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Réflexion de Ibrahiman Sakandé : Boromo, 15 novembre 2008 !

Publié le lundi 16 novembre 2009 à 00h51min

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Ibrahiman Sakandé

15 Novembre 2008… Cette date, associée au nom de la ville de Boromo, rime avec drame, douleur, pleurs, désarroi... Prolongeant le deuil national qui eut lieu cette année là, nous gardons ça et là, la minute de silence en souvenir de nos morts. Une fois encore, les Editions Sidwaya présentent leurs sincères condoléances à toutes les personnes et familles éplorées. Ce souvenir douloureux pose, avec acuité, la question non moins douloureuse de la sécurité des personnes et des biens, en rapport avec le comportement quotidien de tous et de chacun sur nos routes.

Les conditions de vie des Burkinabé, petit à petit, se modernisent : les transports et moyens de transports sont de plus en plus compétitifs dans une vision globale de la sous-région ; le temps est de mieux en mieux géré, car tout le monde a appris à traduire l’adage anglais "time is money" en sa propre langue ; ou plus justement dans le langage de ses intérêts. Ainsi, les palabres et causeries, jadis sans fin, deviennent de plus en plus raisonnables en termes d’emploi du temps.

De même, nos autoroutes et échangeurs, la tenue plus exigeante de la propreté des villes, la mise en œuvre des différentes ramifications de la décentralisation, …viennent inscrire dans nos mentalités et comportements, des modes et modalités inédites.
La leçon est simple : on ne peut plus vivre comme avant. A l’école primaire nous chantions : “cocorico kân-qelle, yâmb n baody toogo, la toog tar yâ” (cocorico, œuf de pintade, vous chercher la douleur et la douleur vous a (traduction litérale). Disons : nous cherchons la modernisation et nous y sommes. Il nous reste à en payer le prix, parfois en monnaie de discorde. De Boromo, l’autorité a compris, par exemple, qu’il fallait « moderniser » l’esprit des transporteurs en leur faisant mesurer par eux-mêmes la gravité d’un geste banal, comme celui de garer un véhicule au bord de la route.

Ce faisant, un pas a été fait vers la sauvegarde solidaire de notre sécurité. Selon notre manière de voir, d’autres décisions de ce genre devraient encore être prises pour conforter nos acquis et continuer dans la modernisation de l’espace social burkinabé. Parmi ces décisions, nous osons citer : le recadrage de la prolifération des mobylettes. Pas seulement le fait que l’usage de la mobylette au Burkina, n’exige pas de précautions, mais parce que la prolifération des deux-roues inquiète.
La question est récurrente. Elle le sera encore pour quelques décennies. Mais il faudra bien qu’un jour les Burkinabé résolvent ce problème, leur problème, notre problème à tous (…), dans le sens d’une plus grande sécurité collective pour un moindre malaise individuel.

S’il y a une chose que celui qui écrit ces lignes possède vraiment, c’est bien une mobylette. Mais voici un second grief contre cet engin : la mobylette ne met pas seulement notre sécurité collective en péril, elle est le facteur numéro un (1) de la culture de l’individualisme. Symbole de l’autonomie et de la liberté de la jeune fille et du jeune garçon, la mobylette permet de « démarrer » à tout moment ; avec ou sans permission. Et de traverser toute une ville en la transperçant, pas de bonjour tonton ou tanti…. On « djafoule » ceux qui pensent que c’est en roulant doucement qu’ils arrivent plus sûrement chez eux ; on « djafoule » le copain policier qui reste là, le sifflet à la bouche ; on « djafoule » les bambins qui traversent la voie, même quand ils s’agrippent les uns aux autres pour se sentir plus forts. Et malheureusement, la surprise et le malheur n’étant jamais loin, il arrive aux sapeurs pompiers de « djafouler » pour sauver ce qui peut l’être.

Dans les pays ou le transport en commun est développé, personne ne “démarre" comme il veut et quand il veut. Il ya des heures communes à partager et à respecter, les heures de départ et de retour par exemple. Dans le bus ou le métro, même quand on n’est pas décidé à dire bonjour à son voisin, on tient au moins compte de sa présence. L’espace social fonctionne avec une culture de courtoisie utile à chacun et à tous. Par bravade ou par coquetterie, nous disons que les utilisateurs des transports en commun sont égoïstes et que nous, depuis que le monde est monde, nous sommes solidaires.

N’ya t-il pas lieu aujourd’hui d’anticiper sur le mal de l’égoïsme qui nous arrive à mobylette, en cherchant d’autres solutions pour améliorer le système du transport urbain au Burkina Faso ?
Il n’y a pas que la mobylette qui menace notre sécurité au Burkina. Il y a aussi le banditisme, la drogue, l’alcool frelaté ( ! ), la prostitution, la délinquance, les restaurants par terre, les faiseurs d’argent, la piraterie des œuvres de l’esprit. Au- dessus de ces maux et les couvrant tous, il y a la pauvreté, l’ignorance et la corruption.
Notre souhait est que, pendant et surtout après ces minutes de silence que nous avons observées cette année en souvenir de l’accident de Boromo et pendant que notre mémoire collective saigne encore de tant de négligences, nous puissions méditer sur ces facteurs multiformes de notre insécurité.

Par Ibrahiman SAKANDE (sakandeibrahiman@yahoo.fr)

Sidwaya

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