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Reconciliation en Côte d’Ivoire : Bamako II, étape - charnière

Publié le jeudi 29 juillet 2004 à 13h57min

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Ainsi que l’avait souhaité l’UA lors de sa troisième session ordinaire tenue à Addis-Abeba, les 6, 7 et 8 juillet derniers, un Sommet tripartite a réuni mardi 27 juillet à Bamako, les présidents malien, burbikabè et ivoirien. Plat de résistance d’une rencontre qui aura duré cinq heures, les voies et moyens pour une sortie rapide de la crise en Côte d’Ivoire, avec comme corollaire, la sécurisation des biens et des personnes (toutes les personnes) résidant sur le sol ivoirien.

Lorsque l’avion présidentiel burkinabè se posait sur le tarmac de l’aéroport de "Bamako-Senou" aux alentours de 11 heures, temps universel, les hôtes maliens avaient déjà "calé" le chronogramme de la rencontre prévue pour se tenir de 12h00 mn à 16 heures. Un temps qui se révélera court, si tant est que trois hommes d’Etat (le Burkinabè et le Malien surtout) attachaient du prix à la résolution adéquate des questions en débat et que l’atmosphère avait été viciée entre eux, tout le long des deux années de crise qu’a connue la Côte d’Ivoire.

Un froid diplomatique et politique auquel l’interprétation de la crise par les autorités d’Abidjan n’était pas étrangère. Pour en revenir aux questions qui découlent de cette interprétation tronquée des causes de la crise, disons que celles-ci tenaient à la sécurisation des biens et des personnes (dans ce cas, les allogènes burkinabè et maliens) résidant en Côte d’Ivoire, à l’établissement d’un "pacte de non-agression" entre les trois Etats, au rétablissement de relations économiques et commerciales fluides et sécurisées entre les trois Etats, et à la lutte contre l’insécurité frontalière et transfrontalière engendrée par la "divagation" d’une grande quantité d’armes dans la sous-région.

L’horizon s’éclaircit

En un mot comme en cent, Gbagbo devait régler le "pendant international" (ou sous-régional c’est selon) de la crise ivoirienne avant de s’entendre avec ses frères à Accra le 29 juillet (aujourd’hui) sur les modalités de son règlement à l’interne. Or, l’une comme l’autre solution se trouve dans les Accords de Linas-Marcoussis et c’est en cela que des motifs de satisfaction existent après Bamako II. C’est qu’en effet, après avoir souligné "la nécessité pour toutes les parties concernées de privilégier le dialogue comme moyen de parvenir à une paix durable", les chefs d’Etat ont réaffirmé que "l’Accord de Linas-Marcoussis conclu librement entre les parties en janvier 2003, constitue, à ce jour, une plate-forme permettant une sortie de crise. Puis, ils se sont félicités "des conclusions des commissions mixtes ivoiro-burkinabè et ivoiro-malienne..., et ont réitéré leur volonté de continuer à favoriser les mesures de rétablissement de la confiance à tous les niveaux, notamment dans les domaines sécuritaire, humanitaire et économique".

De bon augure pour l’avenir d’autant plus que les trois hommes d’Etat ont réaffirmé "leur engagement à empêcher toute bande armée étrangère de se servir de leur territoire comme base arrière pour des actions de déstabilisation contre leurs pays respectifs et ont convenu de coordonner leurs activités en matière de sécurité frontalière." Non-agression, assistance mutuelle en matière de défense, libre circulation des personnes et des biens, droit de résidence et d’établissement, voilà la nouvelle "philosophie" qui prévaut entre trois pays que rien n’aurait dû séparer au regard de l’histoire et des impératifs du moment. Et, si cette fois Gbagbo, Touré et Compaoré ont pris les scalpels et les bistouris pour disséquer le mal, c’était pour mieux le couturer pour une guérison rapide. Le chemin d’Accra et l’avenir de la Côte d’Ivoire sont donc balisés pour peu que les actes soient à la hauteur des promesses.

Boubakar SY
Envoyé spécial à Bamako


Voilà ce que le président du Faso a dit

Lors de la conférence de presse "squelettique" (deux questions autorisées) que les Chefs d’Etat leur ont accordée, les journalistes ont voulu savoir en quoi Bamako II différait de Bamako I (la première rencontre tenue entre les trois hommes en décembre 2002) et ce que ses conclusions présageaient pour Accra III. Aussi, ils ont demandé si Accra III était le dernier Sommet sur la crise ivoirienne et s’il mettrait fin aux suspicions nées entre les trois Etats après le déclenchement de la crise.

Sur le premier point et en accord avec le président ivoirien, Blaise Compaoré a indiqué que "nous étions dans la voie de cicatrisation de la crise". Et d’ajouter que "contrairement à décembre 2002", ils vont à Accra "avec une plus grande visibilité sur les tâches à accomplir pour finaliser cette cicatrisation à travers les Accords de Linas-Marcoussis". Puis il indiquera qu’il est venu à Bamako pour marquer sa "solidarité" à l’égard du président Gbagbo et du peuple ivoirien "au regard de notre communauté de destin".

Quoi de plus normal qu’ils aillent à Accra avec "plus d’optimisme" qu’en décembre 2002, le président Gbagbo les ayant instruit sur le processus de "réactivation" des Accords de Marcoussis. C’est sur la base de ces avancées significatives donc (nonobstant le "boulot" qui reste à abattre) que le président du Faso a déclaré qu’ils vont à Accra avec "plus de détermination et de confiance quant à une issue heureuse de la crise en Côte d’Ivoire". Et, si Accra III consolidait ces avancées significatives et fixait un échéancier clair et précis pour "terminer le processus" nul doute qu’on pourrait dire avec le président du Faso qu’il aura constitué "une étape décisive et essentielle." Le décor ainsi planté la "grand-messe " de la réconciliation en Côte d’Ivoire peut commencer.

Boubakar SY


Gbagbo s’est-il acheté une conduite ?

Lors de la conférence de presse que les trois Chefs d’Etat ont tenus à la fin de leur rencontre, le président ivoirien a surpris plus d’un par sa "nouvelle foi" aux Accords de Linas-Marcoussis ainsi que son ton conciliant vis-à-vis de ses "frères" Compaoré et Touré. Parlant de Marcoussis, Gbagbo a souligné que "les remèdes sont bons, même s’ils sont amers". Puis, il justifiera la tenue du Sommet de Bamako par le fait qu’à la veille du Sommet d’Accra", lui et ses pairs ont "fait le point" pour parler d’une même voix et agir à Accra comme une personne en trois corps.

"Nous allons parler d’une même voix à Accra car nous avons cerné les problèmes d’essence politique et les autres types de problèmes". Voilà de quoi rassurer tous ceux qui espèrent un retour rapide de la paix en Côte d’Ivoire. Cependant, l’homme nous ayant habitués à des "incartades", nous ne pourrons que mesurer sa bonne foi à l’aune de ses actes. Ce d’autant qu’il a toujours le sens de la formule imagée et sibylline.

En effet, répondant à une consœur qui lui demandait si Bamako II sonnait la fin des suspicions entre les trois pays, Gbagbo a cité un proverbe africain qui dit que "même si les dents mordent la langue de temps à autre, elles sont condamnées à la cohabitation". Nous le lui concédons, même si l’harmonie naturelle veut que la cohabitation soit toujours douce. L’histoire et la géographie le veulent aussi pour nos trois pays , Excellence. Alors œuvrons plutôt à cela.

Boubakar SY
Sidwaya

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