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L’Union européenne partage son expérience de la gouvernance régionale

Publié le dimanche 31 mai 2009 à 09h58min

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Le 7 juin prochain, les citoyens européens se rendront aux urnes pour renouveler le mandat de cinq ans des 736 députés siégeant à Strasbourg.
Mais à une semaine du vote, les citoyens européens ne semblent pas très intéressés par le scrutin. A en croire les chiffres publiés par des instituts de sondage, le taux d’abstention pourrait être supérieure à 60%, avec bien entendu des niveaux variables selon les pays : 66% des Irlandais seraient certains d’aller voter contre 64% de Belges où le vote est pourtant obligatoire, 52% au Danemark, 16% en Slovaquie, 24% en Tchéquie, 45% en France et 30% au Pays-Bas.

Il faut dire que les citoyens entretiennent avec l’Union européenne (UE) des rapports pour le moins ambigus. Tout en reconnaissant le mérite de l’UE d’avoir créé les conditions d’une paix durable entre les pays membres, et la nécessité pour les Européens d’avoir un ensemble politique et économique intégré pour faire face aux Américains et aux pays émergents, ils n’hésitent pas de voir en elle, la cause de leurs difficultés économiques. En raison sans doute d’un déficit de communication sur ses activités, c’est surtout la Commission européenne, installée à Bruxelles qui est en permanence l’objet des critiques les plus virulentes. Parfois à tort. Car, si on se plaît, et avec raison, à vilipender certaines directives européennes, comme celles qui concernant la taille et la longueur des concombres, il n’est pas juste d’occulter l’appui de la Commission aux nouveaux adhérents pour les aider à prendre le train de l’Union sans subir trop de secousses.

A l’occasion d’une « conférence sur la gouvernance régionale dans un contexte de mondialisation » organisée à Bruxelles, en Belgique, du 11 au 12 mai dernier par la Commission chargée de la politique régionale, les participants venus d’horizons divers ont pu apprécier le rôle de la Commission européenne dans la mise en œuvre de la politique de cohésion et de solidarité entre les 27 pays membres de l’UE. Et partagé aussi les expériences en matière de décentralisation et de développement régionale menées ailleurs sur d’autres continents. (Voir Interview plus bas).

Selon la Commissaire chargée de la politique régionale Danuta Hübner, « 43% de la production économique et 75% des investissements consacrés à la recherche et à l’innovation [dans l’UE : NDLR] se concentrent sur seulement 14% du territoire européen, soit le Pentagone formé par Londres, Hambourg, Munich, Milan et Paris ». Dans un ensemble composé de 27 pays avec des disparités de développement, comment aider les plus pauvres, notamment les nouveaux arrivants, à combler leur retard à défaut de le rattraper ? L’Etat le plus prospère de l’Union européenne, le Luxembourg, est sept fois plus riche que le plus pauvre, la Roumanie.

Avec de telles disparités, seule une politique volontariste de soutien des pays ou régions pauvres par des investissements massifs dans des secteurs stratégiques permettra de combler les retards de développement. Au nom du principe de solidarité, des moyens financiers ont été mobilisés, un tiers du budget global de l’UE, à cette fin sur la période 2007-2013 à travers des milliers de projets à réaliser dans les régions, pays ou villes. A l’expérience, le soutien aux pays ou régions pauvres profite non seulement aux populations qui y vivent, mais aussi à l’ensemble des pays de l’UE d’autant plus que les projets sont exécutés par des entreprises venant des pays riches. Sur la période 2007-2013, l’UE a ainsi décidé d’allouer 347,7 milliards d’euros afin de soutenir la croissance régionale et stimuler la création d’emplois.

Pour atteindre ces objectifs, l’UE s’est dotée de trois fonds : le Fonds européen de développement régional (FEDER), le Fonds de cohésion et Fonds social européen (FSE). Le premier est destiné à améliorer la coopération régionale, à booster la compétitivité, tandis que le second vise à développer les infrastructures de transports, les énergies renouvelables dans les pays dont le revenu national brut est inférieur à 90% de la moyenne communautaire. Enfin le troisième sert à renforcer les capacités des travailleurs afin qu’ils s’adaptent aux besoins des entreprises, et à combattre les discriminations dans l’accès à l’emploi. Environ 83 milliards d’euros seront affectés aux infrastructures de recherche, aux transferts de technologies et à la vulgarisation des nouvelles technologies e l’information, 76 milliards seront investis dans les transports transeuropéens écologiquement viables et 51 milliards dans l’approvisionnement et l’épuration des eaux et la protection contre les risques environnementaux.

Afin de rationaliser le soutien aux pays membres, les fonds de la politique régionale sont gérés de façon décentralisée par les gouvernements nationaux ou régionaux bénéficiaires. Dans un cadre général défini par l’UE, les régions identifient leurs projets prioritaires dont l’exécution sera suivie aussi bien par les autorités européennes, les partenaires sociaux et la société civile. Dès qu’un projet est accepté, l’UE effectue un premier acompte, puis procède par la suite à des décaissements intermédiaires. Mais si l’utilisation des fonds ne respecte pas les procédures financières rationnelles, l’UE peut arrêter le financement et réclamer le remboursement des sommes déjà versées.

Sur la période 2007-2013, la Pologne bénéficie de 67,3 milliards d’euros destinés à moderniser ses infrastructures, moderniser l’administration et développer les zones rurales. Objectifs : créer 3,5 millions d’emplois, tripler la longueur des infrastructures autoroutières et ferroviaires et augmenter le Produit intérieur brut (PIB) par habitant de 51 à 65% de la moyenne communautaire. 2,3 milliards d’euros sont alloués à la Belgique pour améliorer la compétitivité de ses régions et renforcer la coopération territoriale européenne, avec comme objectifs, l’augmentation à 60% du taux d’emploi pour les femmes et 50% pour les travailleurs âgés de 55 à 64 ans.

Grâce à la politique régionale, de nombreux pays, villes et régions ont pu se doter d’infrastructures adéquates pour prendre le train de l’UE

Joachim Vokouma, envoyé spécial à Bruxelles


Ibrahim Tamponé, Commissaire à l’Aménagement du territoire communautaire, des transports et du tourisme de l’Union économique et monétaire ouest-africain (UEMOA)

Qu’attendez-vous de ce colloque sur la gouvernance régionale et quel est le message que le commissaire de l’UEMOA souhaite faire passer ?

Ibrahim Tamponé

Comme vous le savez, le thème porte sur « La gouvernance régionale dans un contexte de mondialisation », particulièrement marqué par une crise financière et économique. C’est une conférence qui est internationale car il y a beaucoup d’expériences qui vont être déclinées, il s’agit donc d’un forum où nous allons échanger, c’est à dire, en principe donner et en recevoir également.

Européens, Africains, ressortissants de l’Amérique Latine…, nous allons montrer et expliquer comment nous avons vécu la période d’avant la crise en matière de coopération, qu’est-ce qui peut se profiler à l’horizon et quelles sont les stratégies à mettre en œuvre pour surmonter cette situation de crise. C’est de cela que nous sommes venus échanger avec les uns et les autres.

Quel message souhaitons-nous faire passer ? Expliquer ce qui se fait chez nous en matière de décentralisation et partager notre avis sur l’avenir du partenariat nord-sud. Dans notre espace UEMOA, nous savons que nos Etats sont engagés dans un processus de décentralisation depuis la fin des années 80-90, donc c’est une expérience qui est relativement jeune. Ce qu’il faut souligner, c’est que cette décentralisation se mène dans des pays où 70 à 80% de la population n’est pas alphabétisée, et nous sommes une région qui fait face à des crises alimentaires, énergétiques et à des inondations. La décentralisation, se traduit concrètement par le transfert de certaines compétences de l’Etat vers les collectivités, c’est-à-dire, l’application du droit des collectivités locales à gérer leurs propres affaires sur la base d’élections libres et démocratiques.

Quel bilan peut-on faire des expériences déjà en cours dans l’espace UEMOA ?

Certains pays comme le Burkina, le Niger et le Bénin se sont lancés dans la politique de décentralisation depuis trois à quatre ans, et dans certains cas, le bilan n’est pas aussi mauvais. Mais comment les populations vivent cette expérience et qu’en tirent t-elles comme leçons afin de lever les blocages pour mieux avancer ? Au niveau communautaire, nous avons des contacts avec les Etats et suivons de près leurs pratiques politiques en général et celles liées à la décentralisation en particulier. Une chose est certaine, quelque soit le transfert d’argent que l’on fait au profit d’une collectivité ou d’un Etat, si la gouvernance n’est pas bien faite, c’est sûr que l’impact de l’utilisation de ces sommes d’argent sera limité. Les expériences que nous vivons sont en réalité des phases de transition, et il faudra attendre peut-être dans quinze ou vingt ans pour que les populations soient bien informées sur leurs droits et obligations, et aussi que les responsables locaux aient plus envie de faire en sorte que leur région progresse rapidement.

Cela suppose que les capacités des élus locaux soient renforcées…

Absolument ! Il faut que les élus puissent évaluer les ressources humaines et financières dont ils disposent, qu’ils établissement les priorités et qu’ils définissent clairement les défis auxquels ils sont confrontés. Sachant que, et il faut le dire, l’Etat sera toujours présent parce qu’il ne peut pas abandonner les régions sous prétexte que les responsabilités leur ont été transférées. L’Etat sera toujours là pour réguler et agir de sorte à amoindrir les disparités entre les régions. Par exemple, il y a des infrastructures que certaines les régions ne peuvent pas réaliser parce qu’elles sont pauvres alors que d’autres riches. Si l’Etat a senti la nécessité de créer des communautés, c’est de son devoir de faire en sorte qu’elles soient viables et en faisant jouer le principe de la solidarité, il est possible de donner à chacune d’elle les moyens de compenser son retard en matière de développement. C’est grâce à cette politique de solidarité que certains pays de l’Union européenne, notamment les nouveaux arrivants ont pu se développer.

Le principe de solidarité est-il réellement à l’œuvre dans l’espace UEMOA ?

Bien sûr ! Il faut savoir qu’avant même qu’on fasse adopter la politique d’aménagement du territoire par la conférence des chefs d’Etas et de gouvernements au milieu des années quatre-vingt dix, le législateur avait senti la nécessité de créer un fond d’aide à l’intégration régionale. C’est un fonds structurel mis à la disposition des Etats et aujourd’hui, la décision a été prise de l’abonder en conséquent à travers le budget et des aides que nous recevons de nos partenaires. Mais il faut être précis sur ce point. Quand l’Union intervient à travers le fonds d’aide à l’intégration, c’est sur des projets soumis par les Etats. Et, pour l’instant nous sommes à la phase de préparation de que nous appelons la coopération transfrontalière. Le fonds est l’outil et l’un des bailleurs de fonds de cette coopération transfrontalière, et nous avons d’ailleurs prévu d’en créer d’autres pour soutenir la politique de l’aménagement du territoire.

Après l’échec du projet Visa conseil de l’Entente, quelle est la politique communautaire en matière de tourisme, un secteur qui relève de vos compétences ?

La politique de tourisme est en préparation. Nous avons déjà fait 50% du travail en établissant un diagnostic de la situation grâce à une étude d’experts qui a été validée et ce document est en train d’être approfondi par un consultant que nous avons choisi. Ses conclusions nous permettrons d’élaborer un document de politique de tourisme au niveau communautaire avec un plan d’action. Evidemment c’est une politique qui viendra renforcer ce que les Etats ont fait, car à chaque fois que nous élaborons une politique, nous faisons jouer la subsidiarité, c’est-à-dire que nous prenons en charge ce que les Etats ne peuvent pas faire individuellement mieux que nous. Par exemple, nous pensons qu’il faut mettre un accent particulier sur la synergie car, au lieu que tout le monde fasse la même chose chaque année, il faudrait qu’il y ait des spécialisations dans certaines zones qui ont un potentiel touristique important mais qui sont enclavés. Ensuite, il faut pouvoir assurer la promotion de nos zones touristiques à l’extérieur au nom de l’UEMOA et pour cela, pourquoi ne pas imaginer des salons tournants qui seront sponsorisés ou financés par l’Union ? Rien n’est encore décidé sut le sujet, mais ce sont des choses qui sont dans le domaine du possible.

Il faut aussi étudier les dates des manifestations touristiques qui se déroulent dans la zone communautaire de sorte à éviter par exemple que celui qui vient au Salon international du tourisme et de l’hôtellerie de Ouagadougou (SITHO), ne soit pas obligé de rentrer et revenir quelques semaines plus tard pour participer à un autre dans un pays voisin. Le SITHO a lieu vers fin septembre début octobre, or immédiatement après, il y a le salon du tourisme au Canada. Si les étrangers occidentaux sont la cible de nos salons, on risque de les perdre avec des dates pareilles. Nous devons également renforcer les capacités des acteurs dans le secteur de l’hôtellerie parce qu’on n’a pas forcement le personnel qu’il faut. Nous allons donc donner les moyens aux écoles qui existent de mieux assurer la formation du personnel hôtelier, tout comme d’ailleurs, les écoles et instituts qui ont le label communautaire comme le Centre africain d’études supérieures en gestion de Dakar, au Sénégal (Cesag) ou l’Institut international d’ingénierie de l’eau et de l’environnement de Ouagadougou au Burkina (2iE).

L’état des infrastructures de transports dans l’espace UEMOA ne facilite pas les échanges commerciaux entre les pays membres. Comment la commission de l’UEMOA compte t-elle remédier à ce problème ?

Nous avons un programme dénommé « Programme d’action communautaire de l’infrastructure et du transport routier » et qui résume toute la politique de l’UEMOA en matière d’infrastructures routières et de facilitation des transports. Ce programme rentre dans un cadre plus général que nous avons mis en commun avec la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et qui bénéficie du soutien de l’Union européenne (UE). Nous allons construire des routes transnationales et sommes ne train de réaliser des postes de contrôles juxtaposés aux frontières, soit au total onze (11) pour l’UEMOA. La Banque africaine de développement (BAD) nous appuie également dans la réalisation de ce projet après avoir approuvé notre plan général de transport qui vise essentiellement à combattre les contrôles sauvages sur nos routes. Nous avons identifié trois endroits où les transporteurs de marchandises peuvent et doivent être contrôlés : au départ du port, au passage de la frontière, là où il faut remplir certaines formalités, puis, enfin à la douane.

En dehors de ces trois points, on ne doit pas arrêter les transporteurs de marchandises à tout bout de champ, surtout qu’ils sont équipés de macaron qui indique qu’au départ, ils sont en règle. Il n’y a donc aucune raison de les arrêter en cours de route parce que c’est illégal.
Pour répondre directement à votre question, sachez que nous sommes engagés sur plusieurs projets et aujourd’hui l’UEMOA coordonne plusieurs chantiers de route : Tema Ouaga Bamako, le corridor Bamako Dakar par le sud, Dori Tera Niamey, Guinée-Bissau Sénégal, Mali-Guinée et Sénégal-Guinée. Les financements sont acquis et les travaux ont commencé, seulement avec la flambée des prix, nous sommes obligés d’actualiser les coûts et revoir comment gérer le financement pour que d’ici trois ans, les principales capitales soient reliées les unes aux autres

Juridiquement, la compagnie aérienne de l’UEMOA existe, mais quand va-t-elle voler ?

Je ne suis pas le responsable direct du management de cette compagnie, mais aux dires de ses promoteurs, la compagnie prendra l’air cette année.
Les chefs d’Etat ont insisté pour que cette compagnie soit assistée et ait le droit de trafic qu’il faut pour prendre son envol. La CEDEAO va organiser une réunion en juin avec les compagnies nationales afin d’insister sur la nécessité d’aider cette compagnie communautaire à prendre son envol car elle sera un vrai outil d’intégration. Il faut toutefois compter avec les pesanteurs qui existent car c’est une compagnie qui va occuper le ciel africain où certains sont déjà installés, et je ne parle pas de nos petites compagnies…

Face à la crise alimentaire et énergétique, chaque gouvernement a réagi à sa manière, mais il n’y a pas eu de réponse régionale. Pourquoi ?

C’est normal que chacun ait cherché à parer au plus pressé ! Et de bonne foi, les gouvernements ont cru qu’en exonérant de droits de douane certains produits comme le riz, l’huile, la farine, cela aurait un impact sur le prix des denrées alimentaires au profit du consommateur. Mais en réalité, les résultats sont très mitigés parce qu’on n’a pas observé une baisse notable des prix. Nous avons collecté des données que nous sommes d’ailleurs en train d’analyser pour tirer les leçons de ces mesures qui, je le rappelle, visaient à faire baisser les prix et n’étaient pas du tout politiciennes.

Mais au-delà de ces mesures ponctuelles, les chefs d’Etat de l’UEMOA ont adopté depuis 2001 une politique alimentaire et énergétique commune dont la mise en œuvre, qui a commencé, devrait nous éviter les situations que nous avons connues. Au plan agricole, cinq filières prioritaires ont été définies et seront financés sur fonds propres de l’UEMOA comme l’ont décidé les chefs d’Etat en 2008. Reste à faire des études plus détaillées qui nous permettront d’affiner les programmes à mettre en œuvre pour chacune des filières.

En attendant, l’UEMOA a pris un lot de 5500 hectares à l’Office du Niger, au Mali, que nous sommes en train d’aménager pour mettre à la disposition des ressortissants de l’Union qui veulent travailler la terre, produire du riz, du maïs…Si l’expérience est concluante, nous avons encore une réserve de 5700 hectares disponibles pour répondre aux éventuelles demandes.

Pour l’énergie, nous venons de soumettre à la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement, l’initiative régionale pour l’énergie durable qui comporte des actions d’urgence, de court, moyen et long terme. Pour ce programme d’urgence, il nous faut toute suite 250 milliards de F CFA pour renforcer les capacités existantes de manière à ce que les grandes villes ne soient pas dans l’obscurité, parce que vous savez bien qu’autour de ces villes, il y a des industries qu’il faut sécuriser. A moyen terme, il faut régler la question d’interconnexion des différents pays de manière à avoir un marché régional. Nous avons même prévu l’énergie nucléaire, puisqu’il ne faut pas oublier qu’on a de l’uranium au Niger ! Un accent particulier sera mis aussi sur le l’énergie renouvelable, solaire et c’est dans cette optique que nous sommes en train de reprendre le centre de l’énergie solaire de Bamako laissé par la Communauté économique d’Afrique de l’ouest (CEAO), [NDLR : l’ancêtre de l’UEMOA]

Dans votre communication, vous avez souligné que ce sont les villes et zones accessibles qui bénéficient plus de la coopération décentralisée. Comment inverser la tendance pour que les autres zones rurales aussi en bénéficient ?

Il faut définir les priorités et agir ensuite sur plusieurs leviers sachant que les Etats ont conscience que pris individuellement, ils ne peuvent pas réussir cette politique de décentralisation et d’équipements des zones rurales. L’UEMOA a un programme de 250 pistes en appui aux Etats car le développement qui est quelque chose de global se heurte parfois à certaines contraintes naturelles. Tout comme le Burkina et le Mali, il faut que les Etats fassent des études prospectives sur 20 ans sur les moyens de désenclaver les zones rurales, sachant que l’UEMOA s’est dotée aussi d’un programme indicatif genre et développement urbain qui concerne entre autres, le développement local et la décentralisation. Concrètement, il s’agit d’appuyer techniquement les communes pour en faire des villes moyennes et combattre les disparités qui existent avec les grandes villes. Si on ne fait pas attention, dans quatre ou cinq ans, une ville comme Ouagadougou pourrait compter plus d’1,5 million d’habitants. Mais est-ce que les structures sociales de base seront disponibles ? Pour éviter que les gens viennent en ville, il faut leur apporter ce qu’ils viennent y chercher, c’est-à-dire, l’électricité, l’eau potable, l’assainissement etc. Le programme de l’UEMOA prévoit tout cela

Dans les rapports avec les partenaires du Nord, vous insistez sur le fait que les populations doivent être associées à la conception et la réalisation des projets…

Tout à fait ! Il est indispensable que les besoins des populations soient pris en compte. Dans ma communication, j’ai parlé des capacités techniques et humaines dans la réalisation des projets que les partenaires du Nord veulent nous aider à financer. Mais les projets voient le jour, c’est pare qu’il y a des gens qui sont là, compétents et engagés. Ce que je dis parait élémentaire, mais il arrive encore que des projets soient imposés aux populations et qu’elles ne soient pas associées dans leur exécution. Mais à quoi ça sert de réaliser une infrastructure pour des gens qui ne l’utiliseront pas par la suite et qui tombera en ruile faute d’entretien ? La citoyenneté locale passe par l’implication des bénéficiaires dans tous les projets qui concernent leur vie quotidienne.

Interview réalisée à Bruxelles par Joachim Vokouma, Lefaso.net

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