On reconnaît deux femmes militaires qui se côtoient sans signe d’anxiété. Après les formalités et l’enregistrement des bagages, arrivent le chef d’état-major général adjoint des armées, le colonel-major Brice Bayala et le chef d’état-major de l’armée de terre le colonel-major Kodio Lougué. Les militaires sont regroupés sous un vaste hall pour écouter l’ultime message de la haute hiérarchie. "Tout le Burkina Faso vous regarde et nous avons confiance que vous allez représenter dignement le pays", a réaffirmé le colonel-major Bayala.

Ensuite par groupes, les précurseurs sont installés à bord du vol spécial UNO 152 affrété par les Nations unies. C’est à 4h 15 que le Boeing s’est arraché de la piste pour Nyala au Darfour. Au préalable, en fin de matinée du lundi 3 août 2009, le chef d’état-major général des armées, le général de brigade Dominique Djindjéré avait rencontré les précurseurs au camp Baangré de Kamboinsin. Nous vous proposons en intégralité l’adresse du général aux soldats de la paix du Burkina Faso.

Bachirou NANA

L’adresse du général aux soldats de la paix

Officiers, sous-officiers, militaires du rang, gendarmes, aviateurs, sapeurs, personnels civils de l’élément précurseur du Bataillon Laafi

Chers soldats de la paix du burkina faso

Le Burkina Faso, Terre des hommes intègres à nous lègué par nos ancêtres, est un pays épris de paix. Or qui aime avoir la paix chez lui, doit souhaiter la voir chez les autres.

Faisant sienne les dispositions de la Charte de l’Organisation des Nations unies, de l’Union africaine ainsi que celles édictées dans la Constitution de notre pays, son Excellence Monsieur le Président du Faso, Chef suprême des armées, suite à la promulgation de la loi par l’Assemblée nationale autorisant l’envoi d’un contingent militaire au Darfour, a instruit les Forces armées nationales de mettre sur pied un bataillon de la paix le Bataillon Laafi, dans le but de prendre part à la Mission hybride Nations unies, Union africaine au Darfour.
Aujourd’hui, le Bataillon Laafi est une réalité et la projection de ses matériels et équipements ainsi que de ses éléments constitutifs a commencé il y a deux mois de cela.

Personnels civils et militaires de l’élément précurseur du Bataillon Laafi ;

La Communauté Internationale à travers l’Organisation des Nations unies a décidé du déploiement de la MINUAD au Soudan, un pays frère en crise ;
Le peuple burkinabé à travers sa Représentation nationale, a décidé de la participation de ses Forces armées à cette mission pour contribuer au retour de la paix ;

Les Forces armées nationales à travers le Commandement ont porté leur choix sur vous pour constituer le Bataillon Laafi, en vue de les représenter dignement au sein de cette mission.
Chers soldats de la paix ;

Vous voici donc à quelques heures de votre envol, après plusieurs mois de formation intense suivie d’un bon moment de préparatifs, d’attente et même d’impatience. A bord du vol spécial UNO 152 affrété par les Nations unies, vous prendrez les airs tard dans la nuit du 03 au 4 août 2009 en direction de Nyala au Darfour.

Au nom de Monsieur le ministre de la Défense, de l’ensemble du Commandement, de tous vos frères d’armes et en mon nom personnel, je voudrais tout d’abord vous traduire notre satisfaction et notre fierté de vous avoir comme ambassadeurs à ce rendez-vous des braves pour faire la paix Je voudrais ensuite vous rassurer une fois de plus, de la conscience aiguë que le Commandement a du caractère et de la portée de la mission qui vous est confiée. Dans l’histoire de la participation des Forces armées nationales aux Opérations de soutien à la paix, c’est bel et bien la première fois qu’elles contribuent avec une unité constituée de la valeur d’un bataillon avec armes, matériels et équipements.
Assurément, vous constituez des pionniers.

Chers valeureux pionniers !

Le Burkina Faso tout entier, la Communauté Internationale et plus encore le pays hôte ensemble, avec les parties en conflit, ont le regard rivé sur vous.

Lorsque les portes de l’avion s’ouvriront sur le tarmac de Nyala et que d’une marche altière, arborant l’écusson frappé du drapeau burkinabé, vous descendrez des marches sous les feux des projecteurs de l’actualité, rappelez-vous ceci et gardez-Ie en souvenir des recommandations ultimes du Commandement .

Premièrement : de vos comportements et attitudes sur le théâtre d’opération

Vous allez évoluer à partir de cet instant précis dans un pays étranger, en ambiance internationale, au sein d’une force multinationale et pluridisciplinaire, elle-même composante d’une mission de soutien de la paix placée sous un mandat des Nations unies. Vos comportements et attitudes devront donc, à côté de ceux habituels du citoyen burkinabè que vous êtes :
1. Respecter les mœurs du pays hôte, un pays frère africain, arabe et islamique ;
2. Tenir compte des cultures des autres frères d’armes que vous côtoierez tous les jours ;
3. Se conformer strictement aux règles de comportement en vigueur au sein de la Force ;
4. Maîtriser les règles d’engagement édictées par votre Commandant d’unité et qui découleront de celles de l’ensemble de la Force.

Deuxièmement : de vos langages et propos durant la mission

Pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment, avant de tenir tout propos engageant votre qualité de membre du contingent burkinabé, vous devez vous référer à votre supérieur hiérarchique ou vous abstenir. Le cas échéant, situez toujours la légitimité de votre présence sur le théâtre d’opération et la légalité de vos actions, respectivement dans le cadre juridique ainsi que les règles de comportement et d’engagement évoqués... plus haut.

Troisièmement enfin : de l’image de marque de votre pays...

…N’oubliez jamais qu’en votre qualité d’ambassadeur, que vous soyez en public ou en privé, vous véhiculez l’image de marque de votre pays. Travaillez à en présenter une qui l’honorera et qui vous attirera en retour respect et sympathie, toutes choses qui seront d’un apport très certain pour la réussite de votre mission.

Méfiez-vous surtout de la violence faite aux femmes et aux enfants, prenez garde des comportements à risque, voire scandaleux, abstenez-vous de consommer ou d’emporter des produits et objets d’art prohibés. Je ne saurai terminer mon adresse, sans m’appesantir sur un aspect qui me paraît très important. Ainsi que je vous le disais, vous êtes des pionniers dans cette mission d’un contingent militaire au Darfour. Et parce que vous êtes des pionniers, vous êtes amenés à affronter des difficultés causées entre autres par des vides institutionnels et juridiques ainsi que par l’insuffisance d’expériences capitalisées pour des missions du genre. Nous n’avons d’expérience nulle part ailleurs pour nous en inspirer que celle émanant du bon sens collectif, de la bonne volonté et de l’engagement de tous.

Sur les plans de l’acquisition du matériel et des équipements, des préparatifs du Bataillon et de l’homme lui-même, en dépit des énormes sacrifices consentis aussi bien par nos partenaires que par le budget national, certaines préoccupations demeurent et des solutions idoines seront trouvées. Il y va du moral de la troupe et du succès de cette mission A présent, l’heure d’aller sur le terrain a sonné. Tous unis autour de votre chef qui vous attend déjà sur le théâtre d’opération, allez et remplissez votre mission avec la conviction que derrière vous au pays, le Commandement et vos frères d’armes, de même que vos familles, vos parents et vos amis mettent tout en œuvre, chacun dans ses domaines de compétence, pour que tout se passe pour le mieux et que vous reveniez tous sains et saufs au Faso, dans la joie de la mission bien accomplie et dans la chaleur de la retrouvaille des vôtres.

Bon vent au Bataillon Laafi !

Bonne mission à toutes et à tous !

Que Dieu tout-puissant bénisse et protège tout un chacun de vous !
Je vous remercie !

Sidwaya