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ADF-RDA : L’éléphant va-t-il sortir du parc ?

Publié le vendredi 24 avril 2009 à 02h50min

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Serait-ce le début du divorce au sein de la coalition gouvernementale au Burkina ? En tout cas, les deux « épouses » du président Compaoré, à savoir le Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP) et l’Alliance pour la Démocratie et la Fédération-Rassemblement démocratique africain (ADF-RDA), ne semblent plus être sur la même longueur d’onde. A la veille de la présidentielle de 2010 et sur fond de réformes politiques, le débat est monté d’un cran.

C’est un secret de polichinelle : le CDP, le parti au pouvoir, n’a jamais été véritablement enthousiasmé par l’idée d’un tandem avec l’ADF-RDA. Surtout que ce dernier, tout en réaffirmant son soutien au Président Compaoré, se refusait à faire “copain coquin” avec les militants de l’ex-ODP-MT. Toute chose qui avait le don d’irriter les notables cdpistes, qui ne comprenaient pas que l’on puisse être pour le « Général », sans être du côté de ses « troupes ». Furent de ceux-là l’ambassadeur Salif Diallo, ancien directeur de campagne et artisan de la victoire de Blaise Compaoré en 2005. Pour lui, comme pour bien d’autres, l’ADF-RDA devait clarifier son choix et ses options sur la scène politique nationale.

En d’autres termes, il ne pouvait continuer à cultiver le flou sur ses intentions réelles ou supposées.
Dans le landerneau politique burkinabè, d’aucuns avaient beaucoup de mal à comprendre qu’avec un score fleuve de plus de 80% des voix à la présidentielle, le CDP et son chef puissent s’« encombrer » d’un quelconque appui extérieur. Malheureusement pour ces derniers, le docteur Honoré, seul capitaine à bord du navire burkinabè, décida autrement. C’est ainsi que le pachyderme, bien que malmené de toutes parts, brocardé pour son manque de courage, héritera tout de même de deux strapontins dans le gouvernement Tertius. Au grand dam d’une partie de la classe politique, qui espérait ardemment la fin de la récréation.
En bon manœuvrier, Blaise Compaoré parvenait, encore une fois, à déjouer tous les pronostics et à reprendre la situation en main. Grâce à un casernement conforme à ses aspirations, il est parvenu à calmer les ardeurs des durs de son propre camp, tout en se positionnant pour les échéances futures.

Cette stratégie, on le devine bien, a pu être rentable à court terme pour le chef de l’Etat. Mais en vérité, elle a contribué à affaiblir encore plus une opposition déjà minée par des rivalités et des querelles de leadership. Ce qui n’était pas forcément à l’avantage du système lui-même.
Classé par les spécialistes comme faisant partie des démocraties dites de faible intensité, le Burkina se situe à mi-chemin entre les pays africains qui auraient amorcé un virage résolument démocratique, et ceux-là qui, au contraire, seraient à la lutte avec les mauvais esprits politiques. Aussi, le pays des Hommes intègres, dans sa marche vers l’idéal démocratique, devrait plutôt opter pour un raffinement des méthodes, tout en évitant au maximum les stratégies sans lendemain.

Après 22 ans de pouvoir, le locataire du palais de Kosyam, fort d’une hyperprésidentialisation de son régime, affirme d’ailleurs, à qui veut l’entendre, qu’il n’est « pas fatigué ». Ce qui veut dire qu’il espère rebeloter. Du reste, le CDP, qui l’a soutenu et continue de l’appuyer, n’a jamais fait mystère du nom de son candidat : sauf tsunami, ce ne sera personne d’autre que celui que l’on connaît déjà...

Le CDP, fort de sa suprématie, voudrait-il barrer la voie aux ouvriers de la 25e heure ? Bien malin qui saurait le dire. Dans un pays où la communication politique passe très mal, l’analyse du phénomène partisan et de ses implications est tout sauf une partie de plaisir. Pourtant, il faut admettre que les chaudes empoignades de ces derniers jours au sein de la représentation parlementaire ne manquent pas de piment. En effet, c’est une opinion médusée qui a assisté, en off, au show médiatique des députés de l’ADF-RDA ; « seuls contre tous », ces derniers ont voté contre le projet de loi sur le nouveau statut de l’opposition ; ce qui n’a pas empêché le texte de passer comme une lettre à la poste.

Perçu sous l’angle des jeux politiciens, le forcing du mégaparti est un message sans équivoque adressé à ses « adversaires » du moment : il (le CDP) est en position de légiférer et de gouverner, sans en référer. Sauf si, bien sûr, le boss, pour une raison ou pour une autre, venait à imposer ses vues.

Le nouveau statut de l’opposition, qui vient d’être adopté par le parlement, fait partie d’un ensemble de mesures contenues dans un vaste projet de réformes politiques. Il est destiné, selon toute vraisemblance, à assainir l’environnement politique, en clarifiant un certain nombre de relations. A partir de là, espère-t-on, la ligne de démarcation devrait être plus précise entre pouvoir et opposition. Par conséquent, il ne sera plus question d’avoir les deux pieds dans le même camp : une technique trop souvent utilisée sous nos cieux, pour se tailler les bons morceaux.

La loi étant par nature de portée générale et impersonnelle, il est difficile d’affirmer avec une certitude cartésienne que certaines dispositions contenues dans le projet de réformes politiques cité plus haut aient pu être taillées sur mesure. Cependant, au vu des conséquences probables sur la vie publique nationale, il est clair qu’un certain nombre d’acteurs ont toutes les raisons du monde de fulminer. Car c’est bien leur inconséquence qui a contribué à accentuer le déficit de confiance entre les citoyens et la classe politique dans son entièreté. Pendant longtemps, ils ont œuvré à la transformation progressive de l’espace public en un vaste casino où l’on peut transiger allègrement avec les principes. Ils ne peuvent donc que s’en prendre à eux-mêmes.

En entamant sa propre « autocritique », le personnel politique burkinabè a fait un pas dans la bonne direction. A présent, il reste à confirmer l’essai, à travers des actes convaincants. Dans cette perspective, c’est la réplique de l’ADF-RDA qui est ardemment attendue. En effet, et à présent que le sort est jeté, ce sont les Ouédraogo père et fils qui vont devoir réagir. Et que le CDP se le tienne pour dit : l’éléphant n’a pas poussé son dernier barrissement.

Le Journal du Jeudi

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Vos commentaires

  • Le 24 avril 2009 à 18:07 En réponse à : ADF-RDA : L’éléphant va-t-il sortir du parc ?

    Tant que le cdp, ce parti electoraliste ne va pas chasser ce PAKIDERME, il ne va pas sortir du parc animalier ou il broute sans regarder derriere. Un pied dedans, un pied dehors, dehors.

  • Le 24 avril 2009 à 18:10 En réponse à : ADF-RDA : L’éléphant va-t-il sortir du parc ?

    "Après 22 ans de pouvoir, le locataire du palais de Kosyam, fort d’une hyperprésidentialisation de son régime, affirme d’ailleurs, à qui veut l’entendre, qu’il n’est « pas fatigué ». Ce qui veut dire qu’il espère rebeloter.".
    Ce n’est pas une question d’etre fatique ou pas. Et meme si c’etatit le cas, est-ce qu’ il n’ y a pas des plus fatigues et des moins fatigues mme si les plus fatigues pensent qu’ ils ne sont pas assez fatigues pr passer le temoin ?
    Savoir quitter le pouvoir avant qu’ il ne vous quitte n’ est pas sagesse d’ une autre epoque.

  • Le 28 avril 2009 à 12:26, par dugu lamini sadjan En réponse à : ADF-RDA : L’éléphant va-t-il sortir du parc ?

    Et si le vote de cette loi sur le statut de l’opposition était un piège de … Est-ce une question d’actualité ? En quoi cela va-t-elle contribuer à améliorer la vie politique nationale ? Malin qui saura répondre à ces questions.

  • Le 5 mai 2009 à 14:46 En réponse à : ADF-RDA : L’éléphant va-t-il sortir du parc ?

    C’est sur que les dirigrants actuels de l’ADF-RDA rentrerons dans l’histoire. Rien qu’au sein des parties politiques vous avez un début de monarchie, pourquoi s’étonner celle du trone ?

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