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PHILIPPE OUEDRAOGO : "Soumane Touré ne croit qu’aux marabouts"

Publié le mardi 2 décembre 2008 à 02h29min

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Après l’interview de Soumane Touré que nous avons publiée la semaine dernière, nous vous proposons aujourd’hui la version de Philippe Ouédraogo, à propos de l’affaire PAI (Parti africain de l’indépendance). Philippe Ouédraogo n’est pas du tout tendre envers son ancien camarade du PAI, parti politique dont ils se disputent le leadership depuis huit ans.

"Le Pays" : Vous avez certainement lu la dernière interview de Soumane Touré publiée dans "Le Pays" du 18 novembre 2008. Quelle est votre réaction ?

Philippe Ouédraogo : Je précise que je suis le secrétaire général légitime du PAI, par opposition à monsieur Soumane Touré qui ne peut se prévaloir de ce titre que parce qu’il dispose de récépissé que lui a délivré le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. J’ai effectivement lu l’interview de Soumane Touré, parue dans "Le Pays" du 18 novembre 2008.

Finalement, je suis habitué à ces sorties de Soumane Touré qui, très souvent, ne sait pas distinguer entre les faits réels et ce qu’il croit ou voudrait que ce soit. Et on peut l’accuser de mythomanie, ou au moins d’affabulation dans bien des cas. En réalité, les choses sont relativement simples surtout les questions du point de vue de la loi sur les partis politiques ici au Burkina, et de la loi en vigueur au niveau du PAI, c’est-à-dire au moment où nous nous sommes séparés, en 2000. D’abord, Soumane Touré a été élu secrétaire général du PAI le 31 mai 1998, à l’issue du 7e congrès du parti. Contrairement à ce qu’il dit, il n’a jamais été question de me vider du PAI. C’est moi qui ai décidé, librement, de ne pas me présenter à nouveau à l’élection des membres du bureau puisque depuis janvier 1991 et pendant sept années consécutives, j’étais secrétaire général du PAI.

J’ai décidé de ne pas me présenter à nouveau parce que j’avais constaté que l’atmosphère de collaboration au niveau de la direction du parti n’était pas bonne, et c’était essentiellement le fait de personnages comme Soumane Touré et quelques-uns de ses amis proche. Soumane Touré était très heureux de pouvoir se présenter, et il a été élu grâce à nos voix et à l’action que des gens comme moi avons menée auprès des militants, parce que beaucoup de nos militants ne voulaient pas du tout de lui comme secrétaire général. De sorte que le bureau qu’il a passé son temps à composer avant et même pendant le congrès, dès qu’il l’a proclamé, il y a eu des gens qui ont refusé d’en faire partie. Car, ils n’avaient jamais donné leur accord, alors que, lui, avait affirmé publiquement qu’ils avaient donné leur accord. C’était déjà un premier problème. Ensuite, il a une façon bien à lui de concevoir sa responsabilité de secrétaire général du PAI qui n’était pas du goût de tout le monde.

Ce qui s’est passé, c’est qu’il a finalement convoqué un comité central extraordinaire le 12 septembre 1998 pour faire adopter essentiellement deux points. Premièrement, la sortie du PAI du Groupe du 14-Février, alors que le congrès avait plutôt appelé le PAI à soutenir le G14, et deuxièmement, la décision pour le PAI de présenter un candidat à l’élection présidentielle du 15 novembre 1998, alors que le Groupe du 14 - Février dont faisait partie le PAI avait décidé de boycotter l’élection présidentielle et toutes les élections jusqu’à ce que soit mise en place une CENI (ndlr, Commission nationale électorale indépendante) véritablement indépendante.

Et cela était une décision qui avait été prise lorsque moi-même j’étais encore secrétaire général du PAI. Alors, quand il dit que c’est pendant que lui était à Banfora que la décision a été prise, ce n’est pas vrai. Il faut aussi bien noter qu’il avait décidé de la suspension de la participation du PAI au G14 avant d’aller à Banfora ; c’est une décision qu’il avait prise au début d’août 1998.

Il avait donc décidé délibérément de faire quitter le G14 par le PAI et évidemment, toutes les contradictions qui se sont manifestées entre lui et le G14 sont des choses normales. Le problème, c’est que le comité central a refusé ses deux propositions, les a rejetées, et qu’un certain nombre de membres de son bureau qui n’étaient même pas au courant de cette décision importante qu’il préparait ont donné sur place leur démission, sans compter qu’un de ses amis politiques, en l’occurrence Théodule Dah, lui-même avait donné sa démission parce que le comité central avait exigé le retour du PAI au sein du G14, et par conséquent, il ne restait plus personne pratiquement, en dehors de lui-même avec deux ou trois autres personnes, pour diriger le PAI. Logiquement, il a dit qu’il avait donné sa démission, avec tout son bureau, parce qu’en réalité il ne pouvait plus diriger.

Voilà donc les conditions qui l’ont amené à donner sa démission du bureau. Et cette démission du bureau, il l’a notifiée noir sur blanc au ministre de l’Administration territoriale dans une lettre de septembre 1999. Il l’a dit avec beaucoup de fanfaronnade encore devant le président du tribunal administratif lors de l’audience du 8 juin 2000. Aujourd’hui, il est très discret sur sa démission, mais c’est un élément fondamental. Même si c’est par contrainte, il a donné sa démission ; on ne peut donc pas concevoir qu’il puisse convoquer un congrès du PAI par la suite. Il ne faut pas rester sur les apparences juridiques en disant que comme le bureau provisoire n’a pas notifié au ministre cette démission, il est toujours secrétaire général.

Cela est un raisonnement de filou. La réalité, c’est qu’il a démissionné, il l’a écrit, il l’a dit, il faut qu’il l’assume. Par rapport au parti, c’est cela qui est valide. Soumane Touré n’est pas loyal, c’est tout le problème qu’il a avec le parti. Finalement, il remplace la vérité par les intrigues. Depuis le 12 septembre 1998, il n’y a plus de bureau exécutif central du PAI avec à sa tête Soumane Touré. Le comité central a pris deux résolutions qui ont été immédiatement confiées à la presse et qui ont été publiées le 14 septembre 1998 (Ndlr, il explique, documents en main). La première résolution réaffirme la pleine participation du PAI au Groupe du 14-Février, contrairement aux desseins de Soumane Touré et de ses acolytes. Elle souligne que le comité central du PAI décide de ne pas présenter de candidature à l’élection présidentielle du 15 novembre 1998 dans les conditions qui prévalaient.

Alors que dans les semaines qui précédaient cette réunion, Soumane Touré a tout fait pour convaincre tous les responsables des fédérations provinciales qu’il voyait, par des arguments de caractère ethniciste, que non seulement le PAI se présenterait à l’élection présidentielle, mais également que le bon candidat, c’était lui. La deuxième résolution prend acte de la démission des membres du bureau exécutif central dirigé par Soumane Touré et mandate les membres d’honneur qui pourront s’adjoindre à d’autres militants pour assurer la direction du parti jusqu’au prochain congrès extraordinaire du PAI qui sera convoqué dès que possible. Autour de cette résolution en particulier, Soumane Touré a dit beaucoup de choses. Il a dit que le congrès extraordinaire devait être convoqué en janvier 1999. Ce qui est faux.

C’est lui qui l’a proposé et cela n’a pas été retenu. Il a dit que la direction devait être confiée à deux membres d’honneur seulement. Ce n’est pas vrai. C’est l’ensemble des membres d’honneur. Ils étaient neuf à cette époque-là. Il dit dans sa dernière interview que les membres d’honneur se sont réunis une semaine après et ont pris quelques jeunes ; mais cela correspond au mandat qu’on leur a donné de s’adjoindre, parce qu’ils n’étaient que neuf et certains n’habitaient pas à Ouagadougou, et par conséquent, pour que les responsabilités de membres du bureau provisoire puissent être assumées facilement, il fallait qu’il y ait plus de gens que les membres d’honneur. Il a voulu nier que les membres d’honneur et ceux qu’ils auraient désignés constituaient une direction provisoire si bien qu’il a trouvé cette appellation d’organe d’administration provisoire. On ne peut pas remplacer la réalité par des mots, surtout quand c’est à dessein.

Il n’empêche que le congrès extraordinaire n’a pas pu se tenir dans les délais…

Le comité central extraordinaire, devant la démission inattendue de la direction, a dû prendre une décision, celle de mandater les membres d’honneur à assumer la direction provisoire en attendant de convoquer un congrès dès que possible. Et cela dépendait des conditions qui prévalaient, sans oublier qu’il fallait aussi réunir les moyens pour le faire, et ce n’est pas évident quand on vient de sortir d’un congrès. Vous savez, à la passation de service, il y avait zéro franc en caisse. Nous avons commis une seule erreur, celle de ne pas notifier tous ces changements au ministère de l’Administration territoriale dans le délai des quinze jours prescrits.

Mais je veux souligner deux choses : premièrement, c’est vrai que l’obligation de notifier au MATD dans les quinze jours le changement de direction est prescrite dans l’ordonnance qui était applicable à ce moment. Mais aucun article de cette ordonnance ne dit que si la notification a lieu en retard, on n’a pas droit au récépissé, ni que le changement de direction ne peut pas être pris en compte. Or, nous avons donné l’information à l’opinion dans la presse. Et le ministre de l’époque, Yéro Boly, en disant qu’il n’était pas au courant, a fait preuve de mauvaise foi. Il peut seulement dire que nous ne le lui avons pas notifié officiellement, mais il ne peut pas dire qu’il n‘était pas au courant.

D’autant plus que Yéro Boly lui-même m’a convoqué en octobre 1999 et j’ai eu à lui donner les informations sur les conditions dans lesquelles nous assumions la direction du parti. En plus, le ministre lui-même m’avait écrit officiellement, avec le titre de secrétaire général provisoire du PAI, pour m’inviter à une rencontre avec le Premier ministre qui, à ce moment, agitait le projet d’un gouvernement de large ouverture ; cela était une des conséquences de l’affaire Norbert Zongo. Lorsqu’il vient dire par la suite qu’il n’était pas au courant d’un bureau provisoire, ce n’est pas vrai. Et lui-même était à cette réunion avec le Premier ministre. Il m’a même pris à part pour me dire qu’il faut trouver une solution à l’affaire PAI parce que Soumane Touré lui mettait la pression et qu’il fallait absolument tenir un congrès. Je lui ai dit que la tenue du congrès était programmée par nous, mais que nous n’avions pas encore réuni les conditions pour cela.

Puis, il m’a dit qu’il serait obligé de prendre une décision si nous ne nous dépêchions pas. Cette façon de faire m’a paru à la fois comme un avertissement mais aussi comme une menace. Je voudrais aussi signaler que par rapport au congrès, les statuts du PAI sont clairs : peut convoquer le congrès, uniquement le bureau exécutif central. Il peut le faire soit sur décision du bureau exécutif central, soit sur décision du comité exécutif central, soit à la demande des 2/3 des fédérations constituées. Pourtant, Soumane Touré lui seul écrit au ministre de l’Administration territoriale, par une lettre de fin octobre ou de début novembre, et demande à convoquer un congrès. D’abord, il a écrit avec le titre de « membre chargé des relations avec les fédérations » ; c’est un titre inventé par lui, qui n’existe pas. Puis, après avoir écrit deux ou trois fois avec ce titre, il écrit au ministre, portant à nouveau le titre de « secrétaire général du PAI ». En vertu de quoi, si ce n’est lui-même qui s’autodésigne. Et le ministre qui recevait ces lettres, avec des titres pareils, l’autorise à convoquer son congrès. Quoique ce fut en contradiction avec les textes du parti.

Quand bien même Soumane Touré a convoqué son congrès, aucune fédération provinciale constituée n’y a été. Un seul secrétaire général de fédération était de son côté, mais celui-ci n’avait pas réussi à mettre en place ni même un bureau, a fortiori une structure. Soumane Touré a dû racoler, comme il en a l’habitude, des gens à droite et à gauche, soit à Ouagadougou, soit ailleurs, et il les a baptisés secrétaires généraux de fédération. Il a ainsi composé son congrès, tant et si bien que le bureau exécutif central qui était censé sortir de ce congrès du 4 décembre ne comportait que quatre membres résidents à Ouagadougou. Tout le reste était des gens qui résidaient hors de Ouagadougou. Ce qui veut dire que son prétendu bureau ne peut se réunir que de façon minoritaire, et pourtant il fonctionne ; il fait signer ses papiers par des militants de base qui ne sont même pas membres du bureau.

Si de votre côté vous accusez le ministre Yéro Boly et que Soumane Touré, lui, accuse le ministre Clément Sawadogo, de n’avoir pas joué franc jeu, on peut donc dire que chacun a eu son ministre de l’Administration territoriale, non ?

Je ne connais aucun ministre de l’Administration territoriale qui soit de mon bord. Aucun ministre n’a eu à prendre une décision qui me favorise au détriment de Soumane Touré.

Pourtant Soumane Touré se plaint de Clément Sawadogo, chose que l’on peut d’ailleurs constater dans la procédure d’appel qu’il a déposée auprès du Conseil d’Etat…

Clément Sawadogo dit qu’il n’est plus dans le procès, qu’il laisse la justice décider. Ce qui est, à mon avis, juste. Avant, le MATD était partie au procès et il prenait fait et cause pour Soumane Touré. Entre autres preuves, Yéro Boly a offert à Soumane Touré un récépissé, ensuite il a voulu que l’avocat de ce dernier soit également son avocat. On n’a jamais vu cela. Le ministère doit avoir son propre avocat, indépendant de celui de l’une des parties.

Egalement, dès que le ministre qui a remplacé Yéro Boly, en l’occurrence Bernard Nabaré, a pris fonction, nous avons demandé à le rencontrer, mais il n’a pas donné suite à notre demande. Il a attendu de signer le 1er août 2001 une lettre à Soumane Touré, pour le reconnaître à nouveau comme secrétaire général du PAI et lui demander de tenir un congrès ; puisque par un arrêt du 29 juin 2001, la Chambre administrative de la Cour suprême avait confirmé l’annulation de l’arrêté du 31 janvier 2000 dont jouissait Soumane Touré. Par contre, Soumane Touré dit que les jugements du tribunal administratif ne sont pas motivés, alors que dans le jugement rendu le 13 juillet 2000, il est bel et bien dit que Soumane Touré ayant démissionné de son poste de secrétaire général, ne peut plus convoquer un congrès (ndlr, il nous présente un document). Mais comme on dit : il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. Donc, Bernard Nabaré, en contradiction avec la décision du tribunal, a demandé à Soumane Touré de convoquer un congrès. Soumane Touré s’est empressé d’obéir à la lettre du ministre et a convoqué son congrès le 1er septembre 2001.

Nous attendions de voir si le ministre Nabaré allait lui donner un récépissé. Nous avons longtemps guetté tous les numéros du Journal officiel qui passaient, sans rien voir de cela. Soumane Touré qui, d’habitude, bavarde et se vante sur ses succès, s’est tu sur cette affaire. On nous a dit plus tard que le 5 octobre 2001, le ministre a signé un arrêté. Mais cet arrêté n’a pas été publié. C’est lorsque nous avons attaqué cet arrêté que l’avocat de Soumane Touré, qui était aussi l’avocat du MATD, a dit que l’arrêté a été publié dans le Journal officiel du 13 décembre 2001. Nous avons donc rapidement fait de prouver que ce n’était pas vrai et que la photocopie des pseudo exemplaires du Journal officiel qu’on nous a donnée était la preuve d’une imposture. D’une part, alors que tous les avocats sont abonnés au Journal officiel, aucun de nos quatre avocats n’a reçu un Journal officiel du 13 décembre 2001, avec l’insertion de l’arrêté du ministre.

Nous-mêmes qui suivions attentivement les parutions du J.O., n’en avons pas trouvé. Ni même le J.O. qui figure sur Internet ne contient non plus l’arrêté. Par quel tour de passe-passe a-t-on, après notre requête contre cet arrêté, sorti quelques rares exemplaires du J.O. avec l’arrêté ? Nous avons donc vu qu’on a expurgé un ensemble de textes qui figuraient dans le J.O., en le révisant bien sûr, pour faire de la place où on a inséré justement cet arrêté. C’est du tripatouillage qui est indigne d’un Etat moderne. Nous avons donc maintenu notre attaque et le tribunal administratif nous a encore donné raison, en statuant que Soumane Touré a démissionné. Il n’est plus secrétaire général du parti, il ne peut plus convoquer de congrès. C’est la même chose que l’on dit. Soumane Touré refuse de lire, sinon il aurait compris que c’est bien parce qu’il n’est plus secrétaire général du PAI et qu’il ne peut donc pas convoquer un congrès.

L’une des décisions du tribunal administratif, lequel jugement a été confirmé par la Chambre administrative de la Cour suprême, consiste aussi à ne pas vous accorder de récépissé. Mais, vous semblez vous résigner à cela, comme si l’annulation du récépissé du PAI était votre seul but (l’autre décision du tribunal concerne l’annulation du récépissé délivré à Soumane Touré). C’est quand même curieux de votre part…

La justice dit que n’ayant pas respecté le délai de quinze jours, nous ne pouvons pas disposer du récépissé. Je suis d’accord que nous ne pouvons pas réclamer de récépissé, mais nous existons. Notre organisation peut exister sans récépissé. Si l’acte de reconnaissance attribué à Soumane Touré n’est pas définitivement annulé, nous ne pouvons pas demander un récépissé. De notre côté, la procédure que nous avons suivie depuis le début correspond à la procédure régulière prévue par les documents du PAI.

Sinon, les 5 et 6 février 2000, nous avons tenu le congrès extraordinaire demandé par le comité central le 12 septembre 1998. Nous avons déposé le 17 février 2000 les documents pour la reconnaissance et le ministre a dit qu’il a déjà reconnu un bureau du PAI et qu’il ne pouvait pas reconnaître un deuxième bureau. Néanmoins je prends acte et je réécris au ministre, à la suite de l’arrêt rendu le 29 juin 2001 annulant le récépissé de Soumane Touré, pour lui demander de prendre en considération le bureau issu du congrès extraordinaire que nous avons organisé. Il a refusé. Donc ce que nous voulons, c’est être reconnu comme étant le bureau légitime du PAI, mais il nous faut d’abord obtenir l’annulation du récépissé de Soumane touré.

Que répondez-vous à Soumane Touré selon qui votre projet est de liquider le PAI ?

Cela est devenu une rengaine chez lui de dire que mon projet a été depuis 1995 de liquider le PAI. Je dis que Soumane Touré est un mythomane. Il n’a jamais soulevé cette question depuis que nous étions ensemble. Pourquoi chercherai-je à liquider le PAI ? Parce que je ne suis plus marxiste léniniste ? Et même si c’était vrai que je ne suis plus marxiste léniniste, pourquoi ferai-je cela ? Je n’aurais pas besoin de liquider le PAI, je n’aurais qu’à le quitter, si je n’en voulais plus ou si je n’étais plus marxiste léniniste. Il dit qu’en 1995, je suis venu avec une proposition de fusion. Mais une fusion n’est pas une liquidation. Deuxièmement, je crois que c’était même en 1996, je n’ai fait que rendre compte à la direction du parti de la proposition qui m’avait été faite de rentrer dans le projet de création d’un parti de la majorité présidentielle à l’époque. A l’époque nous étions alliés avec la majorité présidentielle. Mais nous avons convenu que ce n’était pas un bon projet et qu’il valait mieux que nous continuions à rester indépendants. Ensuite, il dit que j’ai voulu que nous abandonnions l’option marxiste léniniste. Je ne sais pas à quel moment c’est intervenu. Au congrès de 1993, il y a eu un débat là-dessus parce que c’était la proposition de certaines personnes. Cette proposition a été combattue. Et même que ces personnes n’ont pas osé en parler en salle de congrès, elles n’ont pas osé prendre la parole.

Donc vous confirmez que vous êtes marxiste léniniste ?

Moi je suis marxiste léniniste.

Ces derniers temps, on a constaté que vous avez souvent des alliances avec d’autres partis pour les élections. Ces partis partagent-ils les mêmes idéaux avec vous ?

Puisque le MATD ne veut pas de moi et donne à Soumane Touré, malgré les textes, des récépissés, moi je ne peux pas me présenter ou présenter les candidats de mon parti sous la bannière du PAI. C’est une vérité élémentaire que Soumane Touré n’a pas l’air de bien percevoir. Par conséquent, si nous ne voulons pas être politiquement hors jeu, si nous voulons continuer à être effectivement présents au débat, nous sommes finalement obligés d’être sur la liste d’un autre parti reconnu par le MATD. Parfois nous sommes même sur les listes de plusieurs partis. Mais le parti avec lequel nous avons plus de camarades comme candidats depuis 2002, c’est le Parti pour la démocratie et le socialisme. Donc nous n’avons pas de divergence idéologique avec le PDS. Soumane Touré dit qu’il est marxiste léniniste. Mais un marxiste léniniste qui ne croit qu’aux marabouts ! Qui est tout le temps en train de faire des sacrifices, qui s’allie à n’importe qui ! Voilà le genre de marxiste léniniste, verbal, qu’est Soumane touré.

Est-ce qu’aujourd’hui, avec tout ce qui s’est passé, vous ne regrettez pas d’avoir quitté, volontairement, selon vos propres explications, le secrétariat général du PAI ? N’avez-vous pas des remords d’être à l’origine de tout cela ?

Non. D’abord, on ne peut jamais reconstituer l’histoire. Je pense aussi que ma décision de ne pas me présenter en 1998 était justifiée et cela participe également de ma volonté de vouloir un renouvellement des cadres du parti. Je persiste d’ailleurs dans cette conviction et je rappelle à chaque fois aux camarades la nécessité de renouveler les cadres du PAI.

Moi j’ai bien vu l’atmosphère qui régnait au sein du parti, du fait essentiellement des manœuvres et oppositions de Soumane Touré en 1998, et j’ai préféré ne pas insister ; on ne peut pas continuer à diriger un parti avec quelqu’un dont l’attitude s’assimile à du sabotage. C’est ainsi que je qualifie l’attitude de Soumane Touré : du sabotage. Faire preuve systématiquement de mauvaise volonté, ne pas être capable d’accomplir le travail pour lequel on a été désigné et dans les délais, j’estime que cela n’est pas bien. C’est du sabotage. C’est pourquoi j’ai voulu que quelqu’un d’autre fasse l’expérience de premier responsable du parti. Je l’ai été entre 1991 et 1998, donc pendant sept ans, je pense que c’est une bonne expérience et que quelqu’un pourrait aussi me remplacer. Voilà essentiellement les raisons qui m’ont poussé à ne pas me présenter.

Mais si l’on considère que c’est le fait que je ne me sois pas présenté qui a ouvert la voie à Soumane Touré et ensuite à ses manipulations qui ont conduit à sa démission, c’est peut-être juste. Si je n’avais pas démissionné, peut-être que les choses se seraient passées autrement. Sachez d’ailleurs, qu’en 1993, il a fallu que des gens comme moi, nous nous mobilisions pour assumer la réélection de Soumane Touré au sein de l’organe dirigeant du parti, sinon il n’y entrait pas, les militants n’en voulaient pas du tout. Il a fallu des détours, des entretiens avec les uns et les autres, pour convaincre les gens de le voter. Mais, vous savez, il y a beaucoup de gens comme ça, ils vous paient en monnaie de singe dès qu’ils en ont l’occasion. Cela fait partie de l’expérience.

Propos recueillis par Lassina Fabrice SANOU

Le Pays

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