LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Cinémathèque africaine de Ouagadougou : 20 ans après, quel bilan ?

Publié le jeudi 5 mars 2009 à 01h22min

PARTAGER :                          

Le 40e anniversaire du FESPACO coïncide avec les 20 ans de la cinémathèque africaine de Ouagadougou. Le directeur de cette structure, Ardiouma Soma, fait un bilan de ce long chemin parcouru et lance un appel à l’Etat et aux partenaires au développement afin de disposer davantage de moyens financiers pour constituer et valoriser le patrimoine cinématographique du continent.

La cinémathèque célèbre son 20e anniversaire cette année. Quel est son historique et quel bilan pouvez-vous faire à ce jour ?

La cinémathèque africaine a vu le jour en 1989 suite à un appel par Gaston Kaboré alors secrétaire général de la Fédération panafricaine des cinéastes par qui a demandé à tous ses collègues cinéastes africains d’accorder des autorisations de tirage ou de mettre à la disposition du FESPACO les copies de leurs films.

Les réponses à cet appel ont permis de récolter 40 copies de films qui ont permis de constituer les premiers fonds de la cinémathèque africaine de Ouagadougou.

Par la suite, l’Etat burkinabè s’est fortement engagé pour la réalisation de ce projet et un bâtiment a été construit pour la cinémathèque avec l’aide des partenaires du Burkina Faso afin que les copies de films soient entreposées dans les meilleures conditions climatiques.

Au niveau du dépôt, les conditions climatiques sont telles que les films sont en permanence dans une ambiance de 16 à 20 degrés ; ce qui respecte les normes convenues pour que les œuvres cinématographiques survivent.

Durant les 20 ans, nous avons pu réunir beaucoup de films. A ce jour, nous avons 2000 copies de films à la cinémathèque africaine de Ouagadougou qui sont des fonds d’archives du Burkina Faso. Il faut indiquer qu’il a existé dans notre pays, une cinémathèque depuis le début des années 60 parce qu’on s’est très tôt lancé dans le cinéma pour éduquer et informer les populations.

Le gouvernement à l’époque avait fait le choix de l’audiovisuel pour faire passer les programmes de développement. Beaucoup de films ont été réalisés dans les domaines de l’agriculture, de l’élevage, de la santé et étaient déposés à la cinémathèque qui avait la charge de les diffuser dans la population. C’est sur la base de cette cinémathèque qu’est partie la cinémathèque africaine de Ouaga en 1989.

Pour revenir à l’actualité, les 2000 copies de films sont assez représentatives de la cinématographie africaine. Nous avons donc tous les films d’archives, les films d’auteurs africains pour lesquels nous avons fait un catalogue et des films d’archives sur l’Afrique. Quand on parle de l’héritage du cinéma africain, il ne faut pas se situer à partir du moment où les cinéastes africains ont eux-mêmes accaparé la caméra.

Il faut aller plus loin parce que l’Afrique a été filmée depuis le début du cinéma en 1895, et nous savons que le continent a été sillonné par des opérateurs avec des caméras. L’Afrique a été un terrain pour de grands producteurs qui ont produit de grands films commerciaux. Elle a été également filmée par les métropoles coloniales pour montrer les différentes activités qu’elles menaient afin de justifier leurs "actions civilisatrices".

Toutes ces images font partie du patrimoine culturel africain. Le doyen Sembène Ousmane avait dit que l’Afrique a été énormément filmée mais on n’a pas donné la parole aux Africains, ils ont été filmés comme des insectes mais nous ne devons pas avoir honte de ces images-là. Elles constituent les seules sources auxquelles on peut faire recours pour relire notre histoire.

Cela est très important et nous travaillons avec nos partenaires en Europe pour faire l’état des lieux de ce patrimoine et voir comment le partager avec l’Afrique surtout avec les nouvelles technologies. Nous avons aussi d’autres types de films qui, à une autre époque, ont pu marquer le circuit de distribution et d’exploitation en Afrique. Nous avons enfin, par le biais de la coopération, récupéré un certain nombre de copies de films comme ceux de Cuba et d’autres pays amis.

Quelles sont les difficultés auxquelles la cinémathèque est confrontée ?

• Nous avons beaucoup de choses à faire au niveau de l’archivage des films, le traitement des copies, la conservation et la mise à disposition auprès du grand public. Cela nécessite énormément de moyens parce que nous sommes encore loin d’avoir collecté l’essentiel du patrimoine cinématographique africain. Il faut arriver à établir la filmographie des différents pays africains et à localiser les négatifs parce qu’il n’y a pratiquement pas d’industrie du cinéma en Afrique.

La post-production, c’est-à-dire le développement des pellicules et la finition des films, s’est déroulée dans les laboratoires étrangers. Beaucoup d’entre eux ont fermé depuis longtemps. Où trouver les éléments originaux des films africains ?

• C’est un travail de recherche à mener. Une fois cela fait, il faut restaurer ces films-là pour aboutir à de bonnes copies de conservation. Pour mettre tout cela à la disposition du public, il faut recourir aux technologies de l’information et de la communication en numérisant les films pour faciliter leur accès. Il faut donc énormément d’argent et du personnel à former. Nous avons des idées et des projets dans nos tiroirs mais les moyens font défaut. L’Etat a fait un maximum mais nous en demandons encore plus.

Cyr Payim Ouédraogo

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Clôture du FESPACO à Bobo : 2011 déjà en vue !
FESPACO à Bobo-Dioulasso : Les Bobolais découvrent le MICA
Prix spéciaux FESPACO : Le Burkina engrange sept prix
FESPACO 2009 : Les journalistes ont eu chaud
FESPACO 2009, c’est déjà fini !
FESPACO 2009 : l’heure du bilan