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Présidentielle guinéenne : Cap sur le 13 décembre

Publié le mardi 31 mars 2009 à 01h00min

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13 décembre 2009 ! Enfin une date pour la présidentielle en Guinée-Conakry ! Le CNDD, par la voix de son porte-parole, le capitaine Mandjou Dioubaté, l’a annoncé le 28 mars dernier. Soulagement tant au sein de la classe politique de ce pays, des syndicats que de la communauté internationale, qui a mis au ban la Guinée depuis que, le 23 décembre 2008, 32 officiers et sous-officiers se sont emparés du pouvoir suprême sur le cadavre encore chaud du général Lansana Conté.

En effet, que n’a-t-on pas entendu depuis cette prise du pouvoir par la force, mais sans effusion de sang (on oublie souvent de le souligner) ? Cinq jour après le putsch, le nouvel homme fort, le capitaine Moussa Dadis Camara, disait, lors d’une rencontre avec les syndicalistes et les politiques, ceci :

« Allez-y vous concerter et proposez-nous des projets de société et des dates pour les élections .. si nous vous imposons quoi que ce soit, vous allez dire que nous sommes des dictateurs.. »

Pourtant, quelques jours après, c’est cette même junte qui évoquait la perspective d’élections (lesquelles ?) pour 2010. Dadis et Cie tablaient sur une transition de 2 ans ; une éternité pour ce peuple, qui souffre le martyr et qui n’a jamais eu véritablement, depuis 50 ans, l’occasion de choisir librement les dirigeants qu’il veut, autant dire un peuple en quête du Saint-Graal.

Cette option s’est révélée inacceptable pour la communauté internationale, qui estime que plus vite le pays retournera à une vie constitutionnelle normale, mieux cela vaudra.

On comprend dès lors la polémique qui a entouré le choix du calendrier électoral et qui divise de nos jours les animateurs de la vie politique :pour les uns, notamment un groupe d’opposants composé de 8 formations politiques et de la société civile ,dont le chef de file est Sidya Touré, ex-Premier ministre et leader de l’Union des forces républicaines (UFR), la présidentielle est prioritaire par rapport aux législatives. Ce que n’entend pas de la même oreille Alpha Condé, le leader du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), qui a pris, lui, la tête de 11 partis politiques partisans du contraire.

Les militaires ont donc tranché. En février dernier, ils ont autorisé la reprise des activités des politiciens et des syndicalistes. Chapeau bas donc à ce fils de la Guinée forestière et à ses compagnons d’armes, qui réitèrent, chaque jour que Dieu fait, leur volonté de remettre rapidement le pouvoir aux civils et d’offrir leur expertise à la communauté internationale.

Une présidentielle détermine tout, car, une fois le président élu, la situation se décante et chacun se détermine. Ceux qui pensent que leur heure a sonné le savent, d’où les différentes gesticulations, ces derniers temps, des probables candidats.

Qu’ils s’appellent Alpha Condé, Sidya Touré, Laoseny François Fall, Celoun Dalein Diallo...,, chacun prétend avoir un destin national. Cependant, si l’on exulte à l’idée d’en découdre avec son adversaire, on le fait moins à la seule pensée de l’organisation de ce scrutin.

Dans un pays où les votes en trompe-l’œil n’avaient pas besoin de processus, les choses étaient faciles : le Parti de l’unité et du peuple (PUP) régnait en maître et Lansana Conté était chaque fois reconduit à la présidence ; l’opposition, atomisée, n’avait pour seule arme que le boycott.

Le 13 décembre 2009, si cette date est maintenue, ce sera toute autre chose, et si l’on demandait ce qu’il faut faire pour la réussir, on pourrait répondre qu’il faut les moyens, encore les moyens et toujours les moyens. La Guinée, « scandale géologique », est, de nos jours, un pays impécunieux et il faudra bien financer cette présidentielle. La communauté internationale, prompte à dicter ses oukases, doit impérativement délier les cordons de la bourse pour accompagner la fin de cette transition militaire.

Depuis un demi-siècle, il n’y a jamais eu de vrais scrutins en Guinée, surtout pas une présidentielle. Tout y est donc à faire : identification, enrôlement, confection des cartes électorales, formation de spécialistes des élections, achat de matériels..., bref, la Guinée doit partir de zéro, puisque c’est une nation novice en matière de vote.

Si donc la junte tient parole et que cette échéance a lieu à bonne date, l’Union Européenne, l’Union Africaine, les USA, la CDEAO ...devront donc être conséquents avec eux-mêmes, car on ne peut pas exiger de raccourcir la transition, le risque de bâclage étant en soi réel, et ignorer qu’un tel scrutin dans un environnement pareil a un coût que ne peut supporter la Guinée actuelle.

Ce serait une prime au maintien au pouvoir des partisans des raccourcis militaires, car entre une mauvaise élection source de tous les problèmes et un pouvoir bien que d’exception, le choix est souvent cornélien, surtout pour des populations qui n’ont pas encore expérimenté un vrai pouvoir civil de leur choix.

Ce samedi 28 mars 2009, le CNDD a encore montré qu’il est dans une posture d’arbitre d’une transition dont la fin a été choisie. Sous réserve que Dadis et ses compagnons commettent un parjure, ils viennent de mettre les politiciens de ce pays et la communauté internationale devant leurs responsabilités. A eux d’opter pour une présidentielle propre et acceptable ou pour la solution la plus défavorable.

Z.Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga

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