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OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

Publié le mardi 17 novembre 2009 à 01h36min

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C’est un fait évident que ce sont les sinistrés des inondations du 1er septembre 2009 qui ont payé, ou qui vont payer à la place d’une administration laxiste, clientéliste, insouciante et prédatrice. Mais ce n’est pas tout. Il y a pire. Cette catastrophe survenue dans notre pays est une belle opportunité pour une catégorie de Burkinabè, des femmes et des hommes, pour s’enrichir sur le dos des sinistrés. Cette catégorie appartient à l’oligarchie politique et financière aux affaires dans ce pays. Dans les villages, un adage ne dit-il pas qu’il faut que la chèvre de quelqu’un meure pour que la sauce de son voisin soit bonne ? Ici, ce n’est pas une question de sauce ; c’est une question de « feuilles » comme des femmes et des hommes du Burkina Faso en raffolent. Il est question de comptes en banque et d’une juteuse occasion d’affaires.

Il y a longtemps que cette oligarchie convoitait les parcelles d’habitations qui sont situées le long des canaux d’évacuation des eaux de pluie et des barrages. C’est cette oligarchie qui s’était chaque fois opposée à ce que ceux qui s’y trouvent soient déguerpis. Elle les a de tout temps couverts. Elle les a même défendus en mettant en avant des textes circonstanciés. Depuis les lotissements à grande échelle et la spéculation éhontée qui en a résulté, la terre a acquis la valeur que l’on sait. La spéculation foncière dans les zones nouvellement loties en est une brillante explication. Dans les campagnes, la même oligarchie est sur le point de mettre en place des lois et une législation foncière qui lui permettront de s’accaparer des terres les plus fertiles et dans les zones les plus arrosées de notre pays.

Ces lois et cette législation foncière, il faut le dire, risquent dans un futur proche ou lointain, d’engendrer des conséquences dommageables pour notre société, son équilibre et sa tranquillité, surtout en milieu rural. Les propriétaires du foncier rural n’accepteront pas longtemps de se voir réduits à demander aux nouveaux propriétaires des lopins de terre pour exploiter ou pour habiter. Dans tous les pays du monde et tout au long de l’histoire des hommes, les injustices sur le foncier ou la confiscation des terres par une minorité ont été réparées dans la douleur. Les nouveaux propriétaires, munis de leurs documents les brandiront pour défendre leurs droits de propriété devant la justice. Malheureusement, des drames se produisent avant qu’on en arrive là. Les coutumiers du foncier rural qui refuseront d’être employés comme ouvriers champêtres sur « la terre de leurs ancêtres » dans les plantations des agrobusinessmen viendront grossir les populations des quartiers spontanés de Bobo-Dioulasso ou de Ouagadougou ou encore d’autres centres urbains d’importance secondaire. D’autres préfèreront le chemin de l’immigration, en Côte d’Ivoire notamment, n’ayant pas les moyens pour tenter l’aventure européenne ou celle d’ailleurs.

Pour l’oligarchie dont il a été question ci-dessus, la solution pour s’approprier les campagnes où elle dispose de faziendas est trouvée. Reste les villes, notamment la capitale dont le si bon maire Simon Compaoré, avec la justesse des réflexions qu’on lui reconnaît a dit qu’elle (la ville) n’est pas faite pour tout le monde. Il disait en substance que les pauvres, ceux qui n’avaient pas les moyens pour faire face aux impératifs de la vie dans une grande ville, doivent plier bagages et retourner dans leurs patelins. Beaucoup n’ont pas pris au sérieux ces propos prémonitoires du maire Simon ; on a oublié ou minimisé ses mises en demeure. Les inondations du 1er septembre dernier ont révélé la justesse des propos du maire dans toute leur cruauté. Tous ceux qui ont refusé de suivre son conseil vont le faire maintenant et de force. Ils y sont contraints.

Les inondations de septembre dernier sont venues comme du pain béni pour tous ceux et toutes celles qui convoitaient les maisons de ces "gueux" qu’on s’empresse de déguerpir, de leur donner un lopin de terre pour qu’ils y construisent et recommencent une nouvelle vie, sans autre transition que leur séjour sous les tentes dressées pour sinistrés et sans délai. Le 30 novembre prochain, chacun doit avoir fini de construire, avoir emménagé dans sa nouvelle habitation et sur sa nouvelle parcelle ou avoir trouvé où aller. Quelle hâte ! Les épidémies qui sont réelles en cette période de l’année et que l’on redoute tant sont-elles les seules justifications de cette précipitation, voire de cet empressement ? Combien de sinistrés à reloger ont reçu à ce jour l’enveloppe de deux cent quatre vingt mille (280 000) F CFA, les tôles et tout ce qui leur a été promis ? Ont-ils même la parcelle où bâtir ? Entre nous et le Seigneur, quel est le temps nécessaire pour faire une bonne fondation si l’on veut bâtir une maison qui résiste à la catastrophe que l’on a vécue le 1er septembre dernier ?

Pour une bouchée de pain, les membres de cette "race d’élus" du Burkina vont s’approprier toutes les places qui bordaient les canaux d’évacuation et les zones loties inondables ou non à condition de respecter un cahier des charges pour les nouvelles constructions. Tout le monde sait qu’ils en ont les moyens. La hâte et l’allure des opérations de démolition montrent que quelque part, il y a des gens pressés, voire même impatients d’en finir avec, histoire de se donner bonne conscience. On peut aussi soupçonner une impatience de servir et de servir bien. On ne parle plus de honte quand il est question de se remplir les poches dans notre pays. La détresse des uns a toujours été à l’origine de la prospérité des autres. Dans les diverses déclarations, il n’a jamais été question de dédommagements. Ce sont les sinistrés qui doivent tout assumer. Pourtant, les parcelles sur lesquelles les eaux les ont trouvés leur avaient été bien attribuées par les services du cadastre. Ces derniers ignoraient-ils que les zones où ils les installaient étaient des zones à risques ? L’empressement avec lequel les pouvoirs publics veulent en finir avec les sinistrés cache un malaise. Ce malaise s’explique par le fait que des personnes ont une part de responsabilité dans la situation des sinistrés.

Mais peu importe. Ce qui importe pour elles, c’est que cette situation est en soi une aubaine. Une opportunité d’affaires. Même si l’on laisse de côté les « je retiens » que font les uns et les autres dans l’achat du nécessaire pour entretenir les sinistrés ; si l’on omet les retenues opérées sur les denrées destinées aux sinistrés ; si l’on juge pour quantités négligeables les coups bas qui s’opèrent lors des distributions de vivres et de denrées, on ne peut pas s’empêcher de dire que la catastrophe provoquée par la pluie diluvienne du 1er septembre est une occasion d’enrichissement pour certaines personnes au détriment de gens plus démunis qu’elles-mêmes. Et après !

Sidzabda

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 17 novembre 2009 à 09:22 En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    franchement quand on a rien à dire souvent il faut tout simplement se taire. ce papier ne dit rien de cohérent sinon l’expression d’un journaliste en mal d’inspiration. l’on se rapelle que dans les colonnes du même journal Le Pays, les autorités ont expliqué les fondements de cette opération de démolition et leur vision pour l’aménagement de ces zones. votre journal avait titré le nouveau ouaga 2000 oû le ministre DABILGOU parlait de couloir écologique.
    la phobi de la page blanche est bien connue de tout ouvrier de la plume ! alors quand on a un sujet du genre, prenons tout de même le temps de lire ce qui a été dit sur le sujet. c’est une demarche qui evite d’exposer des platitudes du genre.
    c’est même curieux de voir un tel torchon dans Le Pays.
    je m’exprime pour le respect dû au metier de journaliste car il ya des papiers qui ternissent l’image.

    • Le 17 novembre 2009 à 11:00, par ORAN En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

      Attention à ne pas confondre le discours officiel d’avec la réalité bien cachée (pour le moment). Les propos du Journal ne devrait t’offusquer tant surtout quand on n’a pas d’éléments pour les remettre en cause. La naïveté a des vertus mais pas toujours.

    • Le 17 novembre 2009 à 14:41, par Jeune Burkinabè Indigné En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

      Quelle intervention odieuse de ta part ! Si on cherche bien, tu es surement un de ces monstres qui profite actuellement ou cherche à profiter de la situation de ces gens malheureux. Je suis d’accord pour la vision d’aménagement de ces zones mais avant il faut dédomager les victimes à la hauteur de leur dû.

      Très bon article Mr. Le Journaliste, Félicitations.

  • Le 17 novembre 2009 à 10:04, par burkinabè En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    où allons nous dans ce pays ?

  • Le 17 novembre 2009 à 10:12 En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    Excellent article. Ainsi va la vie. Katrina a permis aux à l’enseignement privé à la Nouvelle Orléans d’éradiquer l’enseignement public dont les locaux dévastés n’ont pu être reconstruits à temps. Le tsunami, à l’image d’un bulldozer géant, a détruit des villages des pauvres pêcheurs en Asie du sud. Les promoteurs des luxurieuses stations balnéaires n’ont pas perdu une seule seconde pour s’y implanter.

  • Le 17 novembre 2009 à 13:32, par SID YA SIDA En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    je n’ose pas croire qu’on déguerpi les pauvres pour installer des riches. Je croyais que les communes (l’état )allaient aménager ces terrains pour construire des édifices publics et que sais-je encore qui profiteront à tous les burkinabè. Ayez un peu pitié de nous autres. Dire que nous allons rencontrer nos parents qui vont perdre leur terrain et venir vers la ville se faire employer pendant que nous perdons nos parcelles et fuyons vers nos villages pour aller mourrir de fain, de maladie.....pitié

  • Le 17 novembre 2009 à 14:15 En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    L’explication du journal est véridique. Il faut voire entre les discours politiques et la réalité. D’ici le 30 Novrembre, on ne pourra pas dégager des parcelles viabilisées et les attributaires n’aurons pas fini de construire.
    Aussi, il ya une zone en bordure du canal après la MACO et s’ettend de Dassasgo Wayalguin en Passant par la Zone du bois. Pourquoi cette zone où poussent les grandes maisons ne fait pas partie. Elle est bien inondable et repond à la distance de 50 mètres pour certaines maisons. Une partie qui n’étais pas lotis au départ s’est vu partagée entre des élites en parcelle de grande superficie.
    Il faut avoir des yeux fermés ou étouffée par le beurre de corruption pour croire à ce discours !

    • Le 18 novembre 2009 à 18:28 En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

      Si c’est le cas, soit l’état prend le même bulldozer et les démolit ou alors, je demande aux déguerpis de se cotiser pour louer un bull et les démolir pour faire respecter la loi que l’état ne peut faire !
      Il ne peut y avoir 2 poids 2 mesures dans ce pays d’hommes (dés)intégrés selon que vous êtes pauvres ou riches. Ces richards, demain, s’il y a inondations se feront indemnisés car ont les moyens de s’assurer auprès des Colina et autres.
      Plus sérieusement, reconvertissez toutes ces zones en jardins bio, zones de reboisement et allées pour se promener et reposer. Au moins, le citoyen lambda pourra respirer et marcher tranquillement sans respirer les gaz d’échappement. De plus, les citoyens pourront aller dans les jardins acheter de bons légumes sains et non dopés d’engrais et autres pesticides qui nous tuent à petit feu avec cancer, hypertension, diabète... A bon entendeur salut !

  • Le 17 novembre 2009 à 14:18 En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    C’est vraiment attristant et à la fois décevant de savoir que des burkinabès, des hommes qui se disent intègres, soient aussi cruels et bafouent autant la dignité humaine. Pauvres de nous qui n’avons pas eu la chance de naître sous une étoile. Et que Dieu aie pitié de cette oligarchie car elle ne sait vraiment pas ce qu’elle fait !

  • Le 17 novembre 2009 à 21:42, par defontaine En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    qu’elle tristesse partout dans le monde

  • Le 19 novembre 2009 à 09:33 En réponse à : OPERATION DE DEMOLITION : Un empressement qui cache un malaise

    Un article qui aurait gagné à être mieux documenté.
    Il aurait permis d’attirer notre attention sur cette affaire très sombre et inciter à la réflexion.
    Merci de nous donner l’information, mais faites le avec le maximum de professionalisme surtout lorsqu’il s’agit de sujets aussi importants.
    Bon courage au journaliste qui a été écrit cet article.

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