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SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

Publié le mercredi 22 juillet 2009 à 01h43min

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La suspension de Salif Diallo des instances et structures de son parti, le CDP, n’en finit pas de faire réagir les personnes physiques et morales. Dans les lignes qui suivent, un enseignant, membre de la LIA/TD donne sa lecture de cet évènement qui est parti pour tenir longtemps en haleine les Burkinabè.

Il n’y a que la vérité qui blesse. Ce truisme éternel, Salif Diallo vient de le vivre dans son âme devant les Burkinabè, suite à la sanction que son parti lui a infligée pour acte d’indiscipline à cause des propos qu’il a tenus dernièrement dans "L’Observateur Paalga". Ne soyons pas étonnés, au train où vont les choses, qu’il subisse une sorte de double peine puisqu’on dit qu’une lettre d’explication lui a également été adressée par le ministère des Affaires étrangères.

Mais alors que des clans célèbrent, comme dans la chanson d’Henri Salvador, la mort du Lion, il faut craindre que « l’animal » ne gagne plutôt en renom pour avoir, aux yeux de nombreuses personnes, été transformé en victime. Même en dehors des formes convenues en diplomatie et dans le parti, il n’a fait que répercuter les préoccupations portées par une grande partie de l’opposition et de Burkinabè qui pensent que le temps des réajustements institutionnels, du changement, du « Tekré », est largement venu. Son parti, au lieu de s’en prendre à ce point la mouche, aurait donc mieux été inspiré en montrant plus de souplesse et, pourquoi pas, en s’appropriant intelligemment ses propositions pour en examiner la faisabilité, ne serait-ce que partielle, tout en le tenant en respect.

Un tel acte de dépassement se justifiait d’autant plus que la refondation dont Salif Diallo se fait ici le démarcheur intrépide n’est pas de son cru (comme, du reste, il le reconnaît lui-même avec un fair-play peu habituel chez nous) et que l’Assemblée nationale en a, en quelque sorte, déjà tâté avec les réformes entreprises en son sein même si on y jure, en dépit des évidences, que tout baigne dans la maison CDP comme dans la République ou le lait et le miel coulent à profusion pour tous.

Au lieu de cette retenue, on a frappé, malmené, jeté aux chiens. Du coup, une part non négligeable de l’opinion se met à voir sous un autre angle « Machiavel », « Raspoutine », « Gorba », l’homme qui a mené la vie dure à plus d’un dans le pays et qui a conduit tambour battant une politique sans sentiment, émancipée de la primauté du droit, au service de son chef. A la réflexion, la sagesse commanderait qu’au lieu de se rebiffer, d’entrer en belligérance comme beaucoup le lui conseillent (à commencer par ses camarades), Salif Diallo accepte de boire la coupe jusqu’à la lie pour rester fidèle à ses nouvelles idées mais aussi à son patron contre lequel il ne devrait, en aucun cas, retourner le glaive mais plutôt partager jusqu’à la mort le bilan, qui est aussi le sien, quoi qu’il puisse faire. Peut-être, quand le temps qui gronde aux réformes aura fait son œuvre, lui reconnaîtra-t-on à tout le moins le bénéfice du franc-parler.

Pendant que Blaise Compaoré se tait, faisant comme si... et qu’on assiste, à la veille du congrès, à une espèce de tragédie à la grecque qui passionne l’opinion et donne (il faut l’avouer) du relief à cette grande rencontre à venir, beaucoup se demandent ce que fait l’opposition. Face aux gens de la majorité qui s’étripent au grand jour, elle avance, pour expliquer son inexplicable silence, vouloir comprendre avant de s’exprimer mais on ne comprendrait pas qu’elle finisse par rester aphone alors qu’un appui de taille a été apporté à ses revendications. En effet, en un seul entretien, tous les fondamentaux du régime ont été secoués. A ceux qui parlaient de fichier électoral « bordélique », Salif Diallo vire sa cuti et répond qu’il faut revoir tout le dispositif électoral pour lui assurer une meilleure transparence. Là particulièrement, on dit bravo car il n’est jamais trop tard pour bien faire ! Il suggère même, dans l’interview incriminée, que l’on revivifie l’Assemblée nationale d’une légitimité plus franche et qu’on recourt à une constituante au besoin en reculant la présidentielle de 2010 pour permettre, par l’assainissement du cadre institutionnel, l’éclosion d’une véritable démocratie. Si en dépit de tout, Salif Diallo convainc, c’est précisément qu’aux yeux de la majorité, il sait de quoi il retourne !

L’ambassadeur a frappé l’opinion parce qu’il rejoint tout d’abord les positions déjà anciennes de l’UNDD, celles actuelles des refondateurs nationaux et des démissionnaires du CDP qui préconisent une relecture de nos institutions, une pause pour remettre la machine démocratique à flot. Ceux de ses compagnons qui le combattent sans réserve parce qu’il cracherait dans la soupe, qu’il renierait son œuvre, ne sont pas, à la réflexion, les meilleurs défenseurs ni des intérêts de l’homme de Kosyam qu’ils se proclament ni des institutions de la 4e République qu’ils considèrent comme un modèle du genre. En tout cas, tel n’est pas le sentiment, si l’on s’en tient à l’écho suscité par les prises de position du « suspendu" à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Même si ici et là, il aurait dû souvent être recadré, cantonné à des seconds rôles pour ne pas écraser tout sur son chemin et avoir ainsi la grosse tête, il est, en ce moment, à ce qu’on voit, dans la juste ligne et on ne gagne jamais vraiment à pousser de tels hommes jusqu’à leurs derniers retranchements, sauf à savoir leur tenir la bride courte.

L’opposition, pour en revenir à elle, serait en tous les cas impardonnable, et cette fois-ci, tenue à juste raison pour la plus bête d’Afrique si ses membres n’arrivaient pas à contenir leurs querelles subjectives, leurs enfantillages pour faire bloc autour de ce courant qui ne pourra que monter en puissance. Que les soutiens manifestés et à venir ne soient pas des chèques en blanc, qu’ils s’attachent surtout, non pas oublieux de tout, à sanctifier un homme mais à garantir le virage vers une démocratie plus vraie, une gouvernance plus solidaire qui n’emprunte pas les chemins de l’aventure. Par contre, le silence des leaders politiques et de la société civile par calculs, peur, tropisme, égoïsme de perdre des avantages, sera impardonnable aux yeux du peuple et de l’histoire. Les langues à cet égard commencent déjà à se délier. Plus rien ne sera comme avant. La machine CDP a été comme démystifiée, désacralisée. Plutôt que de s’échiner à dévaloriser l’homme pour dévaloriser son discours, il vaudrait mieux pour tous d’une manière ou d’une autre accepter la substance de ce que préconise l’ancien ministre d’Etat à la suite de bien d’autres dans le pays. Courage et solidarité agissante à tous ceux qui ont compris que la refondation est la voie de l’avenir.

Le 20 juillet 2009

Jean-Pierre SAWADOGO Enseignant Membre de la LlA/TD

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 22 juillet 2009 à 11:09, par Alkapone En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    un loup devenu agneau parce que vomi par son clan, des incirconcis qui sortent faire une conference de presse comme s’ils pouvaient decider d’eux même alors que même la couleur des chaussettes qu’ils portent, ya quelqu’un qui decident pour eux. y en a marre.

  • Le 22 juillet 2009 à 12:28, par Yome En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    je suis d’accord avec l’analyse de mon cher enseignant. au lieu de tergiverser il faut que l’opposition nous montre cette fois ci qu’elle n’est pas tube digestif en s’alignant sur les idées de Salif et de barrer la route à patrimonialisation du pouvoir.

  • Le 22 juillet 2009 à 14:48 En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    Notre opposition n’est pas la plus bete d’ afriue. Pou sur, c’est la plus gourmande d’ afrique, tellement gourmande que pour des miettes, elle est prete a vendre les autres. Votre LIA, autre demembrement de Hermann et de son famille- parti, n’ inspire aucune confiance. D’ ailleurs , la seconde epouse de Blaise est le vrai fosasoyeur de la democratie au Burina. Merci pour votre longue reflection mais vous auriez mieux employe votre temps a rediger un roman. Quand quelqu’ un parle, ce qui est important, c’est son "record" au sens anglais du terme. Pas necessairement ce qu’ il dit. SD a dit de tres bonnes choses mais c’est un peu le retour du chat de la Mecque qui voudrait hobnober avec les souris : Ca va etre dur , hein. Pour ce qui vous concerne, toi et Hermann, il vous manque la seule piece qui vaille : La credibilite.
    Le peuple reste vigilant et on ne le trompera plus comme par le pase. Aller vendre vos reves ailleurs, Hermann, Salif, Francois Compaore et tout le reste qui n’a aucune fibre patriotique.

  • Le 22 juillet 2009 à 15:34, par Le JUSTE En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    Pour moi qui n’ai jamais porté ce régime dans mon coeur,meme si jai toujours respecter la loyauté de GORBA envers son mentor,je pense que ce débat n’est pas mien,ni pour ceux qui pense comme moi surtout pas celui de l’opposition parce que je pense que nous avons toujours par notre naivété trouver des solutions aux problèmes de Blaise et son régime.Ne gaspillons pas nos idées et gardons les pour notre tour.Laissons les se debrouiller seuls,j’appelle tous ceux qui n’aime pas ce régime de boyicoter leurs problèmes et le changement viendra de là bas plus tot que nous le pensons.Taisons nous et regardons. Le JUSTE

    • Le 23 juillet 2009 à 21:46, par Le Negus En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

      Moi je partage l’avis de LE JUSTE. Le Blaso et Salfo ne sont pas né d’hier et ils se connaissent c’est pas aujourd’hui. C’est dire que chacun d’eux sait ce qu’il fait et gare à l’asymétrie d’information. Je suis sceptique sur le fond de la pensée de ces deux gars là. Maintenant c’est voir la capacité et l’intelligence de nos cher "opposants" à pouvoir tirer profit de ces propos. Autrement, il est mieux pour de nous occuper de nos jardins et laisser ces gens là régler leurs histoires de famille. Quand ils en auront fini les uns avec les autres, on pourra y voir plus clair. Sinon comme le dit M. Le Juste, c’est le peuple qui va trouver la solution à leur problème pour eux pendant qu’ils dorment tranquilement sur le dos.
      Bonne chance au Faso.

  • Le 22 juillet 2009 à 16:32, par zongo de koudougou En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    merci pour votre analyse en tant citoyen comme moi . mais je demande a chaqu, un de ns de tenir compte du peuple reel , qui n, a besoin que la paix la longevite , l,eau pure , de quoi manger a sa faim et surtout la paix sociale .que dieu tt puissant benisse notre chere patrie . une chose est sure ,on est sur terre nu on repartira nu . un citoyen burkinabe en allemagne.

  • Le 22 juillet 2009 à 17:55, par Alain En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    Sachons seulement tirer des leçons à partir du parcours politique de SD. Seuls les intérets comptent en politique.

  • Le 22 juillet 2009 à 18:00 En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    Il y a deux points dans l’analyse que je ne partage pas. Premièrement, pour vous, le parti est allé trop loin. Vous dites que « son parti, au lieu de s’en prendre à ce point à la mouche, aurait donc mieux été inspiré en montrant plus de souplesse et, pourquoi pas, en s’appropriant intelligemment ses propositions pour en examiner la faisabilité ». Mais je pense que ça aurait été faire preuve de laxisme et de la politique du « deux poids deux mesures » si la sortie de Salif Diallo n’avait pas été sanctionnée. Le souvenir des Marc Yao & Co. est toujours vivace alors qu’eux n’étaient pas allés aussi loin dans leur mécontentement. Deuxièmement je veux bien « que Salif Diallo accepte de boire la coupe jusqu’à la lie pour rester fidèle à ses nouvelles idées et partager jusqu’à la mort le bilan » comme vous le dites, mais que faites-vous du « manque de confiance qui s’est désormais instauré entre Salif et la Ive République » comme l’a dit Roch Marc Kaboré ? Même en faisant son auto-critique et en fondant en larmes pour s’excuser, je doute fort que Salif Diallo puisse être re-admis dans le CDP. Quant à ce que l’opposition va en faire…

  • Le 23 juillet 2009 à 11:14, par Jules En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    Tout homme doit être libre de ses opinions Liberté reconnue par la déclaration universelle des droits de l’homme et même la constitution burkinabé Lesquelles reconnaissancent qu’aucune ne doit victime d’oppression ou de discriminations quelques pour ses opinions Je croix que Salif a le droit de dire ce qu’il veut ou pense quitte aux autres de partager ou de ne pas prendre position pour ses propos Au contraire je pense qu’ils devaient à leur tour montrer que ce Salif avance n’est pas fondé Il a ouvert un débat quitte aux autres de ne pas accepter cette ouverture Je ne vois aucune faute dans ce qu’il avance C’est son droit
    Les membres restant de ce partie doivent faire attention, car s’il est défendu à un aujourd’hui d’exposer ses visions politiques, demain cela pourrait être leur tour

  • Le 24 juillet 2009 à 04:55, par Le questionneur En réponse à : SUSPENSION DE SALIF DIALLO : La lecture politique d’un enseignant

    A qui profitera réellement ces reformes proposés par Salif Diallo ?
    Au peuple où à un groupe d’individus (lui y compris) ?

    Quel jugement pour tous les crimes impunis ?

    Supposons que l’idée originale du scénario était de Blaiso, et que Salif Diallo assurait seulement que la mise en scène.

    Comment feront t ils pour la distribution des rôles ?

    sachant qu’il va falloir trouver un acteur principal et un chef bandit à neutraliser à la fin du film, pour que l’espoir revienne.

    Le peuple jouira t il de son rôle éternel de figurant ?
    Le brave pourra t il redonner l’espoir au peuple, et repartir comme à la fin d’un western ?

    je me demande encore des questions...

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