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Sommet d’Addis-Abeba : L’Afrique dont rêve Konaré

Publié le lundi 12 juillet 2004 à 08h14min

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Il y a deux ans à Durban en Afrique du Sud, le Sommet annuel de nos chefs d’Etat et de gouvernement signait l’acte de décès de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), au bénéfice de l’Union africaine (UA), pour une nouvelle vision de notre continent, inconforté et infortuné par la mondialisation et la globalisation. Le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) était alors la perfusion idoine.

Mais depuis, les discours, les résolutions et autres recommandations se succédaient sans impact notable. L’Union africaine était-elle déjà condamnée au sort de la défunte OUA ? Que non ! Le dernier Sommet, pour ne pas dire le troisième, qui s’est réuni du 6 au 8 juillet 2004 à Addis-Abeba, a sonné la rupture d’avec les traditionnelles kermesses annuelles de nos gouvernants.

En l’absence du colonel Mouamar Kadhafi de la Libye, des généraux Gnassingbé Eyadéma et Lansana Conté du Togo et de la Guinée, de Joseph Kabila de la République démocratique du Congo (RDC), et de Paul Biya du Cameroun..., le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, le président de l’Union africaine, Alpha Omar Konaré, et les autres ont manifesté comme un sursaut d’orgueil, et c’est tout à leur honneur.

Après les tergiversations dont étaient coutumiers nos régents, l’on s’est enfin décidé à passer aux actes, pour une intégration africaine véritable. Pour cela, Alpha Omar Konaré et son staff ont besoin d’un budget annuel de 600 millions de dollars, ce qui apparaît comme la mer à boire, mais en attendant que nos traditionnels bailleurs de fonds délient les cordons de la bourse, et que le 0,5% des budgets nationaux en faveur de l’Union africaine soit acquis, l’on a opté de parer au plus pressé : les conflits au Darfour (Soudan), en République démocratique du Congo et en Côte d’Ivoire sont en effet si préoccupants qu’ils étaient à l’ordre du jour du Sommet, qui a accouché de mini-sommets.

Ainsi doit-on se féliciter de la prompte décision de l’envoi d’une force de protection africaine au Darfour pour soulager le million de déplacés ; de renouer le dialogue entre le Rwanda et la RDC pour qu’enfin les armes se taisent dans l’ancien Zaïre, dont chacun des voisins semble se battre pour obtenir une parcelle ; de la tenue d’un Sommet de tous les protagonistes de la crise en Côte d’Ivoire et des pays voisins, à Accra au Ghana afin de plancher une dernière fois sur les moyens de mise en œuvre des Accords de Marcoussis, qu’Abidjan s’ingénie à fouler aux pieds.

A propos, les messages du nouveau président en exercice de l’Union africaine, le Nigerian Olesegun Obasanjo, et du président gabonais Omar Bongo Ondimba à leur frère Ivoirien Koudou Laurent Gbagbo, ont été on ne peut plus clairs : "Il faut arrêter de nous tourner ; il faut respecter la parole d’honneur. Nous aussi nous sommes fatigués. Si le Sommet d’Accra n’aboutit pas, nous prendrons nos responsabilités ! !" Ainsi résumés, les messages de ces leaders, qui comptent sur l’échiquier politique africain et international, sonnent comme un avertissement, si ce n’est un ultimatum.

Les Accords de Marcoussis, censés réconcilier les Ivoiriens, ramener la paix, sont, en effet, vieux d’un an et sept mois, mais aucune lueur d’espoir ne pointe à l’horizon alors que l’échéance présidentielle est pour 2005. Gbagbo et les siens se plieront-ils si facilement à cette injonction des gourous de l’Union africaine, qui a les allures d’un désaveu ? En tout cas, les Forces nouvelles et les partis de l’opposition, qui ont déjà annoncé leur présence effective le 29 juillet prochain dans la capitale ghanéenne, n’entendent point lâcher prise. Car il y a bien longtemps qu’ils n’ont pas été si près du but.

On a bien hâte de voir ce modus vivendi dont accouchera cet énième Sommet d’Accra. Laurent Gbagbo, qui s’y rendra, déjà sonné qu’il est par le verdict du tribunal de Paris, qui a eu à connaître de sa plainte contre le quotidien le Monde, a intérêt à lâcher du lest pour sauver l’essentiel. Car, quand on se retrouve seul contre tous, il faut tout simplement admettre qu’on a perdu la raison. C’est l’histoire et le bon sens qui nous l’enseignent, et nous n’avons aucune prétention de l’apprendre au premier Ivoirien, dont on vante si bien les qualités de professeur d’histoire.

Tournée la page des conflits, le Sommet d’Addis Abeba a choisi l’Afrique du Sud pour abriter le siège du Parlement africain, et décidé d’intégrer le swahili parmi ses langues de travail. Enfin, le sommet se réunira désormais deux fois l’an, au lieu d’une fois. Question sûrement d’avoir à l’œil les différents chantiers et de répondre aux urgences conjoncturelles. Ce regain de dynamisme, l’Union africaine le doit à son président, Alpha Omar Konaré, qui, depuis son installation en septembre 2003, multiplie les initiatives, tient un langage de fermeté et donne l’exemple à ses collaborateurs de l’Africa House à Addis- Abeba.

Des qualités qu’ils gagneraient à enrichir en y mettant la touche diplomatique. Il a l’avantage avec lui d’avoir présidé aux destinées d’une nation, le Mali, qui, si l’on ne s’abuse, est un concentré des problèmes du continent africain. Konaré est donc dans son élément, reste aux autres à jouer franc jeu, à se départir des intérêts égoïstes pour permettre à l’Afrique enfin de prendre son envol, débarrassée des guerres fratricides, des maladies et de la famine. C’est de cette Afrique nouvelle-là que rêve Konaré, dont l’optimisme se révèle aujourd’hui contagieux.

Ce troisième Sommet de l’Union africaine donne à espérer, et le tort revient à ceux qui, pour une raison ou une autre, l’ont boudé. Tel Mouamar Kadhafi, qui après avoir manqué de convaincre ses paires de l’opportunité de transférer l’Union africaine dans sa cour, a aussi perdu le siège du Parlement africain, qui sortira de terre à Johannesburg. En tenant coûte que coûte à s’imposer à tous, le guide a tout perdu, même la cote, sauf ses... dinars.

Observateur Paalga

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