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PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

Publié le mercredi 2 décembre 2009 à 03h05min

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François Kaboré, président du PDP/PS

Dans les lignes qui suivent, le président national du Parti pour la démocratie et le progrès/Parti socialiste (PDP/PS) donne son point de vue sur le développement du Burkina. Du surplace, estime François Kaboré.

1 - Le Burkina Faso, depuis deux décennies, est régulièrement classé parmi les cinq ou six derniers pays du monde dans le rapport mondial sur le développement humain du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). A chaque sortie annuelle de ce classement, des ministres de la IVe République montent au créneau pour tenter de contester le classement et prétendre que notre pays mérite un meilleur rang que celui publié.

Dans le dernier rapport du PNUD rendu public le 11 novembre 2009, le Burkina Faso y est encore classé 177e sur 182 pays. Malgré la pseudo-stabilité politique de notre pays, nous n’avançons pas ; nous faisons du « surplace », dans l’immobilisme qui caractérise la gouvernance globale du régime actuel. La stabilité paralysante du système de Blaise Compaoré et de son CDP n’incite aucun acteur économique au travail. En effet, - les agents publics égrainent leur temps à chercher où sont les failles du dispositif du système qui pourront leur permettre de détourner plus facilement et s’enrichir plus rapidement ;
- les acteurs du privé s’échinent à trouver parmi les barons du régime, des parrains et autres protecteurs pour pouvoir contourner impunément les dispositifs fiscaux en attendant de trouver l’occasion de servir de « prête-noms » pour la création de sociétés et entreprises bidons juste pour des attributions frauduleuses de juteux marchés en « gré à gré ».

Au lieu de chercher les raisons de notre situation économique stagnante au niveau de ces pratiques mafieuses et des mécanismes créés et entretenus depuis deux décennies, on tentera de justifier notre mauvais classement par l’utilisation d’indicateurs dépassés et qui sont ceux d’il y a deux ou trois années, et que sais-je encore. Mais à qui la faute si nos données ne sont pas à jour ? Les multiples sites Web ouverts dans les différents ministères et autres structures rattachées ont rarement des données à jour, et celles qui vous intéressent ne sont jamais sur les sites. Pourtant, des agents de la Fonction publique sont payés par le contribuable burkinabè pour ce travail de mise à jour des données ; mais ils ne le font pas « et il n’y a rien ». Tout le monde est préoccupé, chacun au poste où il se trouve, à chercher les voies et moyens les plus rapides pour s’enrichir, pour construire de grosses villas, pour s’acheter des véhicules de haut standing et surtout pour faire plaisir au « Patron », garant de la position de privilégiés des uns et des autres.

2 - Le Burkina Faso est pauvre, même très pauvre. En effet, au Burkina Faso : i- beaucoup d’enfants abandonnent l’école, le collège ou l’université parce que les parents ne peuvent plus les soutenir ; ii- beaucoup de personnes malades ne se donnent même plus la peine, faute de moyens, d’aller au dispensaire, au CSPS ou à l’hôpital parce qu’elles n’ont pas l’argent pour faire face à l’inévitable ordonnance médicale qui leur sera tendue par l’agent de santé, pourtant de bonne foi ; iii- des pères de familles n’ont plus les moyens pour faire face à leurs obligations essentielles de chef de famille : assurer le repas quotidien de la famille ; iv- la majorité des propriétaires des maisons, en banco de « Lanoag yiiri » et d’ailleurs, qui se sont écroulées suite aux pluies diluviennes du 1er septembre et des jours suivants, n’ont aucun espoir, avec ce régime, d’avoir un jour des logements sécurisés en matériaux définitifs ; ces matériaux étant inaccessibles pour eux.

C’est certainement pour ces raisons et bien d’autres que le Burkina Faso a été admis parmi les pays "PPTE" - Pays pauvres très endettés. Les populations burkinabè sont très sensibles à cette forme de solidarité internationale. Mais ce que les institutions internationales ignorent peut- être, c’est que dans leur grande majorité, ces hommes politiques qui dirigent le Burkina Faso actuellement, sont infiltrés dans le tissu économique du pays à travers des sociétés de service, de fournitures, de travaux publics et dans l’import / export où des monopoles sous des formes diverses sont exercés. Cette minorité ne vit pas les effets directs de cette lamentable situation nationale.

3- Plus grave, dans ce Burkina pauvre, classé parmi les derniers pays du monde en matière de développement humain, la pratique d’octroi des marchés selon la procédure du « gré à gré » semble se généraliser. En effet, la règle des marchés publics dispose que :
- le processus du marché gré à gré est appliqué pour un marché d’un montant inférieur à dix (10) millions de francs ;
- le montant d’un avenant à un marché ne peut excéder le tiers du montant du marché initial ;
- le marché attribué à la meilleure offre doit être exécuté dans le strict respect du cahier des charges et du délai d’exécution. Le principe cardinal de « l’appel à candidatures, ou appels d’offres » qui doit être observé pour les passations des marchés publics est totalement foulé au pied, et même piétiné "et il n’y a rien". Jugez-en plutôt (cf. le journal "L’Événement" n°175 du 10 novembre 2009 qui signale deux exemples illustratifs de la détestable procédure du "gré à gré") :

- Il s’agit d’abord du marché de la route en terre Banfora-Mangodara, longue d’une centaine de kilomètres, attribué de gré à gré à l’entreprise COGEB International S.A. pour un montant de un milliard quatre cent quatre-vingt-quinze millions quatre cent huit mille cent (1.495.408.100) francs – montant initial du marché et avenants ;

- Il s’agit aussi d’un autre marché de construction de sept (7) kilomètres de route bitumée qui va de l’entrée ouest de Ouagadougou, aux environs de Zagtouli, jusqu’au rond-point de la Bataille du rail, également attribué selon la procédure du gré à gré à l’entreprise SACBTP, (...) pour un montant de treize (13) milliards de francs CFA.

4 - Pourquoi toutes ces méthodes crapuleuses et au mépris de la loi ? Ce sont ces différentes pratiques dans notre pays, où les intérêts individuels et de clans sont défendus sans aucune morale et au mépris de l’intérêt national, qui font que le Burkina Faso n’avance pas, et même recule. En effet, il est indéniable et tout le monde l’atteste, que le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque de la fin des années 70/80. Les autres pays avancent, tandis que nous, nous reculons et dans l’indifférence de la minorité oligarchique qui dirige actuellement le pays et décrète que le Burkina va bientôt devenir un pays "émergent".

En désespoir de cause, la jeunesse sombre dans la drogue et la prostitution pendant que l’insécurité en ville et en campagne persiste. On force la jeunesse à se volontariser (cf. dernière présentation à la presse de plus de 800 jeunes se disant "volontaires") à la grande joie du ministre de la Jeunesse dont le premier souci n’est plus de garantir des emplois rémunérateurs à ces enfants, mais plutôt de les mettre à la disposition des autres ministères pour exploitation dans l’insécurité économique totale. Un nouveau genre d’esclavage pour nos propres enfants, sous nos yeux et par ceux-là même qui sont à la tête de notre pays depuis deux décennies, et qui garantissent une société de désespoir plutôt qu’une "société d’espérance", clamée à chaque campagne électorale à travers des promesses rarement tenues.

Les populations de la Boucle du Mouhoun, que nous soutenons, ont dernièrement exprimé leur consternation par rapport à la non réalisation des promesses de la campagne de 2005 ; alors que l’on s’achemine vers une autre campagne en 2010 qui sera encore riche de promesses. Les jeunes veulent du travail ; un travail qui responsabilise, qui libère et qui permet leur plein épanouissement. Il faut engager le Burkina sur la voie du travail pour tous, dans l’égalité de chances de tous les jeunes sur le marché du travail. C’est à ce seul prix que la position de notre pays changera, significativement, dans les classements annuels du PNUD. Le Burkinabè a besoin de mieux vivre, de mieux éduquer ses enfants, de mieux les soigner, de mieux les nourrir dans un cadre sécurisé en ville comme en campagne, et les institutions internationales ne pourront alors que constater les progrès accomplis par le peuple burkinabè, avec ou sans classement.

Ouagadougou, le 16 novembre 2009

KABORE O. François Président national

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 2 décembre 2009 à 11:04 En réponse à : PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

    Oui, Mr Kaboré, je suis d’accord avec vous que le pays est pauvre, très pauvre. Dès qu’on quitte Ouaga de 10 petits kilomètres, ça se voit:santé, éducation, économie, habitat, ressources naturelles,...tout est inquiétant, désolant. Ma mère, que je ramenais au village après un mois de séjour au centre de Ouaga, dès qu’on est arrivé à Tanghin-Dassouri disait ceci : "Yam-nèré, tu vois, dès qu’on arrive ici, la vie est finie". Hm !Mr Kaboré, elle a tout dit.
    Mais vous savez Mr Kaboré, ma mère a ajouté ceci de très important :"Yam-nèré, chez nous au village, les gens passent plus de temps à critiquer les riches qu’à cultiver leurs pauvres terres. Cela ne leur rendra jamais riches et jamais notre village ne ressemblera à Ouaga, même de peu". Vous voyez Mr Kaboré(je ne parle pas de l’homme mais du politique que vous êtes),depuis 20 ans, vous les opposants(les vrais comme les moins vrais), vous nous avez tout décrit : les roses que vous n’avez jamais eues, les épines qu’ont toujours eues les autres. Mais Grand frère, dites moi concrètement, ceux de mon âge (35 ans), que devons faire ? transporter les villas de Ouaga 2000 à Kokologo ? Aller aider nos parents à cultiver la terre ? Aller à l’aventure pour qu’on fasse nos finérailles sans voir nos corps sauf peut-être à la télé ? Mr Kaboré,comme disent les ivoiriens, "si tu ne peux pas m’aider, faut pas m’effrayer ou me décourager". Laissez moi vivre ma pauvre vie au lieu de me faire penser à une belle vie que je n’aurai jamais. Je ne suis pas pessimiste ; je suis réaliste, puisqu’avec vous on ne saurait être optimiste pour longtemps. "Bonne chance nous tous" !

    • Le 2 décembre 2009 à 14:15 En réponse à : PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

      je n’ai rien à rajouter !! Tu as tout dit mon frère !! C’est bien beau de critiquer mais on veut du concret !

    • Le 3 décembre 2009 à 13:42 En réponse à : PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

      Mon frère, je partage totalement votre vision de l’intérèt d’un tel écrit, qui taumatise puisqu’il n’éclaire le Burkinabè d’aujourd’hui. A mon avis la seule solution qui reste c’est l’aventure comme tant d’autres Burkinabè qui ont dépuis longtemps compris que leur salut n’était qu’ailleurs loin de leur terroir-mouroir,en préferant votre dernière recommandation qu’on fasse leur deuil à la télé ou dans la presse,comme Brahima Ouédraogo de l’ASEC qui vient de nous quitter( paix à son âme) tout dernièrement en Côte d’Ivoire.

      Ned Pa Toin Yé.

  • Le 2 décembre 2009 à 11:16, par bhagus En réponse à : PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

    merci pour avoir depint avec exactitude quelques derive de ce regime qui enfonce notre cher pays dans l’extreme pauvrete et ils ont le culot de dire que le burkina avance , le burkina ne se resume pas a ouaga 2000 c’est grand sur 274000 km2

  • Le 2 décembre 2009 à 15:21 En réponse à : PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

    Mr KABORE félicitations ça fait plaisir de lire des artciles de si grande qualités. Merci à la presse qui se fait vraiment le porte flambeau des sans voie, même si parfois elle sert certaines mauvaises causes.

  • Le 2 décembre 2009 à 22:49, par bogan En réponse à : PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

    Ca amuse vraiement quand les
    pensent que construire un echangeur
    c,est le pays est developer.
    Ca gait partie du developpemnet
    mais au Bf ils sont bcp qui pensent
    c,est deja acquis.Un echageur et on devant

  • Le 2 décembre 2009 à 23:10 En réponse à : PDP/PS : "Le Burkinabè de 2009 est plus pauvre que le Voltaïque"

    Helas ! comme vous avez tous raison ! Notre drame, c est surtout cette misere morale. Elle ne nous donne aucun espoir car meme ce que nous pouvons produire peut etre retiré par n importe quel quidam, par divers moyens. Y a t il une possibilité de transition intellectuelle pour nous sortir de cette societe de desepoir et eviter les aventures ?

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