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Alain Yoda, ministre des Affaires étrangères : « Je ne connais rien de la diplomatie… »

Publié le dimanche 4 janvier 2009 à 23h48min

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Bilan d’une année de diplomatie. C’est autour de ce plat fort appétissant que les journalistes et le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération régionale, Alain Bédouma Yoda, se sont réunis le 30 décembre 2008. Si dans bien d’autres secteurs l’année a été peu réussie, le constat qui se dégage après ce point de presse est que le fumet qui s’est dégagé de la marmite diplomatique courant 2008 a été des plus agréables. Est-ce donc par modestie qu’Alain Yoda a dit pendant ce point de presse qu’il ne connaît rien en diplomatie ?

Quelqu’un a dit qu’un diplomate qui s’amuse est moins dangereux qu’un diplomate qui travaille. Mais si l’on se fie au bilan de la diplomatie burkinabè dressé par Alain Yoda, la conclusion est que Georges de Porto-Riche, l’auteur de la citation, devrait être quelque peu aigri ou déprimé sur les bords à l’époque où il a concevait cette formule. Foi du ministre des Affaires étrangères et de Coopération régionale, au cours de l’année écoulée, le Burkina a beaucoup travaillé, et pour le bonheur de la sous-région et de la communauté internationale dans son ensemble, n’en déplaise donc à ce dramaturge et romancier français.

La fin de l’année 2008 a coïncidé avec celle des deux années de mandat de notre pays à la présidence en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Fin 2008 a également marqué deux années accomplies à la tête des institutions de l’Union économique et monétaire ouest- africaine (UEMOA). Troisième coïncidence, elle correspond aussi à la fin de la première année du mandat du Pays des hommes intègres en qualité de membre non permanent au Conseil de sécurité des Nations unies.

Conséquence, la marmite diplomatique a bouillonné de mille et une activités. On peut en citer quelques-unes tout en précisant que la liste est loin d’être exhaustive : contribution au retour de la paix en Côte d’Ivoire, au Togo, en Guinée, en Guinée-Bissau, dans la zone saharienne, interventions dans la stratégie régionale de réduction de la pauvreté, dans l’Accord de partenariat économique (APE) avec l’Union européenne, dans la question des transports, dans la libre circulation des biens et des personnes, dans la lutte contre le trafic de drogues...

Au niveau du Conseil de sécurité, pour sa première année de mandat, le Burkina a « activement » (dixit Alain Yoda) pris part, aux côtés de quatorze autres membres, aux intenses activités du Conseil, consacrées aux séances officielles, aux consultations plénières et aux missions d’information dans de nombreux pays du monde, plus précisément dans les zones en conflit. Bref, pour citer tous les pays qui ont bénéficié des largesses du Burkina pendant 2008, il faut bien sûr avoir le souffle d’un ministre des Affaires étrangères. Il y en a tellement que l’on a comme l’impression que si l’on confiait au Burkina un deuxième mandat au Conseil de sécurité, ce serait bientôt fini le conflit israélo-palestinien.

« Nous avons condamné le coup d’Etat en Guinée ; mais… »

Beaucoup de sujets ont été abordés pendant ce point de presse. Mais l’on imagine bien que cette actualité africaine chaude du moment, le coup d’Etat au pays de Camara Laye, a fait partie des plats principaux. "Quelle est finalement la position du Burkina sur la question ?" Se sont demandé les invités. L’hôte des lieux, Alain Yoda, qui a appelé à la rescousse la ministre déléguée à la Coopération régionale, Minata Samaté, a juré la main sur le cœur que le Burkina a condamné cet acte, au nom du Protocole sur la bonne gouvernance et la démocratie de la CEDEAO, qui condamne la prise de pouvoir par des moyens anticonstitutionnels. Maintenant que c’est fait, ils ont fait remarquer qu’il faut aider la Guinée à organiser des élections dans des délais raisonnables et en concertation avec toutes les parties, notamment avec les nouvelles autorités de ce pays, afin d’aller vers une transition de moins de 24 mois. « En Guinée, il faut reconnaître qu’il y avait un problème : le mandat des députés a pris fin depuis juin 2007.

Avec la communauté internationale, nous reconnaissons que deux ans de transition, c’est trop ; mais, il ne nous revient pas d’intimer l’ordre d’organiser des élections dans un délai qui ne permet pas de bien les réussir. Les discussions se poursuivent donc pour trouver la formule, la meilleure ». Dans une autre Guinée à laquelle on doit ajouter la particule « Equatoriale », la préoccupation de nos ressortissants qui y vivent est toute autre. Leur rêve à eux est que cessent les exactions à leur encontre. Comme pour les rassurer, les différents intervenants ont insisté que des démarches sont entreprises. Et à l’occasion de la visite au Burkina du président équato-guinéen, prévue en février prochain, un accord dans ce sens pourrait être signé. D’autre part, pour assurer la protection des ressortissants burkinabè dans ce pays, un consul honoraire, qui suppléerait à l’absence d’une représentation diplomatique pourrait y être installé.

Etre ou ne pas être diplomate pour faire carrière dans les Affaires étrangères ? A l’image de celle demeurée sans réponse de Hamlet dans l’œuvre de William Shakespeare, cette réflexion continue aussi de diviser bien des analystes. Et nous reviennent en mémoire, les manifestations de colère du Syndicat autonome du ministère des Affaires étrangères (SAMAE), dont le summum a été la marche du 10 avril 2007. Dans leur liste de doléances, figurait, en effet, le reproche selon lequel la plupart de nos représentants accrédités à l’étranger ne sont pas diplomates de carrière. Une fois de plus, la question a ressurgi pendant le débat. Mais Alain Bédouma Yoda est catégorique : « Les ambassadeurs sont des représentants personnels du Président du Faso dans les pays où ils sont accrédités.

Ils peuvent être des instituteurs, des diplomates, des journalistes, des politiciens, etc. Maintenant, ces chefs de missions travaillent avec des professionnels que sont les conseillers, les attachés et les secrétaires d’ambassades ». Et comme pour mieux illustrer son propos, le chef de la diplomatie burkinabè a pris son propre exemple, avec ce ton non dénué d’humour qu’on lui connaît. « Comme vous le savez, moi, je suis économiste financier. Je ne connais rien de la diplomatie, mais je suis amené à en parler ! Mon collègue de la Santé (Ndlr : le ministre Seydou Bouda) n’est pas médecin non plus. Cependant, il a des cadres qui sont médecins à ses côtés ». Et faisant un clin d’œil à son collègue de l’Economie et des Finances, Marie Noël Bembamba, assis à ses côtés, il a annoncé : « Exceptionnellement, nous avons un ministre de l’Economie et des Finances qui se trouve être un financier ».

Issa K. Barry

L’Observateur Paalga

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