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Conseil constitutionnel ivoirien : Une nomination qui ajoute à la suspicion

Publié le mercredi 12 août 2009 à 01h21min

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Pr Yao N’dré Paul

La présidentielle en Côte d’Ivoire, fixée au 29 novembre prochain, est l’événement majeur de l’agenda politique de cette fin d’année dans la sous-région ouest-africaine. En ce moment, Abidjan vit au rythme de cette élection, dont la bonne tenue consacrera la fin, tant attendue, de la crise qui secoue ce pays depuis plusieurs années.

A moins de quatre mois de cette échéance, capitale pour la tranquillité des eaux de la lagune Ebrié, les différents états-majors des partis politiques affûtent leurs armes pour se donner le maximum de chances dans ce scrutin, où les candidats sont loin d’être des plaisantins comme on en voit souvent sur notre continent avec des prétendants à la magistrature suprême qui ne mobilisent pas en dehors de leur village ou de leur quartier. C’est dans ce contexte de précampagne que le chef de l’Etat ivoirien, Laurent Gbagbo, a nommé le Pr Yao N’dré Paul à la tête du Conseil constitutionnel, en remplacement de Yanon Yapo, qui est en fin de mandat. Constitutionnaliste de renom, le nouveau promu a le pedigree nécessaire pour occuper une telle fonction. Rien à dire donc dans cette nomination qui, du reste, fait partie des prérogatives du président de la République.

Mais, au sein des chapelles politiques de l’opposition, le choix de ce juriste, quand bien même ses compétences ne sont pas remises en cause, fait l’objet de critiques véhémentes dans la presse militante. La raison de cette levée de boucliers est bien simple : le nouveau président du Conseil constitutionnel ivoirien, ancien ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation, est un militant bon teint du FPI, député de ce parti et président du Conseil général de Divo. Son curriculum vitae fait donc de lui un homme politiquement marqué en faveur du camp présidentiel, si bien que les adversaires de Gbagbo ne peuvent manquer de voir dans cette nomination une manœuvre pour verrouiller le système électoral, à défaut de contrôler la Commission électorale, dans la perspective de la présidentielle au regard du rôle assigné à cette institution.

En effet, le Conseil Constitutionnel a, entre autres attributions, le contrôle de la régularité de la présentation des candidatures, l’éligibilité des candidats, le déroulement du scrutin et le dépouillement des votes en ce qui concerne l’élection du Président de la République. Il est le grand juge électoral chargé de recevoir les recours en annulation, de statuer sur les plaintes et de valider les résultats définitifs du scrutin.

De ce fait, cette haute juridiction constitue un élément stratégique dans tout le processus électoral. Ainsi, la promotion d’un cadre de la formation politique au pouvoir à ce poste de responsabilité n’est pas innocente et traduit la volonté du chef d’avoir une certaine mainmise sur le scrutin. Du coup, ça ajoute à la suspicion quand on sait que le président Gbagbo est suspecté de ne pas vouloir organiser l’élection.

Contraint d’y aller pour diverses raisons, il use, selon ses contempteurs, de calcul politique pour succéder à lui-même. Gbagbo devait-il nommer un bonze du PDCI, du RDR ou de l’UDPCI ? Pouvait-il en être autrement dans un marigot politique où presque tout le monde est mouillé ? Même ceux qu’on présente souvent comme étant de la société civile ou des mouvements de droits de l’homme sont rarement neutres dans ce pays, très politisé, et ont souvent un penchant pour tel ou tel homme politique.

Dans ces conditions, on ne peut pas lui reprocher d’avoir placé un de ses fidèles lieutenants à ce poste stratégique, comme si les autres auraient résisté à la tentation d’y mettre un cacique sorti de leurs rangs. Sous Bédié, le premier responsable de cette institution n’était-il pas un baron du régime d’alors ? Loin de cautionner de tels choix, politiques, disons que force est de reconnaître que d’Alger à Ouagadougou en passant par Dakar et N’Djamena, le président du Conseil constitutionnel a toujours été un proche du président de la République.

Il appartient au constitutionnaliste et aux autres conseillers de cette juridiction de respecter leur serment et de dire le droit en toute âme et conscience comme c’est le cas dans certains pays occidentaux qui nous inspirent en matière de démocratie. Au Niger, la présidente du Conseil, en refusant de donner sa caution au projet de référendum, a montré aux yeux de l’opinion que, même nommée par Mamadou Tandja, elle demeurait indépendante.

En temps ordinaire, la nomination de Yao N’dré Paul passerait presque inaperçue. Mais, en cette période préélectorale, elle ne peut que susciter des réactions dans le landerneau politique, où le fameux sondage qui crédite Laurent Gbagbo de 43% des intentions de vote au premier tour et de 56% au second fait jaser. L’atmosphère étant déjà délétère, ces petits faits et gestes vont contribuer à pourrir davantage le climat social, ce qui n’est pas favorable à cette présidentielle, cependant décisive pour une sortie de crise

Adama Ouédraogo Damiss

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 13 août 2009 à 11:25, par leopold SEA En réponse à : Conseil constitutionnel ivoirien : Une nomination qui ajoute à la suspicion

    Monsieur,

    Tout d’abord je tenais à vous remercier de votre intérêt ainsi que celui de votre peuple pour mon pays...la Côte d’Ivoire.
    Cependant, il faut rester objectif dans l’analyse et la critique politique, surtout lorsqu’il s’agit de la côte d’Ivoire :
    avez-vous déja vu y compris dans les grandes démocraties occidentales, un chef d’état qui nomme à la tête d’une institution stratégique un opposant ?
    N’est-il pas normal pour Gbagbo de nommer à la tête du Conseil Constitutionnel un de ses proches...
    Demandez au chiraquiens....après l’arrivée de Sarkozy, demandez aux républicains après l’arrivée d’Obama...
    c’est une logique....les bruits des fanatiques de Ouattara et autres ne sont nullment fondés.
    Gbagbo est dans son bon droit et à exerçé ses prerogatives constitutionnelles.
    N’ALLEZ PAS ME FAIRE CROIRE QUE CHEZ VOUS LES HOMMES INTEGERES....CEUX QUI SONT A LA TETE DE VOS INSTITUTIONS SONT DES OPPOSANTS !!!!!
    ADO était 1er ministre, pdt que houphouét agonisait, il a nommé un Vice président d’origine béninoise ...à la cour suprême, car ce dernier lui était favorable.
    Bédié l’a fait.....ARRETONS CES CRITIQUES INUTILES...ET SANS FONDEMENT

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