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Démocratie burkinabé : Notre responsabilité à tous

Publié le mercredi 22 juillet 2009 à 01h43min

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La récente visite du président Obama au Ghana me donne l’occasion de partager avec vous ces quelques réflexions sur la démocratie burkinabè, sur les promesses que nous ne tenons pas pour notre pays, sur nos échecs ou notre myopie à l’égard de ce qui est possible.

“J’ai toujours pensé que l’Afrique et les Africains sont, au moins, autant capables que les autres. Et après tout, nous sommes le continent qui a donné naissance à l’homme. Joseph Ki-Zerbo l’a dit, et cela, nous ne le rappelons que rarement. Comme si nous ne croyions pas vraiment à nous-mêmes. Il y a une réalité cruciale dans ce monde : la force des idées. Au Burkina Faso, comme dans beaucoup d’autres pays africains, nous n’avons pas réussi à ancrer l’idée de démocratie.

La démocratie est, avant tout, une règle. Très peu d’entre nous croient en la force des institutions, en la démocratie comme règle. Au sommet de nos Etats, très souvent on organise des élections pour « légitimer » son pouvoir mais on ne croit guère en la démocratie comme règle de gouvernement. Plus stupéfiant encore, il y a un grand nombre de jeunes Africains, souvent aux longues années d’études supérieures qui, sans doute désabusés par la parodie démocratique, se trouvent à déclarer, avec conviction, qu’il nous faut des dictateurs éclairés. A chaque fois, on mesure le long chemin qui nous reste.

Disons-nous la vérité il est difficile de parler de démocratie dans notre pays lorsque tous ceux qui veulent incarner une opposition politique digne de ce nom sont obligés de se poser mille et une questions sur leur sécurité et celle de leur famille. Par exemple, beaucoup de Burkinabè se demandent quelles sont les intentions réelles de Zéphirin Diabré ; d’autres soutiennent même qu’il est une marionnette du président.

La vérité, c’est sans doute que ce monsieur sait qu’au Burkina Faso nous n’avons pas encore fait la preuve de la démocratie. Et comme quelqu’un l’a si bien dit, pour le combattant de la liberté, le terrain, c’est d’abord la survie. Mais je voudrais rappeler à tous mes concitoyens qui doutent de la démocratie, ce propos du président Obama : « l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais de fortes institutions ». Au Ghana, l’institution démocratique a permis d’instaurer une règle qui permet que des présidents intègres se succèdent, que les dirigeants soient comptables de leurs actes, que la corruption soit punie, que le développement atteigne chaque village et chaque famille, que la stabilité sociopolitique ne soit pas de façade.

Et si j’en juge par l’interview que Salif Diallo a donnée à L’Observateur Paalga (n° 7419 du 08 juillet 2009), la présence d’un homme fort à la tête du Burkina Faso depuis plus de 20 ans ne débouche pas sur des institutions démocratiques ni un développement équilibré, mais sur davantage de problèmes et fait planer de sérieuses menaces sur notre stabilité. Au point qu’il appelle à réinventer le système dont il a été l’un des artisans les plus farouches. Quelle lucidité, enfin ! Soit dit en passant, je ne partage pas du tout la médication qu’il propose. En vérité, dans le contexte actuel, en tout cas, cela va simplement favoriser son propre retour au-devant de la scène, la présidence à vie et la résilience du système, mais pas un Burkina Faso meilleur.

J’invite les premières autorités burkinabè et le CDP, qui rentre bientôt en congrès, à oser le choix sincère de la démocratie. Et au lieu de se contenter de s’émouvoir du constat d’échec fait par Salif Diallo et de le sanctionner, ils feraient mieux de se rendre à l’évidence. Le parti au pouvoir a trop souvent confondu ses intérêts propres à ceux du Burkina Faso. En son sein, beaucoup ne sont pas encore débarrassés du kyste idéologique de la dictature. Et aujourd’hui, de nombreux militants se disent prêts à ce que le président Compaoré, sans conteste leur meilleur atout politique, soit indéfiniment reconduit à la tête du Burkina Faso.

Or, notre lourd passé politique et l’échec de notre transition démocratique commandent, pour réellement entrer dans l’ère de la démocratie, que des bouleversements s’opèrent au sommet de l’Etat. C’est pourquoi il serait très salutaire que le président Compaoré renonce de lui-même à être candidat à la présidence, et ce, dès la fin de son mandat actuel en 2010. Il pourrait, s’il le souhaite, briguer plus tard la présidence. Mais cet évènement, la construction de la démocratie au Burkina Faso en a grand besoin.

Plus vite il interviendra, et mieux ce sera. Ce serait un changement institutionnel en soi. Ailleurs en Afrique, d’autres hommes ont renoncé au pouvoir. Ce n’est donc peut-être pas si difficile que cela. Ainsi, je ne saurais terminer ce texte sans insister sur la responsabilité de l’opposition politique et des citoyens ordinaires que nous sommes. Nous n’avons pas su inventer des stratégies adaptées pour faire face à la puissance politico-militaire du régime, à l’appareil du CDP. Très souvent, nous avons préféré déserter le combat pour toujours. Souvent, nous avons succombé à la tentation de nous rallier facilement au pouvoir. D’autres ont préféré se réfugier derrière des combats d’arrière-garde et rêvent encore du grand soir.

Comment tous ceux qui se disent opposés au régime pourront-ils expliquer demain à leurs enfants qu’ils n’ont pas été capables d’abandonner leurs égoïsmes au profit d’un front républicain qui les rassemble tous autour de la nécessité de l’alternance et de l’alternative politiques ? Le jugement est déjà sévère ! Voilà au moins deux décennies que plusieurs vagues de jeunes Burkinabè avides d’exercer leur citoyenneté sont parvenues à maturité, mais ne trouvent pas où s’engager politiquement. J’ai vu plusieurs de mes aînés s’investir passionnément dans les organisations démocratiques de jeunes. J’ai été séduit par la qualité et la sincérité de nombre de ces enfants du Burkina Faso. Mais c’est un déchirement que de ne voir aujourd’hui que très peu d’entre eux servir politiquement le Burkina Faso, à travers le parti au pouvoir ou l’opposition.

L’absence de démocratie n’a pas favorisé une offre politique qui puisse séduire ou assurer la survie de tous ceux qui sont dans une quête sincère de service au compte du Burkina Faso. C’est cette réalité que nous devons tous travailler à changer. Notre responsabilité est collectivement engagée : du palais de Kosyam jusqu’au village le plus reculé, en passant par les sièges de tous les partis politiques et de toutes les organisations de la société civile. Et ça tombe bien, Obama vient de nous le rappeler : « yes, you can ! »

Yacouba Gnègnè, (ygnegne@gmail.com)

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 22 juillet 2009 à 11:29, par franck dit aspirant Barde En réponse à : Démocratie burkinabé : Notre responsabilité à tous

    Notre propre myopie est que le president Blaise par ci Diallo par la et du coût chacun de nous ferme ses yeux sur ses propres manquements quand je pense a Israël ou chaque citoyen doit être un agent défenseur de la nation d’Israël je me demande pourquoi au Faso tout ce résume au président et a sa famille, pour respecter un stop doit-on voir le policier et puis freiner brusquement que nenni, on vole, on pille, on détourne, on surfacture ,on fait de faut bilan de sa société on intimide les constatateur, et on bombe la poitrine le pays va mal, c’est la faute a Blaise,puisque c’est de lui que je répond et puis qui est fou qui ne veut pas sa patrol ,sa maison a Ouaga2000
    On ferme les yeux pour les banqueroutes des société d’état après on cri,si Blaise avait donner l’ordre on auraient agis résulta perte d’emplois. En conjecture le cadre ce plis en deux explique par A,plus B, que sa gestion étai bonne mais que c’est la faute aux autres

  • Le 22 juillet 2009 à 16:27, par ismael zizien En réponse à : Démocratie burkinabé : Notre responsabilité à tous

    franchement si au burkina on avais des analyse de ce genre depuis longtemps on ne serais pas entrain de tatônnés aujourdhui ! c’est ce qu’on appel prendre ses responsabilté,être un journaliste et joué son rôle de journaliste !
    je ne peut que vous souhaités de continués dans cette lancé,de toujour faire avec la lucidité qui a accompagné cette analyse !
    mille fois bravo !!! et mercis encore

  • Le 22 juillet 2009 à 19:23 En réponse à : Démocratie burkinabé : Notre responsabilité à tous

    ça c’est du professionnalisme !

    Ne dit on pas que chaque peuple merite son président ?

    Si nous sommes comme ceux qui nous gouvernent, qu’on ne s’etonne pas des conséquences. On ferme sa gueule ou on change.

    Imaginez un seul instant, une seule seconde, si nous étions tous civiquement, ploitiquement, financierement ...... correcte ?
    Ils n’y pas de raisons que nos gouvernats ne change pas , si nous nous changeons !

    Dieu bénisse le Burkina et les burkinabés !

  • Le 23 juillet 2009 à 11:44, par Jules En réponse à : Démocratie burkinabé : Notre responsabilité à tous

    La démocratie doit être un jeux transparent Mais on constaté que ce n’est pas souvent le cas en Afrique On parvient au pouvoir et on veut établir une monarchie ou faire du pouvoir un héritage familiale La vraie démocratie devrait reposer sur des textes qu’aucun dirigeant ne puisse modifier à sa guise pour se stabiliser indéfiniment au pouvoir En Afrique il n’y a pas de démocratie, c’est un désordre politique Les Etats Unis sont un grand pays et le premier pays démocratique avec peu de parties politiques C’est pourquoi je dits que c’est un désordre politique et non de la démocratie Il faut commencer à réduire le nombre : les parti qui n’ont pas obtenu un seul député aux élections il faut rayer définitivement de la liste Les parties qui n’ont obtenue qu’un ou deux députés il ne faut qu’ils se présentent aux élections prochaines Trois partis pour le Burkina c’est bon L’indépendance des POUVOIRS doit être réelle Il faut une séparation nette des quatre pouvoirs :

    -  L’exécutif
    -  Le législatif
    -  Le judiciaire
    -  La Presse

    C’est pourquoi la proposition de Salif est à mon avis juste Parce qu’elle pourrait peut-être conduire à l’établissement de cette indépendance et partant une démocratie réelle sans confiscation du pouvoir

    Il faut imiter les américains sur le plan du jeu démocratique Prenons le cas du Niger Il n’est pas le seul à vouloir se maintenir au pouvoir en traficotant la constitution, même au Burkina le traficotage est réel Pour qu’il y ait démocratie il faut que cela cesse Il faut que ces textes contiennent des clauses qui interdisent tout traficotage C’est pourquoi nos pays devront copier les Etats-Unis sur ce plan Il faut revoir les textes pour qu’ils soient proches de la Constitution américaine

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