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SN-SOSUCO : Les syndicats réclament un nouveau repreneur

Publié le mardi 18 août 2009 à 02h59min

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Nous avons reçu des organisations syndicales de la Comoé (CGT-B – ONSL – UST-B) cette lettre ouverte au Premier ministre, dans laquelle elles dénoncent la gestion actuelle de leur entreprise, la SN-SOSUCO. Elles attendent des audits, la mise en œuvre du comité de suivi de la privatisation de la SN-SOSUCO. Toutefois, elles réclament la fin de la cession de la société au groupe IPS. Lisez plutôt.

Monsieur le Premier ministre,

“La Société sucrière de la Comoé (SOSUCO), ex-SOSUHV était le deuxième employeur de notre pays après l’Etat. Celle-ci a été privatisée en 1998 et est devenue depuis la SN-SOSUCO (Nouvelle société sucrière de la Comoé) dont l’actionnaire principal est le Groupe IPS dirigé par le Prince Aga Khan. Lors de la privatisation, le Groupe IPS a pris de grands engagements qui devaient permettre de moderniser la SN-SOSUCO et lui assurer ainsi la capacité de couvrir les besoins nationaux en sucre estimés à 50 000 tonnes. Egalement, celui-ci s’engageait à ne licencier aucun travailleur ; offre qui est à la base de l’octroi de cette entreprise à IPS devant des concurrents non moins performants. Mais depuis plus de dix 10 ans que constate-t-on ?

I/ Des promesses non tenues

De nombreuses promesses faites lors de la privatisation sont restées sans suite. Parmi elles, on peut retenir :
1- Des investissements de 20 milliards en 5 ans et 25 milliards en 8 ans pour développer les capacités de production de la SN-SOSUCO et moderniser les équipements industriels. Jusqu’à nos jours, cette modernisation se fait attendre. Aujourd’hui, le champ et l’usine ont toutes les difficultés à sortir 30 000 tonnes de sucre, vue la vétusté du matériel. Durant la campagne 2008-2009, 12 000 tonnes de canne ont été abandonnées au champ, chose jamais vue !

2- Un agrandissement des surfaces actuellement exploitées et même la possibilité de cultiver la canne à sucre par les populations des Cascades. Malheureusement, cet engagement est resté lettre morte, et à la place, c’est plutôt la sous-traitance de la coupe de la canne à sucre qu’on observe, ce qui a amplifié la paupérisation dans cette région du pays.

3- Les investissements dans les programmes sociaux avec les constructions de nouvelles écoles et de nouveaux dispensaires… sont loin de devenir des réalités rendant insupportable la situation sociale dans le périmètre sucrier. Jusqu’à nos jours, les enfants des travailleurs de la SN-SOSUCO connaissent toutes les difficultés pour obtenir des véhicules afin de se rendre à Banfora pour suivre leurs cours, après plus de 30 années de vie de cette entreprise.

II. La gestion scabreuse de l’entreprise

La gestion actuelle de la SN-SOSUCO est digne de la société américaine des années 1930.
Jugez-en vous-même :
1- Le pillage systématique des maigres ressources de l’entreprise par des détournements crapuleux (cf. Affaire de 5 milliards de francs CFA dite affaire Mathieu Bayala du nom du premier directeur installé par le Groupe IPS), cela au vu et au su des premiers responsables de ce groupe.

Jusqu’aujourd’hui, aucun n’a été inquiété pour ces crimes économiques et même d’autres se tireront avec des sommes rondelettes et iront jouir de leurs « acquis » ailleurs. 2- Des « clans » se sont constitués et ont mis l’entremise sous coup réglée en se répartissant des « domaines de prédation » afin de se remplir les poches au détriment de la fragile santé financière de la SN-SOSUCO.

Il s’agit pour chaque chef de « clan », aidé de ses hommes de main, de mettre à profit la moindre parcelle d’autorité pour s’enrichir rapidement. Point de salut pour quiconque si l’on n’est pas coopté par un de ces « gourous » ou si l’on ne fait pas allégeance à un de ces groupes « mafieux ».

3- L’entreprise connaît de sérieuses méventes sur le plan national. Curieusement, pendant ce temps, ce sont les actionnaires même de la SN-SOSUCO qui sont devenus les grands fraudeurs dans l’importation du sucre. (cf. le contrat et la livraison du sucre entre le fils du PCA et la Brakina pourtant cliente de la SN-SOSUCO).

4- La gestion rationnelle des ressources humaines a fait place à une gestion de groupes ou de clans au sein de la Société. Ainsi le népotisme et le clientélisme y sont pratiqués à visage découvert par les dirigeants et « gourous » des clans mafieux. En effet, des individus farfelus sont recrutés sans aucun rapport avec les besoins de l’entreprise.

Il en est ainsi de ce docteur en géologie dont on ne connaît pas la fonction exacte à moins que ce soit pour collectionner les ragots et aider ses collègues de « clan » ou encore cet agronome responsable du parc motorisé, fonction qu’il a visiblement toutes les peines à assumer, puisqu’on lui a flanqué un expatrié retraité, payé lui aussi à grands frais.

(C’est pourquoi ce département bat le record des sanctions dans l’entreprise). Que dire de cet électricien déjà pas fameux dans sa branche qu’on a bombardé de façon incongrue au niveau de la Division Achats, Approvisionnement et Gestion des stocks simplement, selon lui, pour bouffer et protéger les arrières de ses « amis ».

Dernièrement l’intéressé se trouve au centre d’une affaire rocambolesque liée à l’achat de tracteurs. Le fournisseur enverra par erreur le mail l’informant de la disponibilité d’un pot-de-vin à la GGE à quelqu’un d’autre. Informé, le DG décida de le licencier n’eût été l’interposition de son « mentor », comme sanction l’intéressé écopera seulement d’une mise à pied de 2 jours.

D’autres encore sans qualification adaptée à la production sucrière ne doivent leur présence à la SN-SOSUCO qu’au fait qu’ils sont amis de certaines personnes qui y travaillent. C’est la cas de ce retraité de la sécurité publique qui dit s’occuper de l’entreprise où il bénéficie des commodités les plus étendues pendant que les travailleurs triment pour gagner seulement leur pain et dans quelles conditions !

III. La situation des travailleurs dans l’entreprise

Monsieur le Premier ministre,

Depuis la privatisation, l’ensemble des travailleurs a vu ses conditions de vie et de travail se détériorer dramatiquement. D’abord, tous les acquis sociaux qu’ils possédaient ont été progressivement liquidés par M. Mathieu Bayala qui s’était autoproclamé secrétaire général de tous les syndicats de la SN-SOSUCO ! (prêts scolaires, frais médicaux…) pendant que se déroulait la pire gabegie que la société ait connue. Récemment la Direction vient de supprimer le car, des Cadres en violation du contrat qui impose leur transport par l’employeur.

Or l’achat de ce car, à l’époque, avait été justifié par les responsables comme une mesure d’économie avec la suppression des véhicules individuels de service. Egalement, on continue à payer des salaires de plus de 10 millions à des travailleurs expatriés retraités dans une entreprise qui bat de l’aile !

Dans une société comme la SN-SOSUCO, connue pour la vitalité de son mouvement syndical, depuis 1998, c’est la confiscation pure et simple du droit syndical (interdiction d’AG, de toutes les structures, licenciement des responsables syndicaux, intimidations et menaces des responsables, appels anonymes…).

Devant cette situation et malgré la répression, les travailleurs ont continué à se battre et à dénoncer cette situation qui n’augure d’aucun avenir pour cette entreprise. En effet, de nombreuses lettres ouvertes destinées à la direction générale, à Monsieur le président du Faso ont été publiées.

Aujourd’hui, nous, organisations syndicales demeurons plus que convaincues que le Groupe IPS, de par l’ensemble des actes posés, les promesse non tenues, le non-respect du cahier des charges… n’est pas à même de gérer une entreprise comme la SN-SOSUCO et lui assurer un avenir serein.

Aussi les organisations syndicales de la Comoé en appellent à la responsabilité du gouvernement afin qu’il diligente tous les audits qui permettront d’éclairer les déclarations que nous faisons, qu’il mette au moins une fois en œuvre le Comité de suivi de la privatisation de la SN-SOSUCO et enfin qu’il soit mis fin à la cession de la SN-SOSUCO au Groupe IPS pour espérer sauvegarder ce fleuron de l’agro-industrie et véritable poumon économique de la région des Cascades.

Banfora le 11 août 2009

Ont signé :

CGT-B

Omar Soma
Secrétaire général

USTB

Goudouma Kaboré
Secrétaire général

ONSL

Adama Boly
Secrétaire général

L’Observateur Paalga

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