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PDP-PS : Dur, l’aprés Ki-Zerbo

Publié le vendredi 26 juin 2009 à 01h38min

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Dur, l’après K Au Burkina, les partis politiques sont constamment confrontés à des crises internes. La résultante de cette situation inconfortable, on la connaît : c’est cette sorte de scissiparité dont les Burkinabè sont obligés de s’accommoder malgré eux. C’est le cas notamment au PDP-PS, le parti fondé par le Professeur Ki-Zerbo et qui traverse de graves moments d’incertitude, teintés de déchirements internes.

Les apparatchiks du PDP-PS ont été particulièrement expéditifs. Moins de 2 ans après la disparition du « père fondateur » de leur maison commune, ils ont gagné leur pari. Celui d’étaler leurs divergences au grand jour et sur la place publique. Naturellement, en pareille occasion, chaque camp dissident se réclame de la flamme originelle.

C’est d’abord l’universitaire et philosophe Etienne Traoré qui, excédé, dit-il, par les agissements de la « nouvelle direction » à son encontre, décida de claquer bruyamment la porte, en créant sa propre formation politique baptisée « Faso METBA ». Mettant ainsi ses ex-camarades dans l’embarras. Eux qui tentaient vainement de contenir la fronde. Ces derniers n’ont d’ailleurs pas trouvé d’autre solution que de fustiger ce qu’ils considèrent comme étant de l’opportunisme. Par médias interposés, les pugilistes de gauche se sont ainsi livré une bataille féroce dont ils savent pourtant qu’ils sont les seuls perdants.

Mais comme une division ne vient jamais seule, voilà qu’à la suite d’Etienne Traoré, c’est une grosse tête couronnée du parti, en l’occurrence le Dima de Boussouma, qui s’est offert un petit air de liberté. Il est désormais le président d’honneur du « RDS », un parti qu’il vient de porter sur les fonts baptismaux avec comme leader Wendlassida François Ouédraogo. Député à l’Assemblée nationale depuis les 4 législatures, le Dima n’a pas cherché à refaire la roue. Il lui a juste suffi de faire comme bien d’autres avant lui. C’est-à-dire créer sa « chose ». Cette méthode, qui est devenue très classique au Burkina, n’est pas sans inconvénient sur la conduite du jeu politique.

En effet, elle a tendance à rendre l’espace démocratique particulièrement hétérogène, voire composite. Ce qui n’est pas forcément un gage de qualité et de sérénité. Il convient de se souvenir que bien avant les deux personnalités citées plus haut, c’est le Dr Emile Paré qui fut l’un des tout premiers à officialiser son divorce d’avec le parti. Depuis lors, le « chat noir du Nayala » poursuit tranquillement sa route vers la conquête du fauteuil présidentiel. En cas de victoire, le médecin-président se propose d’administrer sa potion miracle à un Faso qu’il dit être malade de ses dirigeants actuels. C’est oublier pourtant que le socialisme burkinabè dont il se réclame traverse des moments difficiles et qu’il a plus que jamais besoin d’un remède de cheval.

A l’image du parti socialiste français, le PDP-PS continue de se chercher une nouvelle identité sur l’échiquier politique local. Plus encore, il doit faire face à des dissensions internes. Au point de miner ses propres chances de maintien au sein de l’élite. Jadis première force de l’opposition, et réputé autant pour sa force de proposition que pour sa grande capacité de mobilisation de l’électorat, il n’est plus que l’ombre de lui-même à l’heure actuelle. Et rien ne dit que la situation actuelle va s’apaiser. Au contraire, les jours et les semaines qui passent voient la fracture s’agrandir. Comme dirait l’autre, elle est loin, l’époque où le charismatique Ki-Zerbo savait trouver la petite phrase ou le petit mot pour faire passer la pilule. En particulier, lorsqu’on lui reprochait, par exemple, de ne pas songer à un rajeunissement du parti.

Manifestement, ce n’est pas le cas avec ses anciens compagnons, qui sont véritablement à la peine. En dépit de leurs efforts pour être à la hauteur de la tâche, ils ne parviennent toujours pas à faire décoller la fusée.
Du côté des militants, c’est également la décrue. Fatigués de subir les querelles intestines de leurs dirigeants, certains ont préféré choisir leur camp, question de noyer leur spleen. Pour eux, comme pour bien d’autres, le parti n’aurait pas fait sa cure de jouvence. Principalement, sur le plan de ses structures. Des critiques balayées du revers de la main par l’actuelle équipe dirigeante. Certes, elle admet que le fonctionnement d’un parti politique n’est pas une mince affaire, mais elle refuse d’accorder du crédit aux propos alarmistes, qui tendraient à présenter le PDP-PS comme une coquille vide. Pourtant, il faut reconnaître que le contexte électoral à venir s’annonce très difficile pour les socialistes burkinabè.

En 2005, ils avaient fait chorus autour de la candidature d’Ali Lankoandé, un des plus fidèles compagnons du Pr Ki-Zerbo. En 2010, la situation sera moins gaie, à cause notamment des nouvelles dispositions relatives aux candidatures à la présidentielle et qui viennent d’être adoptées par le Parlement. Parmi celles-ci, on peut noter le relèvement de la caution qui passe de 5 à 10 millions de francs CFA. Mais en plus, le candidat devra désormais se faire parrainer par des élus. Dans ces conditions, les bisbilles actuelles pourraient desservir fortement les intérêts d’une mouvance dont l’héritage idéologique est à ce point disputé, semblable à la tunique du Christ que les soldats tirent au sort, après l’avoir mis en croix.

Malheureusement, cette angoisse existentielle n’est pas le propre du PDP-PS. Bien au contraire, elle est largement partagée par l’ensemble de la classe politique, toutes tendances confondues. Si bien qu’à force d’enfanter sans cesse des petits partis, la scène partisane se trouve confrontée à une démographie galopante. Du reste, sur la centaine de formations politiques officiellement recensées et autorisées à exercer leurs activités, seules quelques-unes fonctionnent selon les règles de l’art. Les autres n’ayant d’existence légale que le seul nom qu’elles portent.

Face à cela, les avis sont partagés au sein de l’opinion nationale, concernant l’attitude à observer par les autorités. Pour les uns, l’on ne devrait pas empêcher les partis politiques de se créer au rythme qui leur convient, au risque d’enfreindre aux principes de la démocratie et de l’Etat de droit. Pour d’autres, par contre, il est impérieux de réfléchir dès à présent à la recherche de mécanismes alternatifs, afin de venir à bout de ce qui semble être, à leurs yeux, une crise du système démocratique au Burkina. On comprend mieux pourquoi la loi sur les réformes politiques récemment adoptée a suscité autant de polémiques.

Créé au début des indépendances par des intellectuels de gauche avec à leur tête l’historien Joseph Ki-Zerbo, le Mouvement de Libération nationale (MLN) est l’ancêtre de la Convention nationale des patriotes progressistes/Parti social démocrate (CNPP/PSD). C’est cette dernière qui, lors des élections législatives du 24 mai 1992, remporta 12 sièges. Se classant ainsi seconde derrière l’ODP/MT qui, elle, obtint 78 sièges. En 1996, une aile dissidente de la CNPP-PSD décide de faire cause commune avec l’ODP/MT pour former le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), l’actuel parti au pouvoir. Quant à l’autre branche, elle restera dans l’opposition sous l’appellation de Parti pour la démocratie et le progrès/Parti socialiste (PDP/PS).i-Zerbo

A. Traoré

Le Journal du Jeudi

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