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TRANSPORTS AU BURKINA : "C’est de nos vies qu’il s’agit"

Publié le mardi 17 février 2009 à 03h13min

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On me dit souvent que les transports coûtent cher au Burkina, mais je me demande parfois comment font les transporteurs pour gérer leurs entreprises. Il y a d’abord l’achat du véhicule… et son amortissement. Si "cela n’est pas compté", on voit vieillir le parc automobile et la société de transport faire faillite.

Il y a ensuite le prix du carburant, que nous avons tant vu varier ces derniers temps ; mais peu ignorent que ce n’est pas forcément la plus grosse dépense des transporteurs, même si elle reste très importante. Il y a l’entretien du véhicule : vidanges, graissage, changement des pièces d’usure (freins, embrayage, cartouches filtres de gas-oil et d’huile), renouvellement des pneumatiques, des courroies, changement de la batterie, et selon l’état des routes, changement des amortisseurs et autres pièces de direction et de suspension.

Il y a les pièces administratives : contrôle technique, assurance, conformité, carnet de route…que sais-je encore ? Et quand tout cela est en place, il y a le chauffeur, son salaire et ses charges sociales (caisse et impôts), un éventuel "graisseur" (souvent mal payé). Il y a aussi les "frais de route" (vous voyez ce dont je veux parler !). Les frais éventuels dans les gares… Et il faut que celui qui a affrété ce véhicule puisse en vivre ; ce doit être un investissement qui doit rapporter au moins "un peu"… Et quand c’est une compagnie, elle a aussi des "gares" à gérer, avec des manœuvres, gardiens et personnels administratifs… qui sont loin d’être tous payés et déclarés… Il faut alors bien dire qu’à ce moment, c’est difficile parfois de rentabiliser tous les trajets. Bien sûr, il y a des lignes très fréquentées qui sont très rentables, mais d’autres le sont beaucoup moins, surtout quand l’état des pistes laisse sérieusement à désirer.

Que fait on alors pour y arriver… ?

On prend des risques en retardant le changement de pièces essentielles jusqu’à tomber en panne et passer des heures au bord de la route. On prend le risque de vouloir prolonger la vie des pneumatiques et ainsi de provoquer de graves accidents. On prend le risque de faire conduire un même chauffeur pendant plus de 20 heures d’affilée, ce qui amène forcément de graves tragédies. (Ayant vécu cela moi-même, j’ai été effrayé de voir l’indifférence des autres passagers devant de tels abus : "Ne vous inquiétez pas, il a l’habitude"… J’ai répondu : "Mais c’est de nos vies qu’il s’agit !"… Une pareille inconscience me paraît invraisemblable). On évite de payer l’assurance, espérant que les "amendes privées" seront moins élevées que le prix même de l’assurance ("ça arrange tout le monde", me disait un ami transporteur). On multiplie le nombre de passagers au-delà de la capacité du véhicule… et la sécurité des passagers n’est plus assurée.

On prend une multitude de bagages qui risquent de déstabiliser le véhicule et d’empêcher les passagers de sortir en urgence… On roule en pleine vitesse pour "gagner du temps", même dans la traversée des villes et des villages (Il y a quelques jours, un car m’a doublé dans Kokolgho avec grands coups de klaxon, à au moins 90 km/h, sinon plus !). Se mettre en danger, c’est grave, mais ça reste ton problème ; mettre les autres en danger, c’est pire ! J’ai toujours été étonné que de nombreux Burkinabè s’angoissent avant d’entreprendre un voyage et partent consulter sur l’opportunité du jour du voyage, l’heure de départ, ou la destination… Mais une fois rassurés sur l’irrationnel, avant de monter dans un car, ils ne prennent pas la précaution de vérifier l’état du véhicule, des pneumatiques, et la sobriété du chauffeur, ou même s’il s’est vraiment reposé depuis son dernier voyage. Etonnant, non ?

En exigeant que le prix des transports soit le moins élevé possible, on prend ainsi le risque d’abus qui conduisent aux drames que l’on a connus. Et l’Etat, malgré quelques déclarations tonitruantes, s’en accommode fort bien pour maintenir des prix bas. Pourtant, il y a quelques mesures qui devraient être raisonnablement prises pour tous : limitation de vitesse à 80 ou 90 km/h… comme dans les autres pays du monde sur des routes goudronnées équivalentes. A 70 ou 80 km/h sur les pistes. A 50 km/h réels dans les agglomérations (mais il faudrait que les panneaux correspondent aux agglomérations et ne se trouvent pas 4 kilomètres avant le village). Avec éventuellement des ralentisseurs bien étudiés qui fassent ralentir sans casser les voitures… Le Ghana a déjà inauguré des radars de contrôle de vitesse. Et pour les transports en commun, limitation de la durée de conduite en continu ; sur les longs parcours, obligation de deux chauffeurs…

De vrais contrôles techniques… moins entachés de magouilles… surtout pour les autocars, les camions et les taxis. Et je pense aussi aux deux roues… C’est vrai que le casque pourrait sauver des vies (ceux qui font de grands trajets en portent souvent). Mais pour être sûr que ce ne soit pas perçu par la population comme une opération spéculative gérée par un politicien accointé avec un commerçant, il suffirait peut être de demander que deux casques soient livrés obligatoirement à la vente de chaque "deux roues". D’ici 5 ou 10 ans, les villes, inondées de casques, pourraient mieux supporter cette mesure qui restera quand même impopulaire (chaleur, coiffures, visibilité…). En tous cas, à vous tous qui prenez la route, exigez des véhicules corrects, des pneumatiques en bon état, des chauffeurs reposés, la plus grande prudence… et bonne route !

Père Jacques LACOUR (BP 332 Koudougou) jacqueslacourbf@yahoo.fr

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 18 février 2009 à 07:54 En réponse à : TRANSPORTS AU BURKINA : "C’est de nos vies qu’il s’agit"

    Vos idées sont lumineuses, simples. Résultats : impossible de les mettre en pratique parce que si non tout le monde "va en faillite". Par exemple, si la gendarmerie déclare qu’à partir de telle date chaque car doit avoir une liste numérotée de ses passagers. A chaque poste de police, l’on compte le nombre de passagers. Si le car est de 22 places et il y en a 23, le 23ème débarque et son prix de transport est remboursé en double par le chauffeur avant de continuer. Toutefois le passager restera auprès du poste de police 2 heures avant de continuer pour avoir lui aussi accepter d’embarquer en surnombre. Ne mettez aucune amende d’argent entre les forces de l’ordre ni entre les usagers ni entre les chauffeurs. En une année, vous verrez une sensible modification.
    Voyez-vous ce ne sont pas les idées simples qui manquent. Seulement, tout le monde dit : Pourquoi veut-on m’empêcher de transgresser les règles ? Voilà tout le problème. Et les idées simples qui sauvent la vie, il y en des tonnes et des tonnes !
    En tout cas... bon courass mon pèré !

    • Le 25 février 2009 à 16:59 En réponse à : TRANSPORTS AU BURKINA : "C’est de nos vies qu’il s’agit"

      Ce ne semble pas etre l’ idee du Pere. Votre ecrit est totalement independant de ce que Mon Pere a dit meme si vous voulez vous opposez en contradicteur, d’ailleurs je ne sais pourquoi. Seriez- vous un transporteur verreux pour ne pas dire vermoulu ?
      Mon Pere, tout mon soutien pour vos diees lumineuses aussi bien que courageuses et surtout tres simples et tres pratiques. il ne reste plus que la volonte politique de nos seigneurs et la bonne foi des uns et des autres.

      • Le 6 mars 2009 à 14:45 En réponse à : TRANSPORTS AU BURKINA : "C’est de nos vies qu’il s’agit"

        le net c’est bien. cela permet à ceux qui n’ont pas été à l’école ou qui ont traversé la cour de l’école en courant et qui ne savent pas lire d’écrire n’importe quoi. En quoi l’idée du premier internaute respire la corruption. en quoi ses idées s’opposent à celle du père ? Si vous ne savez pas lire, garder vos 100f dans votre poche au lieu d’aller squatter un cyber pour écrire n’importe quoi.

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