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Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

Publié le mardi 13 octobre 2009 à 05h57min

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Partira, partira pas ? La junte militaire en place à Conakry depuis décembre 2008 semble n’avoir cure des injonctions et autres lancées contre elle. Depuis le 28 septembre de l’horreur, elle a fait l’unanimité contre son pouvoir et, surtout, contre sa capacité à gérer l’Etat guinéen et à mener la transition politique à bon port…

A Abuja, la capitale fédérale du Nigeria, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) tente de tirer les leçons du « lundi noir » qui a fait plus de 150 morts en Guinée. Un tournant dans la marche de la junte militaire qui s’est emparée du pouvoir, là-bas, à Conakry, quelques minutes après le décès du président Lansana Conté. Adoptés par les populations, adulés par les foules, applaudis par l’ensemble de la classe politique, les militaires avaient alors le vent en poupe, et tenaient ce discours charmeur et engageant qui sait si bien marier le réalisme politique du moment et les recettes démocratiques attendues par la communauté internationale. Ils sont tellement bien pris que le show démocratique devant conduire à l’instauration d’un véritable Etat de droit, suite à des élections apaisées et transparentes, est devenu un très médiatique « Dadis show », sorte de talk-show qui faisait monter l’adrénaline.

Mais un jour, tout bascula. La tolérance a déserté le forum et les « bérets rouge » ont sauvagement chargé la foule de contestataires, rassemblés au mythique Stade du 28-Septembre pour dire « Non » à une quelconque candidature de Moussa Dadis Camara à l’élection présidentielle, finalement fixée au 31 janvier 2010. A l’arrivée, plus de 150 morts – même si le pouvoir militaire n’en reconnaît que 57 – et de nombreuses victimes de viols et d’actes de barbarie. En rupture de ban avec la population qu’elle est censée défendre, la junte au pouvoir s’est ainsi totalement disqualifiée pour porter, à nouveau, l’espoir le plus ténu d’un redressement démocratique dans ce pays. L’appel au « dialogue politique », conduit par le président du Faso, Blaise Compaoré, le facilitateur désigné par la CEDEAO, a-t-il, dès lors, des chances de succès, lorsque, aussi bien à l’intérieur de la Guinée qu’à l’extérieur, de plus en plus de doigts désignent la sortie à la bande à Dadis ?

La CEDEAO, justement, qui réclame maintenant, elle aussi, une enquête internationale, semble avoir pris la mesure de l’unanime réprobation qui a sanctionné la tuerie du 28 septembre 2009. Mieux, le président de la commission de l’institution régionale, Mohamed Ibn Chambas, ne prend plus de gants pour dénoncer une militarisation de la Guinée caractérisée, selon lui, par « l’usage arbitraire et irresponsable du pouvoir pour réprimer la population ». Et c’est sans conteste du bon grain qu’il apporte au moulin de tous ceux qui exigent le départ des militaires, lorsqu’il affirme : « Si cette junte passe en force, elle va imposer une nouvelle dictature. La CEDEAO et la communauté internationale sont aux côtés du peuple guinéen. »

Alors, la messe est-elle dite ? Rien n’est moins sûr. Pour l’heure – en tout cas, au moment où j’écris ces lignes - on ne sait pas encore ce qu’il advient de la médiation confiée au chef de l’Etat burkinabè. Sans compter que, forcée à lâcher un pouvoir dont elle s’est accaparée avec les vivats de la foule, la junte n’aura certainement pas l’élégance d’emprunter gentiment la porte que lui ouvre l’opposition politique nationale guinéenne et la communauté internationale. Dans cette tension désormais intenable, où l’épreuve de force reste permanente, quelle place réserver désormais à la négociation et au compromis, pour sortir la Guinée de cette infernale parenthèse de sang ?

Serge mathias Tomondji

Fasozine

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Vos commentaires

  • Le 13 octobre 2009 à 09:36, par Paris Rawa En réponse à : Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

    "Dans cette tension désormais intenable, où l’épreuve de force reste permanente, quelle place réserver désormais à la négociation et au compromis, pour sortir la Guinée de cette infernale parenthèse de sang ?"

    Je n’aime pas cette conclusion qui laisse entendre que le massacre de plus 150 personnes serait une simple parenthèse de sang qui, en tant que telle, est appelée à être fermée pour laisser les choses se poursuivre dans la logique qui a précédée son ouverture. Il faut qu’en Afrique on apprenne à accorder du prix à chaque vie humaine, même dans les discours et les écrits journalistiques.

    Par ailleurs, il n’y a pas lieu de penser à "la négociation et au compromis" avec ou en faveur des criminels qui ont tiré sur la foule. Tout dialogue avec les responsables politiques de cette situation ne doit avoir pour autre but que l’arrestation et la comparution en justice des criminels, puis le retour des vrais militaires dans leurs casernes avec la discipline qui convient.

    On ne peut pas demander indéfiniment aux peuples et aux citoyens africains d’accepter l’indéfendable au prix de leurs vies et de l’avenir des nations ! Nous ne sommes pas des sous-hommes et il y a un moment pour dire NON NON et NON !

  • Le 13 octobre 2009 à 09:59, par Kôrô Yamyélé En réponse à : Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

    C’est vrai, il m’est arrivé de supporter DADIS. Mais depuis que je l’ai vu se faire filmer dans son lit à l’intérieur de sa chambre, et il affirmait tout de go : ’’Je suis le père de la Nation...’’, j’ai déchanté et j’ai conclu que ce monsieur est fou ou psychopathe. Il faut le faire partir en effet car il ne donne pas l’image d’un président sérieux.

    Pour autant les leaders de l’opposition ne valent pas mieux. Il faut que le premier ministre actuel se détermine et presse le pouvoir car aucun des leaders de l’opposition de Guinée n’est crédible à mon avis. Il y en a même qui sont très hyppocrites parmi eux (je pense à tous ceux qui ont défilé à Paris, devant les cameras de AFRICA 24 pour semer la zizanie, etc.). Les guinéens, s’ils sont honnêtes, ne doivent pas voter ces gens-là car comme dit la chanson, avec ces opposants actuels, les guinéens vont ’’sortir des fécès pour entrer dans l’anus’’.

    Par Kôrô Yamyélé

  • Le 13 octobre 2009 à 10:33, par negro sapien En réponse à : Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

    je suis vraiment navré pour les victimes mais une opposition inconsciente + une JUNTE militaire = beaucoup de morts.
    Ce n’est pas parce que les militaires ont pris le pouvoir sans effusion de sang qu’ils n’en demeurent pas moins des putchistes !!!!

  • Le 13 octobre 2009 à 16:34, par kindo En réponse à : Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

    une analyse sombre et pertinente. kindo

  • Le 13 octobre 2009 à 16:45, par kindo En réponse à : Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

    erreur de frappe.
    une analyse sobre et pertinente.kindo

  • Le 13 octobre 2009 à 17:01 En réponse à : Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

    La communauté internationale y compris la CEDEAO est disqualifiée pour exiger quoi ce soit à la junte au pouvoir en Guinée. Pourquoi ?
    Parce ce qu’elle a été toujours complaisante vis à vis des pouvoirs autoritaires et elle a très souvent de façon explicite ou implicite aider des pouvoirs non agréés par les populations à s’installer.
    Rappelons-nous de la manière dont Faure Gnassimbé, fils de feu Président Eyadéma Gnassimbé a pris le pouvoir au Togo. C’était un véritable coup de force accompagnée par la même communauté internationale. Rappelons également de la répression meurtrière qui a suivi les élections présidentielles au Togo en 2005 : pas de détails, environs 400 personnes tuées suites à des manifestations post électorales. Alors qu’est ce qui s’est passé ? RIEN !!! Faure continue de "dîner" son pouvoir !
    Rappelons-nous aussi du Niger où tout récemment, le Président Tandja a dissout toutes les institutions démocratiques qui étaient contre son vœux de demeurer éternellement au pouvoir, et faire voter dans l’illégalité la plus totale une nouvelle constitution qui lui garantisse un mandant exceptionnel et des pouvoirs exceptionnels et tout cela avec la négligence et la complaisance de la soit disante communauté internationale.
    Rappelons-nous du cas Gabonais ou le pouvoir s’est transmis de père en fils en essayant d’y mettre la manière mais personne n’est dupe.
    Comment voulez-vous que dans ce contexte, le capitaine Dadis Camara prenne au sérieux les gesticulations de la CEDEAO ? Au contraire, il sait qu’il ne se passera rien en fin de course. Parce la CEDEAO s’est à maintes reprises discrédité.
    A mon avis, il faut mettre en place un mécanisme de prévention des crises dans nos pays et ne pas laisser le ver rentré dans le fruit et vouloir l’extirper. Il faut s’attaquer aux causes des conflits internes et sans état d’âme. Refuser les modifications tout azimut des constitutions pour s’éterniser au pouvoir. Refuser qu’on massacre les populations pour avoir exprimer leur ras-le-bol des pouvoirs qui les fatiguent. Casser le lobby des chefs d’État qui se soutiennent vaille que vaille.

    M. WEDONGO FAUXON

  • Le 13 octobre 2009 à 20:19, par Idrissou Honoré En réponse à : Quel scénario de sortie de crise pour la Guinée ?

    Le problème guinéen doit être traité sans émotion même si nous déplorons des morts ce que nous regrettons tous.
    Je regrette que ça et là des voix s’élèvent pas pour construire mais pour aggraver la situation.
    La CEDEAO doit être conséquente avec elle même. Vous avez confié la facilitation à un homme d’expérience et avant qu’il ne commence à proprement parlé cette médiation, vous commencez à disqualifiez une des parties de la future table ronde. Jusqu’à demain je trouve inconséquent de dire au militaire de quitter le pouvoir par injonction. Pour le moment, ce sont eux qui ont pris le pouvoir et ce sont eux qui ont les armes. Il me semble que ç’eut été bon de laisser le facilitateur essayer de trouver une solution à l’africaine, car chaque fois que la communauté a voulu lancer les menaces elle a perdu la bataille. Je ne veux pour preuve que le Mauritanien. D’ailleurs, messieurs de la CEDEAO nous voulons bien vous respecter mais nous ne pouvons pas comprendre que vous gardiez un silence devant les divagations de TANDJA QUI NE vaut pas mieux que DADIS ;
    Il est entrain de tuer la démocratie en instaurant une dictature avec la complicité de ceux qui aiment élever la voix pour imposer la démocratie.
    En tout cas je trouve qu’il faut dialoguer avec les militaires et les convaincre à ne pas se présenter aux élections et il faudrait aussi trouver une formule pour que les leaders qui ont vendu la Guinée à l’extérieur à travers ses richesses ne viennent pas aussi au pouvoir. Il serait injuste de ne pas voir ce que le régime militaire a fait en peu de temps dans le cadre de la lutte contre la drogue, le régionalisme etc...
    Il ne faut pas dire à junte de partir puis que vous n’obtiendrez pas cela et vous allez créer un durcissement au détriment des guinéens que vous voulez protegez.
    A mon avis il faut encourager, soutenir le facilitateur au lieu de faire des déclarations qui vont rendre difficile cette facilitation. En tout cas nous avons foi en Compaoré Blaise qui a fait ses preuves à travers l’accord de Ouagadougou par rapport aux échecs de la communauté internationale qui n’a pas pu faire appliquer quoi que ce soit à Gbagbo.
    Je n’aime pas pariculièrement DADIS mais je crois qu’il ne faut pas faire des déclaration démagogiques au sujet du départ de la junte.
    Les opposants ne doivent pas recevoir la commmunion sans confession, car, ils savent que l’armée est désorganisée et ils organisent une marche pour laquelle l’autorisation qa été refusée ; Ils sont co-responsables de ce qui est arrivé. Si l’on dit à la junte de partir cela veut dire qu’on a pris partie pour les opposants et on se demande avec qui ils vont dialoguer. Je suis pour un diague de toutes les parties et que du dialogue on arrive à persuadé les militaires qu’ils doivent retourner dans l’honneur à la caserne. Tous les militaires ne sont pas d’accord avec le carnage que nous déplorons mais de grâce soyons réalistes.

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