écossaise de la rétractation du pouvoir par rapport à l’application de cette loi sous prétexte qu’il est en manque d’argent et que l’organisation pratique de cette votation à l’extérieur est difficile à mettre en œuvre, nous stupéfait et même nous remplit de colère, nous autres Burkinabè résidant hors du pays, surtout que, sans autre forme de procès, les médias se détournent maintenant de nous et que la pré-campagne a fait long feu. Au moment où le pouvoir CDP s’enorgueillit d’être un modèle d’intercession dans la sous-région pour aider les pays voisins en difficultés à se doter des meilleurs instruments démocratiques pour des gouvernances apaisées et responsables, on est blessé de voir que, s’agissant de ses propres nationaux, il puisse commettre des fautes si lourdes qu’il ne se permettrait pas dans ses facilitations.

"Légèreté et imprévoyance"

Il y a, en effet, dans l’annonce de l’incapacité du pouvoir à exécuter la loi sur le vote des Burkinabè de l’étranger, beaucoup de légèreté et d’imprévoyance caractérisée qui auraient nécessité des sanctions appropriées car, s’éloignant totalement des marques de bonne gouvernance dont nos autorités sont promptes à se vanter. Mais plus grave, ce constat/décision fait sans courage, annoncé dans des termes sibyllins et sans explication de texte à l’étranger à la faveur d’une causette commandée à dessein par le Premier ministre avec la classe politique, véhicule (sur la base de la violation de la loi fondamentale qui donne les mêmes droits à tous les citoyens du Faso) une classification des Burkinabè entre ceux de classe supérieure (les résidants) et ceux de classe inférieure (les non résidants). On peut refuser, pour une question de quelques milliards de F CFA, certains disent 20, à treize millions de Burkinabè, pratiquement le même nombre que ceux de l’intérieur (treize millions neuf cent mille), leur droit constitutionnel de voter ; jamais on ne le fera pour ceux de l’intérieur parce que, dit-on, il faut éviter un vide juridique et ne pas rompre la tradition de sérieux de nos institutions ! C’est tout à fait ségrégationniste. Cette façon de ne pas tarir envers nous d’éloges, de salamalecs et de « poussi-poussi » lorsqu’il s’agit d’encourager nos transferts d’argent pour le développement de la mère-patrie mais de nous traiter comme des moins que rien quand il est question de nous mettre à égalité de droits électoraux avec nos compatriotes du pays, est d’un mépris insupportable.

Si le souci de la Justice habite nos gouvernants, les partis politiques, la société civile, il faudrait éviter la consommation du retour à cette atteinte à la Constitution quand s’agissant surtout de nous autres résidant en Côte d’Ivoire, la votation pour les scrutins du pays participe d’une identification nationale qui brise les graves suspicions d’assaillants et de bétail électoral qu’on nous colle au facies. On peut trouver des mesures palliatives (puisque nous n’avons que 28 ambassades et 5 consulats dans le monde) en s’investissant dans le vote électronique, le vote postal, dans le recours aux prestations des autres ambassades et pourquoi pas des pays d’accueil. Si la coopération militaire, diplomatique, judiciaire existe, il peut en être de même de la coopération électorale et cela ne diminuerait en rien notre souveraineté. En définitive, à défaut, de trouver rapidement l’argent nécessaire ou les solutions de rechange pour rétablir les équilibres constitutionnels, que le pouvoir se donne le temps d’y parvenir. Le plus important ici, c’est de mettre tous les Burkinabè sur un même pied d’égalité par rapport à la votation, en sachant mettre à profit l’exploitation des données pertinentes de la Constitution comme du génie politique burkinabè.

"Notre droit à voter..."

D’ailleurs, les tensions financières déclarées peuvent nous aider à une meilleure exploitation du temps ; elles ne se manifestent pas seulement au niveau électoral : le budget lui-même fait face à un déficit de plus de 260 milliards de F CFA ; si l’on y ajoute tous les problèmes qu’il y a sur le front social (santé, éducation…), les suites des dernières catastrophes diluviennes du 1er septembre sans compter les retombées de la crise financière et climatique, on ne peut que reconnaître de la sagesse dans les suppliques de tous ces refondateurs, réformateurs, rénovateurs qui demandent une pause pour réfléchir aux innovations institutionnelles, financières, organisationnelles… pour construire une nouvelle gouvernance plus économe, plus soucieuse de transparence, de respect de l’égalité des droits des Burkinabè, de la souveraineté populaire et même de la survie de l’humanité.

Une telle pause pour réflexion, évaluation et reconfiguration, qui permettra entre autres au passage de coupler toutes les élections, n’est pas au demeurant, semble-t-il, hermétique à la pensée du chef de l’Etat. A preuve, ce passage de son Message du 10 décembre dernier : « … j’invite l’ensemble des citoyens à approfondir les réflexions sur les réformes politiques indispensables à l’enracinement, dans notre société, des valeurs de démocratie et de citoyenneté responsable ». Alors, puisqu’on nous dit d’approfondir les réformes, continuons le combat pour nos droits à participer aux affaires de notre pays pour le renforcement de la démocratie et qui passe aussi par l’acceptation de notre droit à voter que bien de pays, plus tard venus que nous à la démocratie, appliquent sans chichi.

Abidjan, le 20 décembre 2009

Dominique GNISSI, Secrétaire national Chargé des Burkinabè de l’extérieur

Le Pays

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : Justice militaire et droits de l’homme
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique
Le Dioula : Langue et ethnie ?