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INVESTITURE DU PRESIDENT BISSAU-GUINEEN : Un nouveau jour se lève

Publié le jeudi 10 septembre 2009 à 03h47min

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Ça y est ! Malam Bacaï Sanha est entré dans ses nouveaux habits de président de la République de Guinée-Bissau. Plus d’un mois après sa victoire aux élections présidentielles du 26 juillet dernier, (il a recueilli un peu plus de 63% des suffrages contre 35% pour son adversaire Kumba Yalla), il a prêté serment le 8 septembre dernier à Bissau, en présence de quelques chefs d’Etat africains. Pour la Guinée-Bissau, un nouveau jour se lève, plein d’espoir. Cette cérémonie d’investiture intervient 6 mois après l’assassinat par les militaires, de son prédécesseur, Joao Bernardo Vieira.

Il y avait foule au stade national du 24-septembre, ce 8 septembre, jour marquant l’entrée officielle en fonction du nouveau président démocratiquement élu de Guinée-Bissau, Malam Bacaï Sanha. La pluie qui s’abattait sur la capitale Bissau, n’a visiblement pas émoussé la détermination de ces milliers de Bissau-Guinéens, sortis nombreux pour être les témoins directs de la cérémonie d’investiture de l’ancien compagnon d’arme d’Amilcar Cabral. Ils n’ont pas voulu se faire conter l’événement, quitte à se munir de parapluies ou d’imperméables. Autre difficulté qu’il fallait aussi braver ce jour-là : l’attente. De fait, prévue en fin de matinée, à 11 h, la cérémonie démarre avec plus de trois heures de retard. En Guinée-Bissau, commente un habitué du pays, la ponctualité, ce n’est pas trop dans leurs habitudes. Ce qui amène le président du Faso, qui avait déjà installé ses pénates à l’hôtel Bissau Palace, comme ses homologues africains, à apporter un léger ré-aménagement dans son programme. Les ressortissants burkinabè de Guinée-Bissau seront donc reçus plus tôt que prévu (nous y reviendrons), dans la matinée, histoire de gagner du temps. La délégation des ressortissants est forte d’une dizaine de personnes.

Investiture sous une pluie battante

Outre Blaise Compaoré, quatre pairs africains ont tenu, eux aussi, à faire le déplacement de Bissau. Le Sénégalais Abdoulaye Wade, le Gambien Yahya Jammeh arrivé par voie terrestre (la distance Bissau-Banjul n’excédant pas 200 kilomètres) à bord de sa Hammer (marque américaine de véhicule), le Nigérian, Umaru Yar’adua, le Cap-verdien, Pedro Pires et enfin leur homologue de la République arabe sarahouie démocratique (RASD), Mohamed Abdelaziz. Quant au Mauritanien qui était annoncé, il ne fera finalement pas le déplacement. L’Angola est représenté par le vice-président de son Parlement. L’Algérie par le président du Parlement. Arrivés au même moment sur les lieux de la cérémonie, sous une pluie battante, les chefs d’Etat font leur entrée dans un stade bruyant de sonorités et étalant les variétés de danses traditionnelles bissau-guinéennes. Malam Bacaï Sanha rejoindra ses hôtes un peu plus tard. Son entrée au stade est marquée par les vives acclamations du public qui vient en rajouter à l’animation. Le temps de quitter son véhicule et de rejoindre ses homologues installés sous une tente aux couleurs nationales, dressée au milieu du stade d’une capacité de 15 000 places et fortement trempé, il s’offre un bain de foule. A son arrivée dans le stade, il fait s’envoler une colombe.

Cérémonie sous une tente

Sous la tente prise d’assaut par les preneurs d’images, les journalistes et autres, attendent les membres du Parlement bissau-guinéen, ceints de leur écharpe, les ministres, les membres du corps diplomatique, les présidents d’institutions et des organisations internationales. Tout est loin d’avoir été réglé comme du papier à musique. Les flottements dans l’organisation sont perceptibles. Malam Bacaï Sanha vient de prendre place aux côtés du président par intérim de Guinée-Bissau, Raimundo Pereira, et de celui de l’Assemblée nationale, Serifo Nhamadjo, celui-là même qui va bientôt le faire officiellement président. Sanha entendra le discours du président par intérim avant de prononcer le sien, ponctué de coups de canons et précédé de sa prestation de serment.

Un tournant

Au président par intérim, Raimundo Pereira, le tout nouveau président adresse une "salutation particulière", pour avoir conduit, avec succès, le processus de transition qui a abouti à l’organisation de ces élections. Pour lui, cette journée marque un tournant. D’autant qu’il entend ouvrir une nouvelle page (de l’Histoire de son pays) fondée sur le dialogue, la stabilité, la justice sociale au sein d’un Etat respectant les lois et considérant la vie humaine comme une valeur sacrée. C’est pourquoi, ajoutera-t-il, "il nous revient la tâche ardue de mettre une fin à la spirale de haine et de violence et pour ce faire, nous prenons l’engagement de jeter les fondements de notre développement et de notre progrès". Le président intérimaire de juin 1999 à mai 2000 rêve, en fait, d’une Guinée-Bissau nouvelle, construite sur "le modèle d’un Etat moderne, laïc et démocratique, ayant des institutions fortes qui fonctionnent normalement, de façon interdépendante et solidaire".

Tourner le dos à l’impunité

Une Guinée Bissau résolue à tourner le dos à l’impunité. Et, à ce propos, il s’est fait fort de condamner les événements tragiques qui ont abouti à la mort du président-général Joao Bernardo Vieira, et du chef d’Etat-major général, Tagme na Waie. Non sans prendre l’engagement de ne ménager aucun effort pour que la lumière soit faite sur ces événements et bien d’autres. Pour faire face aux dérives à l’origine des conflits qui mettent en danger l’unité nationale, "le président de tous les Guinéens" - c’est du moins ce qu’il a promis d’être durant son mandat- préconise une réponse collective par l’unité nationale, mais toujours dans le respect de la diversité. C’est, selon lui, la voie vers un Etat fort, ayant des institutions solides et durables". Pour le successeur de Nino Vieira, les aspirations à la paix et la stabilité doivent se fonder sur une réelle réconciliation de tous les Guinéens. Il indique qu’il en fera donc sa cheville ouvrière tout au long de son mandat. Sanha s’est, pour cela, réjoui de la décision de l’Assemblée nationale populaire de convoquer une Conférence nationale visant à identifier les causes et conséquences des conflits dans ce pays et à en rechercher les solutions consensuelles et durables.

Vers une conférence nationale

Il compte jeter les bases d’un véritable contrat social fondé sur la stabilité et la solidarité nationales. Le licencié en sciences politiques invite l’Etat à prendre ses responsabilités face aux citoyens en leur assurant le bien-être, la sécurité sociale, la croissance économique et l’égalité des chances. En retour, l’ancien président de l’Assemblée nationale de Guinée-Bissau de 1994 à 1998 attend des citoyens qu’ils considèrent la valeur du travail digne, comme étant la seule voie pour bâtir le progrès. Il souhaite, pour ce faire, que les Guinéens s’inspirent de l’exemple des combattants de la Liberté, tel Amilcar Cabral à qui il a rendu un hommage particulier. Pour lui, l’exemple de ces combattants doit rester une source d’inspiration pour les Bissau-Guinéens.

Combattre la corruption

Une autre composante de l’action de Sanha au cours de sa magistrature, sera, promet-il, celle de la moralisation et de la transparence de la vie publique de son pays. A ce sujet, Sanha promet de combattre la corruption à tous les niveaux de l’Administration publique et de l’Etat. Ainsi que le narco trafic et le crime organisé qui devront mériter, à ses yeux, une attention ferme de l’Etat dans le contexte sous-régional. Il sollicite, à cette fin, le concours de la communauté internationale, tout en comptant sur l’appui de la justice de son pays pour autant qu’elle se montre plus crédible.

La communauté internationale sollicitée

Pour ce qui concerne la réforme et la normalisation des forces de défense et de sécurité bissau-guinéennes, cette réforme doit être fondée, selon sa vision, sur la nécessité d’une restructuration et d’une modernisation réduisant des effectifs de façon à ce que l’Armée soit efficace du point de vue technique et opérationnel et moins lourde financièrement pour l’Etat. Quant à la politique extérieure de la Guinée Bissau, Malam Bacaï Sanha promet de tout faire pour relancer les relations de son pays – membre de l’Organisation de la conférence islamique (OCI) - avec le monde arabe. Avec ces élections, la Guinée Bissau s’engage à démarrer une nouvelle ère vers le développement, a-t-il assuré. Pour cela, ce pays ne demande que l’attention et l’appui de la communauté internationale et des Nations unies, auxquelles il a lancé un appel.

De l’Afrique et de ses institutions, il attend beaucoup. Il espère qu’ils poursuivront leur aide à ce "peuple martyr" et qu’ils viendront investir dans son pays. Au total, c’est un discours fondé sur l’action que le nouveau président de Guinée Bissau a livré, ce jour, à la Nation. Un discours dans lequel il a aussi décliné ses ambitions pour la jeunesse et la femme bissau-guinéenne, des projets qui devraient donner un coup d’accélérateur au développement économique, social, culturel, technique et scientifique de cette ancienne colonie portugaise. Le 7è dirigeant de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest, a terminé son discours, qui fut par ailleurs, révélateur de son état d’esprit actuel : "Dans l’histoire des peuples, il n’est jamais trop tard pour réaliser le Rêve et accomplir l’Espoir".

Par Cheick Beldh’or SIGUE (envoyé spécial en Guinée-Bissau ) La suite dans nos prochaines éditions

Le Pays

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