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PDP/PS : Ki-Zerbo s’en est-il allé avec son parti ?

Publié le mardi 25 novembre 2008 à 00h36min

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Ce fut l’un des coups de tonnerre dans le ciel politique passablement bleu de l’année 1993 : la CNPP/PS, principale formation de l’opposition dans l’Etat de droit naissant, venait de voler en éclats. En effet, le professeur Joseph Ki-Zerbo mettait sur les fonts baptismaux le PDP, emportant avec lui 9 députés CNPpistes. Il faut dire qu’à l’époque et à écouter l’éminent historien burkinabè, les divergences étaient telles qu’il fallait cette scissiparité pour avancer.

Puis survint le Congrès constitutif en 1994, et celui de l’unité en 1998, un congrès qui avait rassemblé du monde et on peut même dire que le PDP était au faite de sa forme, booster en cela par la personnalité de son géniteur, qui, au moyen de formules chocs, savait soulever des foules. Comme celles qu’il a prononcée à la Bourse du travail et qu’il reprenait souvent lors de ses points de presse (1).

En 2001, le PDP se rapproche du Parti socialiste burkinabè (PSB) de Ouendlassida François Ouédraogo, et lors d’un congrès extraordinaire, les deux partis fusionnèrent, même si les mauvaises langues de l’époque avaient soutenu que le PDP avait besoin du "S" du PSB, et même qu’en son temps, un des responsables (2) de ce parti s’était démarqué de ce rapprochement.

Le dernier Congrès en date fut celui de février 2005, qui tint, lui aussi, toutes ses promesses, même si à l’époque déjà, de nombreuses questions sur le rajeunissement de sa direction se susurraient.

De jeunes loups aux dents longues, tel Emile Paré et Etienne Traoré, avaient auparavant en effet créé un courant rénovateur au sein du parti, question d’apporter un plus en son sein ou de pratiquer la politique de la terre brûlée, c’est selon.

Hélas, est-on tenté de dire, puisque ce fut une tentative vaine. Parce qu’ils furent accusés de vouloir pratiquer la politique du ôte-toi pour que je m’y mette, cette initiative fit long feu.

Il est vrai qu’il faut déplorer l’attitude d’un Emile Paré, qui avait fait fi de toutes les propositions de bon sens du sage Ki-Zerbo lors de la confection des listes pour les législatives de 1997. Avec le recul, le "Chat noir" du Nayala, fils spirituel de Ki-Zerbo, aurait dû accepter le compromis.

Même si l’on ne peut pas non plus excuser la direction d’alors d’avoir maintenu le parti dans une situation dont les horloges politiques retardaient par rapport à la conjoncture. Les responsabilités sont donc partagées. De fait, lorsqu’on qualifiait sa formation politique de gérontocratique, le professeur Ki-Zerbo, avec son sens de la repartie, répondait invariablement à ceux qui lui faisaient ce procès que :

"Le vieillard assis voit plus loin que le jeune debout". Cela est peut-être vrai, mais il est tout aussi réel qu’un parti politique se doit d’opérer de temps en temps une cure de jouvence, des changements au gré du contexte. Pour l’avoir réclamé, mais de façon maladroite, certains militants ont dû soit quitter le parti, soit y rester, mais évitent de se faire entendre.

Et pour ne rien arranger les choses, les dernières législatives de 2007 ont vu un PDP/PS se retrouver avec très peu de députés, un revers électoral qui trouve certes son explication dans les conditions d’organisation du scrutin, mais aussi dans l’état de santé du parti.

Le 4e Congrès ordinaire, qui s’est déroulé les 22 et 23 novembre 2008, survient donc sous de mauvais auspices, car, à l’évidence, le PDP/PS va mal, englué dans une crise.

"Nous, les jeunes, avons assisté de loin à la naissance de la crise, ce congrès est un tremplin et un cri d’espoir, soyons francs avec nous-mêmes, ayons une vision commune, soyons une équipe qui gagne face aux attaques de nos adversaires".

Ces propos du représentant des jeunes, Jacob Badolo, à l’ouverture des assises statutaires de ce week-end, sonnent comme un aveu : l’heure n’est plus aux dénégations et aux multiples explications, le PDP/PS est "crisé" et il faut s’atteler au plus urgent, à savoir requinquer le parti.

Ce n’est sans doute pas un hasard de calendrier si ce jamboree politique s’est déroulé à la veille d’un colloque consacré au fondateur du PDP/PS. En effet, c’est hier 24 novembre, à l’université de Ouagadougou, que des personnalités de diverses disciplines se sont rappelés au bon souvenir de Ki-Zerbo, ce grand intellectuel, historien et homme politique, dont la vie fut bien remplie.

Paradoxalement, si l’œuvre scientifique du professeur fait autorité, et lui a survécu, son ouvrage politique bat de l’aile, à telle enseigne que les langues fendues au mauvais endroit affirment que Ki-Zerbo, décédé le 4 décembre 2006, s’en est allé avec le PDP/PS.

Excessif sans doute, ce jugement, mais force est de reconnaître que le parti, ces deux dernières années, doit colmater des brèches, qui ont tendance à devenir des trous béants.

C’est pourquoi il faut saluer le thème de ce 4e congrès, "Prendre un nouvel élan et restaurer la confiance et l’espoir", qui est d’une actualité évidente pour le PDP/PS. On aurait pu l’appeler le congrès du rassemblement que personne n’aurait crié au scandale, car il s’agit bel et bien d’un nouveau départ, d’un congrès pour rebondir.

D’où l’immense tâche qui attend le nouveau président, François O. Kaboré, qui devra batailler doublement :

- d’abord pour se faire un nom, se faire connaître, imposer sa marque, bref faire son trou au PDP/PS. Un travail titanesque pour cet ingénieur hydraulicien, ex-agent du CILSS, d’où il a pris sa retraite.

"Ce qui ne sera pas une sinécure", comme nous l’écrivons hier dans notre compte rendu factuel du congrès. En effet, parfait inconnu, il devra ferrailler pour se faire une image dans tout le pays, car il est le président national du PSP/PS. Certes, il est bien un grand militant, mais à l’échelle du BF, il demeure un illustre anonyme ; François O. Kaboré doit transformer l’essai ;

- être un rassembleur. Si l’on en croit certaines indiscrétions, son élection à la tête du PSP/PS a été tout sauf sereine, puisqu’opposé à Ouendlassida François Ouédraogo, et faute de consensus, ce dernier et le Dima de Boussouma auraient quitté la salle. Si à ces bisbilles on ajoute ce départ du député Etienne Traoré, le nouveau premier responsable du "parti de l’espoir" doit sonner le cor pour rassembler son monde, qui se disperse.

A deux ans des municipales et de la présidentielle, politiquement donc les exécuteurs testamentaires de Ki-Zerbo doivent prouver que son legs politique n’a pas été gâché et que le PDP/PS a survécu à son fondateur. Et cela commence par un regroupement en bloc sous la bannière du parti.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga

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