LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

SYNDICATS : Le SNEAB souffle ses 60 bougies

Publié le mardi 13 octobre 2009 à 05h57min

PARTAGER :                          

Le 12 octobre dernier marquait le 60e anniversaire du SNEAB. A cette occasion, son secrétaire général fait ici un rappel du long parcours de ce syndicat, de 1949 à nos jours.

"Aujourd’hui 12 octobre 2009, le Syndicat national des enseignants africains du Burkina (SNEA-B) souffle ses 60 bougies. Cet anniversaire nous donne l’occasion pour rendre hommage à tous ceux qui sont tombés sur le champ de bataille jusqu’à nos jours.

Pour mémoire, c’est le 12 octobre 1949 qu’un groupe d’enseignants, face aux multiples brimades de l’administration coloniale sur les personnels africains et profitant du décret du 12 juillet 1939 accordant le droit syndical aux sujets indigènes français titulaires du certificat d’études primaires, décidait de la création du Syndicat des personnels enseignants africains de Haute Volta (SPEA-HV). Le Camarade Bertrand Benon est porté à la tête de ce jeune syndicat qui ne prendra véritablement son essor qu’à partir de 1953. "Les luttes de ces premières heures portaient essentiellement sur la défense des droits syndicaux et de la dignité de l’enseignant noir des colonies face à la férule de l’administration coloniale", nous confiait le patriarche Benon le 30 octobre 1999 lors d’une visite de courtoisie du bureau national à son domicile à Gao dans le Ziro.

Tous les fonctionnaires de l’AOF relevant au plan salarial du gouvernement général de cet espace dont le siège était à Dakar, il n’était pas question pour un syndicat autonome de formuler de revendications salariales, cette prérogative revenant exclusivement aux fédérations syndicales telles que l’Union générale des travailleurs d’Afrique noire (UGTAN) et à la Fédération des enseignants d’Afrique noire (FEAN) dont notre syndicat était membre. Le 1er congrès eut lieu en 1955. Au 9e congrès tenu à Bobo Dioulasso en 1963, l’appellation SPEA-HV est abandonnée au profit du SNEA-HV et Ali Lankouandé est élu secrétaire général.

De 1949 à nos jours, 15 secrétaires généraux ont présidé aux destinées de notre organisation. Feu Benon Bertrand : 1949-1953 - Feu Tibo Bernard Ouédraogo : 1953-1958
- Jean André Diallo : 1958-1959
- Feu Zoumana Traoré : 1959-1961
- Feu Triande Toumani : 1960-1961
- Feu Lambert Ouédraogo : 1961-1963
- Ali Lankouandé : 1963-1968
- Ibrahim Sanogo : 1968-1969
- Albert Somda : 1970-1971
- Feu Sié Léopold Kambiré : 1969-1970 / 1972-1974
- Baba Hamidou Ouédraogo : 1975 – 1983
- Victor Flatié Sanfo : 1984 – 1989
- Feu Jean BILA : 1990 – 1993
- Alfred Sawadogo : 1993 – 2000
- Jean Kafando : 2000 – à nos jours

Camarades militantes et militants, sympathisantes et sympathisants, collègues enseignantes et enseignants, Le 12 octobre 1999, notre organisation fêtait son jubilé d’or placé sous le signe de la fidélité :
- fidélité aux engagements et aux serments des aînés ;
- fidélité aux martyrs du SNEA-B ;
- fidélité aux objectifs et aux ambitions de notre organisation. En attendant le jubilé de diamant, votre bureau national a placé cet anniversaire sous le signe de la constance :
- constance dans la ligne idéologique ;
- constance dans la promotion de la démocratie ;
- constance dans le combat et la lutte qui paie. Il lance un appel vibrant aux militantes et militants à plus d’ardeur au travail et à plus de tranchant dans la lutte car après le devoir accompli, on peut légitimement réclamer les droits. En 60 ans de lutte, notre organisation est incontestablement la structure qui a le plus œuvré pour le bien-être des travailleurs de l’éducation et la restauration de la dignité de l’enseignant burkinabè. A coup de grèves, de procès, de négociations, les différents bureaux nationaux ont fait valoir vos droits. A titre d’exemple, voici la teneur de la lettre du ministre de l’éducation nationale adressée au SNEA-B le 15 juillet 1974


"LETTRE AU S.N.E.A.H.V

Ouagadougou, le 15 juillet 1974

Monsieur le Ministre de l’Education nationale A Monsieur le Secrétaire Général du Syndicat National des Enseignants Africains de Haute-Volta
- OUAGADOUGOU-

Monsieur le Secrétaire Général,

J’ai l’honneur de vous faire connaître que le conseil des Ministres en sa séance du 3 juillet 1974, a bien voulu examiner dans leur ensemble les revendications du corps enseignant. Il a arrêté les mesures suivantes concernant le personnel du 1er degré : 1. gratuité de logement pour les maîtres en service en dehors des chefs –lieux des sous –préfectures et des communes. 1126 enseignants servant dans ces conditions bénéficieront donc de cette gratuité. Des mesures seront prises pour qu’avant le 31 décembre 1975, les 598 autres maîtres servant dans les mêmes conditions soient décemment logés. 2. Les enseignants en service dans les chefs –lieux des sous-préfectures et les communes, actuellement logés verseront mensuellement une participation forfaitaire de 200 francs par chambre à coucher, avec un plafond de 1000 francs. Les maîtres servant dans ces localités qui ne sont pas logés percevront une indemnité compensatrice mensuelle de 2000 francs pour compter du 1er janvier 1975. 3.

Les inspecteurs de l’enseignement primaire logés sur leur lieu de travail verseront une participation mensuelle de 1000 francs par chambre à coucher, en remplacement de la retenue de 10% sur leur traitement précédemment prévu par décret. 4. Au principe "une classe un logement" qui est très souvent contourné, le gouvernement a préféré retenir le principe : "le logement avant la classe" et a demandé au Ministre de l’Education nationale de veiller à son application dès la prochaine rentrée scolaire. Il a également reconnu le droit au logement pour les enseignants du premier degré que les jeunes professeurs débutants (jusqu’à trois ans) 5. Les problèmes du reclassement des professeurs de C.E.G des P.T.A, des maîtres d’éducation rurale et celui de l’avancement automatique seront réexaminés dans le cadre de la révision du statut général de la fonction publique et de celles de tous les statuts particuliers des autres corps de l’Etat. 6. Le gouvernement a retenu le principe de la création d’un corps d’inspecteurs principaux de l’enseignement du second degré. Ces inspecteurs seront nommés après inscription sur une liste d’aptitude établie sur la base des critères suivants :
- critère universitaire : licence d’enseignement plus, soit l’agrégation, soit le CAPES, soit le CAPET, soit le CAIP.
- critère d’ancienneté : 15 ans d’enseignement effectif dans le second degré avec une interruption n’excédant pas 5 ans.

L’ensemble de ces mesures sera précisé dans des décrets ultérieurs 7. Enfin je profite de l’occasion qui m’est offerte pour vous signaler que satisfaction partielle - en attendant de pouvoir faire mieux – a été donnée à votre motion sur le pécule des boursiers externes du secondaire et la bourse d’études des étudiants de l’université de Ouagadougou. En effet, pour compter du 1er avril 1974, le taux du pécule a été porté de 3 000 à 4 000 francs et celui de la bourse de 22 500 à 24 000. A compter du 1er janvier 1975, ces taux seront portés à 5 000 francs pour le premier et 24500 pour le second.

Ces mesures constituent à mes yeux un début de solution aux nombreux problèmes de l’école et des enseignants voltaïques. Je vous prie de croire, monsieur le secrétaire général, à l’assurance de ma considération distinguée. Le Ministre Ali LANKOUANDE"

Rappelons également qu’en 1995, le SNEA-B a intenté un procès contre l’Etat burkinabè sur la réouverture du concours A’ de l’ENAM ; procès qu’il a remporté devant la chambre administrative de la Cours suprême. Camarades militantes et militants, Outre les victoires remportées, notre organisation a aussi connu des moments de répression sous les différents régimes dont le summum a été atteint sous la révolution

- du 9 au 13 mars 1984, arrestation de 4 responsables du SNEAHV : Koné Batiémogo ; Sib Joachim ; Bila Jean ; Kindo Ousmane Ismaël.
- 21-22 mars 1984, grève de 48h et licenciement de 2600 enseignants
- Le 10 novembre 1984, le CNR notifie au bureau du SNEAHV qu’il n’a plus le droit d’existence en tant que syndicat. Nous réitérons nos remerciements aux centrales syndicales : ONSL ; CNTB ; USTB, CSB, les autorités religieuses, l’empereur des Mossé, le BIT, pour le soutien inestimable qu’ils ont témoigné à notre organisation dans ces moments difficiles.

Malgré ces coups durs, le SNEAB, par son dynamisme et son rayonnement a su se faire respecter et même craint. C’est cette peur et la volonté de liquider un syndicat trop puissant qui a poussé au licenciement de tant d’enseignants pour nous museler à jamais. Mais vous avez compris camarades, que les régimes passent et que seule la profession demeure. C’est pourquoi, notre organisation restera indépendante de tout régime politique, de toute confession religieuse et de tout groupe ethnique.

Le SNEA-B lance également un appel à la jeunesse enseignante qui, écartelée entre le pluralisme syndical se trouve comme déboussolée, perdue. Beaucoup ne militent plus dans aucun syndicat. Nous leur disons que les portes du SNEAB leur sont largement ouvertes. La distance parcourue en 60 ans est longue certes, mais les défis qui se présentent aujourd’hui au monde des éducateurs sont énormes. Ensemble, nous saurons les relever. Bon anniversaire à toutes et à tous."

Pour le Bureau National Le Secrétaire Général National

Jean KAFANDO Chevalier de l’Ordre des Palmes Académiques

Le Pays

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique