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Kanidoua Naboho, 1er vice-président de l’Assemblée nationale, député au parlement de la CEDEAO : « Si le CDP n’avait pas une position critique sur la question des privatisations, l’ONEA, la SONABEL et la SONABHY seraient déjà dans les mains du privé depuis longtemps »

Publié le mercredi 23 septembre 2009 à 04h23min

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Kanidoua Naboho

Le Congrès pour la démocratie et le développement (CDP) a t-il une orientation idéologique clairement identifiable ? La question qui peut apparaître comme une provocation, n’est pourtant pas illégitime. Créé en 1996 par la fusion de douze formations politiques dont les deux principales sont l’Organisation pour la démocratie et le progrès/Mouvement du travail (ODP/MT) et la Convention nationale des patriotes progressistes (CNPP), le CDP est officiellement un parti social démocrate. Composée de partis se réclamant ouvertement du socialisme scientifique, l’ODP/MT avait vu le jour en 1989 sous le Front populaire. Mais dès 1991, elle avait entamé sa mue idéologique avec l’adoption du premier Programme d’ajustement structurel (PAS). La Banque mondiale et le Fonds monétaire international venaient ainsi d’entrer dans les affaires intérieures, voire, les foyers burkinabè pour n’en plus sortir. On parlait alors de capitalisme d’Etat comme seule option viable pour impulser le développement économique du Burkina Faso. C’est donc à tort que les dirigeants de la CNPP ont pu croire que leurs nouveaux camarades les avaient rejoints sur leur propre terrain idéologique.

Dans l’histoire des idées politique, les sociaux-démocrates ont souvent été raillés, qualifiés par l’extrême gauche de « socialistes bourgeois ». En Europe du Nord et de l’Ouest, les partis se réclamant de la social-démocratie ont cependant eu le souci d’entretenir des relations de proximité avec le monde ouvrier, les associations de la société civile, les syndicats et les coopératives. Dans leurs programmes économiques, ils insistaient sur la réduction des inégalités sociales par l’accès du plus grand nombre à la santé, à l’éducation et par l’instauration d’une fiscalité équitable.

Au Burkina Faso, on chercherait en vain l’existence de liens organiques qu’entretiendrait le CDP avec les coopératives, groupements ou syndicats. Les rapports entre le parti au pouvoir et les associations de la société civile sont plutôt de type conflictuel. En revanche, le CDP semble avoir beaucoup de sympathie pour le milieu des affaires, lequel était fortement représenté à l’ouverture du dernier congrès. En avalisant les différents programmes élaborés avec le soutien des institutions Brettons Wood, le CDP se réclamerait-il de la social-démocratie pour mieux appliquer une politique libérale ? Question : Et si politiquement, le parti au pouvoir était un « non-être idéologique » ? Eléments de réponse avec Kanidoua Naboho, un des poids lourds du parti et premier vice-président de l’Assemblée nationale

A l’occasion du congrès de votre parti, vous avez invité plusieurs formations politiques de pays étrangers, dont le Front populaire ivoirien (FPI), le Rassemblement des républicains (RDR) ou le Parti de l’Istiqlal, une formation marocaine plutôt conservatrice. Existent-ils des affinités idéologiques avec les deux derniers partis qui justifient leur présence à votre congrès ?

Cette invitation rentre dans le cadre d’une tradition. Etant un parti au pouvoir, nous avons eu l’habitude d’inviter les partis des pays voisins lors de nos congrès et généralement, nous tenons compte de ce que nous appelons le pluralise d’opinions pour que justement, on ne pense pas que nous avons une affinité particulière qui pourrait créer des incidents diplomatiques avec des partis au pouvoir ou dans l’opposition. Pour le FPI, nous coopérons avec ce parti depuis qu’il était dans l’opposition en Côte d’Ivoire et l’invitions déjà à nos congrès, en même temps que nous invitions le PDCI/RDA qui était au pouvoir. Nous ne voulons pas donner l’impression que nous soutenons un parti dans un pays étranger, car cela pourrait être perçu comme une ingérence dans les affaires intérieures de ce pays. Nous avons, bien évidemment nos affinités idéologiques, mais il y a deux aspects : nous sommes membres de l’interafricaine socialiste et démocratique au sein de laquelle, il y a des partis sociaux-démocrates comme il y a des partis qui défendent tout simplement les valeurs de liberté, de démocratie et de développement avec les sociaux démocrates sans exactement être des sociaux démocrates.

Là également, nous avons l’habitude de nous retrouver avec des partis qui ne sont pas nécessairement des partis sociaux démocrates. Et compte tenu aussi de notre histoire, nous avons déjà invité à nos congrès ou colloques, des gens comme le Parti communiste français (PCF) qui a aussi eu des relations avec des militants de notre parti au moment où ceux-ci se réclamaient du marxisme léninisme. Je veux parler de la période de la Révolution démocratique et populaire (RDP) survenue en août 1983. Donc, nous avons des relations avec le PCF, mais aussi avec le Parti socialiste français (PS) et le Rassemblement pour la république (RPR) devenu Union pour un mouvement populaire (UMP) avec qui nous avons des relations amicales quand bien même nous n’avons pas la même idéologie. En somme, il s’agit d’une question d’ouverture d’esprit.

A travers justement toutes ces invitations, il est difficile aujourd’hui de cerner l’identité idéologique du CDP. En a t-il réellement et si oui, laquelle ?

L’idéologie du CDP, c’est la social-démocratie et c’est écrit noir sur blanc dans nos statuts. Nous avons créé le CDP en 1996 sur les bases de l’idéologie social-démocrate et c’est ce que nous défendons officiellement. Là-dessus, il n’y pas d’ambiguïté. On ne comprend pas très bien pourquoi alors vous invitez à votre congrès des partis qui ne partagent pas votre idéal dont l’idéologie est loin de la social-démocratie comme le RDR et l’Istiqlal… Je viens de vous dire que nous sommes un parti né au pouvoir et étant au pouvoir, nous faisons attention à nos relations avec les autres. L’Afrique, comme vous le savez, a amorcé des transformations dès la fin des années 80, début 90 avec une démocratisation du continent. Avant, notre continent était dominé par des partis uniques et dans ce processus, lorsque vous êtes au pouvoir et que vous ne faites pas attention, on vous accuse d’appuyer l’opposition contre un pouvoir en place.

Mais pourquoi se cacher pour soutenir un parti quand on partage avec lui les mêmes valeurs ?

Pour garder des relations de bon voisinage, il est bon de mettre un peu de diplomatie dans nos relations, ce qui n’empêche d’ailleurs pas que nous affirmons clairement que nous sommes des sociaux démocrates ! Mais par courtoisie, nous invitons des partis des pays voisins afin que nos relations soient les plus sereines possibles. Vous savez bien que certains pays voisins croient que nous abritons leurs opposants, juste pour leur créer des problèmes ! Même si ça ne se dit pas bruyamment, c’est quand même une réalité et dans notre action, nous ne devons pas prêter le flanc. Par contre, lorsqu’il s’agit de débattre idéologiquement sur un problème, nous prenons une position sans équivoque. Après tout, la différence entre les partis ne doit pas les éloigner les uns les autres, au contraire, ils doivent même, qu’on soit de la majorité ou de l’opposition, gérer ensemble les questions politiques d’un pays soit à travers la presse, soit à l’assemblée nationale pour voter des lois. Nous ne faisons pas de la démarcation physique un principe de relation avec les autres partis.

La crise financière a brouillé les repères traditionnels puisque même dans les pays capitalistes les plus avancés, l’Etat est intervenu pour sauver des banques privées de la faillite. Quelle est la position du CDP par rapport aux privatisations et quel rôle l’Etat doit-il jouer dans l’économie nationale ?

Nous sommes pour une gestion économique où il y a le secteur privé qui se développe selon les règles établies en matière de gestion économique, et à côté, un secteur d’économie mixte où le privé et l’Etat peuvent mettre en commun leurs ressources pour développer telle ou telle activité. Dans certains secteurs jugés stratégiques ou importants, seul l’Etat peut assumer le rôle du développement. Nous considérons par exemple que dans les domaines sensibles comme l’énergie, l’eau, l’approvisionnement en produits de première nécessité comme les produits alimentaires, l’Etat doit jouer un rôle clé. Nous avons toujours été clairs là-dessus, et c’est pourquoi, au cours de notre congrès, nous avons dit que les rapports économiques que nous établis dans les années 80 et 90 avec les institutions financières internationales ont montré leurs limites tant en théorie qu’en pratique. C’est écrit dans le rapport sur le thème du congrès ! Avant, on disait que l’Etat devait se contenter d’assumer les fonctions régaliennes telles que la justice, la sécurité, la défense et laisser le reste, notamment les secteurs de développement au privé. Eh bien, nous savons que cette conception a été battue en brèche justement avec la crise actuelle. Il faut donc penser le développement d’un pays en prenant en compte le secteur privé, l’économie mixte et le secteur de l’Etat, tous devant évoluer ensemble. Il appartient à chaque peuple de pouvoir à chaque moment stratégique donné, définir quel rôle exact l’Etat doit jouer en matière économique.

Donc très clairement, le CDP est opposé à la privatisation de la SONABEL, de L’ONEA et de la SONABHY ?

Nous avons une position effectivement sur ces cas ! Nous avons dit qu’il y a des secteurs où le privé et l’Etat peuvent jouer ensemble un rôle, il faut prendre tout cela en considération. Si le CDP n’avait pas une position critique sur la question des privatisations, les secteurs dont vous parlez seraient dans les mains du privé depuis longtemps ! Mais à chaque fois, nous avons dit qu’il fallait réfléchir pour voir s’il faut privatiser totalement, partiellement ou si l’Etat devait continuer à être l’acteur principal. C’est pour cela d’ailleurs que contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays, l’électricité et l’eau n’ont pas encore été vendues. Le gouvernement travaille à approfondir la réflexion de telle manière à éviter qu’il y ait des préjudices sur le fonctionnement normal de l’économie, et surtout pour les populations en cas de privatisation partielle ou totale. C’est pourquoi jusqu’à présent, nous sommes en train de chercher les meilleures formules pour développer ces secteurs

Donc, aucune hypothèse n’est exclue pour l’instant ?

Aucune ! Des propositions ont été faites à l’Assemblée et nous avons dit au gouvernement qu’il devait prendre en compte certains aspects si la privatisation était l’option retenue. C’est pour dire que c’est sur la base de nos idéaux que nous examinons les privatisations au Burkina Faso

Comment jugez-vous le bilan des privatisations déjà faites. Positif ou négatif ?

Non, je ne peux pas affirmer tout de go que c’est positif ou négatif puisqu’il n’y a aucune étude sur la question, ce que nous devons penser à faire.

La privatisation de l’imprimerie nationale et de RAN devenue SITARAIL par exemple était est-elle justifiée ?

Concernant ces cas précis, on peut dire que l’imprimerie nationale ne fonctionnait pas bien et la privatisation n’a pas été une mauvaise chose puisqu’à plusieurs assemblées générales de sociétés d’Etat, il a été constaté que cette entreprise avait des difficultés qu’elle n’arrivait pas à surmonter. Il fallait donc laisser ceux qui savent gérer ce genre de chose le faire de la meilleure manière possible pour que ça ne soit pas un gouffre à sous et que l’état soit obligé à chaque fois de la renflouer. En réalité, c’était mal géré ! Pour ce genre de structure, lorsqu’on ne parvient manifestement pas à redresser la gestion, si un privé peut s’en sortir, alors il faut le laisser faire.

Pour SITARAIL, vous savez que la régie Abidjan Niger depuis le temps colonial est une régie qui intéresse la Côte d’Ivoire et le BF et à l’époque, nous n’étions même pas pour qu’on scinde cette société en deux, une partie ivoirienne et une burkinabè. Mais la situation politique dans notre sous-région était telle que finalement, chaque pays a pris sa portion et de discussion en discussion, il fallait chercher un repreneur qui puisse dynamiser le transport ferroviaire et c’est ce qui a été fait. Est-ce que ça aurait pu être pire si on n’avait pas privatisé SITARAIL ? Je peux dire oui. J’ai présidé la commission sociale du Front populaire dans le cadre justement de la restructuration de SITARAIL et je peux vous dire qu’il y avait plein de problèmes sociaux parce que là également, il y avait des soucis dans la gestion que l’Etat ne pouvait pas résoudre. Nous avons décidé de trouver un partenaire stratégique et franchement, notre choix est positif. Donc, il faut analyser chaque entreprise dans sa situation concrète et non en théorie et voir quel type de privatisation, partielle ou totale, peut garantir le service public dans les meilleures conditions possibles.

Le congrès du CDP s’est tenu dans un contexte marqué par la polémique sur la réforme des institutions. Est-ce que cela s’est ressenti dans les débats ?

Ce congrès a été le mieux préparé depuis que nous en organisons. Dès que le thème a été choisi, des commissions ad’ hoc ont été formées pour réfléchir sur la ligne du parti et sur le bilan de la mise en œuvre du programme du président du Faso. Les commissions ont travaillé et les documents ont été envoyés au niveau des sections qui les ont examinés et amandés. Des synthèses ont été faites et des documents préparatoires ont été élaborés et transmis environ un mois aux différentes sections avant la tenue du congrès, et les gens ont encore eu le temps de voir si ces documents étaient conformes aux débats antérieurs. Après l’ouverture du congrès, nous avons remarqué que les gens étaient très assidus aux débats, et très sérieux, ce qui a d’ailleurs émerveillé le délégué du Parti de l’Istiqlal. Les résultats ont été appréciés et les militants sont repartis satisfaits des travaux de congrès parce qu’ils ont eu le sentiment d’y avoir contribué.

Le président du CDP, Christian Roch Kaboré n’a pas écarté l’hypothèse d’une révision de la constitution. Avez-vous l’intention de retoucher l’article 37 sur la durée et la limitation des mandats présidentiels ?

D’abord, je dois relever que les débats sur la réforme des institutions ont été introduits par les partis de l’opposition et non le CDP. Ils ont dit qu’ils veulent refonder la IV république et ont pour cela élaboré un document, ont rencontré tous les partis politiques y compris le CDP pour parler de leur projet en sillonnant tout le pays. Le débat était donc engagé par les partis politiques de l’opposition et comme nous n’avons pas peur de mener les discussions surtout quand elles sont politiques, nous avons dit, eh bien, débattons-en ! A partir du moment où les gens demandent qu’on regarde les fondements de notre république, il faut y aller, et nous avons dit que nous allons aussi mettre en place un groupe de travail qui va réfléchir sur la question. Il y a des idées qui fusent par ci par là concernant la constitution, et comme il a été dit, 18 ans après, peut-être qu’on peut mieux faire pour renforcer notre démocratie. Tous les aspects seront passés en revue et ce qu’il y a à changer, on verra et cela avec tous les acteurs de la vie politique.

Je vous rappelle qu’il y a déjà eu d’autres réformes comme celle portant sur le code électoral ou sur les quotas pour les femmes. Puisqu’à chaque fois qu’il y a des élections, les gens soulèvent pas mal de problèmes, nous avons mis en place une commission pour nous faire des propositions. Nous avons estimé qu’il fallait élargir le débat à toutes les formations politiques, ce qui a été fait avec la création de commissions dans lesquelles siégeaient même des représentants de partis non représentés à l’Assemblée. Donc, à partir du moment où un débat est engagé, nous, en tant que parti majoritaire, nous ne pouvons pas le fuir, mais apporter notre contribution et notre président a dit qu’on allait s’y mettre

Après avoir exclu Marc Yao, Pierre Tapsoba et autres qui réclamaient une refondation du parti, vous venez de suspendre Salif Diallo des instances du CDP après qu’il ait proposé une dissolution de l’assemblée et l’instauration d’un régime parlementaire. Le débat n’est-il pas possible au CDP ?

Effectivement, ceux dont vous faites allusion parlaient de refonder le CDP et non la république, mais ils s’y sont mal pris et nous y avons vu une tentative de déstabilisation. Et nous fondant sur les règles de fonctionnement du parti, il y a au des débats internes auxquels les refondateurs ont assisté, confrontant leurs idées avec celles des membres du bureau politique. Au final, il fallait qu’ils fassent leur autocritique par rapport à la manière non réglementaire avec laquelle ils ont introduit le débat. Je vous donne un exemple : le CDP a été créé par la fusion de 12 partis et même d’autre venant d’ailleurs. Les refondateurs sont allés jusqu’à dire que toutes les structures actuelles de notre parti n’étaient plus valables et qu’il fallait les mettre de côté, puis faire appel aux anciens chefs des 12 partis qui ont fusionné pour redémarrer en quelque sorte à zéro, c’est-à-dire, détruire le parti et le reconstruire. Ça, nous ne pouvions pas accepter !

Est-ce que la présidentielle de 2010 est-elle déjà un sujet de débats au CDP ?

Nous avons eu le souci de préparer et de bien réussir notre congrès, conscients qu’en 2010 il y aura une élection présidentielle. Nous avons dit que nous étions co-auteurs du bilan du président et co-acteurs dans la mise en œuvre de son programme. Et pour aller à une élection quelle qu’elle soit et quelque soit la personne qui sera notre candidat, c’est à partir d’un bilan que nous irons aux élections et c’est sur la base de cette analyse que nous avons tenu notre congrès. Sur la question de savoir qui sera ou ne sera pas candidat, nous n’en n’avons pas encore discuté, mais nous nous préparons pour être certains que quelque soit le candidat que nous allons présenter, notre suprématie habituelle sera maintenue.

Est-il possible qu’il y a ait plusieurs candidatures au point que vous soyez obligés de passer par des primaires ?

Si c’est pour les suppositions, on peut tout supposer (rires), car je ne suis pas dans la tête des gens ! Mais l’essentiel pour nous, c’est notre unité car on ne peut pas envisager gagner des élections dans la débandade. Il faut donc un parti qui garde sa place de leader au Burkina, et c’est pourquoi tous les problèmes liés à la formation de nos militants, le bon fonctionnement du parti, etc., qui sont des questions récurrentes, nous en faisons une préoccupation car nous devons garder notre leadership. Nous voulons faire du CDP une institution incontournable dans le développement de la démocratie au Burkina sachant que les partis politiques ne sont pas puissamment organisés. Comme je le disais au début, la démocratie a pris un tournant sur notre continent depuis les années 80-90, et vous avez vu le foisonnement des partis que nous avions appelé à l’époque, « le printemps des partis politiques » ! Notre constitution a adopté le multipartisme intégral et avec cette liberté, vous voyez plein de partis qui se créent puisque nous en sommes actuellement à 170 !

Pour l’alternance, est-ce vraiment une bonne chose et faut-il s’en réjouir ?

Il y a un vrai travail à faire pour que, lorsqu’on dit parti politique, les gens y voient bien une institution importante dans le développement démocratique d’un pays. Souvent on nous pose la question : est-ce qu’on ne peut pas limiter le nombre de parti ? Nous disons non ! Parce que ça fait partie des libertés fondamentales que notre constitution a consacrées et c’est dans le jeu démocratique que la décantation va se faire petit à petit. Comme dans d’autres pays, il ne restera que deux ou trois partis qui joueront le jeu de l’alternance lorsque la situation le permettra. Mais pour le moment, nous avons 170 partis et chacun veut conquérir le pouvoir.

Lors des manifestations contre la vie chère, le CDP avait accusé certains d’être manipulés. En aviez-vous les preuves ?

Vous savez, on ne dit pas les choses en l’air comme ça ! Quand vous surprenez des gens en train de distribuer de l’argent pour encourager à organiser la casse dans la ville, ça ne va plus et ça c’est ça que nous avons dénoncé. Sinon, après les casseurs, vous avez vu qu’avec les syndicats qui ont l’habitude des manifestations, les choses se sont bien passées. Mais le désordre et les casses qui ont eu lieu à Bobo, Ouahigouya et Ouagadougou, nous avions à l’époque reproché ceux qui étaient au courant de ces choses de n’avoir pas appréhendé les fauteurs et les juger pour l’éducation des populations. Ceux qui ont été jugés et condamnés, ce ne sont pas ceux dont je parle, mais des gens comme Nana Tibo, qui a déclaré qu’il a allait organiser des manifestations n’a pas pu contenir les infiltrés si on lui concède la bonne foi. Or, nous avons une loi qui dit que si vous organisez une manifestation publique et que ça dérape, vous en êtres responsables et c’est cette loi qui a été appliqué à Nana Tibo.

Les mesures prises par le gouvernement pour faire baisser les prix des denrées alimentaires n’ont pas abouti. On a d’ailleurs eu l’impression que le CDP est resté très en retrait dans la diffusion et l’explication de ces mesures…

Les gens peuvent estimer que le CDP ne s’est pas beaucoup impliqué parce toutes les réunions du CDP ne sont pas publiques ! Sinon, nous avons eu des réunions avec le gouvernement pour voir ce qui se passe et examiner les mesures que le gouvernement envisage. En tant que parti qui est sur le terrain, nous avons interrogé nos structures qui sont dans les provinces et en fonction de leurs appréciations, nous avons pu discuter avec le gouvernement avec des arguments précis. Donc, nous avons beaucoup agi avec le gouvernement dans la gestion de cette crise et parfois ce n’est pas le CDP, mais le gouvernement qui n’a pas pu aller loin car les accords que nous avons signés avec les institutions de Brettons Wood disent que les prix sont libres. Il n’y a donc pas de système de contrôle sur la fixation des prix, c’est la loi qui le dit et c’est dans cet ordre juridique que le gouvernement doit appliquer sa politique. C’est pour ça que le gouvernement n’a pas eu les mains totalement libres pour agir et venir à bout de certaines difficultés quand bien même on a injecté des ressources en supprimant certaines taxes. Mais étant donné que le commerce est libre, certains commerçants ont trouvé que c’était le bon moment d’en profiter et c’est aussi les avatars de la démocratie

Si on vous comprend bien, ce sont les institutions de Brettons Wood qui ont empêché le gouvernement d’aller loin dans les mesures ?

J’ai dit que nous sommes dans un système où on ne peut pas parler de contrôle des prix, mais je vous rappelle quand même que dans l’énergie, l’Etat intervient pour fixer les fourchettes dans lesquelles les prix peuvent être pratiqués. Je reconnais toutefois que ça ne concerne que quelques produits. Le prix du riz, de la farine de blé n’est par exemple pas fixé par l’Etat.

Propos recueillis par Joachim Vokouma, Lefaso.net

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